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Critiques de André Dhôtel (205)
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Le Pays où l'on n'arrive jamais

Voila probablement le livre que j'ai le plus relu et rerelu de toute ma vie ! J'aime l'écriture calme et soigneuse d'Andrée Dhotel, son goût pour l'étrange, l'inattendu, l'inexpliqué. Le cheval noir surgit. Il emporte Gaspard loin d'un monde d'ennui. Dans son cas, c'est un petit village trop calme. Cela pourrait aussi bien être une banlieue dortoir trop grise... On peut s'identifier à lui.



Les évènements se succèdent, entrainant Gaspard dans un grand périple. Il voyage, rencontre des gens simples, retrouve Hélène. La jeune fille a tout ce qu'elle veut. Mais elle sait que quelque part, il y a autre chose. Pour trouver quoi, il la suivra jusqu'au bout du monde…



Bien sûr, c'est un désir un peu enfantin qui s'exprime dans ce livre. La quête d'un monde plus beau et plus libre, où n'existerait ni l'ennui ni la laideur. Un rejet un peu simpliste du matérialiste – malgré tout ce qu'elle a et tout ce qu'on lui offre, ce n'est pas ça que veut Hélène. Mais quelque part, est-il inutile de nier que nous avons tous plus ou moins ce désir au fond de nous ? Et que nous le repoussons le plus loin possible parce que nous sommes conscients de sa naïveté ?



Mais le propre d'André Dhotel – et son charme - n'est-il pas justement de laisser parler cette naïveté ? C'est ce que font souvent ses personnages du reste, ce qui leur vaut l'incompréhension des autres. Mais ce n'est pas le rêve de celui qui voudrait vivre dans le luxe à ne rien faire qu'il nous montre là. C'est une vie simple, faite de travail et de fraternité.



André Dhotel a laissé ses rêves les plus simples s'exprimer dans ce livre. On peut l'y suivre pour s'évader un instant, ou rester dans le quotidien du monde…
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Le Pays où l'on n'arrive jamais

Le pays où l'on arrive jamais... c'est le livre que je n'arrivais jamais à lire!

Le pays où l'on arrive jamais, me suit toujours, depuis les débuts de ma bibliothèque au début des années 70.

Donc, en prenant tout mon temps, j'ai entrepris de lire ce livre magique.

Et voilà que je viens de terminer ce voyage avec Gaspard, l'enfant blond-qui-cherche-son-pays, Théodule, Niklaas et ses fils Ludovic et Jérôme... J'en sors ému, ravi, étourdi par un récit qui m'a profondément touché: Cette quête de lieux dont les souvenirs diffus se trouvent si loin dans la petite enfance. Ces images éparses que l'on cherche à rassembler, préciser.

Il y a ce pays qui s'éloigne, au fur et à mesure que l'on grandit, et c'est l'urgence qui surgit à Lominval (Quel joli nom de bled somnolent!) dans la vie de Gaspard: Un enfant blond qui cherche son pays à partir de minces indices, puis un cheval pie... L'urgence de l'aventure, la vraie, avant qu'il ne soit trop tard pour Gaspard et le mystérieux enfant que l'on enferme à l' Hôtel du Grand Cerf avant que son tuteur ne vienne le chercher. L'urgence, avant que le rêve et l'espoir ténu ne s'éteignent.

Toutes ces péripéties, ces voyages démesurés, ces retrouvailles, ces cavalcades et embardées pour aller encore plus loin et trouver ce fameux pays où l'on arrive jamais, André Dhôtel nous les fait vivre avec ce sentiment d'attente. Sentiment teinté d'une douce mélancolie d'une enfance qui se perd et s'efface.

André Dhôtel aimait profondément sa terre natale d' Ardennes, et il l'exprime parfaitement dans cette quête d'un pays perdu. Il le fait magistralement, dans ces paysages de forêts et de fleuve, ces villages qui sommeillent. Il le fait avec l'aide de ces enfants, et de ces grands enfants dont les rêves d'enfants n'ont pas tout-à-fait disparus.

Le pays où l'on arrive jamais, s'adresse à chacun de nous, pour peu que nous ayons gardé cette flamme de l émerveillement et ce sentiment qu'il nous manque quelque chose que nous ne trouvons plus.

Et le pays où l'on arrive jamais, soyez en sûr, ne manque pas de mirages!

Mais il n'y a qu'un seul pays où l'on arrive jamais: le vrai.
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Le Pays où l'on n'arrive jamais

Gaspard est le fils de marchands forains, une profession jugée honteuse. Sa garde est confiée à sa tante qui gère une auberge dans un village des Ardennes. Dès sa naissance, le garçon semble victime d’une fatalité malheureuse, sa seule présence déclenche une série de catastrophes. Son enfance est pourtant monotone, il accomplit consciencieusement diverses tâches pour sa tante. Son destin est bouleversé le jour où il rencontre un enfant fugitif, blond comme les blés, et dont les yeux sont emplis d’ une lumière « d’une dureté angélique ». Avant d’être repris, l’enfant lui confie l’objet de sa fugue ; il recherche le pays de sa mère, un pays où les chênes, les bouleaux et les pommiers côtoient les palmiers au bord d’une mer immense. Peu après, emporté par une force mystérieuse, Gaspard entame un voyage sans limite. Les rencontres sont nombreuses, certaines pleines de danger, d’autres providentielles. Des apparitions vont jeter un voile fantastique sur le récit. Gaspard et ses jeunes amis vont être emportés dans une aventure semée d'embûches.



« Le Pays où l'on n'arrive jamais » est un récit initiatique d’une grande humanité, une magnifique histoire d'amitié, un voyage fabuleux où se mêlent la nature et le merveilleux. On suit le garçon dans son périple à travers les forêts ardennaises pleines de mystère et la vallée de la Meuse à la fois industrieuse et sauvage. Séduit dès les premières lignes par la poésie bucolique du texte, j’ai été happé par le suspense d’une quête au but énigmatique. Quel est le sens de cette errance loin de la quiétude du foyer? Qu’est-ce qui pousse ces enfants à emprunter des chemins plein de dangers et à briser le cours de destinées déjà décidées ? Et quel est ce pays où l’on n’arrive jamais ? Pour le savoir, plongez vous dans ce livre. Je ne livrerai qu’un seul indice : ce pays, c’est aussi le vôtre.
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Le Pays où l'on n'arrive jamais

Si vous cherchez un livre 'raisonnable', passez votre chemin car ce livre n'est pas fait pour vous. Le Pays où l'on n'arrive jamais m'a fait penser aux livres lus lorsque j'étais enfant. Un héros, en apparence assez banal au sein d'une famille qui ne le comprend pas, vit une succession d'aventures rocambolesques et même invraisemblables avec des amis, face à des méchants vraiment méchants. Mais est-ce que ce roman prétendument pour les enfants a été écrit pour eux ? Non, et je dirais même qu'il s'adresse en priorité aux adultes.

Situé à la fin de la seconde guerre mondiale, ce roman d'André Dhôtel nous fait beaucoup voyager. Des noms probablement inconnus pour qui n'y a jamais mis les pieds. Revin, Laifour, Stonne, la vallée de la Meuse. Grâce à lui nous découvrons les Ardennes à pied. Les vallées, les forêts, les champs d'épines et de ronces. D'une certaine façon, Gaspard est un peu un nouveau Rimbaud, toujours sur les routes, toujours en marche. Il est généreux, spontané, parfois naïf. A la recherche d'un pays idéal, il garde au gré de ses aventures l'âme d'un enfant qui refuse de grandir et se bat pour une cause qu'il croit juste. Peut-être André Dhôtel me rappelle-t-il tout simplement de ne jamais abandonner mes rêves.
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Pays natal

C'est dans une sorte de bulle que l'on traverse ce roman de 1966, en flottant au dessus d'une réalité démodée, désuète, surannée. Quand Félix y rencontre une âme soeur, les familles de la belle s'en mêlent en évoquant au subjonctif la dot, ou la respectabilité des uns et des autres. Largement de quoi rebuter le lecteur avide de contemporain. Et pourtant il s'y passe une sorte de miracle d'alchimie narrative, difficilement explicable. le démodé devient merveilleusement démodé, le suranné délicieusement suranné, comme dans un conte qui élèverait un tableau kitch en belle oeuvre poétique. Un mystère, sûrement en rapport à une écriture limpide et aérienne, alliée à une romance que l'on visite en ouvrant son âme d'enfant face à un conteur talentueux. À moins qu'il n'y ait autre chose. Par exemple un auteur libéré des contingences d'une littérature moderne, qui écrirait son âme vagabonde au lieu d'une histoire ficelée et ancrée dans notre monde.

Parce qu'il y a une histoire bien sûr, même si l'intérêt de ce livre n'est pas là à mon avis. Il y a donc Félix, Tiburce son ami d'enfance, Angélique, une comtesse et un général, Célestin l'oncle référent, des villes comme Namur, Charleville ou Dinant. Félix a été un enfant abandonné, avant de construire sa vie d'honnête jeune homme méritoire, prêt à convoler avec Juliette grâce à un patron conquis. Mais son passé le rattrape avec le retour de Tiburce. Les deux seront aspirés en deux temps trois mouvements dans la spirale d'une déchéance sociale, aimantés par des chimères à peine conscientes.

de l'amitié, de l'amour, des rebondissements donc, agrémenté d'une sauce à l'eau de rose, au goût miraculeux de potion enchantée. Et même si la bulle a parfois éclaté au cours de ma lecture, dévoilant un arrière-goût de naphtaline, je n'en reste pas moins charmé, je crois même avoir mieux appréhendé cet auteur entrevu avec ses nouvelles d' « un soir », qui m'avaient laissé sur un entre-deux optimiste et curieux.

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Le Pays où l'on n'arrive jamais

« Le pays où l’on arrive jamais » fait partie de ces romans soit disant « pour enfants » tellement croisés sur les rayonnages, chez les amis, dans la famille, qu’ils me sont devenus familiers sans que je puisse me rappeler vraiment si je les ai ou ne les ai pas lu. Le souvenir d’une antique déception me semble associé à celui-ci. Rouvert à la faveur de l’été, il m’a enchantée.



Le tout début est délicieux. Le rapport de mépris institué entre la bonne société et les forains incontrôlables est finement décrit.



La langue est belle, le récit construit. André Dhôtel ne cherche pas à en faire trop. Il affectionne les broussailles, les murs à franchir en secret. Il cultive le temps qui passe autant que les péripéties. Gaspard, Théodule, Hélène bataillent pour préserver leur intégrité malgré ceux qui font obstacles à leurs aspirations (souvent avec les meilleurs intentions). Le livre finit sur une ode à la vie et à une certaine idée de la liberté, n’en déplaise à ceux qui déplorent l’originalité du monde.



Je comprends finalement pourquoi je n’ai pas pu aimer ce livre quand j’avais une dizaine d’années. Ce parfum d’enfance qui émeut l’adulte ne touche pas l’enfant. Il faut avoir vécu pour apprécier ce roman.
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L'enfant qui disait n'importe quoi

Maman m'a dit que ça ne servait à rien de t'écrire, que là où tu es, tu ne peux pas vraiment me répondre. Mais cela ne fait rien, j'ai tout de même des trucs à te dire et je suis persuadé, tu m'as persuadé, que d'une manière ou d'une autre ça parviendra jusqu'à toi.

D'abord, je dois t'avouer que des livres, j'en avais pas lu beaucoup avant le tien. Quelques illustrés et seulement un fantômette de ma sœur. Juste histoire de la faire enrager un peu.

- Parce que maman disait "laisse ce livre à ton frère, pour une fois qu'il a le nez dans un bouquin !

Alors, quand papa m'a collé celui-là dans les mains, après m'avoir confisqué ma bidullebox, les manettes, mon smartphone et la télécommande de la télé, j'étais pas vraiment enchanté.

Pourtant, dès les premières lignes, ce qu'il y avait à l'intérieur ma capté. Peut-être à cause de l'enfant, de la vie qu'il mène avec son grand père, loin de l'école, libre comme un sanglier.

En fait, je ne saurais pas trop dire. Y a presque pas d'histoire, juste cet enfant menteur, qui pourrait être moi, la forêt, une maison à la géométrie incompréhensible et des gens qui passent comme des nuages dans le ciel, avec de temps en temps, une averse, un éclair suivi d'un coup de tonnerre et des espèces de lumières qui déchirent tout, sans prévenir, comme on a par chez nous.

Pour sur, à cause de tout cela, je suis obligé de te dire un peu merci.

Tout de même, je t'en veux vraiment beaucoup. Parce que, vois-tu, quand j'ai eu fini le livre, je me suis senti si seul !

J'avais même plus envie de tirer les cheveux de Babette, ou de casser des trucs sans le faire exprès. Plus rien ne m'intéressait.

Il parait que tu en as écrit d'autres, des livres. Un jour prochain j'y mettrai certainement le nez, mais en attendant je retourne dans ta forêt retrouver Alexis.
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Le Pays où l'on n'arrive jamais

En voilà un livre que j'ai trouvé étrange, aux vagues connotations oniriques, rêveuses, poétiques... Mon côté terre-à-terre n'a pas suivi. En fait j'ai beaucoup aimé les premier chapitre, quand on découvre le héros, monsieur catastrophe innocent. C'est drôle, cocasse. Bref je m'installe confortablement dans le livre qui pour le coup me plait bien. Et puis..... J'embarque dans tout autre chose, entre fantastique et rêve.... Je ne sais pas. Bref j'ai décroché et j'avançais péniblement dans ce court livre. Il m'a fallu la fin pour y reprendre de l'intérêt.

Je pense que celles et ceux qui apprécient les récits un peu étranges, poétiques peuvent y trouver leur compte. Moi franchement je suis restée extérieure, perdue. Manifestement je suis trop terre-à-terre !

Au moins j'aurai découvert l'auteur qui m'était inconnu.....
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Le Pays où l'on n'arrive jamais

Le petit Gaspard, fils de forain, n'a jamais quitté le village de Lominval dans les Ardennes. Pour cause, sa tante, une demoiselle, qui tient l'hôtel restaurant du Grand Cerf voit en lui son digne héritier qu'elle espère un jour toqué ! Mais le passage en coup de vent d'un étrange blondinet aux longs cheveux d'or qui cherche à rejoindre son grands pays et sa maman Jenny l'intrigue... Gaspard qui n'a jamais quitté son nid va voler de ses propres ailes par monts et forêts et même au delà à la recherche de son nouvel ami qu'il vient de perdre de vue...



Le roman d'André Dhôtel couronné d'un prix Fémina en 1955 peut paraître à prime abord un brin désuet et primesautier  mais c'est faire fi de sa prose ensorcelante pleine de fantaisie et de poésie. 

Avec des yeux de gamin, j'ai suivi la chevauchée fantastique et rocambolesque du maladroit mais pugnace Gaspard sans lâcher la bride de son cheval Pie, une belle bête qui va peut-être bien nous mener quelque part...

Et moi qui adore les blazes bien trouvés, je suis comblé avec le dur d'oreille Théodule, les frêres Niklaas, le fameux Parpoil...à gratter, l'excentrique Emmanuel Résidore et la belle Hélène qui n'est pas une poire. L'auteur Franz Bartelt, romancier ardennais de souche, grand fan Dhôtel s'en est inspiré pour le titre de son polar baroque l'Hôtel du Grand Cerf, un bien drôle de brame....

Le pays où l'on arrive jamais, il m'a bien fait galoper !

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Ma chère âme

Une quintessence du romantisme certes mais au style curieux, syncopé, que j’ai trouvé un peu pénible.

L’écriture, à l’emportée, est faite de phrases courtes mais curieusement syntaxées, faisant abstraction du temps qui passe et qui, parfois, s'arrêtent soudainement comme en suspend.

Peut-être un effet de style visant à créer la confusion sur ce temps qui s’écoule sans jamais altérer la passion du héros. Je ne sais pas mais cela m’a gêné.

Dommage car l’histoire, elle, est bien dans cette mouvance romantique que j’adore.



Voici donc l’amour de Pierre pour Achyro née d’un moment furtif mais qui transforma le reste se sa vie en une quête à la recherche du Graal perdu, le précipitant dans des abymes taciturnes et de fous espoirs.



La torture est à son comble quand la vie lui fait retrouver sa chère âme et qu'un doute diabolique s'installe entre elle et lui.



car enfin, ce n'est ni Hélène, sa femme, ni Sophia, la sœur d’Hélène et sa maîtresse platonique, mais bien l'Achyro, que l'une des deux fut pourtant, qu'il aime et quête sans cesse.



Là est la beauté romantique de cette histoire, ce poignard qui sans cesse triture le cœur de l'amoureux.



Oh, on a souvent envie de lui botter les fesses à notre Pierre pour qu’il cesse de souffrir et de faire souffrir. Mais c’est bien dans ses tourments que réside l’âme romantique et la beauté de ce roman

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L'homme de la scierie

Peut-être l’œuvre la plus aboutie d’André Dhôtel, et pourtant l’une de ses moins connues. Logiquement plutôt, en fait : elle est totalement cryptique. Un ouvrier se réveille un matin, couché à même le sol, au beau milieu d’une scierie. Il sait qu’il travaille ici. C’est à peu près la seule chose dont il se souvienne. Pour le reste, toute sa mémoire s’est comme envolée. Tout son corps lui fait mal. Ses compagnons de travail arrivent, le reconnaissent, prennent soin de lui. Mais bien que très amoché, il refuse d’aller se faire soigner, et se met à travailler. Peu à peu des souvenirs lui reviennent. Ceux de l’enfance, d’abord…



L’ouvrier, héros de l’histoire, s’appelle Henri Chalfour. Bien que de très humble extraction, son destin semble inextricablement lié à celui de la grande famille aristocratique locale : les Joras. Nobles, plus ou moins riches, un domaine quelque part en Ile-de-France près de la scierie, un autre en Normandie. Leurs affaires ne vont pas trop bien, la faute à ses membres fantasques et peu matures. Leurs frasques et leurs disputes servent de télénovelas à tous les villages alentours. De temps en temps, au milieu d’une partie de pêche ou de braconnage, la route de l’un ou l’autre d’entre eux croise celle de Henri Chalfour… Puis chacun reprend son chemin.



L’histoire se déroule, n’a l’air d’aller absolument nulle part, comme si Dhôtel essayait de briser une bonne fois pour toute cette puérile croyance des hommes que leur vie à une direction, un sens et un but. Et pourtant, d’une façon ou d’une autre, elle va quelque part. On le sent, même si on ne sait pas où. Quelque chose se cache dans les pas, les travaux, les attentes d’Henri Chalfour. Pas dans ses peines – il ne les partage guère – ni dans ses mots – rares. Dans ses rencontres avec les Joras, dans ses échanges, de loin en loin, avec celle qui est peut-être sa fille. Dans sa contemplation de certaines fleurs, dans ses efforts pour retaper une vieille maison…



Une leçon de vie.
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Le Pays où l'on n'arrive jamais

André Dhotel, écrivain prolifique du 20ème siècle, et pourtant si peu connu de nos jours. Son nom ne m’était pas étranger, mais je n’avais jamais rien lu de lui, et c’est un commentaire de mon ami Dourvach qui m’a mis sur son chemin.



A la recherche de ses livres dans mon imposante médiathèque municipale, j’ai pu constater effectivement l’oubli dans lequel se trouve André Dhotel. Un seul livre « Le pays où l’on n’arrive jamais » et encore, même pas en rayon, mais dans la réserve du rayon jeunesse.



Et pourtant quel merveilleux récit que celui-là, un conte rempli de poésie, de fantaisie, de féerie, voire de fantastique, mais aussi beaucoup plus profond que son classement dans la « littérature jeunesse » le laisse présumer, car ce livre n’est pas seulement organisé autour de la quête d’une enfant et de ses amis pour retrouver sa mère, je l’ai ressenti comme une histoire célébrant la liberté, l’amitié et la recherche de la beauté du monde.



Gaspard Fontarelle, fils de gens du voyage, est confié par ceux-ci à sa tante Gabrielle Berlicaut, propriétaire d’un hôtel dans une petite ville des Ardennes. C’est un garçon un peu gauche, plein de maladresses qui font le désespoir de sa tante, mais dont la vie va complètement changer lorsqu’un bel enfant blond poursuivi par des gendarmes va lui demander de l’aide. Ce bel enfant est en réalité une fille, Hélène, qui est à la recherche de sa «Maman Jenny » et du beau pays de son enfance.

Cette quête va entraîner Gaspard dans de nombreuses aventures aux folles péripéties, où la belle nature des Ardennes (le pays auquel André Dhotel a toujours été si attaché) est magnifiée et habillée de féerie, où le fantastique se mêle au réel, où l’amitié est partout présente jusqu’à une fin que je ne dévoile pas, mais qui au delà des événements est si poétique, car le beau pays, est, pour celui qui voyage sur les routes, en réalité partout dans le monde.



Cette célébration du voyage, de l’esprit vagabond, n’a pas manqué de me faire penser à ce jeune poète blond natif de Charleville, cet éternel voyageur, « homme aux semelles de vent », ou encore à ce génial musicien nommé Django, vivant dans une roulotte, et né à Liberchies, pas très loin de ce pays.



Et puis, il y a cette écriture délicieusement surannée, mais si belle, notamment lorsqu’elle évoque la beauté fantastique des forêts des Ardennes, et celle de tous les villages de ce pays. Une écriture pleine de finesse, où j’ai ressenti le plaisir que l’auteur a eu de tresser ce récit à mi-chemin entre le roman d’aventures et le conte de fée.



En conclusion, un beau roman qui donne envie d’en lire d’autres d’André Dhotel
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Ma chère âme

André Dhôtel a quelques lieux privilégiés : Paris, la banlieue, les forêts, la Grèce. Et voici l'oeuvre qui les réconcilie et les relie tous. le personnage principal, Petros puis Pierre, passe d'un monde à l'autre comme tous les personnages de Dhôtel : intimement convaincus de leur propre insignifiance, s'abandonnant sans un murmure au destin qui les ballote, mais avec un formidable espoir au fond de leur coeur.



Un espoir qu'ils ne sauraient pas définir eux-mêmes, espoirs d'échapper à la banalité grise, espoir de retrouver l'être aimée à peine entrevu... Espoir qu'il se passe quelque chose à la mesure de l'attente, tout simplement. Comme ce héros, Petros. Quelques heures de vagabondage avec une adolescente surgie de nulle part ont suffit à le convaincre qu'il y avait quelque chose à attendre dans le monde. Même en ayant appris la mort de l'adolescente. Même après avoir quitté l'île pleine de soleil pour les rues ternes de Paris. Même après de longues années, jour après jour, à vendre fruits et légumes douze heures par jour. Même après tout...



Que se passe-t-il exactement dans ce livre ? Difficile à dire. Des vies se mêlent. Des espoirs fous et de violents désirs se transforment en amour pour la lente croissance d'une forêt. Un feu de paille s'élève dans les coeurs et les âmes, retombe lentement en sage labeur et en travail de la terre. On s'arrache d'une monotonie grise pour s'en construire une à soi, teinté de couleurs douces un peu sépia. On est bien loin des mondes flamboyants auxquels on se croyait promis dans sa jeunesse, mais le regret ne jaillit que rarement. On vieillit, en somme.
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Un soir...

J'irai crier Dhôtel sur tous les toits de la ville mais le mien d'abord pour apprivoiser ma peur du vide,

j'en frôlerai deux miaous aux chats qui aiment à se cacher derrière des livres jaunis,

je le hurlerai à la face du monde à commencer par mes voisins polonais qui parlent pas français,

je le clamerai à mes CP qui commencent à peine à lire et m'écoutent à peine aussi,

je le martèlerai à papa aussi lui qui n'a jamais ouvert un roman de sa vie,

je le murmurerai au vent pour que les oiseaux colportent ces 11 nouvelles au ciel,

je taguerai son nom sur la façade de toutes les auberges parce qu'il n'y en a qu'un (Dhôtel),

je le ferai savoir oui, finie la réserve, ça vous change un homme une telle révélation littéraire, il faut le scander quand on découvre une perle injustement ignorée, qu'on a noté sur le calendrier un après.

Ça, c'était ce que je pensais avant de l'avoir lu. À trop traîner sur internet pour se renseigner sur un auteur qu'on ne connait pas en attendant l'arrivée du livre (merci Babélio et masse critique), on peut se mettre à délirer, surtout s'il est autant adulé, l'auteur. Je me contenterai finalement d'une banale critique ici-même. En plus ça m'arrange bien, vu que les toits et moi...



le facteur a donc fini par passer, retour sur terre. Un livre de très belle facture éditoriale se retrouve dans ma boite (merci beaucoup à « La clé à molette » aussi), un ouvrage de 11 étages où j'ai donc rendez-vous avec Mr André Dhôtel et ses nouvelles. Ascenseur, siouplait (j'aime bien monter sans faire trop d'effort).

Premier étage, bien le bonjour Mr Meurtiaux le professeur de lettres, qui court après la première fois où il croisa Jeanne à Véziers, instant d'émoi à la fois surnaturel et banal. Je reste avec des habitants de Véziers au deuxième, deux cousins rivaux en héritage qui s'embarquent vers un piège, sur un cours d'eau en voie de dégel. Encore l'amour, quand au troisième temps de la valse de jeunes fiancés s'éloignent pour mieux se retrouver dans l'élément naturel.

Au revoir les tourtereaux et au revoir l'ascenseur aussi, problème de rythme peut-être mais je sens que je suis pas prêt de croiser Mr Dhôtel si je continue comme ça. J'y vais par les escaliers, c'est sûrement par là qu'il doit passer.

Et là miracle au quatrième, ça y est je reconnais enfin sa silhouette sur le palier, l'homme dont Henri Thomas a dit qu'il fallait se méfier, « … méfiez-vous de sa redoutable simplicité ». Me suis peut-être pas assez méfié jusque là, moi. L'entrée en matière de ce « conte d'hiver » se fige dans mes rétines, implacable : « ....L'affaire étrange c'est que la neige, bien loin de confondre les lieux, affirme le caractère unique de chacun d'eux. Plus loin la place du village avec la poste et l'église, les bâtiments de la petite gare et la courbe de la voie ferrée entre les haies devaient plus que jamais garder en profondeur le dessin d'une irremplaçable existence ». Mais elle est fugace la silhouette, elle se dérobe entre Émilie et Bertrand et leur histoire de rencontre qui bégaie, pour réapparaître furtive au détour d'un couloir ou derrière une porte entrebâillée.

J'accélère quatre à quatre la montée pour la retrouver cette silhouette, je bouscule les habitants, barrez-vous, rien à foutre de vos histoires, j'ai rendez-vous avec Mr Dhôtel moi. Me retrouve au 6ème sans l'avoir vraiment revu. Stop. Repos, j'ai le palpitant trop exalté. Il doit falloir être au calme pour rencontrer Mr Dhôtel, première règle.

Je reprends l'ascenseur et mon rythme cardiaque. Je descends, je remonte au hasard. A tous les étages ou presque, encore des affaires de coeur aux scenarii assez proches, un poil surannées. Bonjour Mme Bonjour Mr, oui je sais vous avez une histoire à partager, allez-y je suis tout ouïe. Et parfois la silhouette de Mr Dhôtel se redessine furtivement dans le décor. Mais j'ai quand même fini par le trouver au 7ème, bien installé chez les Brintart, « sur la route de Montréal ». Encore une histoire de rencontre bégayée, cette fois 20 ans après, entre Mathilde et Thierry, pourtant promis à Justine.

Je crois deviner la teneur de tout ça, la rencontre effective avec Mr Dhôtel ne peut avoir lieu que sous certaines conditions. Au delà de son style pur, le format court de ces nouvelles aux histoires peu captivantes à mon goût n'étaient peut-être pas l'idéal pour une entrée dans son domaine. Reste à savoir quelles conditions le sont vraiment, et pour cela la découverte de quelques uns de sa centaine d'ouvrages m'y aideront peut-être un jour.



N'empêche, j'avais peut-être pas complètement tort à envisager de grimper sur tous les toits. Allez, j'irai quand même en murmurer deux mots au vent, on sait jamais trop, avec les oiseaux.

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Ce jour-là

André Dhôtel écrit ici la monotonie de la vie campagnarde où, ce jour-là, des sentiments humains viennent quelque peu perturber les bruits inchangés de la vie de village.

Dans ce petit bourg des Ardennes, le départ bien matinal du train fait office de réveil pour Germaine dont la journée commence invariablement au cri du sifflet. Préparation du feu, lait mis à chauffer au coin de la cuisinière et vieux seau à remplir au puits du jardin.

Ce matin de mai, les pétales des fleurs sont mouillés et elle se fait la réflexion qu’il a plu pendant la nuit. Elle pense aussi, puisque c’est l’Occupation, qu’il lui faudrait trouver du savon pour laver le linge, surtout que ses deux petits-enfants Alain et Charlotte sont chez elle. Ernest, leur père et fils de Germaine, est prisonnier, et sa femme, blessée, est à l’hôpital.

Mais la pluie, ne se serait-elle pas infiltrée jusqu’à la chambre des enfants ? Martial, son mari, n’avait toujours pas pris la peine d’aller réparer la gouttière. Un reproche de plus à l’encontre de ce mari qui ne pense qu’à sa pêche. Après quarante ans de mariage, l’entente s’effrite et en réponse aux critiques de sa femme, Martial dénigre Fabien, le fils naturel de Germaine. Lui avait aussi un fils au moment de leur mariage, Frédéric, et voilà que le garde-champêtre vient de lui faire part d’une altercation, avec coup de feu, entre Fabien et Frédéric. Ce jour-là, les occupations routinières de Germaine vont être chamboulées par cette nouvelle. Sa hotte sur le dos pour ramasser de l’herbe pour ses lapins, elle court chez Frédéric afin de savoir si c’est sa femme, une belle étrangère plutôt farouche, qui est à l’origine d’un différent entre les deux hommes.

Décidément, ce jour-là, Germaine n’arrivera pas à butter toutes ses pommes de terre…



Une histoire d’un jour, si simple en apparence et qui fait juste dévier des vies. On a tendance à penser que cette simplicité finira par cacher un drame mais non, l’auteur n’en a pas décidé ainsi. Un fond de campagne nous est rappelé par petites touches discrètes mais justement si réalistes dans leur simplicité ; un ruisseau qui s’élargit aux abords du lavoir, des corbeaux chamailleurs, des champs ondulant dans le lointain, une plaine infinie où le regard se perd. Dans ces petits bourgs et hameaux entourés de champs, les rumeurs n’ont aucun mal à se frayer un chemin entre landes et taillis jusqu’à la voisine, ou le garde-champêtre, ou un vagabond.



C’est une histoire reposante, comme une douce musique qui débute et s’achève sans jamais lever le ton. Et mine de rien, cette petite histoire volette agréablement dans la tête.

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Campements

C'est un conte en vérité que nous lisons là. Point de péripéties extraordinaires. Non, le récit d'une vie simple rythmée par la lumière changeante des saisons, par les semailles et les labours, les tâches qui raidissent les doigts et crèvent le coeur de peine.



Chacun des personnages de ce roman est habité par un espoir enfantin que son rêve va se réaliser. Et comment en serait-il autrement dans un monde où la seule description d'asphodèles crûes au pays lointain est comme un miracle offert dont il faut se saisir?



La véritable aventure est intérieure. Une vieille voie ferrée envahie d'herbes sauvages, un train de nuit, des chemins qui divaguent, des talus comme des montagnes que le pas enjambe, une absence de but mais l'envie du chemin et l'accueil de la rencontre, cela suffit au bonheur des êtres pourvu que l'esprit, le coeur, le corps soient disposés à s'enivrer de boue et de ciels.



Il n'y a pas pour ces héros ordinaires de différence très nette entre possible et impossible et ils en franchissent la frontière avec une jeunesse éternelle et insouciance.

Un des personnages importants de cette étonnante histoire ( qui est le premier roman écrit par André Dhotel, en 1930) est la Nature.

Vous ne trouverez pas ici de description grandiloquente, juste ces petites choses que l'on ne sait plus voir mais dont la présence rend à la vie et la joie ou au contraire, appuie le désespoir. Une fleur séchée, le bruit des insectes au bord d'un marais, la houle des moissons, le mystérieux ballet de la neige...



Des rencontres surnaturelles il y en aura. Tout le roman tend vers elles. Et qui plus est, Ô bonheur, elles nous parlent de temps et d'êtres que nous avons rencontrés sans les voir sur nos propres chemins.

Par petites touches, avec une poésie étonnante, une maestria sans pareille dans la juxtaposition des temps de conjugaison, Dhotel gauchit légèrement tout ce qui voudrait aller droit. Sous la plume de n'importe quel autre auteur, l'histoire serait banale. Son art consommé du récit, de l'attente, de l'observation naturaliste, de la lenteur et de l'imprévu subitement ouvert donnent dès les premières lignes la sensation d'être nous-mêmes en Campement provisoire, au bord de la chute ou du départ.

Comment, par ces courtes phrases qui, saisissant le détail, savent encore donner à voir la totalité, comment mieux donner à sentir le temps consacré à observer d'un regard plein d'enfance la neige faisant d'une contrée un pays neuf où l'on est transporté sans bouger de derrière son carreau?



Lisez ce livre qui parle intensément de l'attention tendre aux êtres et aux petites choses, de la paix que l'on sait advenir au beau milieu des peines, de ce qui est accepté sans se laisser mordre par le doute.

La Vie elle-même est Campement, départ brusqué et en cachette des lieux que l'on croyait acquis, ombres qui déplacent les limites entre le rêve et la réalité, lumière si belle de la nuit que les poitrines s'en rehaussent.

Tzigane de Maurice Ravel

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Le Pays où l'on n'arrive jamais

Voici une lecture bien étrange. Décevante, surprenante et finalement agréable.



Décevante car j’en attendais beaucoup, trop sans doute.

André Dhôtel vanté par Christian Bobin que j’aime tant, vanté par nombre d’amis Babeliautes…



Surprenante car j’attendais quelque chose d’introspectif, de profond, d’épais et je trouvais légèreté, fraîcheur, jeunesse.

Entendons-nous bien, je n’oppose pas introspection et profondeur à légèreté et fraîcheur – Bobin en est un maître – non, mais là, je trouvais l’un sans l’autre.



A moins, bien sûr, que tout m’ait échappé….



Je trouvais finalement, dans ce roman franchement destiné aux jeunes lecteurs, aventure, nature, amitié, animaux complices ou dangereux, gentils et méchants.



Il y avait aussi comme des fragrances d’Alain Fournier, dans cette amitié se présentant, au début du moins, comme celle de deux jeunes garçons, la fuite de l’un, la recherche de l’autre, les forêts, les collines, les rivières, les « gitans ».



Il y avait encore comme un effet de miroir à briser entre ces deux enfants, infiniment blonds : l’un élevé par sa tante, l’autre adopté par un simulacre d’oncle. L’un résigné, l’autre en fuite continuelle. L’un masculin, l’autre féminin.



Mais peut-être, une fois encore, que je m’égare à vouloir à tout prix voir des choses qui n’y sont pas dans ce beau roman d’aventure qui se termine fort bien et de façon apaisante pour tout le monde.



Je vais tout de même m’empresser de lire autre chose d’André Dhôtel pour me rassurer ou m’affliger sur mon entendement.

J’ai sous la main « ma chère âme » qui devrait faire l’affaire…

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L'Honorable Monsieur Jacques

Un des romans d'André Dhôtel qui ne me quitte jamais.

Des passages (leur esprit) se sont gravés en moi ou plutôt s'y sont installés, car André Dhôtel ne distille pas des leçons de vie, il éveille en nous ce qui, si proche de nous en notre enfance, a parfois manqué d'eau, de lumière ou a été recouvert par des leçons bien apprises, appuyées par la persuasion et les explications des maîtres.

On peut lire "la complexité" d'Edgar Morin pour se persuader que le monde ne se résume pas à l'abstraction qu'en donnent les mots de la science.

On peut aussi retrouver en soi cette connaissance en lisant "L'honorable Monsieur Jacques", celui que les gens de la Saumaie aiment bien, parce qu'il se souviennent de lui enfant, et qu'ils respectent comme savant tout en étant désolé pour lui qu'il ne puisse pas comprendre, du fait même de toute cette science, pourquoi sa femme la quitté.

La délicatesse de l'écriture participe à l'entrée douce et progressive du lecteur, et de Monsieur Jacques dans ce monde étrange de la Saumaie, ces trois villages où Viviane, l'épouse, s'est réfugiée.

Il faudra au héro (mais est-ce vraiment lui le personnage central du roman ... ici pas de projecteur pas de second rôle) ... il faudra au héro donc, se dépouiller de toutes ses certitudes pour comprendre que Viviane n'est pas l'enfant insouciante qu'elle semble être, que sa soeur n'est pas non plus une fille de petite vertu, et que si L'oncle bredouille, est à moitié aveugle et n'entend pas bien, c'est pour mieux parler, voir et entendre ce qui échappe à l'oeil, l'oreille, la bouche qui sait déjà avant de percevoir.

Monsieur Jacques devra se perdre, tourner en rond, alors même qu'il pense aller droit, douter de l'évidence, brûler les tiroirs où il sait si bien ranger toute chose comme on lui a appris, retrouver l'utilité du chemin pour lui même, silence entre deux lieux, de l'ennui, silence entre deux temps, des mots qui disent précisément ce qu'ils ne disent pas et qu'on entend pourtant grâce à l'amitié, à l'amour, à la confiance.

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Ma chère âme

Un jour, quelque chose de blond et de pur s'est levé depuis l'horizon. Est-ce seulement l'effet de la brume à la surface de l'infini d'une Méditerranée ?

Quelqu'un ou quelque chose a plongé du bord de la falaise blanche. Pour toujours...

On dit que c'est la jeune Achyro "aux cheveux de paille" : elle a laissé ainsi – par jeu, en riant – l'adolescent Petros... On dit même : " C'est pour ne plus jamais revenir... "

S'est-elle noyée ? Ne s'est-elle pas , plutôt, évanouie dans l'air blanc de midi ?

Indicible, éblouissante – silencieuse et cristalline – poésie de roches blanches. Mystères de la Terre exposés pour ne jamais être éclaircis.



Le sourire d'une statue grecque a-t-il vocation à être, un jour, par nous "éclairci" ?

Que dire, face aux yeux blancs de l'archaïsme ?

Que cela tombe bien : qu'il n'est pas de beauté VRAIE sans mystère.



Adieu donc à l'île de Samos... Le jeune Petros Colydas migre en France avec son oncle Iorgos (ce protecteur fort envahissant), devient "Pierre" et commence là son apprentissage dans le commerce des Denrées orientales. Le voilà qui prend son envol, s'émancipe – pour travailler dur comme pépiniériste en Banlieue parisienne : celle des maraîchers des années Cinquante...



La jeune Hélène qu'il rencontre a l'oeil d'or de son Achyro disparue...

Existerait-il des "fiancées doubles" ?

Hélène EST Achyro mais en même temps ne peut l'être...

Hélène est, elle, bien réelle. Charnelle.



Ils se marient, travaillent ensemble : un rêve paraît renaître, cerné des murs de pierre blanche des serres et des jardins... Sensibles descriptions de la proche banlieue parisienne des années Cinquante/Soixante, encore si "campagnarde" : et l'on repense à "La Belle Equipe" [1936] de Julien Duvivier... On remonterait bien encore le courant - et la flèche du Temps - jusqu'aux canotages de guinguette de Guy de Maupassant...



Prose agile, aventure de chaque phrase, harmoniques inattendues : musicalité discrète et pourtant extrême. Mon tout premier "Dhôtel"...

Dhôtel l'enchanteur [1900-1991] a ainsi parlé au pur monde de nos sens et aux plus intimes de nos souvenirs - en l'un de ses "romans de prose poétique" des plus charmeurs : c'était en 1961 (*)...

André DHÔTEL, étrange adolescent de 60 ans.



(*) Voici à nouveau la liste des (somptueuses) rééditions de DIX des 42 romans d'André Dhôtel disponibles dans la collection "Libretto" de Phébus (si bon marché, belle police de caractère et belle qualité de papier - toujours illustrés de leur merveilleuse page de flore) :



- "Ce jour-là" [1947] - (160 pages - prix : 7,00 €)

- "Ce lieu déshérité" [1949] - (160 pages - prix : 7,00 €)

- "Les Premiers Temps" [1951] - (288 pages - prix : 9,05 €)

- "Ma Chère âme" [1961] - (288 pages - prix : 9,05 €)

- "Le Mont Damion" [1964] - (256 pages - prix : 8,90 €)

- "Pays natal" [1966] - (288 pages - prix : 9,05 €)

- "Lumineux rentre chez lui" [1969] - (prix : 9,05€)

- "Un jour viendra" [1970] - (288 pages - prix : 9,05 €)

- "Le Soleil du désert" [1973] - (192 pages - prix : 7,60 €)

- "Les Disparus" [1976] - (304 pages - prix : 9,90 €)



... et ce FAIRE-PART DE NAISSANCE de 2 sites littéraires (contributifs, touffus et de présentation très sobre), nouvellement créés sur le media "Canablog" :



- "La Tribu Dhôtel" (LIEN : http://latribudhotel.canalblog.com/ )

- "Dourvac'h" (LIEN : http://dourvach.canalblog.com/)
Lien : http://latribudhotel.canalbl..
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L'homme de la scierie

J'aime la critique de notre ami Philippe Castellain (fort) à propos de "L'homme de la scierie" (1950) : ses points forts sont habilement mis en avant.



Ce dense roman nous place d'emblée au plus près de l'Odyssée personnelle d'Henri Chalfour, employé de scierie de son état. Un homme non pas humble mais affairé (et non pas accablé) par l'accomplissement de ses lourdes tâches professionnelles (le port et le tri de planches gigantesques et le transport des tas de sciures), compensées par ses amourettes au jour le jour... Henri a un frère : Remi... A eux deux, un soir de beuverie qui tourne mal, ils feront son affaire au marchand de chevaux...



Je ne vous lai point précisé : l'action se déroule aux tous débuts de notre charmant XXème siècle... et le roman est non seulement dense, mais fleuve - tel celui qui passe devant la scierie de Nogent-sur-Marne... Un coin à impressionnistes mais sans Renoir ni Maupassant.



La morne existence d'un prolétaire, qui aurait pu finir repris de justice (étiqueté assassin ou à tout le moins complice d'assassinat)... Ce qu'il y a vraiment de plus authentique, "vrai" et sans bavures dans cette oeuvre...



Les destinées de chacun des membres de la famille de richousses locaux : sans problèmes pour le crédible Hector Joras, le patron de la scierie nogentaise... Ses frères Alcide et Claude : des parasites sans cervelle, qui se mêlent de vouloir trouver un vague sens à leur existence de rupins coincés dans une maison bourgeoise aux allures de "château"... Ils ne peuvent que nous faire du "Bouvard et Pécuchet" (au mieux), hélas... Heureusement, il y aurait la frangine fantasque, la "révoltée de la famille", qui a (selon les mots poétiques de l'ami Brassens) passablement et constamment "le feu au cul"...



On s'ennuie en fait assez ferme aux prévisibles pérégrinations des aristos, comme près de cette foutue Comtesse, partageant sa vie entre l'Île de France et son manoir normand, et ayant au grenier son "fauteuil hanté" gaston-lerouxesque, auquel ladite Comtesse se trouve attachée mais dont le lecteur, très vite, ne sait que faire ni quoi en penser... Un "running gag" en trop !



Au moins, on ne s'ennuie pas avec Henri, un dingue de pêche, et qui aime à l'occasion "pécho la meuf", comme on dirait (assez bêtement et tristement) par nos jours despentesques [Attention, "un grand écrivain est née" nous préviennent les bandeaux des enièmes subutexeries-cherconnarderies...] ; bref, Henri a de la ressource... Il ne se fait jamais serrer par la Maréchaussée : pas bête.... Bref, souple comme une ablette, et muet comme une carpe !!!



Résumons nous : pour nous, pas vraiment le chef d'oeuvre du Maître André DHÔTEL (1900-1991), parfois si inégal dans sa production romanesque et nouvelliste sans égal... Chef d'oeuvre qu'il aurait pu être...



Alors, un postulat : Dhôtel n'était pas à l'aise dans les formes romanesques longues... Trop de personnages (dont ceux de "la Haute") dont on ne connaîtra trop peu pour nous offrir un minimum d'intimité et de confort psychologiques, trop peu crédibles donc, insuffisamment construits... du coup, on se moque un peu de leurs péripéties existentielles !



"L'Homme de la scierie" n'a cependant rien à voir avec les ratages flagrants que seraient selon nous : "La route inconnue" (personnage féminin central totalement bâclé et incrédible au possible... ) et le très infantile et VRAIMENT navrant "Le soleil du désert"...



L'un des soubassements de l'idée de "maîtrise" serait de pouvoir tenir la distance... La réponse à cette interrogation-là me semble ici négative. Hélas...



Les véritables "chefs d'oeuvre" seraient donc, selon nous, et dans leur brillante concision et leurs beaux mystères : "Pays natal", "Ma chère âme", "La Tribu Bécaille", Les disparus" (Quelle merveille méconnue !), "Je ne suis pas d'ici" (dont nous attendons âprement la réédition...), "Lumineux rentre chez lui" , "Le Pays où l'on n'arrive jamais", "L'île aux oiseaux de fer", "Dans la vallée du chemin de fer", "L'honorable Monsieur Jacques", "L'azur", "La maison du bout du monde" (Un éblouissement de simplicité !), "Nulle part" (Petit chef d'oeuvre précoce...), "Les chemins du long voyage" et quelques autres qui ne me reviennent pas à l'esprit...



Que vive encore la perpétuelle redécouverte du monde magique d'André Dhôtel !!!





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