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Critiques de Akira Mizubayashi (650)
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Âme brisée

Au début du roman deux histoires se côtoient.

Dans la première, quatre musiciens amateurs, trois étudiants chinois restés au Japon malgré l'animosité croissante entre les deux pays depuis l'incident de Mandchourie en 1931, et un japonais Yu accompagné de son fils Rei, épris de musique classique occidentale, répètent au Centre culturel de Tokyo, en 1938. Soudain, irruption de soldats. Yu enjoint à son fils de se cacher rapidement dans une armoire. Rei, par le trou de la serrure assiste à la scène...

Dans la deuxième, nous entrons dans la vie d'un couple Jacques et Hélène, lui luthier et elle archetier. Ils se sont connus en 1950 à Mirecourt, petite ville des Vosges et capitale de la lutherie française.

Le lien de la musique est évident, mais apprendre ensuite que Jacques est Rei m'a surprise! Rei, cet enfant de 11 ans a assisté de sa cachette à l'arrestation de son père et de ses trois amis. le lieutenant Kurokami ne l'a pas dénoncé lorsqu'il l'a découvert et lui a même remis le violon de son père, détruit par un militaire.

J'ai été littéralement charmée et envoûtée par ce roman écrit tout en délicatesse. Mais la poésie des mots qui accompagne le roman n'empêche pas Akira Mizubayashi de nous faire ressentir ce que l'humanité peut receler de cruauté, notamment en période de guerre. Il fait ici référence à la politique expansionniste de l'Empire japonais et il n'oublie pas de parler du monstrueux champignon d'Hiroshima et du bombardement de Tokyo le 10 mars 1945.

De plus, La culture japonaise est bien mise en valeur comme sa cuisine, et cela participe à notre plaisir. Souvent, mais pas trop, des mots japonais sont insérés et permettent de mieux s'imprégner de l'ambiance.

J'ai découvert aussi, grâce à ce roman, que Mirecourt était la ville de Jean-Baptiste et Nicolas-François Vuillaume, célèbres maîtres luthiers et que le pernambouc, arbre qui ne pousse qu'au Brésil, servait à fabriquer les archets.

Lors des dialogues entre les membres du quatuor, est abordé également le sujet des nuances existant entre les langues. Yu s'exprime ainsi : "Je pense que pour Philippe, la langue, en l'occurrence le français, est un bien commun que ses usagers partagent équitablement. Les relations sociales de supériorité et d'infériorité ne sont pas encastrées dans la langue... comme dans le cas du japonais ". La littérature et la musique sont les pièces maîtresses de ce magnifique roman. Ce sont grâce à ces deux formes d'art que Rei va arriver à dépasser l'énorme blessure que la vie lui a infligée.

Avec ce roman, l'auteur a réussi de façon magistrale à nous faire ressentir au plus profond de nous-mêmes, que nous l'ayons déjà vécu ou pas, ce que pouvait être la perte d'un être cher, le déracinement et l'oubli impossible à faire. J'ai lu ce roman d'une seule traite tant j'ai été happée par cette écriture si poétique. Je me suis laissée emporter par cette émouvante recherche du père, sublimée du début à la fin par la musique.

Âme brisée est un titre à double évocation. C'est en effet l'âme du violon de Yu qui est brisée, (L'âme du violon étant la petite pièce de bois interposée, dans le corps de l'instrument, entre la table et le fond, les maintenant à la bonne distance et assurant la qualité, la propagation comme l'uniformité des vibrations), ce qui va briser l'âme de son fils Rei.

Ce roman, découvert dans le cadre des Explorateurs de la rentrée littéraire 2019 de Lecteurs.com, s'apparente à une véritable mélodie où les émotions foisonnent et m'a profondément bouleversée, parfois jusqu'aux larmes. Un bijou à lire absolument et à relire...
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Âme brisée

Cette fiction est un concentré d’émotions, d’amour de la musique, d’élévation des sentiments, de luminosité, d’amour des animaux. J’ai été bouleversée, touchée, par l’écriture d’Akira Mizubayashi. L’auteur m’a transportée dans le monde de la Beauté et dans cette période, c’est un baume, une vision optimiste de l’humanité malgré le drame qui sert de point de départ à ce récit et qui est un véritable réquisitoire contre la guerre et ses ravages.



D’une poésie à couper le souffle, j’ai ressenti la même plénitude, la même intensité émotionnelle à la lecture de « L’éternité n’est pas de trop » de notre François Cheng national. L’écriture est belle, fluide, classique et respectée comme seules les personnes étrangères, amoureuses de notre langue, savent le faire. L’auteur écrit directement en français. Sa plume nous tire les larmes des yeux tant la beauté et la symbolique de certains passages évoquent, pour certains d’entre nous, des moments connus, des similitudes de souvenirs peuvent alors s’échanger entre l’auteur et le lecteur. D’ailleurs ce livre est dédié « A tous les fantômes » ! « La musique était tellement incarnée qu’elle possédait la puissance de rappeler les âmes du royaume des morts » (page 223).



Le Japon est en guerre de 1937 à 1945 et a envahi la Chine. Le récit s’ouvre sur un beau dimanche ensoleillé en 1938, dans le centre culturel municipal de Tokyo. Un quatuor à cordes entame la répétition en la mineur opus 29 de Schubert dit Rosamunde. Soudain des bruits de bottes se font entendre, Yu Mizusawa fait signe à son petit garçon de 11 ans en train de lire, de se cacher dans une armoire. Rei obéit, prend son livre et ferme la porte de l’armoire. L’un des soldats violente son père et lui arrache son violon qu’il va briser sous les yeux de l’enfant qui regarde par le trou de la serrure. Le lieutenant Kurokami, grand mélomane, arrivant après l’agression, découvre la cachette de l’enfant qu’il ne trahira pas et une fois la salle vide, désolé, confiera le violon détruit à Rei dans son armoire. L’enfant ne reverra plus son père.



A cet instant, le traumatisme psychologique subi par l’enfant le projette dans un sentiment d’abandon, de solitude. Sa vie s’arrête. Rei se retrouve seul avec le violon de son père totalement saccagé. C’est un Nicolas François Vuillaume de 1857 sur lequel Yu a interprété une dernière fois La Gavotte en rondeau de Bach. Le lecteur peut imaginer facilement la charge symbolique qu’incarne l'instrument qui restera la personnification de son père.



Le titre de cette fiction nous renvoie à la petite pièce en épicéa essentielle à la propagation du son d’un instrument à corde. Sous l’impact de la douleur traumatique, l’Ame du violon comme l’Ame de Rei se sont brisées devant l’horreur.



C’est l’histoire d’une reconstruction et d’une résurrection sur plus de cinquante ans. Rei et le violon marcheront de concert si j’ose m’exprimer ainsi. Rei tout en restaurant le violon, restaure sa propre personnalité et ainsi jusqu’à une fin heureuse ou les destins croisés de quelques personnes permettront à Rei de reconstituer le puzzle de sa vie depuis ce drame où son âme a explosé jusqu’à la guérison de celle-ci. « Le temps de défossilisait , recommençait à trembler » la vie s’était comme arrêtée sous la violence du traumatisme, et sous la musique, elle reprenait son souffle.





On ressent l’humanisme de l’auteur dans cette fin qui jette un regard positif sur l’humanité. Certes l’être humain peut se montrer cruel, d’une noirceur profonde, mais Akira Mizubayashi se veut attentif à la beauté des êtres dans toutes leurs manifestations et c’est un véritable remède qu’il partage avec son lecteur.





Dans cette fiction, j’y ai vu l’Art contre la barbarie. Comment la musique, langage universel, abolit les frontières du temps et de l’espace, survole les continents, en donnant vie à l’âme d’un disparu par le truchement de la filiation, de la fidélité, de la beauté des gestes. Il y a aussi de très belles pages sur la lutherie et l’archèterie. « Dès lors, son art de luthier, celui de rendre les sons de l’âme, de la vie intérieure, de la plus noire mélancolie comme de la joie la plus profonde à travers les instruments qu’il fabriquait ».



Marcel Proust fait même une petite apparition dans « la madeleine de ce petit garçon » devenu septuagénaire « un bol de riz mélangé à un œuf cru ».



Akira Mizubayashi doit vivre la musique du plus profond de son être pour écrire des pages sublimes sur « A la mémoire d’un ange » du concerto de Berg dédié à la fille d’Alma Malher. La trame du livre s’appuie sur Schubert et Bach « Gavotte en rondeau » et se décompose en chapitre dont les dénominations s’apparentent à un morceau de musique.



Je ne suis pas musicienne, plutôt mélomane en toute humilité. Après la peinture, je ne voulais pas quitter le monde de la création et l’histoire de ce violon m’a séduite. Ce livre parle à toutes celles et ceux qui sont sensibles à l’Art, qui perçoivent les messages en premier lieu avec leur cœur et ensuite avec leur intellect afin de pouvoir se plonger dans l’intimité de l’auteur, recevoir celle-ci. Je ne remercierai jamais assez les artistes pour le bonheur qu’ils nous procurent en contemplant, en écoutant, en lisant leurs œuvres chacun de nous avec sa sensibilité, son inclination.



« Face à la musique de Schubert, les larmes coulent sans questionner l’âme auparavant, puisqu’elle se précipite sur nous avec la force même de réalité sans le détour de l’image. Nous pleurons sans savoir pourquoi ; parce que nous ne sommes pas encore tels que cette musique nous promet d’être mais seulement dans le bonheur innomé de sentir qu’il suffit qu’elle soit ce qu’elle est pour nous assurer qu’un jour nous serons comme elle ». Théodor W. Adorno

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Âme brisée

Cet ouvrage qui, sans aucun doute, m’a le plus ému et émerveillé depuis le début de cette année, associe une intrigue captivante, des personnages attachants et une écriture ciselée.



L’âme d'un instrument à cordes est une petite pièce de bois interposée, dans le corps de l'instrument, entre la table et le fond, qui les maintient à la bonne distance et assure la qualité, la propagation comme l'uniformité des vibrations.



Ame brisée est l’histoire du violon de Yu Mizusawa, un intellectuel japonais, dont l’instrument, victime de la soldatesque nippone en 1938 à Tokyo malgré l’intervention du lieutenant Kurokami, est emporté par son jeune fils Rei.



Qu’advient-il de Rei et de sa famille à l’issue du conflit mondial conclu par une bombe atomique sur Hiroshima ?

Que devient ce violon, ou plutôt ses restes ?

Comment arrive-t-il en Lorraine à Mirecourt, chez Jacques et Hélène Maillard, un couple d’artisans luthiers experts en restauration d’instruments anciens ?

Par quel miracle Midori Yamazaki, petite fille de Kenzo Kurokami, hérite-t-elle de ce violon ?



Akira Mizubayashi, écrivain japonais écrivant en français, nous offre cette œuvre en quatre mouvements rythmés par le Quatuor à cordes en la mineur opus 29 "Rosamunde" de Franz Schubert, La Gavotte en rondeau, Partita n°3 en mi majeur de Jean-Sébastien Bach et le Concerto à la mémoire d'un ange d’Alban Berg.



Roman magnifique, aussi bouleversant qu’ « Opus 77 » d’Alexis Ragougneau, écrit d’une plume sensible et élégante, étayé par une double culture, c’est un hymne à la paix et à la culture. A lire et à relire !
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Âme brisée

En 1938 à Tokyo, Yu, professeur d’anglais et violoniste amateur, est arrêté sous les yeux de son fils de onze ans, Rei, au beau milieu d’une répétition musicale avec trois de ses étudiants chinois restés sur place malgré la guerre sino-japonaise. Rei grandira sans son père, avec deux souvenirs particulièrement obsédants datant de ce jour-là : le violon paternel brisé, et la vaine tentative d’intercession d’un officier mélomane nommé Kurokami.





Ecrit dans un français impeccable par un Japonais de souche, le texte possède un je ne sais quoi d’étrange et de déroutant, issu tant du style que de l’histoire : mi roman réaliste, mi conte féerique, le récit qui pourrait sembler idéaliste et naïf en raison des destins tout à fait improbables de ses personnages très lisses, presque trop « parfaits » dans leurs rôles, emporte le lecteur par son indéniable charme et par l’esthétisme de sa symbolique.





A l’oppression martiale et au bellicisme nationaliste, mais aussi à la rigidité hiérarchique de la société japonaise, l’auteur oppose l’universalité de l’émotion musicale et de la beauté, la puissance de l’amitié et de l’amour, la fidélité de la mémoire et l’inextinguible attachement à ses racines, enfin tout ce qui constitue l’âme humaine et que Rei s’obstine à faire refleurir en consacrant sa vie à la lutherie et à la résurrection d’un violon détruit par obscurantisme.





Certes idéalisé et non exempt de quelques clichés, ce roman est une jolie parabole dont le charme séduit volontiers, une ode à la musique où l’âme humaine se confond de bonne grâce avec celle prêtée par les luthiers à leurs plus beaux instruments.


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Âme brisée

C’est avec un peu de retard que je me suis attaqué à ce roman de l’écrivain japonais Akira Mizubayashi, couronné par le Prix des Libraires 2020.



L’âme qui se retrouve brisée est celle du violon de Yu Mizusawa, à Tokyo, en 1938. Ce dernier avait osé jouer une œuvre de Schubert en compagnie de trois étudiants chinois restés au Japon malgré les prémices de la guerre sino-japonaise. En entendant le bruit des bottes des militaires entrant dans le centre culturel municipal de Tokyo, Yu a le réflexe de cacher son fils Rei, âgé de 11 ans, dans une armoire. Par le trou de la serrure, le gamin voit les soldats fracasser le violon de son père et embarquer le quatuor. Quelques instants plus tard, le lieutenant Kurokami, grand mélomane, découvre la cachette de l’enfant, mais ne trahit pas sa présence et lui confie même les débris de l’instrument de son père…



« L’âme brisée » est l’histoire d’une reconstruction. Celle d’un gamin qui mettra toute sa vie à comprendre les aboutissants de cet évènement tragique qui le sépara à jamais de son père, mais également celle d’un luthier qui vouera toute sa vie à la restauration d’un violon pourtant jugé irrécupérable. Un roman sur le déracinement, sur les origines et sur la musique qui traverse les époques et véhicule les émotions au-delà des guerres…



Si l’auteur nippon, tombé amoureux de la langue française au point d’écrire celui-ci directement en français, livre un roman classique au style simple et dépouillé, il ne délaisse pas pour autant ses origines et baigne son œuvre dans la poésie et la délicatesse de la culture japonaise. Malgré le déchirement provoqué par la scène initiale et la noirceur qui entoure toute guerre, Akira Mizubayashi demeure positif tout au long du récit et ne s’attarde pas trop sur les fausses notes de l’humanité…
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Suite inoubliable

En 1945, au Japon, un graffiti en latin rapproche deux dissidents. L’un est musicien, l’autre étudiant, tous deux succombent avec l’empire nippon. L’un a confié un violoncelle à sa tendre amie, l’autre a laissé sa bibliothèque à ses proches. Soixante dix ans plus tard, la providence permet aux deux familles de se connaitre et de communier dans le souvenir des disparus.



De cette romance, où se retrouvent quelques protagonistes et des lieux d’Âme brisée, Akira Mizubayashi, dégage une série d’enseignements en montrant comment l’accès à une langue étrangère permet de se libérer de l’endoctrinement d’un régime dictatorial, comment la culture classique (les « humanités » aujourd’hui jugées démodées) est la base de la liberté de pensée, d’expression et de conscience.



L’auteur, un japonais qui écrit et publie en français, rappelle l’importance d’une bibliothèque familiale : « Le but de mes parents consistait, à n'en pas douter, à proposer des lectures éclairantes et émancipatrices qui allaient dans le sens opposé à celui du chemin des sujets bruyamment prôné par les autorités militaires et impériales. C'était là mon école. C'était là mon monde séparé de celui qui m'encerclait. En transportant partout cette école avec moi, en moi, en poursuivant la voie qui était celle de mes parents, j'ai fini par me trouver vers l'âge de vingt ans dans l'immense forêt des livres en français. Et c'est là que j’ai bâti ma demeure. C'est là que j’ai construit ma forteresse. »



La prière de Bach « In terra pax hominibus bonae voluntatis. Dona nobis pacem » ou la musique de Pablo Casals, sont un hymne à la paix ; la dictature, l’oppression, l’impérialisme brisent la paix et l’âme. La musique, la lecture, la culture sont l’ultime rempart d’une civilisation contre la folie humaine.



« Suite inoubliable » conclut la trilogie entamée avec « Ame brisée » et prône l’esprit critique, la curiosité intellectuelle et la liberté de penser qui sont l’apanage de tout Babeliote !



Pour mémoire, ma lecture d'Ame brisée
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Petit éloge de l'errance

♫ J'm'en fous, j'm'en fous

De tout

De ces chaînes qui pendent à mon cou

J'm'enfuis, j'oublie

Je m'offre une parenthèse, un sursis

Je marche seul [...]

En oubliant les heures

Je marche seul

Sans témoin, sans personne

Que mes pas qui résonnent

Je marche seul♫

-Jean-Jacques Goldman- 1985 -

---♪---♫---🦶--⬜🔴⬜--🦶---♫---♪---

Je n'ai pas vraiment suivi vos routes

J'ai voulu tracer mon chemin

Comme un Samouraï en déroute

qu'on appelle aussi Ronin

La Châtre- Périgueux par la voie de Vézelay

Renouer avec les souvenirs, de l'avenir se rapprocher

Toujours plus loin, aller plus haut, au-delà, Ultreïa !!

Oka-e-ri-na-sa-ï en hiragana

ou "welcome to Japan" en langage universel

La quintessence de l'âme de quoi se compose-t'elle ?

Un futon pour Shiro le chiot blanc

Ou un disque rouge au milieu d'un rectangle de tissu blanc...

Abhorration du corps étatico-moral, mais dans quel état j'erre !?

Ce n'est que ton mouton de Panurge qui cuit, quand tu dis j'erre...
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Suite inoubliable

Après le violon dans Ame brisée et l’alto dans Reine de coeur, Akira Mizubayashi complète sa trilogie musicale – son trio à cordes littéraire ? - avec le violoncelle. Cette troisième partition romanesque, jouant elle aussi l’alternance entre les années quarante et nos jours, est une nouvelle variation sur le thème de la résistance et de la transmission, à travers la musique, des valeurs humanistes mises à mal par la guerre.





Violoniste prodige formé à Paris dans les années 1930, le jeune Ken Mizutani, revenu à Tokyo, reçoit en 1945 « le fatidique petit papier rouge d’incorporation ». Forcé de rejoindre les rangs d’une armée impériale que « le démon de la guerre et du despotisme, bafou[ant] les consciences », emmène de manière suicidaire vers une déroute inexorable, le jeune homme doit se résoudre à quitter les siens et son violoncelle. Quelque soixante-dix ans plus tard, Pamina, la luthière à qui l’illustre violoncelliste Guillaume Walter a confié pour révision son Goffriller de 1712 à la si particulière teinte « rouge cerise sombre », découvre en détablant l’instrument, cachée dans un tasseau, une lettre datée de 1945 et signée d’un certain Ken Mizutani...





Découpée en six danses comme chacune des six suites pour violoncelle de Bach, qui, avec le concerto d'Elgar et le chant des oiseaux – devenu un symbole de paix et de liberté depuis son arrangement pour violoncelle par le catalan Pablo Casals engagé contre le franquisme –, forment la bande originale du roman, la narration est une nouvelle fois une ode vibrante à la musique, en même temps qu’un chant d’amour à la langue française. Comme l’auteur, à ce point épris du français que c’est en cette langue qu’il choisit d’écrire ses romans, le personnage Ken Mizutani sent « en lui la musique parler français depuis qu’il l’a vécue en France ». Alors que son pays, « gangrené par une dictature exacerbée fondée sur le culte fanatique de l’empereur », sombre dans une « folie cauchemardesque », cette musique et cette langue, qu’il associe à l’époque des Lumières en Europe, représentent pour lui « une lueur d’espoir », la voix de l’humanité qui survivra aux ténèbres passagères de l’Histoire.





Est-ce la répétition du schéma narratif d’un livre à l’autre de la trilogie ? Le charme de la jolie parabole qui, dans l’opus initial, prenait pour la première fois tout son sens, perd de sa puissance dans cette ultime variation qui, faute d’ajouter au propos, parvient aussi beaucoup moins bien à occulter la récurrence des stéréotypes et la tendance à l’idéalisation de la narration. Reste une lecture agréable, non dénuée de beauté, emplie d’un plaisir mélomane et tout entière vouée au culte de la musique et des hommes qui la composent, l’interprètent et en fabriquent les instruments d’exception.


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Âme brisée

Âme brisée - Akira Mizubayashi - Roman - Éditions Folio - Lu en septembre 2022.



"A tous les fantômes du monde"



L'âme, qu'est-ce exactement ?

Les objets ont-ils une âme ?

Qu' est-ce que l'âme d'un violon ?



L'âme humaine, esprit, conscience, elle est immatérielle

L'âme d'un violon, elle, est bien matérielle, c'est l'ultime petite pièce de bois que le luthier va placer au cœur de l'instrument, c'est elle qui va donner au violon sa sonorité, ses vibration, son âme.



Et donc, oui, certains objets ont une âme, j'y crois.



Dans son magnifique roman, Akira Mizubayashi nous raconte l'histoire de ce violon fracassé, de son âme brisée par les bottes d'un soldat japonais sous les yeux apeurés d'un petit garçon chinois que son père a eu le temps de cacher dans une armoire avant le drame.



Nous sommes à Tokyo, en 1938, dans un centre culturel où quatre musiciens chinois sont réunis pour une répétition. Parmi ces quatre violonistes, le père du petit Rei.



L'animosité des Japonais vis-à-vis de la Chine commence en 1931 lorsque le Japon envahit la Mandchourie.



Le père de Rei ne reviendra jamais de son arrestation par des soldats japonais ce dimanche 6 novembre 1938.



"... mais la guerre m'a privé de toute ma famille, c'est-à-dire de mon père ... puisque ma famille n'était composée que de mon père. Nous n'étions que deux" page 154



Le petit Rei sera adopté par un ami de son père et son épouse, des Français, ami qui est aussi le parrain de Rei.



Et ce petit bonhomme tout perturbé va se retrouver propulsé en France où il vivra dans cette nouvelle famille qui l'aime et l'entoure au mieux.



Mais Rei restera sa vie durant dans le questionnement, il deviendra maître luthier et réparera au fil des ans le violon de son père afin de lui rendre son "âme" et il y arrivera. Le violon de son père revivra grâce à la petite-fille du soldat japonais qui sachant que le petit garçon était dans l'armoire, ne l'a pas dénoncé et lui a remis l'instrument brisé dans les bras.



L'auteur m'a envoûtée par son écriture tout au long du parcours de Rei, par les rencontres qui ont permis à cet enfant de se relever d'un traumatisme violent. Il avait déjà perdu sa mère très jeune.



Je suis entrée dans l'atelier d'un luthier, métier de passion que j'ai découvert, un métier qui rend vie aux âmes brisées des violons.



C'est aussi une histoire de résilience, la guérison de l'âme blessée d'un petit garçon.



C'est un livre magnifique, plein d'émotion !



Merci Monsieur Akira Mizubayashi.

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Âme brisée

En ce dimanche après-midi de novembre 1938, Yu, professeur d'anglais, se rend au Centre Culturel pour répéter. Son fils, Rei, l'accompagne. Là, ils retrouvent trois jeunes musiciens chinois. Tandis que le groupe sino-japonais s'entraîne, le jeune collégien, lui, lit tranquillement tout à côté. Tout à coup, des bruits sourds de pas et des voix d'hommes se font entendre. La musique de Shubert s'arrête. Yu se précipite vers son fils, lui sommant de se cacher dans l'armoire. Des militaires font bruyamment irruption dans la salle et s'étonnent de voir des chinois ici. Aussitôt, ils soupçonnent Yu d'être un communiste et de pactiser avec l'ennemi. Fou de rage, l'un d'eux va jusqu'à détruire son violon... Parce que le Quartier Général veut interroger tous les supects, le groupe est escorté là-bas. Rei qui, depuis sa cachette, a assisté à toute la scène et a échappé de peu au même sort grâce à un soldat, ne se doute pas que c'était la dernière fois qu'il voyait son père. Seul vestige de celui-ci, son violon brisé...



Un violon brisé, tel est le fil conducteur de ce roman. Mais quel lien entre le jeune Rei, dans le Japon des années 30, et Jacques, luthier en France qui redonne vie et âme aux violons blessés ? Si le début du roman est prometteur, la suite oscille entre déceptions, déconvenues et hasards qui font bien les choses. Le tout manque de profondeur, de sensibilité, d'émotions, les dialogues sont plats et creux, les situations trop convenues et les personnages un peu trop lisses. Cela est-il dû au fait que Akira Mizubayashi ait écrit ce roman en français ? Toujours est-il que l'on est déçu, une fois la dernière page tournée, tant le sujet promettait et n'a pas été exploité plus en profondeur (notamment la guerre, la transmission, les origines, le déracinement...).
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Reine de coeur

Le premier mouvement ouvre cette tragédie par des massacres d’une rare cruauté où la soldatesque japonaise sabre les chinois en février 1945, les stukas mitraillent les réfugiés en mai 1940, les forteresses volantes rasent Tokyo en mai 1945.



Deuxième mouvement, 1937, Jun, altiste japonais rencontre Anna, serveuse dans le restaurant parisien de son oncle Fernand. Ils sympathisent mais la mobilisation contraint Jun à retourner dans sa patrie en 1940 et à dire Adieu à Anna sur un quai de Marseille. Ils meurent l’un et l’autre peu après la guerre sans jamais se revoir. De leur amour est née Agnès en 1941 qui, une génération plus tard, accouche d’une gracieuse Marie-Mizumé.



Troisième mouvement, 2007, un discret Otto Takosch publie son premier roman « L’oreille voit ; l’oeil écoute » qui frappe Mizumé bouleversée d’y lire une évocation de sa grand-mère Anna, qu’elle n’a jamais connue…



Sans dévoiler les quatrième et cinquième mouvements, rythmés par la Symphonie N°8 de Chostakovitch « Stalingrad », le lecteur retrouve les sujets de prédilection d’Akira Mizubayashi : dénonciation du totalitarisme, éloge de la culture et de la musique, rôle essentiel des langues …



Le totalitarisme impose sa dictature en usant et abusant de la servilité de gradés « exécutant les ordres impériaux» au garde à vous, sans le moindre état d’âme ; le parallèle avec les règles imposées durant la crise sanitaire crève les yeux quand on se souvient que les EHPADS ont été transformés en prisons pour personnes âgées, privées de toute visite, et que l’obligation vaccinale a « suspendu » de tout droit et salaire les soignants soucieux de respecter le « principe de précaution » inscrit dans notre constitution.



L’éloge de la culture passe notamment par l’évocation de l’oncle Fernand, profitant de sa retraite pour découvrir la langue et la culture japonaise. Le rôle de la musique et de ses interprètes est davantage valorisé ici par l’auteur, que dans les autres romans qui valorisent plutôt les instruments (le violon d'Ame brisées et le violoncelle dans Suite inoubliable). La « musique de l’eau » s’accorde au « prince des sons » pour initier un chant d’amour joué par une « Reine de coeur » qui couronne ainsi la trilogie débutée par Âme brisée et conclue par Suite inoubliable.



Personnellement c’est ce titre de la trilogie que je préfère par son balancement subtile des époques et des espaces qui sort progressivement le lecteur de l’enfer de la guerre mondiale pour le mener avec Otto et Mizumé vers un présent parfois trouble, mais « rythmant et ponctuant encore et toujours la vie en train de se faire. »



PS : ma lecture d’âme brisée :
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Âme brisée

Un auteur japonais et une thématique autour de la musique, je suis bien loin de mes lectures habituelles.

Il s'agit d'une belle histoire et d'un parcours de vie passionnant, d'un récit habilement construit qui fera vibrer les cordes les plus sensibles et de cordes il en sera d'ailleurs question.

Le résumé est malheureusement un peu bavard puisque révélant un bon quart du récit, cela-dit ce qu'il reste à découvrir est bien plus important, nous allons voyager au propre comme au figuré, voyager dans le temps et en pensée au son de la musique classique, voyager culturellement aussi.

Nous allons apprendre des choses sur la musique et les instruments de musique, sur le métier de luthier, l'auteur nous invite ici à ressentir une sensibilité propre au monde des musiciens, et il le fait avec virtuosité.

Il sera aussi question d'une quête intime et personnelle qui ne laissera pas le lecteur indifférent, la recherche d'une vie, celle qui vous construit en avançant et vous donne force et espoir jusqu'au but final.

Une quête obsessionnelle commencée enfant et qui s'apparente à la recherche du graal.

J'ai aimé cette lecture pour la sensibilité omniprésente tout au long du récit, pour la somme des choses apprises qu'elles soient culturelles, techniques ou historiques mais aussi pour sa justesse de ton que certains trouveront peut-être trop pudique.

Il me reste à remercier Martine (alias enjie77) dont le billet inspiré m'a permis cette belle découverte.
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Âme brisée

Roman musical et nostalgique, empreint de douceur et de mélancolie, sur les thèmes éternels de la quête des racines et de ces épisodes de la vie qui constituent les fondations de nos existences.



Tout commence en 1938, au Japon, alors que les relations avec la Chine se sont détériorées. Un quatuor à cordes répète Rosamunde de Schubert peinant sur le premier mouvement. Rei, le fils de Yu, écoute d’une oreille distraite, plongé dans une lecture qui l’absorbe. Des militaires ont irruption dans le centre culturel et tel le petit chevreau du conte de Perrault, Rei assiste à l’arrestation de son père et à la destruction absurde de son violon. Deux âmes brisées. Avant que la scène dramatique ne s’achève, l’un des militaires restitue à l’enfant l’instrument massacré.



Des années plus tard, à Paris, Jacques exerce son art dans son atelier. Il tente de redonner leur perfection à des instruments déréglés ou usés, lorsqu’une amie l’informe que la jeune femme qui a gagné le premier prix du Concours international de violon se nomme Midori Yamazaki, un nom certes commun au Japon, mais tout de même dans ce contexte, évocateur d’un passé enfoui.





Les indices semés au cours du récit sont suffisamment évidents pour que l’on devine la suite, les retrouvailles, les mystères résolus et les failles de la mémoire comblées.



Il est recommandé de prévoir la bande-son du quatuor, ainsi que de la Gavotte en rondeau de Bach pour accompagner la lecture. Lire les caractéristiques et l’évocation du sublime d’un extrait musical n’est pas suffisant, à moins de le connaitre déjà par coeur.



C’est court et même sur le petit nombre de pages, de nombreuses redites, à chaque fois qu’un personnage fait le point, contribuent à une impression de dilution du récit.





L’histoire ne peut qu’être émouvante, portée par une écriture aussi mélodieuse que les oeuvres évoquées. On regrette cependant que le récit ne soit pas un peu plus étoffé.


Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Reine de coeur

Même s’il est plutôt question d’alto, les violons sont de sortie pour ce nouveau roman d’Akira Mizubayashi, et le lecteur entend leur longue plainte venir de loin…

Après un démarrage prometteur en fanfare auprès de Jun, soldat de troisième classe dans l’armée japonaise en 1945, lors de la décapitation au sabre de trois soldats chinois, j’avoue ne pas avoir été transportée ensuite par la plume de l’auteur.

Est-ce parce qu’Akira Mizubayashi a écrit ce livre en français ? Le style est impersonnel, pas très fluide et l’histoire convenue se traine en longueur, en particulier dans sa deuxième partie lorsque l’on revient à la période contemporaine.

L’histoire de Mizuné et Otohiko est cousue de fil blanc, elle se révèle passablement ennuyeuse avec un final sans aucune surprise, et aucune émotion ne m’a traversée lors de cette lecture.

Je n’y ai pas trouvé la magie des sentiments, l’auteur s’attachant plus à les décrire qu’à nous les faire ressentir, et certains passages avec leurs onomatopées ponctués de ooh et de aahh manquent de finesse…

Voilà fort longtemps que j’ai « Âme brisée » dans ma PAL, et si certains commentaires m’avaient laissé entendre que ce Reine de cœur était un ton en-dessous, j’en attendais tout de même beaucoup mieux…

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Reine de coeur

Jun et Anna se sont rencontrés à Paris en 1937, où le jeune altiste japonais est venu se perfectionner, sous la direction du célèbre professeur Maurice Vieux, alors qu'Anna est élève de l'École normale primaire. Mais bientôt Jun, obligé de retourner dans son pays, est engagé malgré lui dans la guerre Sino-japonaise qui le brise, au point qu'il en oublie sa promesse faite à Anna... Une histoire d'amour que découvre bien des années plus tard la petite-fille de Jun et Anna, Mizuné, altiste elle-même.



Akira Mizubayashi croit indéniablement au pouvoir de la musique, celui que certaines oeuvres ont de transmettre la vérité d'un sentiment, d'une situation, d'une époque. C'est ce que l'on comprend avec Reine de coeur, un roman ambitieux qui s'ouvre sur une scène insupportable, métaphorique d'un Japon nationaliste, mortifère pour ses ennemis comme pour les Japonais eux-mêmes. Les mouvements suivants, même si parfois teintés de naïveté, sont à la hauteur d'une symphonie, telle la huitième de Chostakovitch qui après d'épouvantables tempêtes laissent place à de gracieux temps calmes...
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Suite inoubliable

* Ahhhh Bach et le violoncelle *



Tout d'abord, j'aimerais en lisant cette critique que vous écoutiez ceci : https://www.youtube.com/watch?v=XqPGnyWk9zc

Ce sont les Suites pour violoncelle de Bach, celles dont on parle dans ce bouquin.



Suite inoubliable, c'est une histoire d'amour multidimensionnelle.

Celle d'un violoncelliste et de sa luthière, amour qui survivra par-delà la mort grâce à un violoncelle exceptionnel.

L'amour d'un père pour son fils, qui survivra au travers d'une inscription de paix.

L'amour d'une jeune luthière digne successeur sa grand-mère et qui découvrira l'histoire de sa famille au travers l'"Amor" et la "Pax animae".

C'est l'amour de la musique qui transparait à chaque page.



Cette musique nous transporte à travers les âges, époque contemporaine, seconde guerre mondiale et l'appel sous le drapeau des jeunes japonais.



Un très joli roman d'amour qui m'a transportée... comme la musique de Bach.
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Âme brisée

1938, le Japon a envahi la Mandchourie. Dans un centre culturel à Tokyo, un quatuor à corde sino-japonais répète l'opus 29 en la mineur de Franz Schubert, « Rosamunde ». Yu, premier violon, n'a que le temps de cacher son fils Rei dans une armoire lorsque les militaires japonais viennent appréhender les quatre musiciens. Un officier dirigeant le commando, découvre le jeune Rei dans sa cachette. Il n'en souffle mot, mais lorsqu'ils s'en vont tous, le jeune garçon est désormais orphelin…

S'il existe une littérature Feng-Shui, Akira Mizubayashi en est l'un des plus remarquables artisans. Son écriture claire, épurée est confondante de sobriété. L'auteur ne s'embarrasse d'aucune fioriture, d'aucun effet de style, il va à l'essentiel. La poésie de son texte nous transporte à travers une histoire triste mais qui, grâce à la pureté des mots d'Akira Mizubayashi, ne sombre jamais dans l'hystérie de la tragédie shakespearienne, ce qui participe à la beauté unique de ce texte.

Il nous emmène dans un voyage à travers le temps, où les disparus prématurés vont être les héros fantômes qui vont faire triompher le travail de mémoire de Rei allias Jacques Maillard, luthier. C'est une histoire sur le souvenir, élixir de jouvence pour que nos défunts acquièrent l'immortalité.

« Âme brisée » est un magnifique roman, léger, admirable, merveilleux, à consommer sans aucune modération.

Editions Gallimard, Folio, 259 pages.

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Âme brisée

«  Les notes de musique s'égrenaient comme une enfilade de gouttes d'eau argentées sur une feuille de bambou après une forte averse » .

«  Une mélodie simple , touchante, lancinante, transparente comme un ruisseau de larmes , commença à couler sur les cordes du premier violon » .

«  On joue de la musique européenne au Japon,.........Monsieur.

La musique traverse les frontières , c'est le patrimoine de l'humanité » ...

Quelques extraits de ces sublimes pages!

Je n'aurai pas de mots assez forts ni convaincants pour évoquer au mieux cette jolie parabole dédiée à la musique de l'âme, à l'amitié , à l'amour , au souvenir, à la poésie , à la fidélité , défiant la mort...



C'est l'histoire longue d'un violon brisé et reconstruit à l'image d'un petit garçon nippon, Rei Mizusawa, dont le père , Yu, professeur d'anglais , passionné de musique classique occidentale , périra , battu et torturé , pour avoir , en plein conflit sino- japonais , constitué un quatuor à cordes , avec trois étudiants chinois, restés au Japon en 1938, malgré la guerre dans laquelle la politique expansionniste de l'Empire est en train de plonger l'Asie .

.Devenu orphelin Rei dit «  Jacques » atterrira en France ,, adopté par Jacques et Isabelle Maillard .

Il n'aura de cesse sa vie durant d'entretenir la passion de cet instrument maudit , en devenant luthier lui- même et en épousant Hélène , une archetière .

Ils répétaient au Centre culturel de Tokyo le quatuor à cordes en la mineur opus 29 de Franz Schubert appelé «  Rosamunde » lorsque cinq soldats en uniforme surgissent dans la salle.

le violon de Yu est brisé , les musiciens sont embarqués , soupçonnés de comploter contre le pays.

Réfugié grâce à son père dans une grande armoire , Rei , onze ans , collégien ,assiste à toute la scène.



Il ne reverra jamais son père, échappera à la violence des militaires grâce au lieutenant Kurokami qui lui confie le violon détruit .

Cette blessure d'enfance irréversible , non cicatrisée le marquera sa vie entière .

En parallèle nous pénétrons dans la vie d'un couple ,très longtemps après , au coeur de Mirecourt , la ville de Jean Baptiste et Nicolas François Vuillaume, petite ville Lorraine connue dans le monde entier , la ville des archers et des luthiers , où ont vécu Rei , devenu Jacques Maillard, luthier et Hélène archetière , comme Crémone en Italie ...



J'ai été littéralement happée , séduite par la poésie délicate de cette oeuvre où l'instrument vit, s'éveille , s'anime , prend vie , où l'auteur écrit des pages magnifiques.

Il vit la musique comme un art à la fois intime et universel.

Un texte lumineux entre réalisme cru et magie du conte où les émotions foisonnent, la musique, la tendresse et l'harmonie affleurent au fil des pages semblables à une mélodie douce , sensible, attachante, sur fond de Schubert.



Un petit bijou touchant pétri d'humanité évoquant la question du souvenir douloureux, le déracinement, le deuil impossible au fil des jours.

La langue est élégante, émouvante et ample .

Une oeuvre bouleversante , fine , à recommander , cette « Âme brisée. » un jour de 1938, l'âme d'un petit garçon et celle d'un violon , détruits par une violence inimaginable !

Ce livre restera longtemps dans mon coeur !

Encore une bonne idée de mon libraire !





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Âme brisée

Rei est un petit garçon en cet automne japonais de 1938. Sa mère décédée à ses trois ans, il vit avec son père professeur mais aussi violoniste amateur.

Rei , tout en lisant ardemment un livre, écoute son père répéter avec des amis chinois. Lorsque débarque l'armée impériale.



Livre magnifique , d'une sensibilité hors du commun qui m'a bouleversée.

Il y a deux histoires qui se fondent très vite l'une dans l'autre, autour d'une destinée tragique et de la quête du deuil. Le trait d'union est un violon, le violon du père de Rei , saccagé par les militaires et que Rei va récupérer des mains d''un lieutenant plus sensible que ses comparses.



Ce roman, empli de nostalgie, d'amour, est bercé par une écriture fluide qui fait la part belle à la douceur , à la patience .

La musique est ici magnifiée, c'est un vecteur de vie, une force surpuissante que même les bombes ne peuvent faire taire. C'est un livre qui pousse ceux qui comme moi ne connaissent pas les œuvres citées à les découvrir d'urgence, à fermer les yeux et à se projeter dans cette histoire magnifique qui fait du tragique une base pour construire une existence exemplaire.

Les messages sont nombreux mais ramènent souvent à l'universalité. Celle de la musique certes, mais aussi celle de l'homme , qui s'il nait au hasard dans tel ou tel pays est avant tout un être humain avant d'être un Chinois ou un Japonais. On peut être militaire , dans l'une des armées les plus cruelles au monde qu'il fût , et être un homme bouleversé, dont le restant de la vie va consister à effacer ses méfaits.

Et enfin , il y a cette déification de l'instrument, prolongement du corps et vecteur d'un combat pour faire vivre ce que la barbarie a tué.

Un livre incontournable, dont j'espère ne pas avoir trop dévoilé de détail tellement la découverte au fil des pages suscite l'émotion.
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Âme brisée

Magnifique !

Pris au hasard, un vague souvenir en tête d'une critique enthousiaste lue sur Babelio.... Et puis j'ai commencé la lecture, hypnotisée par ce violon, ce violoniste et ce petit garçon....

1938. Japon. On ne peut plus parler de montée du militarisme et du nationalisme. Là on est déjà au-delà. Une intervention militaire interrompt un quatuor à cordes composé de 3 Chinois et 1 Japonais. Le violon est détruit par un soldat, préfigurant ce qui va arriver au violoniste japonais, traître à la Patrie puisque la guerre avec la Chine a commencé, et en plus il joue de la musique de blancs (Schubert et Bach). Dans une armoire, caché, un jeune collégien, fils du violoniste.... Témoin de la disparition de son père.



Un livre magnifique. Un texte a l'image d'un Lied de Schubert : beau, doux, mais infiniment triste.



*



Petit détail pour celles et ceux qui ont reconnu l'animal qui me représente : il s'agit de Totoro du grand Miyazaki. Dans le livre Ame brisée le jeune collégien était plongé dans un livre ("Dites-moi comment vous allez vivre") avant l'intervention des militaires. Ce livre n'a jamais été traduit en français. Mais il va pouvoir être découvert bientôt sur grand écran : Miyazaki est en train de réaliser un film tiré de ce livre.... film prévu au mieux pour 2023 vue la rapidité du maestrio....
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