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Citations sur Pourquoi la musique ? (6)

On ne peut dire pourquoi il y a de la musique sans définir d’abord ce qu’est la musique. Mais la question « Qu’est-ce que la musique ? » à peine formulée, un doute surgit. Pire : un scrupule. Est-elle « correcte » ? Est-il juste de parler de « la » musique ? N’est-ce pas là une généralisation imprudente? Ne conviendrait-il pas de respecter la diversité, la richesse, l’infinité des manifestations musicales et de parler « des » musiques, sans préjuger de l’essence ni même de l’existence de quelque chose qui serait « la » musique ?
C’est l’objection des ethnomusicologues : on croit qu’il y a un universel anthropologique là où il n’y a que des particularismes culturels. Après tout, il n’y a peut-être rien qui soit la musique en général, rien de commun entre le Clavier bien tempéré de Bach, les rituels grecs de possession dionysiaques, la stylisation du chant d’oiseaux chez les Kaluli et un concert de Booba.
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Plaisir de la pulsation. C’est le plaisir le plus simple, le plus originel. L’enfant bas des mains en cadence en écoutant la comptine ou en chantant en cœur. Irrésistiblement. La cadence est en lui, il l’entend hors de lui. Plaisir. Plaisir de trouver, ou plutôt de retrouver, dans la musique notre besoin d’isochronie. Plaisir de retrouver, dans le monde tel qu’il advient hors de soi, ce qui est soi : notre mesure biologique du temps. Plaisir d’entendre que le monde ne nous est pas totalement étranger puisqu’il bat à l’unisson de notre corps.
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Il y a les plaisirs du corps : écouter, vibrer, bouger, danser. Et il y a aussi ceux de l'esprit : écouter, se troubler, tressaillir, s'émouvoir. Que la musique nous meuve, passe encore. Mais qu'elle nous émeuve, voilà qui semble vraiment incompréhensible.
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Comprendre intellectivement une musique, c'est disions-nous, entendre une multiplicité comme une unité. Mais il nous restait à comprendre sur quoi se fonde, dans la musique, cette compréhension intellective. Le concept de cause formelle permet de l'appréhender. Comme la cause matérielle, elle est double, selon qu'on focalise l'evènementialité ou le contenu qualitatif des événements sonores
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Contre les formalismes et les relativismes, il faut dire que la musique exprime des émotions, dont certaines sont universellement entendues. Ce ne sont pas celles que nous donne la vie réelle puisqu’elles sont amputées de leur part intentionnelle, de leur ancrage dans le monde des événements extérieurs. Il n’en reste que des humeurs, aussi indéfinissables conceptuellement que musicalement précises. Le plus souvent, plutôt que des humeurs, la musique exprime des climats qui s’en distinguent mal mais se passent, eux, de toute subjectivité. Parfois même, la musique exprime “tout court”, quand quelque chose en elle, un sentiment intime ou un rapport au monde, semble vouloir se dire au nom d’une personne ou d’un sujet.
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La compréhension perceptive de l'accord

Une même analyse vaut donc pour l'accord, lui aussi unité instantanée d'une multiplicité. Mais alors que celle du timbre resultait des différents harmoniques (du son) entendus simultanément dans une seule note, celle de l'accord résulte de différentes notes entendues simultanément : l'harmonie. Car il est rare qu'on n'entende en musique qu'un son à la fois. C'est la deuxième unité du divers. La compréhension qu'elle requiert n'est plus simplement sensitive, elle est perceptive: il faut à la fois saisir clairement l'ensemble des notes tout en entendant distinctement chacune. L'unité perçue n'est pas encore celle de la musique elle-même, parce qu'elle n'est pas une résultante dynamique, mais elle est déjà une unité musicale, parce que son matériau est musical: ce sont les notes (sons distincts relevant d'une échelle discontinue), tandis que les matériaux de la compréhension sensitive sont purement sonores (les harmoniques). Là encore, il y a différents degrés d'unité. Il y a l'unitétron parfaite des notes jouées "à l'unisson", séparées par une octave, où l'oreille peine à entendre la diversité (sont-ce bien deux notes ou n'est-ce qu'une seule?) tant s'impose à elle la consonance des notes et la confusion de leur harmoniques. C'est pourquoi, afin de favoriser l'idée de polyphonie (multiplicité de voix simultanées), la musique occidentale a tendance à éviter, sur le plan vertical, le parallélisme des intervalles trop consonants entre les voix comme l'octave ou la quinte (deux voix parallèles à la quinte sonnent "médiéval"). Au contraire, des voix séparées par des intervalles de sixte et de tierce sont jugés acceptables parce que ces deux notes sont suffisamment distinctes pour ne pas créer l'impression d'une fusion : on entend clairement deux notes. On privilégie ici le multiple sur l'unité, laquelle sonnerait "monodique".

A l'opposé, il y a la multiplicité discordante du triton (l'intervalle de quarte augmentée, ce fameux diabolus in musica longtemps interdit par l'Eglise) où l'oreille peine à entendre l'unité tant elle perçoit de dissonance entre les deux notes ; il y a même la discordance voulue des clusters (agrégats de notes conjointes, par exemple un coup d'avant-bras sur le piano). Entre ce trop d'unité, qui est pour ainsi dire monodique, et ce trop de multiplicité, qui est dis harmonique, il y a tous les (bien nommés) "accords". Il y a ceux dans lesquels l'unité et la multiplicité semblent s'équilibrer totalement - comme est supposé être l'"accord parfait majeur" qui réunit, à peu de choses près, en trois notes nettement différenciées (premier degré, troisième degré, cinquième degré), les premiers harmoniques naturels d'un son de base, la tonique: on entend parfaitement plusieurs notes mais unies substantiellement, comme les parties d'un même tout. A l'opposé, il y a ceux où la diversité prend perceptivement le pas sur l'unité, pourtant claire : ce sont les accords plus dissonants (comme les accords de septième) qui demandent, dans l'harmonie ique, à être "résolus", parce que la perception semble ne pouvoir se satisfaire de ce léger désaccord interne dans laquelle la diversité est plus puissante que l'unité, et paraît chercher l'assise de la consonance.

Entendre tout cela, timbre et accord, c'est comprendre sensitivement ou perceptivement la musicalité de ce qu'on entend, ce n'est pas encore comprendre une musique, laquelle suppose une unité de différents événements se succédant dans le temps.
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