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EAN : SIE123954_452
(30/11/-1)
4.28/5   9 notes
Résumé :
« Le plus désagréable dans l'aventure de Chalfour c'était que les copains et les gens du village s'obstinaient à le considérer comme un mort ou un déterré, ce qui n'était pas tout à fait inexact, mais discourtois. Il fut sensible à ces manières imbéciles, et il se répétait souvent qu'on verrait ce qu'on verrait, et il priait tout de même le ciel de ne pas permettre qu'il soit tout à fait mort. La vallée était magnifique en ce mois de juin. Quoi donc pouvait arriver ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Peut-être l'oeuvre la plus aboutie d'André Dhôtel, et pourtant l'une de ses moins connues. Logiquement plutôt, en fait : elle est totalement cryptique. Un ouvrier se réveille un matin, couché à même le sol, au beau milieu d'une scierie. Il sait qu'il travaille ici. C'est à peu près la seule chose dont il se souvienne. Pour le reste, toute sa mémoire s'est comme envolée. Tout son corps lui fait mal. Ses compagnons de travail arrivent, le reconnaissent, prennent soin de lui. Mais bien que très amoché, il refuse d'aller se faire soigner, et se met à travailler. Peu à peu des souvenirs lui reviennent. Ceux de l'enfance, d'abord…

L'ouvrier, héros de l'histoire, s'appelle Henri Chalfour. Bien que de très humble extraction, son destin semble inextricablement lié à celui de la grande famille aristocratique locale : les Joras. Nobles, plus ou moins riches, un domaine quelque part en Ile-de-France près de la scierie, un autre en Normandie. Leurs affaires ne vont pas trop bien, la faute à ses membres fantasques et peu matures. Leurs frasques et leurs disputes servent de télénovelas à tous les villages alentours. de temps en temps, au milieu d'une partie de pêche ou de braconnage, la route de l'un ou l'autre d'entre eux croise celle de Henri Chalfour… Puis chacun reprend son chemin.

L'histoire se déroule, n'a l'air d'aller absolument nulle part, comme si Dhôtel essayait de briser une bonne fois pour toute cette puérile croyance des hommes que leur vie à une direction, un sens et un but. Et pourtant, d'une façon ou d'une autre, elle va quelque part. On le sent, même si on ne sait pas où. Quelque chose se cache dans les pas, les travaux, les attentes d'Henri Chalfour. Pas dans ses peines – il ne les partage guère – ni dans ses mots – rares. Dans ses rencontres avec les Joras, dans ses échanges, de loin en loin, avec celle qui est peut-être sa fille. Dans sa contemplation de certaines fleurs, dans ses efforts pour retaper une vieille maison…

Une leçon de vie.
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J'aime la critique de notre ami Philippe Castellain (fort) à propos de "L'homme de la scierie" (1950) : ses points forts sont habilement mis en avant.

Ce dense roman nous place d'emblée au plus près de l'Odyssée personnelle d'Henri Chalfour, employé de scierie de son état. Un homme non pas humble mais affairé (et non pas accablé) par l'accomplissement de ses lourdes tâches professionnelles (le port et le tri de planches gigantesques et le transport des tas de sciures), compensées par ses amourettes au jour le jour... Henri a un frère : Remi... A eux deux, un soir de beuverie qui tourne mal, ils feront son affaire au marchand de chevaux...

Je ne vous lai point précisé : l'action se déroule aux tous débuts de notre charmant XXème siècle... et le roman est non seulement dense, mais fleuve - tel celui qui passe devant la scierie de Nogent-sur-Marne... Un coin à impressionnistes mais sans Renoir ni Maupassant.

La morne existence d'un prolétaire, qui aurait pu finir repris de justice (étiqueté assassin ou à tout le moins complice d'assassinat)... Ce qu'il y a vraiment de plus authentique, "vrai" et sans bavures dans cette oeuvre...

Les destinées de chacun des membres de la famille de richousses locaux : sans problèmes pour le crédible Hector Joras, le patron de la scierie nogentaise... Ses frères Alcide et Claude : des parasites sans cervelle, qui se mêlent de vouloir trouver un vague sens à leur existence de rupins coincés dans une maison bourgeoise aux allures de "château"... Ils ne peuvent que nous faire du "Bouvard et Pécuchet" (au mieux), hélas... Heureusement, il y aurait la frangine fantasque, la "révoltée de la famille", qui a (selon les mots poétiques de l'ami Brassens) passablement et constamment "le feu au cul"...

On s'ennuie en fait assez ferme aux prévisibles pérégrinations des aristos, comme près de cette foutue Comtesse, partageant sa vie entre l'Île de France et son manoir normand, et ayant au grenier son "fauteuil hanté" gaston-lerouxesque, auquel ladite Comtesse se trouve attachée mais dont le lecteur, très vite, ne sait que faire ni quoi en penser... Un "running gag" en trop !

Au moins, on ne s'ennuie pas avec Henri, un dingue de pêche, et qui aime à l'occasion "pécho la meuf", comme on dirait (assez bêtement et tristement) par nos jours despentesques [Attention, "un grand écrivain est née" nous préviennent les bandeaux des enièmes subutexeries-cherconnarderies...] ; bref, Henri a de la ressource... Il ne se fait jamais serrer par la Maréchaussée : pas bête.... Bref, souple comme une ablette, et muet comme une carpe !!!

Résumons nous : pour nous, pas vraiment le chef d'oeuvre du Maître André DHÔTEL (1900-1991), parfois si inégal dans sa production romanesque et nouvelliste sans égal... Chef d'oeuvre qu'il aurait pu être...

Alors, un postulat : Dhôtel n'était pas à l'aise dans les formes romanesques longues... Trop de personnages (dont ceux de "la Haute") dont on ne connaîtra trop peu pour nous offrir un minimum d'intimité et de confort psychologiques, trop peu crédibles donc, insuffisamment construits... du coup, on se moque un peu de leurs péripéties existentielles !

"L'Homme de la scierie" n'a cependant rien à voir avec les ratages flagrants que seraient selon nous : "La route inconnue" (personnage féminin central totalement bâclé et incrédible au possible... ) et le très infantile et VRAIMENT navrant "Le soleil du désert"...

L'un des soubassements de l'idée de "maîtrise" serait de pouvoir tenir la distance... La réponse à cette interrogation-là me semble ici négative. Hélas...

Les véritables "chefs d'oeuvre" seraient donc, selon nous, et dans leur brillante concision et leurs beaux mystères : "Pays natal", "Ma chère âme", "La Tribu Bécaille", Les disparus" (Quelle merveille méconnue !), "Je ne suis pas d'ici" (dont nous attendons âprement la réédition...), "Lumineux rentre chez lui" , "Le Pays où l'on n'arrive jamais", "L'île aux oiseaux de fer", "Dans la vallée du chemin de fer", "L'honorable Monsieur Jacques", "L'azur", "La maison du bout du monde" (Un éblouissement de simplicité !), "Nulle part" (Petit chef d'oeuvre précoce...), "Les chemins du long voyage" et quelques autres qui ne me reviennent pas à l'esprit...

Que vive encore la perpétuelle redécouverte du monde magique d'André Dhôtel !!!


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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
[AVANT-PROPOS]

« Il y a des noms et des phrases qui vous reviennent comme des refrains dans les chansons ».

"Les rues dans l'Aurore" [1945] et "L'Homme de la scierie" [1950] sont les deux romans phares de la manière du « premier » Dhôtel, que l'on pourrait dire noire — dans cette veine on citera "David" [1948], "Le Plateau de Mazagran" [1947], "Les Chemins du Long voyage" [1949], "Bernard le Paresseux" [1952] , par exemple. L'un de ces deux romans, pour ainsi dire devenus mythiques, "L'Homme de la scierie" est aujourd'hui, enfin réédité par les jeunes éditions Sous le Sceau du Tabellion.

Georges Leban, le héros des "rues dans l'Aurore", est un menteur à la manœuvre dans une bourgade de moyenne importance flanquée d'un faubourg qui ne cesse de s'agrandir et où, dans l'arrière-salle de bistrots et d'épiceries dignes des fonds de province et des derniers cercles de l'enfer, se fomentent des intrigues torses qu'éclairent les mensonges de Leban et la chevelure blonde à mèche blanche d'une fille qui serre le cœur à force d'être morte et d'apparaître vivante.

Construit sur un flash-back époustouflant — une première en 1950 dans le roman français — "L'Homme de la scierie" brouille les temps et les lieux : il débute dans une scierie des bords de Seine avant d'émigrer en Normandie dans le château d'Asqueville, face à la mer. On dira que se croisent l'histoire des Joras et des Chalfour.

Les frères Chalfour sont des gens de peu. L'aîné, Henri, à la force herculéenne, s'abrutit à trimballer des planches dur un chantier, admiré par les seuls oiseaux de proie qui tournant dans le ciel au-dessus de la scierie. Le cadet, Rémi, un paresseux, trafique dans l'espoir de monter un élevage de chevaux.

Les Joras : de grands propriétaires. Hector fume sans broncher d'énormes cigares « qui le font atrocement pâlir », Alcide est un casse-cou qui sort en mer par gros temps. Et puis il y a la sœur, Eléonore, « la fille Joras », sauvage et chaude, dont on se demande par quelle lubie elle a épousé Damont, qui se promène dans les champs en faisant des moulinets avec une canne à pommeau d'or, tout en se vantant : « La mer ne peut noyer un fat tel que moi ». Et que dire de la comtesse de Falebert, qui a des visions ?

Le fin mot ? Il faut le demander au marchand de chevaux. Mais il est au fond du fleuve et le lecteur dans tous ses états.

De même que "Le Village pathétique" [1943] est articulé sur le chant de la grive — trois brèves, deux longues — "L"Homme de la scierie" s'appuie, lui, pour reprendre haleine, sur deux refrains lancinants : « Qui le savait ? » et « Le marchand de chevaux est au fond du fleuve ».

Patrick REUMAUX

[André DHÔTEL, "L'Homme de la scierie", éditions Gallimard (Paris), 1950 — rééd. aux éditions Sous le Sceau du Tabellion (Caluire et Cuire), 2020, 432 pages]
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Le soleil était vif. Aux confins de la vallée (où se perdaient vers le nord la forêt de Cize et, vers l'est et l'ouest, tant de blés purs), chaque détail demeurait aussi précis que les cailloux du chemin autour des pieds d'Henri. Il y avait des vols de perdrix, de corbeaux, de pigeons et de hérons presque invisibles, mais qui ressemblaient à de petites lumières allumées et très vite éteintes dans l'espace.

[André DHÔTEL, "L'Homme de la scierie", éditions Gallimard (Paris), 1950 — Première partie : DES NUITS ET DES JOURS, Chapitre IX : MARAIS ET COLLINES ; rééd. aux éditions Sous le Sceau du Tabellion (Caluire et Cuire), 2020 — page 154]
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La vallée ! Ses mille chemins, ses penchants couverts de prés, de bois, de cultures. Vers le sud l'immense plateau ondulé qui sépare la Seine de l'Yonne, et où les nombreux villages se perdent dans l'étendue. Il y avait ces futaies et ces halliers sans fin dans une région de marécages où Eléonore aimait faire de longues promenades, où elle avait rencontré Dufard au temps de sa franche jeunesse. Comment une campagne si vaste n'aurait-elle pas abrité tant d'événements, dont l'aventure d'Henri Chalfour n'était qu'un mince épisode ? Il avait tué Jarnicot et l'on savait aussi qu'il avait eu un enfant avec une fille de bonne famille, Rosine Villiers, qui s'était mariée à Troyes.

[André DHÔTEL, "L'Homme de la scierie", éditions Gallimard (Paris), 1950 — Deuxième partie : QUAND NOUS NOUS REVEILLERONS, Chapitre IV : QUAND S'EST TISSEE LA TRAME, page 265 ; rééd. aux éditions Sous le Sceau du Tabellion (Caluire), 2020 — page 277]
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Henri gagna le pont de Caunes. A ce moment, il eut l'impression que durant toute sa vie il tournerait autour de ce pont. Le pont serait toujours présent comme la brouette, comme les étoiles et les chants du grillon, comme ce sentiment inapaisable de se trouver parfois dans une cave avec le désir de dévorer toute la lumière du ciel.

[André DHÔTEL, "L'Homme de la scierie", éditions Gallimard (Paris), 1950, Première partie : DES NUITS ET DES JOURS, Chapitre III : CHEZ SEMIGANT — page 55 ; rééd. aux éditions Sous le Sceau du Tabellion (Caluire), 432 pages, 2020 — page 63]
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Au bord de la route, des fleurs se multipliaient dans l'herbe pauvre, et Chalfour s'étonnait de l'éclat des marguerites. Il apercevait des insectes qui voyageaient au milieu des herbes et au-dessus des herbes : moucherons, sauterelles, faucheux. Lui-même ressemblait à un faucheux embarrassé par le fardeau de son corps, comme le ciel aussi par l'illustre poids du soleil.

[André DHÔTEL, "L'Homme de la scierie", Gallimard (Paris), 1950, page 155 — rééd. aux éditions Sous le Sceau du Tabellion (Caluire), 2020]
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Videos de André Dhôtel (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de André Dhôtel
« […] J'ai reçu de François Dhôtel (1900-1991), sous la forme d'un « tapuscrit » photocopié […], la merveilleuse suite de poèmes que voici. Je me suis dit qu'André Dhôtel, à la mort de qui je n'ai jamais cru, se dévoilait soudain plus vivant que jamais, avec la lumière pailletée de son regard et son sourire en coin. […] Maintenant ces poèmes sont là, qui n'ont rien de testamentaire, même si l'on devine que leur auteur peu à peu s'absente - mais c'est pour mieux affirmer une présence imprescriptible. Voici ces poèmes, dans l'ordre où je les ai reçus. […] Les poèmes naissent de la couleur du ciel, du temps qu'il faut, d'un écho des jours ordinaires et miraculeux, comme les impromptus qu'aimait tant Dhôtel, ou les petites pièces de Satie. […] Au rythme séculaire des premières lectures éblouies,
« Voici donc le chant de la jeunesse oubliée et des souvenirs perdus » […] » (Jean-Claude Pirotte)
«  […] Des paroles dans le vent en espérant que le vent est poète à ses heures et nous prêtant sa voix harmonise nos artifices.
Nos strophes seraient bien des branches avec mille feuilles que l'air du large fera parler peut-être un jour où personne n'écoutera.
Car l'essentiel serait qu'on n'écoute jamais et qu'on ne sache pas qui parle et qui se tait. […] » (Espoir, André Dhôtel)
0:00 - Abandon 2:00 - Attente 3:30 - En passant (II) 4:50 - La preuve 5:30 - L'inconnu 6:15 - Splendeur (II) 6:46 - Générique
Référence bibliographique : André Dhôtel, Poèmes comme ça, éditions le temps qu'il fait, 2000.
Image d'illustration : https://clesbibliofeel.blog/2020/04/08/andre-dhotel-idylles/
Bande sonore originale : Scott Buckley - Adrift Among Infinite Stars Adrift Among Infinite Stars by Scott Buckley is licensed under a Creative Commons Attribution 4.0 International License.
Site : https://www.scottbuckley.com.au/library/adrift-among-infinite-stars/
#AndréDHôtel #PoèmesCommeÇa #PoésieFrançaise
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