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Citations de Ambroise Vollard (34)


Lorsque les Baigneuses, que je considérais comme mon œuvre maîtresse, furent terminées, après trois années de tâtonnements et de recommencements, je les envoyai à une exposition chez Georges Petit (1886). Quelles « engueulades » je reçus ! Cette fois, tout le monde, Huysmans en tête, était d'accord pour décider que j'étais un homme à la mer ; quelques-uns même me traitaient de paresseux. Et Dieu sait combien je trimais !..
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Je regardais un nu commencé, sur le chevalet. « A vous entendre, monsieur Renoir, il n'y a que le noir d'ivoire qui compte, mais comment faire croire que c'est avec de la « boue » que vous avez peint de pareilles chairs!...
— Renoir. Sans me comparer à Delacroix... ce mot qu'on rapporte de lui : « Donnez-moi de « la boue, j'en ferai de la chair de femme ! »
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A l'âge de 19 ans, un deuxième prix de dessin, remporté par le jeune Paul, à l'école des Beaux-Arts d'Aix, augmente encore les appréhensions du père qui, peiné et, en même temps, étonné de voir que le fils d'un financier (car M. Cézanne avait réalisé, depuis quelques années, son rêve de devenir banquier), puisse prendre plaisir à de telles billevesées, ne cessera plus de lui répéter : « Enfant, enfant, songe à l'avenir ! On meurt avec du génie, et l'on mange avec de l'argent. »
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Un jour, dans son atelier, je lui avais apporté un tableau. Un tout petit morceau de papier s'étant détaché du paquet que je dépliais, Degas de s'élancer pour le saisir. Il retrouva le "confetti" dans la rainure du plancher et le jetant dans son poêle. «Je n'aime pas le désordre. »
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Après 115 séances, Cézanne abandonna mon portrait pour s'en retourner à Aix. «- Je ne suis pas mécontent, du devant de la chemise », — telles furent ses dernières paroles en me quittant. Il me fit laisser, à l'atelier, le vêtement avec lequel j'avais posé, voulant, à son retour à Paris, boucher les deux petits points blancs des mains, et puis, bien entendu, retravailler certaines parties. «J'aurai fait, d'ici-là, quelques progrès. Comprenez un peu, M. Vollard, le contour me fuit ! » Mais, en parlant de reprendre cette toile, il avait compté sans ces « garces » de mites, qui dévorèrent mon vêtement.
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Bien peu de personnes ont pu voir Cézanne le pinceau à la main ; il ne supportait que très difficilement d'être regardé pendant qu'il était à son chevalet. Pour qui ne l'a pas vu peindre, il est difficile d'imaginer à quel point, certains jours, son travail était lent et pénible. Dans mon portrait, il y a, sur la main, deux petits points où la toile n'est pas couverte. Je le fis remarquer à Cézanne : « Si ma séance de ce tantôt au Louvre est bonne, me répondit-il, peut-être demain trouverai-je le ton juste pour boucher ces blancs. Comprenez un peu, M. Vollard, si je mettais là quelque chose au hasard, je serais forcé de reprendre tout mon tableau en partant de cet endroit ! » Et cette perspective n'était pas sans me faire frémir.
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******

À l’égal des fleurs, Degas détestait les animaux dans les appartements. Aussi, quand il était attendu chez des amis, ceux-ci prenaient-ils soin, avant son arrivée, d’enfermer les bêtes. Et si, ayant oublié de le faire, on entendait dans l’antichambre des coups de parapluie, suivis de cris de chiens trop empressés à se faire caresser, tout le monde s’écriait :
— Voilà Degas !

***
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C'est presque un lieu commun, la "haine" de Degas pour la femme. Personne, au contraire, n'a autant aimé la femme, mais une espèce de pudeur où il y avait comme de la peur l'éloignait des femmes; c'est ce côté (janséniste) de sa nature qui explique cette sorte de cruauté qu'il mettait à représenter la femme occupée aux soins de sa toilette intime.
Un autre lieu commun quand on parle de Degas, la "rosserie" de ses mots. On n'a pas voulu voir le côté "sensible" de sa nature.
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En 1895, l'Etat eut à se prononcer sur l'acceptation,pour le musée du Luxembourg, du legs Caillebotte. Entre autres tableaux, il y avait quelques Cézanne, notamment les Baigneurs, donnés jadis à Cabaner et que Caillebotte, à la mort de celui-ci, avait acquis pour la somme de 300 francs, prix énorme pour le temps. Mais Caillebotte ne regardait jamais au prix quand un tableau lui plaisait. Cézanne, en apprenant que ses « Baigneurs » iraient au Luxembourg, l'antichambre du Louvre, avait eu ce cri du cœur: " Maintenant j'em Bouguereau". Le mot fut répété et eut beaucoup de succès, sauf en haut lieu où on le jugea d'une suprême inconvenance. On décréta aussitôt que les Baigneurs n'entreraient pas au Luxembourg. Du même coup, on arrivait au résultat souhaité : ne plus entendre parler de ce legs qui, d'après la volonté du testateur, devait être accepté en totalité.
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Lorsque je connus Tanguy, les choses avaient un peu changé. Non pas que les amateurs fussent devenus plus clairvoyants : mais Cézanne avait repris la clef de son atelier, et le père Tanguy, qu'Emile Bernard avait fini par persuader de la supériorité possible de certaines œuvres sur d'autres, tenait les quelques Cézanne qui lui restaient pour un trésor sans prix.
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N'importe, on imagine la joie de Cézanne de se voir accroché. Cette joie n'était toutefois pas sans mélange, son. père n'ayant pu la partager. Il avait eu la douleur de le perdre quatre ans auparavant, en 1885; mais il lui restait la consolation de penser que ce père. si regretté avait conservé une confiance inébranlable dans le triomphe final de son enfant. Cette foi si forte était entretenue chez. M. Cézanne par son orgueil de père. Ne disait-il pas : « Moi, Cézanne, je n'ai pu avoir fait un crétin ! » Quant à la mère du peintre, qui n'allait mourir que huit ans plus tard, en 1897, et qui devait voir s'éveiller la faveur du public pour les Cézanne, si elle désirait ardemment voir les efforts de son fils récompensés, c'était parce qu'elle sentait combien il était malheureux d'être méconnu : autrement, qu'il vendît ou ne vendît pas, cela n'avait pas d'importance à ses yeux, puisque « le petit avait de quoi ».
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Alors Degas: de temps en temps, en voyage, je mets le nez à la portière du wagon. Et, sans même sortir de chez soi, avec une soupe aux herbes et trois vieux pinceaux piqués dedans, est-ce qu'on n'aurait pas de quoi faire tous les paysages du monde? C'est comme mon ami Zakarian, avec une noix, un grain de raisin et un couteau, il en a pour travailler pendant vingt ans en changeant seulement son couteau de place ... Et Rouart qui faisait l'autre jour une aquarelle au bord d'un précipice! Voyons, la peinture, ce n'est pas du sport !
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On peut penser, étant connue l'antipathie de Degas pour les fleurs, à quel point ces sorties en omnibus lui étaient désagréables les dimanches en été, avec cette "rage" des Parisiens de rapporter des bouquets de la campagne. Degas faisait ces jours-là sa «promenade hygiénique» au milieu de touffes de lilas et de roses. Il me disait un jour le bien-être qu'il avait éprouvé d'une promenade en voiture découverte à la campagne, le bon air qu'on respire.
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Les yeux de Degas s'étaient portés sur une toile de Gauguin.
— Pauvre Gauguin! Sur son île, là-bas, il doit penser tout le temps à la rue Laffitte. Je lui avais conseillé d'aller à la Nouvelle- Orléans, mais il trouvait que c'était trop civilisé. Il lui faut des gens avec des fleurs sur la tête et un anneau dans le nez... Moi, quand j'ai seulement quitté mon atelier depuis deux jours...
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Un jour que j'y étais allé prendre un tableau — il faisait un temps exceptionnellement favorable à peindre — voilà qu'on entend sonner; c'était quelqu'un qui venait présenter ses souhaits de bonne année, et demandait s'il ne pourrait pas faire monter un ami resté en bas dans la
voiture...
— Pas à cette heure, répond Degas, mais à une heure et demie de l'après-midi, avant que je ne commence à travailler, ou quand il fait nuit!
Une fois l'autre parti :
— Moi aussi, monsieur Degas, je pourrai vous amener des personnes à ces heures-là ?
— Si vous voulez, Vollard.
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C'est que personne plus que Degas ne croyait à la nécessité d'une espèce de discipline dans tous les actes de la vie, besoin qui semble ridicule aujourd'hui... Mais Degas se flattait d'être d'une autre époque, une époque où il y avait de l'ordre dans le monde, une époque où chacun se tenait à sa place. C'est ainsi qu'il se jugeait légitimement offensé si quelqu'un, sans y être invité, lui tendait la main avec un «Bonjour Maître!' Et on s'étonnait quand il sortait ses griffes !
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J'expliquai à Degas que l'on en était venu à dîner de plus en plus tard, parce que chaque dame croyait qu'elle manquerait son entrée si elle n'arrivait pas la dernière. Et je hasardai quelques considérations sur les femmes et sur la mode. Degas me prit le bras: «Je vous en prie, Vollard, ne dites pas de mal de la mode. Vous êtes vous jamais demandé ce qui arriverait s'il n'y avait pas la mode? A quoi les femmes passeraient leur temps? De quoi parleraient- elles? Ce que la vie deviendrait impossible pour les hommes!
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Renoir, assis devant le chevalet, avait ouvert sa boîte à couleurs. Je fus émerveillé de l'ordre et de la propreté que j'y voyais. Palette, pinceaux, tubes aplatis et roulés au fur et à mesure qu'ils se vidaient, donnaient une impression de netteté quasiment féminine.
Je dis à Renoir quel avait été mon ravissement devant deux nus de sa salle à manger.
« Ce sont des études d'après mes bonnes. J'en ai eu quelques-unes d'admirablement faites, et qui posaient comme des anges. Mais il faut ajouter que je ne suis pas difficile. Je m'accommode fort bien du premier cul crotté venu... pourvu que je tombe sur une peau qui ne repousse pas
la lumière. Je ne sais pas comment font les autres pour arriver à peindre des chairs faisandées ! Ils appellent ça des femmes du monde !...En avez-vous jamais vu, des femmes du monde avec des mains qu'on aurait plaisir à peindre ?
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Je désirais savoir qui avait posé pour un tableau de Manet que je possédais. C'était le portrait d'un homme campé au milieu d'une allée du Bois de Boulogne, coiffé d'un chapeau gris, habillé d'une jaquette mauve, d'un gilet jaune, d'un pantalon blanc, avec des escarpins vernis ; j'allais oublier une rose à la boutonnière. On m'avait dit : « Renoir doit savoir qui c'est. » Je m'en fus trouver Renoir qui habitait, à Montmartre,
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On doit considérer, en effet, que le présent ouvrage a été fait de mille touches : conversations à bâtons rompus avec Renoir, pendant une période de vingt cinq années', à la fois sur les événements de sa vie et sur le mouvement de la peinture ancienne et moderne ; observation des faits et gestes du peintre ; observation de son entourage (la famille, ceux qui fréquentaient chez Renoir). Plus généralement encore, l'auteur s'est appliqué à présenter, à côté du peintre, le monde des Arts : les collectionneurs qui spéculent, les snobs de la peinture, les critiques, les Mécènes modernes...
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