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Critiques de Anouk Markovits (24)
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Je suis interdite

Je sors bouleversée de la lecture de ce roman comme je l’ai été de ma lecture précédente «Paula T. une femme allemande» de Christoph Hein. 
Ces deux livres peuvent paraître très éloignés et pourtant on retrouve dans les deux la pression que subissent des femmes qui veulent être elles-mêmes, pression de la famille, pression masculine, du père et du mari, et des normes qu’imposent la société dans laquelle elles évoluent et dont elles ne peuvent s’extraire qu’en rompant c’est-à-dire en se blessant profondément elles-mêmes et ceux qu’elle aiment. Les hommes aussi sont pris dans le filet mais il ne s’y sentent pas si mal puisque c’est eux qui maintiennent, ou tentent de maintenir, close la nasse.

«Je suis interdite» nous fait pénétrer dans l’univers d’une famille hassidique où le fondamentalisme religieux impose des règles strictes, véritable carcan qui enferme dans les traditions et menace de châtiment tout ceux qui auraient envie de braver les interdits.
 Mais peut-on juguler tout élan vital ? Non, la vie demande à exploser et les conséquences sont parfois heureuses, parfois tragiques. Quel que soit le choix de chacun nul n’en ressort indemne.

Ce roman n’est pas un règlement de compte, il n’y a pas de jugement de la part de l’auteur mais il n’en contient pas moins une grande force subversive.

Merci à Ivre de livres qui m'a donné envie de le découvrir.
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Je suis interdite

Atara Stern et Mila Heller, deux jeunes filles de familles juives hassidiques, cherchent à échapper à leur destin.



En août 1940, la Roumanie est contrainte de rétrocéder à la Hongrie la partie Nord de la Transylvanie. Dans les déplacements forcés de population, les Hongrois sont regroupés au Nord et les Roumains au Sud. Les Saxons, colons allemands restés en Roumanie, sont incorporés dans la Wehrmacht. Après la chute du régime hongrois de Miklos Horthy, qui les a relativement préservés, les Juifs sont déportés et livrés aux Allemands en 1944.



Deux enfants juifs hassidiques transylvains, Josef et Mila, échappent à la mort après avoir vu leurs familles anéanties. Josef est sauvé par une fermière catholique. Plus tard, c'est lui qui soustrait Mila à la mort et la conduit auprès du rabbin hassidique Satmar, Zalman Stern, le père d'Atara.



Après la guerre, Mila et Atara, élevées comme des soeurs, suivent la famille à Paris. Bien que fréquentant une école laïque, elles sont soumises aux règles très strictes de la communauté. Mila accepte, mais Atara se rebelle. Elle découvre que le Rebbe, chef religieux du mouvement, a quitté la Hongrie pour la Suisse en 1944, à la suite d'une négociation entre le sioniste Rudolf Kastner et le nazi Eichmann. On reproche au Rebbe d'avoir été épargné alors que sa communauté mourait dans les camps. Petit à petit, les découvertes d'Atara l'éloignent de sa famille, qu'elle finit par quitter. Mila épouse Josef, mais leur union ne donne pas naissance à une lignée pure.



Je suis interdite initie aux rites et aux traditions du judaïsme orthodoxe où l'adhésion stricte à la loi, celle de la Torah, est fondamentale. L'utilisation de termes hébreux accentue encore l'immersion dans un monde très codifié. Avec un style dépouillé et concis, Anouk Markovits revient sur le sort des Juifs de Hongrie. Elle raconte aussi l'histoire de sa communauté et l'histoire de sa famille. Atara la rebelle, c'est elle.



Un roman authentique et prenant qui ne juge pas, mais éclaire sur le parcours d’Anouk Markovits et le monde dont elle est issue.





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Je suis interdite

Avant de nous plonger très prochainement dans les romans de la rentrée littéraire 2014, retour sur un beau livre passé hélas un peu inapercç de la rentrée de septembre dernier.



Ce beau roman nous fait entrer dans l'univers des juifs hassidim ultra orthodox où toute action dans la vie est soumise à des lois extremement strictes sans aucun écart possible. Le récit commence au début de la guerre et nous suivons les personnages.



L'histoire de Mila et de Joseph nous émeut particulièrement car malgré leur amour ils sont despespérement prisonniers de leur religion jusqu'au drame final; l'auteur sait, comme dans les bons romans, nous faire partager cette souffrance de cette famille enfermée dans ses croyances et ses inteprétations pour le moins équivoque des textes religieux. Un récit intelligent, émouvant et qui fait réfléchir...
Lien : http://www.baz-art.org/
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Je suis interdite

Quel livre!



Avec les années noires de l'extermination juive en Europe se sont multipliés les déplacements, contraints ou volontaires, de populations survivantes, constituant une vaste diaspora qui n'a jamais aussi bien porté son nom de peuple errant.



Après la guerre, en exil comme tant d'autres, la famille du rabbin Zalman s'installe à Paris, venant de Transylvanie. Chez ces juifs Hassidim, on vit dans la crainte du père, car dans la crainte de Dieu. Grand érudit de la Thorah, Zalman veut imposer soumission, études des livres saints et tempérance à ses enfants, fascinés par un pays nouveau.

Coutumes, costumes, contraintes les marginalisent. L'éducation par devoirs et interdits fait le quotidien, assortie de culpabilité dans l'inévitable transgression de la jeunesse.



Quitter sa famille et choisir l'indépendance pour s'instruire sera un acte de courage remarquable pour l'une des filles qui y perdra sa famille, tandis que l'autre suivra la voie tracée d'un mariage arrangé dans sa communauté, pour le meilleur et le pire...

Entre Paris et New York, le destin des individus est peu de chose face au fondamentalisme religieux.



Chacun choisit le chemin qui lui convient.

Mais en toute chose, l'excès me semble condamnable, l'humanisme, la tolérance et le libre arbitre devraient être la règle.

L'argumentaire de ce roman m'a donc émue, révoltée et sidérée, face à une religion dogmatique, rouleau compresseur indifférent aux sentiments des êtres.



Une lecture rendue pourtant agréable par une écriture qui privilégie les sensations, les bruits, les odeurs, montrant de l'amour et de la poésie dans un monde familial compliqué. Une lecture difficile, mais dont la qualité narrative force l'intérêt et captive, en nous mettant en immersion dans la culture juive(glossaire en fin de livre), et en nous instruisant sur la différence de l'autre.

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Je suis interdite

Ce récit est à la fois beau et inconcevable au profane, et c'est justement ce qui le rend bouleversant.

Ce sont d'abord trois enfants, Josef, Mila et Atara, tous trois juifs hassidiques, pendant la seconde guerre mondiale.Quand ses parents et sa jeune soeur sont assassinés, Josef est recueilli par la bonne qui l'élève dans la foi catholique pour en faire un solide paysan. Mila voit aussi mourir ses parents, et grâce à Josef, elle rejoint les parents d'Atara qui la gardent dans leur foyer. le père d'Atara revient ensuite chercher Josef pour l'arracher à sa mère adoptive et l'envoyer étudier la Torah comme il le doit à ses ancêtres.

Ce sont donc ces trois enfants que nous suivons à travers les années, mais bien plus que trois personnages, ce sont trois rapports à la foi et aux traditions que nous découvrons. Chacun se trouve confronté à la question du libre-arbitre humain face à la toute-puissance de Dieu et chacun y apporte une réponse différente, déterminante non seulement pour sa vie entière mais aussi pour celle de sa fratrie et de sa descendance. Et c'est ainsi que nous les suivons tous les trois sur plusieurs générations, dans les cinq livres du roman, jusqu'à leur vieillesse dans les années 2000.

Mais c'est surtout un roman des traditions, des textes sacrés, de leur connaissance et de leur interprétation, de la frontière qui sépare ce qui est "permis" de ce qui est "interdit", de l'observance des rites, des codes, et de leurs conséquences.
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Je suis interdite

Je suis admirative car Anouk Markovits réussit à écrire un roman, apparemment pour partie autobiographique, sans porter de jugement négatif sur cette communauté hassidique alors qu’on a rapidement envie de hurler face à tant de «traditions» qui pour moi, font surtout preuve d’un obscurantisme affirmé.

L’histoire débute en 1939 en Transylvanie et se termine à Williamsburg (Brooklyn) en 2007.

On traverse donc presque soixante dix ans d’histoire mais rien ne bouge dans cette communauté où l’on vit une foi intransigeante, reclus, sans aucun lien avec le monde extérieur. Il y est question d’amour et d’amitié mais c’est difficile (c’est un euphémisme...) d’être heureux, surtout pour les femmes, quand le poids de la religion et ses contraintes sont si prégnants.

Le roman est construit en cinq livres, rappelant les cinq livres de la Torah (Pentateuque). Il comporte de nombreuses références à ce texte et un glossaire en fin de livre permet de comprendre quelques termes d’hébreu.

J’imagine qu’Anne Markovits qui a quitté sa famille ultra orthodoxe à l’âge de 19 ans a du vivre un déchirement entre sa foi et son besoin de liberté. A travers son roman, elle nous restitue ici brillamment et sans manichéisme cette douloureuse expérience.
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Je suis interdite

Avez vous vu et aimé le film Kaddosh ? Avez-vous lu et aimé l’Elu de Chaïm Potok ?

Alors ce livre est fait pour vous.



Une histoire qui se déroule dans ces contrées qui furent le théâtre de pogroms, vous êtes en Transylvanie et Joseph a cinq ans, il vient d’échapper à un pogrom, toute sa famille a été massacrée mais lui a été sauvé par Florina, elle est catholique et désormais Joseph Lichenstein sera comme son fils. Il garde malgré tout des souvenirs de sa famille, de ses voisins.

Quelques années plus tard lorsque Joseph est témoin de l’anéantissement de la famille de Mila, il va l’aider à rejoindre une famille juive, les Stern qui va la protéger.



Mila va être élevée par cette famille en Transylvanie d’abord puis à Paris. Les Stern vivent sous la loi du chef de famille, Zalman, ce sont des juifs hassidiques, des juifs appartenant à la communauté Satmar aux traditions extrêment contraignantes et fermées.

Mila et Atara les deux filles ainées grandissent donc avec une série d’interdits : pas question de lire autre chose que des livres religieux, pas question de faire des études autres que religieuses.

Tout est question de codes dans la famille, de rituels. Du lever au coucher tout est fixé et doit être appliqué avec intransigeance pour préserver la pureté de la famille, diktats alimentaires, vestimentaires, bains rituels pour les femmes, port de la perruque pour les femmes mariées.

Le seul écart que se permet Mila c’est un questionnement sur les circonstances de la disparition de ses parents, ce n’est pas clair pour elle, mais pour le reste elle est une jeune fille qui suit tous les préceptes qu’imposent Zalman mais une petit graine est semée.

Atara elle brandit l’étendard de la révolte assez tôt, elle enfreint les règles, lit des livres interdits, pose des questions, exprime le souhait de faire des études et refuse l’idée d’un mariage arrangé.

Mila elle accepte elle de partir se marier aux Etats-Unis. Elle va y retrouver Joseph son futur époux, Joseph qui a fui la Transylvanie et a été élevé dans une famille hassidique lui aussi.

L’une est rebelle, l’autre l’obéissance incarnée, mais la vie réserve parfois des embûches que ce soit sur le chemin de la rébellion ou sur celui de l’obéissance.

L’auteur poursuit son récit à travers trois générations et c’est extrêmement réussi.

La lecture de ce livre demande un peu d’attention, certains mots yiddish sont explicités en fin de livre, les paroles de prières reviennent de façon un peu lancinante et ajoute au climat d’oppression que vivent Mila et Atara.

On est immédiatement en empathie avec les deux filles et l’on ne peut s’empêcher de penser que pour décrire aussi finement leurs parcours, l’auteur a du vivre une situation similaire. Ce besoin et cette peur d’enfreindre la loi, la terrible culpabilité qui en découle, la crainte d’ être exclue de la communauté.

Un excellent livre sur les ravages d’une religion (quelqu’elle soit) quand l’orthodoxie l’emporte sur la foi.
Lien : http://asautsetagambades.hau..
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Je suis interdite

J’ai découvert « Je suis interdite » dans la liste « Livres étrangers sélectionnés pour le Fémina 2013 » Comme je fais toujours confiance à Babelio, j’en ai sélectionné quelques-uns dont celui d’Anouk Markovits. Disons en introduction que le roman aurait également mérité de figurer dans la superbe liste « Le livre qui vous a bouleversé »…

Alors que ses parents sont exécutés par les nazis, Mila est secourue par Joseph, lui-même orphelin de guerre, qui va la conduire à bon port chez Zalman Stern. La fillette va grandir dans cette famille aimante, développer une relation forte avec Atara, l’aînée du couple. Joseph, quant à lui, sera envoyée dans une communauté juive hassidique aux Etats Unis, pour y être élevé selon la Loi religieuse.

La religion tient une place centrale dans la vie des personnages, une religion pratiquée avec ferveur, qui guide chaque acte du quotidien, dont la Loi est la seule vraiment reconnue. Mila et Atara, en grandissant, choisissent des voie différentes. La première va totalement se conformer, accepter le cadre et les règles strictes imposées par les Hassidim. Elle sera mariée à Joseph ; leur amour sera bien fragile cependant lorsqu’ils auront à arbitrer entre leur propre bonheur et/ou respecter la Loi.

Atara, après que son père l’ait battue parce qu’elle n’avait pas respecté Sabbat, fermera son cœur à la tradition et s’enfuira. Pour elle, pas de retour possible : elle sera bannie définitivement de la famille, de la communauté.

Pour les deux jeunes femmes, le choix de vie sera complexe – les confrontant chacune à des paradoxes. Impossible d’être juive à moitié ici : on se soumet aux règles, pas d’autres alternatives sinon que la fuite.

Dès les premières pages on est accablé par le poids de la religion : Zalman Stern, alors adolescent, fait un rêve érotique et les émois que cela suscite en lui génère une culpabilité terrible. Le contexte est ainsi posé d’emblée : lorsqu’on est juif et hassidique, on contrôle son corps, on ne se laisse pas aller des pulsions, l’intimité elle-même est rythmée par des règles (les pénitentiels chrétiens sont rédigés sur le même modèle).; la Torah a une réponse pour toute situation de la vie terrestre. C’est à la fois très sécurisant – pas besoin de se perdre dans des débats intérieurs puisque tout a déjà été édicté – et extrêmement oppressant.

Anouk Markovits dépeint ici, avec pudeur et distance, sans jugement, tout ce qui peut effrayer dans cette forme extrême de religiosité : une pratique impitoyable où l’individu ne peut jamais être sujet de sa vie mais toujours l’objet de Dieu ; une Loi qui empêche de penser, de questionner, où la soumission au groupe et à la communauté est totale. Dans l’Europe de l’après-guerre, de la Shoah, où de nombreux enfants –tels les personnages principaux ici – se sont retrouvés orphelins, appartenir à une communauté est sans doute vital. Ce sont aussi ces valeurs que l’auteur nous fait partager.

J’ai souffert pour Mila, Joseph et Atara, j’ai compati au fait qu’ils ne puissent pas être vraiment artisans de leur destin. Lorsque j’ai refermé le livre (que j’ai lu d’une traite)et essuyé une larme, j’étais contente d’avoir fait un bout de chemin avec eux, d’avoir plongé au cœur d’une culture si étrangère à la mienne.

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Je suis interdite

« Je suis interdite » : c’est ce titre étrange et assez inquiétant qui attire tout d’abord. Le « je » suppose en effet la revendication d’une identité, et même sans doute d’une certaine liberté, ici paradoxalement associées à l’idée d’interdiction. Qui a fixé cet interdit ? De quelle nature est-il ? Dans quelle mesure le sujet qui dit « je » est-il libre d’accepter la contrainte de cet interdit ? Ce sont ces questions qui préludent à la lecture de ce roman saisissant. Il nous raconte l’histoire d’une famille juive sur quatre générations. Tout commence en Transylvanie, en 1939, lorsque le jeune Josef, cinq ans, assiste au massacre de sa mère et de sa sœur par la Garde de Fer roumaine. Recueilli par son ancienne bonne catholique et rebaptisé Anghel, le jeune garçon aidera ensuite la petite Mila, dont les parents ont connu le même sort, à trouver refuge chez Zalman Stern, le père de famille juif fondamentaliste. De la Roumanie à Paris, puis à Williamsburg, quartier juif ultra orthodoxe de New York, nous suivons le cheminement de Mila et d’Atara, la fille de Zalman et de Hannah, toutes deux éduquées dans la pure tradition hassidique. La première va en adopter les principes, tandis que la seconde va finir par s’y refuser. L’intrigue nous fait découvrir le monde peu connu du hassidisme, avec pour arrière fond la grande Histoire tourmentée du XXe siècle. Si ce récit a une telle force, c’est parce qu’il présente des personnages dont l’énergie vitale leur a permis de survivre et de revivre après l’Holocauste, mais aussi parce qu’il pose des questions essentielles. Il est question de la conciliation entre liberté individuelle et appartenance à une communauté, de la possibilité de commettre une transgression pour perpétuer la vie et ainsi continuer à transmettre les préceptes de cette communauté… Enfin, il s’agit de la difficulté à concilier la foi et l’amour, la foi et la société moderne. C’est donc un roman passionnant, car il nous fait vivre l’intrigue au plus près des aspirations des personnages.
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Je suis interdite

Saga familiale et religieuse à travers quatre générations d'une famille juive orthodoxe hassidique, originaire de Transylvanie, ayant fui le nazisme, installée entre Paris et New-York.

Ce roman nous donne un aperçu sans concession ni complaisance mais sans aucun jugement non plus du fondamentalisme juif et de la loi rabbinique. Cette famille de juifs orthodoxes, et principalement le père de famille, le rabbin Zalman, vit dans la crainte de Dieu et dans une pratique stricte, austère de la religion (hormis les chants qui donnent un peu de gaieté et de joie dans tout ça !) où tout contact avec le monde extérieur et profane est proscrit, où tout n’est que codes et rituels. Cette communauté fermée est hostile à toute modernité. Et la notion du libre-arbitre – qui s’oppose au destin – la volonté de Dieu – n’existe pas. Et c’est là tout ce qui oppose Mila (recueillie par la famille Stern après le massacre de sa famille) qui va vivre sa foi avec dévotion à Atara, la fille aînée des Stern, sa sœur de cœur qui, elle, va rapidement vouloir s’échapper de ce carcan religieux qui l’étouffe. « Etait-ce être sans cœur que de rêver d’une vie à soi ? » se demande Atara. « Atara s'était mise à lire de plus en plus, elle lisait sur le chemin de l'école et au retour, elle lisait en classe, le livre sous le pupitre, elle lisait la nuit à la lueur d'une lampe de poche sous l'édredon». Plus elle découvre les livres profanes, plus l’enseignement judaïque fondamentaliste qui lui est délivré lui semble devoir être remis en cause, ainsi que les interprétations hassidiques de la Torah. Mais pour Atara, choisir son chemin et son destin (pour s’instruire notamment ailleurs que dans les livres sacrés), c’est quitter sa famille, pour toujours car aucune compromission n’est possible ni aucun retour. Mila suivra la voie du mariage arrangé mais heureux et plein d’amour avec Josef, son compagnon d’enfance, à New-York mais elle transgressera les règles elle aussi, dans le secret.

La notion de péché (et donc de culpabilité) et de souffrance du peuple juif est omniprésente et pesante dans ce roman. « Quand Dieu commande qu’un enfant doit payer pour les pêchés de ses parents », cette phrase résume bien la pression qui pèse sur les épaules de cette famille hassidique, à commencer par les enfants, pratiquant la religion à la lettre, sous peine d’être châtiés et de compromettre la venue du Messie.

Anouk Marcovits nous montre une religion extrême, rigide, qui nie toute décision personnelle dans sa vie et dans ses choix, puisque c’est Dieu qui guide la vie. Et l’amour (celui de Josej et Mila) dans tout ça devient compliqué quand il faut s’en tenir aux diktats de la Torah !

Livre bouleversant pour une lecture enrichissante, tellement que j’ai eu envie et besoin de me documenter pour mieux le comprendre et aller plus loin dans la réflexion. Une lecture tout sauf passive. On dit que les bons romans ouvrent des mondes, et celui-ci n’échappe pas à la règle.

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Je suis interdite

Depuis la Transylvanie juste avant la Deuxième Guerre Mondiale, en passant par Paris après la guerre, jusqu’à Williamsburg aux USA, le roman fait revivre quatre générations d’une famille Satmar. Une plongée passionnante dans la vie d’une famille juive orthodoxe, un sujet qui me fascine depuis de nombreuses années.

On suit pas à pas l’évolution des deux sœurs Satmar : Mila, dont la foi s’intensifie au fil des années et Atara, qui remet en cause la doctrine fondamentaliste en découvrant en cachette le monde des livres et du savoir. Un récit presque autobiographique si l’on en croit la bio d’Anouk Markovits, qui a fuit aux Etats-Unis pour échapper à un mariage arrangé…
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Je suis interdite

C'est une lecture enrichissante qui nous permet de vivre une véritable immersion dans les milieux hassidiques. On peut être stupéfait du jusqu’au boutisme de certaines pratiques évoquées dans le texte mais le livre permet de poser de nombreuses questions essentielles. Dans quelle mesure l'observation rigoureuse des lois religieuses peut-elle nous rendre heureux ? Où puiser ses forces pour se défaire de ces liens ? Sommes-nous responsables des fautes de nos aïeux ? La langue pudique et juste, rend, quant à elle, les personnages touchants et nous met dans l'incapacité de porter le moindre jugement sur eux.
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Je suis interdite

Je dévoile quelques points, mais tâche de rester évasive.

J’ai vraiment aimé ce roman, qui déroule sous nos yeux la vie de 4 générations d’une même famille qui a souffert durant la 2de guerre mondiale. Mais c’est surtout l’histoire de Mila et d’Atara, lors de leur adolescence, puis de Mila et Josef, après leur mariage, ainsi que de leurs propres enfants et petits-enfants que nous suivons.

Mais commençons par le commencement. L’histoire s’ouvre sur deux tragédies dont sont victime Josef, puis Mila en Transylvanie. Le premier s’en sort grâce à Florina, une allemande, non-juive qui le fait passer pour son fils et l’élève en dehors de sa confession juive. La seconde Mila, encore petite fille, est sauvée par Josef qui l’aide à fuir et rejoindre un certain Zalman Stern. Cette rencontre marquera les deux enfants qui ne tarderont pas à se retrouver. Le début est mouvementé, je regrette cependant une certaine confusion dans la description de ce passage clé pour nos deux personnages.

Mila grandit donc parmi les Stern, une famille juive hassidique très croyante, et fait véritablement partie de la famille. Avec Atara, dont elle est très proche, elles grandissent dans l’obéissance de la Loi, jusqu’à ce qu’un évènement finisse par séparer les deux sœurs dans leur croyance. J’ai lu que l’auteur a été élevée en France jusqu’à ce qu’à l’âge de 19 ans, elle s’enfuie en Amérique pour échapper à un mariage arrangé et entreprendre des études laïques. Il est ainsi facile de faire le lien entre elle et Atara.

Mais pour revenir au personnage de Mila, fille obéissante, très croyante, heureuse dans cette vie qui la réduit à être la femme de Josef, à être une mère et rejetant toute ambition personnelle, tout cela est assez révoltant. Mais voilà, Atara a semé la graine de la révolte chez sa sœur… L’auteure décrit ainsi la pression exercée sur la femme qui ne peut concevoir, fait émerger dans le couple l’idée d’enfreindre la Loi juive pour avoir un enfant… Ce que l’auteur concocte pour le couple Mila-Josef est aussi surprenant que triste.

Le livre nous emmène vraiment au cœur des pratiques, des coutumes juives. Il est mentionné par exemple la question de la pureté familiale, des bains rituels pour s’assurer que la femme est permise, la façon de se vêtir, le fait que les cheveux ne doivent pas être visible, le port de la perruque, etc… Bref un mode de vie très strict que l’auteure met en opposition avec le mode de vie laïc, si je puis dire, comme s’il y avait deux mondes séparés.



Ce fut pour moi un grand plaisir de lire ce livre qui m’a touchée, grâce au destin de ses personnages. Si la confusion dans les descriptions du début m’ont un peu déçu, le reste du récit fut parfaitement mené à mon goût.
Lien : http://aucafelitterairedecel..
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Je suis interdite

"Je suis interdite comme le sont mes enfants et les enfants de mes enfants, interdits jusqu'à la dixième génération". Cette histoire est inspirée de ce qu'a vécu Anouk Markovits, un livre sans jugement et un profond respect pour cette religion.
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Je suis interdite

Voilà une lecture qui m'a laissée pensive et plutôt bouleversée. Durant la seconde guerre mondiale, Josef et Milz, deux enfants juifs échappent à la mort et chacun d'entre eux se retrouve le seul survivant de leur famille respective. Josef, sauvé et élevé par une jeune femme catholique, rejoindra, après la guerre, une communauté juive hassidique aux Etats Unis, pour y être élevé selon la Loi religieuse. Mila quant à elle, grandira à Paris auprès d'une famille hassidique. Elle y rencontre Atara qui deviendra à la fois sa sœur et sa meilleure amie. Mila et Atara grandiront ensemble et seront initiées à la tradition hassidique. Leur manière de voir les choses et l'existence qu'elles mèneront prendront cependant des tours très différents. Si Mila se conformera aux règles strictes imposées par la religion, Atara, elle, se rebellera, perdant sa famille mais gagnant sa liberté.



Si la religion tient une grande place dans ce livre, l'auteur y aborde aussi la question du train de Kastner qui a longtemps fait débat au sein de la communauté juive. Elle nous parle des souffrances du peuple juif et de l'après guerre, de l'exil, du poids de l'éducation, de la famille, du couple.



Ce livre nous conte l'histoire de plusieurs générations dont les personnages sont prisonniers. Prisonniers du fait de ne pouvoir vivre leur religion durant la guerre et de "trop" la vivre ensuite. Comment concilier son désir de liberté et son appartenance à une communauté? Peut on commettre une transgression afin de permettre la transmission? Est ce trahir les siens que de vouloir s'instruire et rêver d'une autre vie? Doit on choisir entre foi et amour? Est on responsable des fautes commises dans le passé? Tant de questions auxquelles se retrouvent confrontés les personnages.



Avec subtilité et respect, sans jugement, l'auteur, qui elle même a fui sa communauté afin d'échapper à un mariage arrangé et suivre des études laïques, nous dépeint là un monde clos et intransigeant mais où l'amour est bel et bien présent.



Je suis interdite est un livre à la fois beau et angoissant. Un livre qui ne laisse pas indifférent.




Lien : http://tantquilyauradeslivre..
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Je suis interdite

Étrange destinée.

De Transylvanie à New York, la vie de Mila aurait pu être douce et calme, mais la magnifique histoire d'amour qui avait si bien commencée va s'écrouler, Mila a transgressé les règles strictes imposées par la religion.

Ce roman fait pénétrer le lecteur dans un univers plutôt méconnu où amour et foi ne sont pas toujours compatibles.

A découvrir sans tarder.
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Je suis interdite

Ce livre n'est pas une simple lecture, ni même une lecture simple.

Car j'ai découvert un autre aspect de l'Histoire, et un univers qui m'était totalement opaque, tout cela m'a d'ailleurs donné envie, au cours de ma lecture, de faire quelques recherches sur cette mouvance hassidisme hyper austère décrite dans ces pages fortes et instructives.

Ce qui est incroyable, et ajoute du poids à cette lecture, c'est qu'Anouk Markovits a été élevée en France dans une famille ultra orthodoxe Satmar jusqu’à l’âge de 19 ans.

Elle s’est enfuie en Amérique pour échapper à un mariage arrangé et a alors entrepris des études laïques. Je l'ai entendue dans une émission (Au Field de la Nuit) dire combien ce départ avait été pour elle autant un violent traumatisme qu'une évidence.



Son écriture puissante reste prudente, et très respectueuse de ces origines.

Elle ne pointe pas du doigt, elle raconte: l'Histoire, le génocide, les survivants, en progressant vers le présent.

Et à travers ces années nous partageons l'éducation, les traditions, le quotidien de cette communauté, rythmé par les coutumes et les croyances.



La suite:
Lien : http://blablablamia.canalblo..
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Je suis interdite

Ce roman m’a énormément surprise, notamment par son thème principal qui ne correspondait pas à l’idée que je m’en étais faite. Dans Je suis interdite, nous suivons une famille juive hassidique au fil de son exil. Cette communauté est très traditionnelle : je n’y connaissais pas grand chose de la religion juive mais ce que j’en ai découvert par le biais de ce roman m’a glacé le sang ! Bien sûr, il s’agit d’une branche extrême de la religion, j’en suis bien consciente. Dans cette communauté, les Juifs n’ont d’autre but dans la vie que le retour du Messie. Tous leurs actes sont réalisés de manière à tendre vers ce but : ils doivent respecter au mieux les écritures pour parvenir à mettre au monde celui qui incarnera le retour du Messie. Dans cette optique, les hommes passent leur jeunesse, de l’enfance à l’entrée dans l’âge adulte, à étudier la Torah [et toutes les autres écritures qui y sont liées] tandis que les filles se préparent à devenir de parfaites femmes au foyer/poules pondeuses [oui, en ce moment mes lectures ont l’air de titiller ma fibre féministe]. Tout ce petit monde ne vit qu’en vase clos : il est interdit de fréquenter des goys ou pire, des sionistes [les juifs hassidiques sont opposés à la création de l’Etat d’Israël qui va retarder l’arrivée du Messie, d’après ce que j’ai lu dans ce roman].



C’est dans ce contexte qu’on voit évoluer Mila et Atara. Tandis que l’une commence à questionner le bien fondé de ces préceptes, l’autre se plonge à corps perdu dans la religion, étant persuadée que cela fera revenir ses parents. Ce fossé se creuse de plus en plus, jusqu’à la séparation. Mais finalement, celle qui transmet la plus grosse transgression n’est peut-être pas celle qu’on croit. Il est intéressant de voir l’évolution de ces deux jeunes filles, leurs craintes par rapport à l’avenir qui les attend au sein de la communauté, leur préparation à la vie d’épouse, etc. Le roman se déroule sur quatre générations donc nous les suivons également une fois arrivées à l’âge adulte, ayant eu ou non des enfants.



J’ai eu beaucoup de mal à adhérer à cette lecture : la vie de la famille Stern est sans doute bien trop éloignée de ce que mon esprit quasi athée peut supporter. C’est aussi un roman qui monter à quel point la pression d’une famille ou d’une communauté peut être forte et difficile à accepter mais qu’importe les différences, le prix à payer pour se libérer de ce carcan est tout de même extrêmement fort.



Finalement, je suis assez mitigée face à ce roman qui m’a trop souvent exaspérée ou mise mal à l’aise pour que je l’apprécie réellement.
Lien : http://www.maghily.be/2015/0..
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Je suis interdite

'ai été totalement déstabilisée par l'écriture de ce roman qui, au début, aligne les actions ou les noms:



Mila a sauté du lit, s'est penchée sur le berceau, a pris le bébé dans ses bras, délicatement. Hannah a déboutonné le haut de sa chemise de nuit.



Mila est allongée dans l'obscurité, le silence, la solennité.



Je trouvais que ces phrases mettaient une distance entre les personnages et moi, distance que je n'ai jamais réussi à franchir. L'un des problèmes de ce roman est qu'il évoque une large tranche de vie en passant sous silence de très longs laps de temps. Bien sûr, c'est le principe des sagas familiales mais ici, le roman est court et on passe sur l'enfance de la fille de Milla de manière très abrupte je trouve. Pourtant le thème de l'intégrisme religieux, ici celui de la judaïcité aurait pu m'intéresser. Ce fut un vrai rendez-vous manqué pour moi.


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Je suis interdite

Je ne sais pas si j’ai aimé ce livre ou pas. Il est dérangeant, il m’a exaspéré et en même temps j’avais à cœur de savoir jusqu’où cela irait.

Quelle violence morale. Faut-il y voir une dénonciation ou au contraire une admiration devant tant d’abnégation ? mon côté un peu rebelle y voit une forme d’oppression des femmes pourtant soumises aux rituels depuis leur plus petite enfance. Celles-ci ne semblent pas le vivre de manière contraignante. Quand l’une d’entre elles se risque à vouloir s’éloigner du carcan religieux elle est vite repérée et doit rentrer dans le rang. Gare à celle qui osera s’affranchir, elle sera « effacée ».

Anouk Markovits explore dans ce livre la vie de juifs hassidiques issus de Transylvanie à travers trois générations. De la naissance à la mort, du lever au coucher, tout est code et rituel. C’est d’ailleurs ce climat un peu répétitif que l’on pourrait reprocher au livre. Les passages d’explications religieuses n’apportent pas grand-chose au récit, par contre ils contribuent fortement à rappeler l’importance des rituels et cérémonials et faire sentir l’importance de ceux-ci.

Y a-t-il une part d’histoire vécue dans ce livre ? On ne peut s’empêcher de penser que ces descriptions si précises, cette grande connaissance (semble-t-il) des us et coutumes juifs ont imprégnés l’auteur. Mais alors est-elle Mila ou Atara ? Les deux jeunes filles, pivot du livre, bien qu’élevées de la même manière finissent par avoir des trajectoires différentes. Alors on admire les deux. L’une pour avoir eu la force de s’extraire de la prison de la religion, l’autre pour avoir su y trouver tout le sens de sa vie. Laquelle a eu raison ? Et bien il n’y a pas de bonne réponse à cette question. La seule que l’on pourrait donner est : lisez le livre et faites-vous votre propre opinion.

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