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Citations de André Markowicz (80)


Plus tu te retournes, myrrhophore,
intouchable pour le dieu sonore,
plus tu brouilles le chaos des voix.
Monstre de toi-même, face grise,
quand les marches grincent, ton emprise
est l'étreinte vide par trois fois.
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Iambes du pic-vert contre l'écorce
quand la mousse a une odeur de thym
gris - discontinus. Demain matin,
sors plus tôt, sentir ton propre torse.
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Mon ami, qui donc peut monter jusqu’au ciel .
Ce sont les dieux qui y logent pour toujours avec le Soleil.
Quant à l’humanité, ses jours sont comptés:
tout ce qu’elle fait et refait, ce n’est que du vent.
Toi à cette heure, tu as peur de la mort;
Où donc est la force de ta vaillance?
C’est moi qui marcherai devant toi,
Que ta bouche me crie: “Avance, ne crains pas !”
Si par hasard je succombe, j’aurai donc assuré mon renom:
“C’est contre le féroce Huwawa
que Gilgamesh est tombé”, dira-t-on.
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André Markowicz
Canicule pour un dix octobre.
Un café à la terrasse. Je
j'entends rien, mais que pourrais-je entendre ?
Être là,– là ou ailleurs –, et pas
de ma faute. C'est comme une vague
lente de tristesse, pas une marée,
puisque la marée peut redescendre –
un état d'étrange compassion
pour n'importe qui, – pas tous ensemble
quand je m'en rends compte, et, pourtant, si,
tous ensemble, – si. L'inévitable
nous rapproche, fût-ce à contrecœur.
J'ai toujours vécu dans son fantôme
par les yeux – les yeux plus que les mots –
de ceux qui l'ont vu en vrai. Ses ruines
ont construit ce que j'essaie de dire
si j'essaie de dire quelque chose, –
que, bien sûr, je ne veux pas savoir,
né de gens qui l'ont gardé en eux
parce qu'une fois qu'on le ressent,
il vous reste, même s'il s'efface
comme quelque chose dans les os
qui aurait sa vie indépendante.
Ce n'est pas qu'il se reforme, c'est
que le corps est devenu plus apte
à le figurer, et pas le corps
seul, mais l'air que nous respirons tous.
Autre chose que de l'inquiétude,
une espèce, je ne dirais pas
de sérénité mais de bizarre
assurance, – l'ange de la ruine,
le melekh ha movet de celui
qui s'était assis devant sa porte
parce qu'il était trop fatigué
pour ne pas l'attendre. Va savoir
d'où il vient mais sa noirceur est celle
de la flamme froide du granit.
Il ne pèse pas sur la poitrine,
il étend sa main, il est sans dieu.
[10-14 octobre 23].
*
« melekh ha movet » – en fait « melekh ha mavet », mais j’ai le souvenir d’avoir entendu le « o » chez de vieux ashkénazes, c’est l’ange de la mort de la Bible.

Source : https://www.facebook.com/andre.markowicz
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Et si l'Ukraine libérait la Russie ?

Cette phrase semble indécente alors que la guerre fait rage, que l'Ukraine est ravagée, que la Russie s'efforce de détruire toutes ses infrastructures civiles ; alors que l'on assiste, avec plus d'un quart de la population ukrainienne déplacée ou réfugiée dans d'autres pays, à un nettoyage ethnique sans précédent et que l'on découvre de jour en jour des dizaines et des dizaines de crimes de guerre perpétrés par l'armée russe : alors que c'est l'existence même de l'Ukraine qui est mise en cause par Vladimir Poutine. Et pourtant, je la répète, cette phrase : et si l'Ukraine libérait la Russie ? Si l'électrochoc provoqué par le désastre ukrainien arrivait, en Russie, à réveiller les consciences et à changer l'histoire russe ?
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Gilgamesh pleure son ami Eabani,
Amèrement, il pleure et il fuit dans le désert :
"Je vais mourir !
Ne suis-je pas semblable à mon Eabani?
Le chagrin est un poids sur ma poitrine,
J'ai peur de la mort, et je cours, je fuis dans le désert !
Vers la puissance d'Ut-Napishtim,
fils d'Ubara-Tutu,
Je dirige ma route, j'avance en hâte.
Je suis venue la nuit vers des rochers
dans les montagnes,
J'ai vu des lions, et voilà que j'ai peur.
Je relève la tête, j'invoque le grand dieu Lune."
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Matin d’hiver
  
  
  
  
Soleil et neige : pure grâce !
Mon adorée, tu te prélasses, -
Ma belle, allons – tu dors encor :
Ouvre tes yeux lourds de caresses ;
Astre du Nord, enchanteresse,
Viens saluer l’aube du Nord !

Hier, la bourrasque faisait rage,
Au ciel erraient de noirs nuages ;
La lune, un disque blême et froid,
Teintait les nues d’un jaune sombre ;
Toi, tu tremblais dans la pénombre –
Et désormais... regarde, vois !

Sous un ciel bleu qui vibre et brille,
La neige, à l’infini, scintille ;
Le noir massif de la forêt
S’ouvre ; sous l’or du givre luisent
Les sapins verts ; la glace irise
L’eau du ruisseau qui transparaît.

Regarde comme notre chambre,
Toute moirée de reflets d’ambre,
Est accueillante ; on est au chaud ;
On resterait en tête à tête.
Mais sortons la jument brunette,
Faisons préparer le traîneau.

Sur cette neige étincelante
Qu’elle s’élance, impatiente,
Pour éveiller, nous emportant,

Ces plaines nues et sans frontières,
Ces forêts si touffues naguère,
Ces bords déserts que j’aime tant.
                           1829


// Alexandre Sergueïevitch Pouchkine (06/06/1799 – 10/02/1837)

/ Traduit du russe par André Markowicz
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Les amis de Pouchkine, lisant ce poème en 1829, s'indignèrent de ce qu'ils virent comme un hymne à l'autocratie. Et c'est, de fait, un hymne - on pourrait croire manichéen - à Pierre le Grand et à la puissance de la Russie. Mais pourquoi "fracassant le verre" ? Le marteau a-t-il besoin de casser le verre pour forger l'acier ? C'est que le verre, dans la poésie russe, c'est une référence, là encore évidente, pour quiconque a un peu lu, à L'Epître sur le verre du premier grand poète russe, Mikhaïl Lomonossov (1711-1765) - qui expliquait que le verre est ce qu'il y a de plus précieux, parce qu'il est fragile, il montre la vérité, il permet de voir plus loin, et il n'existe pas dans la nature : il est une pure création humaine. Le verre, explique Lomonossov, résume toute la grandeur de l'homme. Et c'est donc cette humanité que détruit le "marteau pesant" qui forge l'Empire russe.
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André Markowicz
Mais c’est le signe de la dictature, qu’elle tue pour ce qu’on écrit. — C’était vrai sous les bolchéviques. C’est vrai pour cette ruine atterrante, et proliférante, qu’est, aujourd’hui, l’islam dans le monde, — quand on pense à l’immensité de la culture islamique dans les pays arabes, en Perse, dans toute l’Asie Centrale au Moyen-Age, et quand on voit ce qu’on voit aujourd’hui... Parce que le propre (hum...) de la dictature est de voir le monde comme un tout rigide, immuable, et de ne pas connaître la notion de détail, la graduation des valeurs. De ne pas comprendre qu’un livre, même un livre qui remettrait en cause les fondements de la foi ne peut remettre en cause ni Dieu ni la foi, parce que, si Dieu existe, et si la foi existe, eh bien, parce que rien d’humain ne peut remettre Dieu en question (c’est, je le rappelle, en fait, la raison pour laquelle Ivan Karamazov refuse Dieu), et que, donc, plus les gens écrivent ce qu’ils veulent, plus, tranquillement, ils louent la Création.
La dictature, qu’elle soit religieuse ou politique, n’est pas que la fabrique d’un Tout. Elle est la fabrique des imbéciles. — Qu’est-ce que vous voulez dire à un fanatique islamique ? Il ne sait pas penser, parce que, ce n’est pas qu’il croit, il sait. Et ce qu’il sait, ce n’est pas seulement qu’il le sait pour lui-même, c’est qu’il le sait pour tous, puisque sa vérité doit être celle de tous. Du coup, si un seul élément de ce « tous » n’est pas conscient de cette vérité, lui, ça lui remet tout en cause. Ça lui casse sa joie, exactement pour les nationalistes quand on remet en cause les fondations de la nation. Parce que les fanatiques ont besoin d’être en souffrance, bien sûr, mais cette souffrance est une source de joie publique et intime, c’est la souffrance, fantôme, et bien réelle, qui fait passer à l’acte. Parce que la dictature, quelle qu’elle soit, a un ennemi suprême. Non, pas la démocratie, pas la liberté de conscience, — la solitude.
Ces grandes cérémonies de masse dans l’Allemagne hitlérienne, en URSS, en Chine. Ces gosses dans les écoles religieuses dont le seul savoir, après des années et des années de rabâchage ensemble, est de savoir par cœur un texte qu’ils n’auront jamais lu.
La dictature vous refuse la solitude. Vous n’êtes jamais seul. Ce qui signifie que vous ne pouvez pas être vous. Vous n’êtes pas, vous n’êtes qu’en étant avec, qu’en étant « par ».

Vous lisez, — vous êtes seul. Vous pouvez lire à quelqu’un, bien sûr, mais, même là, vous avez été seul avant, à découvrir ce que vous lisez à celui ou celle à qui vous lisez, comme un présent, comme l’expression la plus profonde de vous-même, parce que lire à quelqu’un, c’est offrir le don de sa solitude, et, pour la personne qui écoute, c’est recevoir ce don, et offrir en échange le don de son écoute, et celui de sa propre solitude en devenir. La littérature, c’est le lieu de la solitude, et donc le lieu du doute, le lieu où la vérité est celle-là même : pas seulement le dépassement de l’instant, de la contrainte. Non, c’est le lieu où notre propre solitude se découvre capable de recevoir le don d’une autre solitude, par delà tous les temps, tous les espaces, pour construire cet espace, à la fois intime et ouvert, que sera notre vie, une vie qui n’est pas seulement celle qu’on nous construit, mais celle que nous construisons nous-mêmes, en nous, avec nos êtres aimés, — nos bien-aimés à nous, et ceux que nous lisons, que nous voyons, que nous écoutons.

De l'influence de la littérature (billet du 14/08/2022 sur facebook).
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Tchekhov, on le sait, n’aimait guère Dostoïevski – ni ses tempêtes métaphysiques ni ses idées messianiques sur le destin de la Russie. Il disait que les écrivains ne doivent pas dire aux gens comment ils doivent vivre, mais leur montrer comment ils vivent.
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André Markowicz
Ce n’est pas l’ancienne URSS que Poutine veut reconstituer, mais bien l’Empire russe : son modèle n’est pas Staline, mais Nicolas Ier. Or, ne l’oublions pas, quand Mikhaïl Lermontov [1814-1841] s’est laissé mourir, en duel, avant d’avoir 27 ans, l’empereur de Russie Nicolas Ier, a dit : « A chien, mort de chien. » Telle fut son épitaphe pour le plus grand poète russe après Alexandre Pouchkine [1799-1837] – et Pouchkine lui-même s’est laissé mourir en duel après avoir compris que Nicolas Ier lisait ses lettres, que la police était partout et qu’il n’y avait plus moyen, en Russie, de séparer l’Histoire et la Maison.

La guerre en Ukraine, non, ce n’est pas la Russie qui la fait, ce sont les chars de Poutine. Et je pense aujourd’hui, avec une douleur et une honte infinies, aux Ukrainiens qui haïront les Russes comme les Tchèques de mon adolescence nous haïssaient, nous, dans les rues de Prague, quand je parlais à ma mère en russe – parce que, ma mère, je ne peux toujours pas lui parler une autre langue que celle qu’elle m’a fait si profondément aimer.

(Le Monde du 1/03/22)
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Anne Le Gardien déclarait
En arrivant dans le palais :
— Bonjour à vous deux, roi et reine,
Je suis venue, jeune et en peine.

— Quel crime avez-vous donc commis
Pour être venue jusqu'ici ?
— J'ai commis un crime à faire peur :
J'ai assommé dix-huit seigneurs.

[...]

— Tous avaient une grande épée rase,
Moi, je n'avais que mon penn-bazh,
Un bâton de coudrier roux,
Ferré au cœur et aux deux bouts,

Ferrés aux deux bouts et au cœur
Pour ouvrir un crâne ou plusieurs !
— Moi, je ne juge pas les dames,
Faites-le, je vous prie, ma femme.

— SI je dois juger de ses torts,
Loin de la condamner à mort,
J'écrirais sur du papier bleu :
"Prends ton penn-bazh tant que tu veux !"
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Il se saisit d'elle avec rage,
Il la jeta sur le plancher ;
Le lait jaillit de sa poitrine,
Et le sang gicla de son nez.

[...]

Claudinaïc au cœur des flammes
Disait au monde sans merci :
— Si la justice était plus juste,
Je ne serais pas seule ici !

Si la justice était plus juste,
Si, vraiment, on disait la loi,
Alors, M. de Villeneuve
Devrait brûler, là, avec moi.

(Claudinaïc)
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Pourquoi donc, ma sœur, pleurez-vous ?
Si vous avez un bel époux ?

— À quoi me sert qu'il soit charmant,
S'il n'est pas à mon sentiment ?

Dès que je le regarde en face,
Mon cœur est comme un bloc de glace.

Ses yeux sont rouges et sanguins,
Rouges comme est rouge le vin.

(L'enragé)
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André Markowicz
extrait de « Comme il vous plaira », qu’on peut encore (...?) trouver chez les Solitaires

LE VIEUX DUC
Tu vois, d’autres que nous sont malheureux,
Dans ce vaste théâtre universel,
Il est d’autres spectacles déplorables
Que cette scène où nous jouons.
JACQUES.
-----------------------------------Le monde,
Est un théâtre, tout entier, et, tous
Ne sont que des acteurs, hommes et femmes :
Tous, ils ont leurs sorties et leurs entrées,
Chaque homme dans sa vie joue bien des rôles,
Et il y a sept âges dans ses actes.
D’abord, le nourrisson miaule et vomit
Sur sa nourrice. Ensuite l’écolier,
Qui ronchonne, son sac en bandoulière,
Le front brillant d’aurore, qui se traîne
En limaçon vers son école. Ensuite,
L’amant qui, soupirant comme une forge,
Ecrit une ballade douloureuse
Sur le sourcil de sa maîtresse. Ensuite,
C’est le soldat, plein de jurons étranges,
Barbu comme un guépard, et chatouilleux
Sur son honneur, vif et prompt en querelle,
Cherchant sa bulle de savon, la gloire,
Face aux canons fumants. Puis vient le juge,
Beau ventre rond, doublé de bon chapon,
L’œil dur, la barbe à coupe bien formelle
Plein de sages sentences quotidiennes ;
Il joue son rôle ainsi. Le sixième âge
C’est Pantalon, maigre, avec ses pantoufles,
Lunettes sur le nez, la bourse au flanc,
Ses chausses de jeune homme, toujours bonnes,
Trop larges d’une vie pour ses pinceaux,
Et sa grosse voix d’homme revenue
Au grêlé de l’enfance, un son de flûte
Et de pipeau. Enfin, la scène ultime
De cette histoire étrange et agitée,
C’est l’enfance à nouveau, le pur oubli,
Sans dents, sans yeux, sans goût, sans rien du tout.
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Le souvenir



Lorsque pour le mortel le jour bruyant se tait
Et la cité lassée se plonge
Dans la semi-clarté nocturne et dans la paix
Et trouve le bonheur du songe, –
A ces moments, pour moi, les heures d'insomnie
Se traînent dans un long silence :
Le serpent du remords triomphe et s'ingénie
A torturer ma conscience ;
Les rêvent bouent ; l'esprit succombe sous leur poids,
Ils se bousculent, ils l'accablent ;
Le souvenir muet déroule devant moi
Son parchemin interminable ;
Et, relisant ma vie, je tremble de dégoût,
Je me maudis et je m'indigne,
J'implore amèrement, je crois me rendre fou,
Mais je relis la moindre ligne.

//Alexandre Pouchkine
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              La mort du poète (*)



Extrait 4

Mais vous, les héritiers, vous, arrogante foule
    Que l’infamie des pères couvre d’or,
    Vous dont les pieds d’esclaves foulent
Les débris des lignées accablées par le sort ;
Pressés autour du trône, assassinant, féroces,
    La Liberté, la Gloire, le Génie ‒
    Vous dont les lois protègent les négoces,
Le juge devant vous frissonne et se renie ;
Pourtant, un autre juge existe, il est terrible ‒
    C’est le Dieu de Justice, il vous attend :
A l’or et aux honneurs Il demeure insensible,
Il lit au fond des cœurs, Il a le temps.
Devant Lui, plus de fard, Il vous voit, Il vous sonde,
    Mentez encor, vous subirez Sa loi :
Vous ne laverez pas de votre sang immonde
    Le sang du poète au cœur droit.
                    Janvier-février 1837


(*) Il s’agit de Pouchkine.

//Mikhaïl Iourievitch Lermontov (1814 – 1841)
/ Traduit du russe par André Markowicz,
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              La mort du poète (*)



Extrait 3

Et le découronnant, ils mirent des épines
  Sur ces lauriers qui paraissaient l’orner :
  Et la douleur de mille pointes fines
    Brûlait son front illuminé ;
Les infâmes ragots d’arrogants imbéciles
Souillèrent de venin ses heures ans issue –
Il est mort assoiffé de vengeance stérile,
Plein du dépit secret de ses espoirs déçus.
    Les sons divins ont su se taire,
    Nous aurons beau les rappeler ‒
Il n’a plus qu’un abri, la sombre et froide terre,
    Ses lèvres pour toujours scellées.
                    Janvier-février 1837


(*) Il s’agit de Pouchkine.

//Mikhaïl Iourievitch Lermontov (1814 – 1841)
/ Traduit du russe par André Markowicz,
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              La mort du poète (*)



Extrait 2

Pourquoi, quittant la paix et l’amitié sincère,
A-t-il cherché ce monde envieux mortifère
    Pour un cœur libre et des passions de feu ?
Pourquoi a-t-il serré la main flasque des traîtres,
A-t-il cru les flatteurs, faux-frères du paraître,
Lui qui, depuis toujours, nous connaissait le mieux ?
                            Janvier-février 1837

(*) Il s’agit de Pouchkine.

//Mikhaïl Iourievitch Lermontov (1814 – 1841)
/ Traduit du russe par André Markowicz,
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              La mort du poète (*)
Extrait 1

                    Vengeance, souverain,
                             vengeance !
         Que ma supplique monte jusqu’à
                                     toi :
                 Soutiens le droit et punis
                              l’assassin,
         Fais que son châtiment de siècle
                               en siècle
             Proclame ta justice à l’avenir

          Et fasse la frayeur des criminels.

Le poète est tombé ! – prisonnier de l’honneur,
     Tué par des ragots infâmes ;
Le plomb au cœur, la soif de vengeance dans l’âme,
     Il a baissé son front vainqueur.
    L’indignation fut trop profonde.
     Devant les lâches, les retors, ‒
  Il s’est dressé contre les lois du monde.
  Seul comme à chaque fois... et il est mort !
    Mort !... à quoi bon les larmes vaines,
Des louangeurs tardifs le cœur inopportun
    Le babil des excuses, de la gêne ?
    L’heure a sonné de son destin !
    N’avez-vous pas dès l’origine
    Persécuté son libre don,
    Soufflant sur des flammes mutines,
    Pour vous distraire, sans raison ?
    Réjouissez-vous... l’offense ultime
    L’aura jeté dans le tombeau :
    C’en est fini du cœur sublime,
    De l’âme fière, du flambeau.
    Le meurtrier reste impavide,
    Il vise et tire... affreux combat :
    Son souffle est froid, son cœur est vide,
    Son pistolet ne tremble pas.
    Pareil à des centaines d’autres,
    Chassé chez nous de son pays,
    Quêtant la chance et les profits,
    Il méprisait ce qui est nôtre,
    Et notre langue, et nos chemins ;
    Que savait-il de notre gloire ?
    Inscrit au sang dans nos mémoires,
    A-t-il compris pour notre histoire
    Sur quoi il a levé la main ?

  La mort l’a pris, la terre va le prendre,
  Comme l’autre poète obscur et tendre,
    Proie d’une aveugle jalousie –
Lui que si puissamment il avait fait entendre –
Abattu comme lui par un coup sans merci (**).
                        Janvier-février 1837


(*) Il s’agit de Pouchkine.
(**) Allusion au sort de Vladimir Lenski, dans Eugène Onéguine


//Mikhaïl Iourievitch Lermontov (1814 – 1841)
/ Traduit du russe par André Markowicz,
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