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Critiques de Benoîte Groult (306)
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Les Vaisseaux du coeur

« Il fait grand vent, Madame... » Quelle triste idée d'aimer un cormoran.



Mais quel plouc ce péquenot ! A chaque fois qu'on vient passer un mois de vacances l'été dans notre maison de famille avec mes parents, lui et sa ribambelle de frères et soeurs se moquent de nous les parisiens « têtes de chien ». Et mon prénom évidemment, avec les brillantes idées de maman, n'aide pas : George sans S ce qui devint pour les bretons du cru « George Sanzès ». « Nous nous étions toisés comme les représentants de deux espèces inconciliables. »



On a grandi. Comme ça, chacun derrière sa barrière. le temps est venu de penser au mariage. C'est sa soeur qui a choisi cette solution pour s'éloigner de la ferme et des frères, marins-pêcheurs. Elle voulait voir au long-cours. Elle m'a choisi comme demoiselle d'honneur. Je suis revenue au village pour la fête et vérifier si son frère avait changé. Je ne voulais pas le revoir sans savoir comment nous avions grandi après une baignade nocturne que nous avions partagée deux années plus tôt (en tout bien tout honneur à cette époque nous étions timorés).



A la fin de la fête nous nous sommes retrouvés seuls, dans une petite cabane et plus rien n'a compté. On ne se connaissaient pas. Seuls nos corps semblaient se connaître et se reconnaître « le corps sait ce qu'il veut au moins, il est imperméable aux raisonnements, il est implacable, le corps. » Et ça a commencé. Pour des années. Des années et même des décennies, de manière discontinue. On s'est vus peut-être quinze fois ...en trente ans. Une semaine en moyenne à chaque fois, autant dire que c'était des enfilades de retrouvailles et de déchirures. Vous y croyez à une histoire pareille ? Moi oui.



« Dites-moi que si je veux garder cet amour-là, il faut accepter de le perdre. » Je n'ai pas voulu l'épouser car je sentais que nos mondes étaient incompatibles et que je ne pourrais le supporter. « Celui qui parle le langage de la raison est celui qui aime le moins. Gauvain savait déjà cette vérité-là. » Que j'ai aimé le voir, voir son corps, faire l'amour avec lui. Même si « faire l'amour » est bien fade à côté de se que je vivais, « la recherche de ce frisson mystérieux qui ne se fonde sur rien que puissent traduire les mots humains. »



Dans ma tête la vielle duègne s'ingéniait à me dire que ce n'était qu'un plan cul. Oui forcément. Mais un plan cul qui ne faiblit pas malgré le temps et la distance qui nous séparaient, vous ne pensez pas que cela porte un autre nom ? Plus de trente ans à s'aimer sans que jamais les corps se lassent, j'ai bien une idée mais George tu ne vas pas l'aimer mon idée. Gauvain était plus honnête avec lui-même, il le disait « tu es un peu ma femme, après tout. »



« Ils ont leurs mots de passe tout de même ; ce stock d'allusions, de plaisanteries, de complicités, de souvenirs de jeunesse aussi, sans lesquels un amour n'est qu'une aventure sexuelle. »



Il va lui demander d'écrire leur histoire « il faut expliquer comment ça peut arriver, une histoire pareille. » Et elle de répondre « il n'y a rien de plus impossible à raconter qu'une histoire d'amour.» « Cette rage de comprendre le sexe comme on comprend les mathématiques ! le sexe n'a d'autres sens que lui-même. »



Alors je te le dis moi aussi « Même quand je te déteste, je t'aime. Tu comprends ça, toi ? » « Cette union que nous vivons, c'est aussi puissant qu'une communion mystique. C'est comme un décret de la nature qu'on accepterait. Et c'est rare de les entendre, les décrets de la nature. »
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La Touche étoile

Bonsoir Moïra, je sais que tu m'attends, c'est la vie. Mais patiente encore car je ne suis pas prête. Qui l'est au fond ? Alice oui. Après avoir livré tant de batailles, elle veut gagner la dernière et tu l'accompagnes avec bienveillance. Quel personnage Alice, tu ne pouvais que l'aimer. Moi aussi et je lui dit merci. Merci pour ces combats rudes qui ont permis aux femmes d'avoir le droit de vote, l'IVG et tant d'autres libertés qui semblent couler de source aujourd'hui. Mais sans des Alice et des Simone, que serions nous encore obligées d'endurer. Les jeunes nous trouvent dépassées car nous y faisons encore très attention à ces droits gagnés chèrement et nous passons pour des vielles soixante huitardes aigries, out. Mais prenez-garde, chères jeunes femmes il suffit d'une loi pour autoriser ou interdire, confirmer ou supprimer une liberté et c'est vite fait car le fruit n'est pas encore mûr, il ne faut pas croire que les vieux relents de la pourriture soient morts, ils sont juste endormis et nous attendent pour nous remettre à nos fourneaux. Enfantons dans la joie et choisissons nos vies. Encore une fois merci Benoîte Groult pour ce livre qui m'a fait beaucoup rire (moi aussi je commence à compter les marches et je surveille le genou gauche, non mais c'est qui qui commande encore !?), m'a fait voir la vieillesse avec bonheur et réalisme et vivre une jolie histoire d'amour pleine d'embruns irlandais au delà des générations.
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Journal d'Irlande : Carnets de pêche et d'amour

La fille aînée de la grande auteure féministe Benoîte Groult nous dévoile les carnets irlandais intimes de sa mère.



Le mot « intime » doit être légèrement revu à mon sens, car je pense qu'une amoureuse des mots comme Benoîte G. ne pouvait que savoir, qu'espérer même, qu'ils seraient publiés un jour.



Entre détails de vie quotidienne en Irlande (météo horrible, pêche à pied et à bateau, menus, linges à laver, toilettes bouchées, maux divers et variés, invités reçus …) tout est consigné presqu'au jour le jour pendant plusieurs décennies, et rendu avec précision dans le joli style qu'on lui connaît.



Evidemment, c'est quelque peu dépaysant surtout que l'Irlande c'est loin et que l'amour de la pêche était pour l'auteure une DROGUE (à en faire des intolérances alimentaires ensuite).



Assurément, j'ai adoré retrouver le franc-parler et la sensibilité de Benoîte G. (plus pour décrire les nuages irlandais que pour parler de ses filles), mais Dieu qu'elle est dure avec les autres (les irlandais en prennent plein la figure, et c'est parfois à la limite du supportable) - moins que sur elle-même ! - vieillesse, critique acerbe sur ceux qui la visitent ou qu'elle croise, même sur son cher amant …



La Benoîte était rude et manquait vraiment d'empathie à mon sens. Ca m'a profondément gênée.



Même si on a bien compris que vieillir n'est facile pour personne, que la perte des plaisirs physiques quand on aime beaucoup pêcher, quand on a un amant qui vieillit, s'avère doublement douloureuse, le personnage qui se dessine dans ces carnets est étonnant.



Le féminisme si bien narré et explicité dans ses ouvrages prend là un coup : son mari épuisé, jaloux, repoussé physiquement lui en fait voir de toutes les couleurs, et, portée par une rage de vivre, Benoîte G. s'accroche et est (malgré tout) active sur tous les fronts.



C'est ça être femme ? J'ai dû louper quelque chose dans ses précédents ouvrages, ou bien, c'est peut-être plus facile à dire (à écrire) qu'à faire !

A méditer donc…



Cette lecture est donc surprenante en tous points, et nous révèle une auteure méconnue dans sa (parfois triste) réalité irlandaise. Je recommande. Evidemment !

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Les Vaisseaux du coeur

J'ai lu plusieurs textes de Benoîte Groult... mais celui-ci je ne le connaissais pas... Je vais m'empresser de le lire, après en avoir vu l'adaptation théatrâle ce soir, 25 février 2014, avec Josiane Pinson et Serge Riaboukine. Deux acteurs fort convaincants...et mise en scène de Jean-Luc Tardieu, au Petit Montparnasse, rue de la Gaieté...



Un très beau moment de théâtre et la découverte d'un texte audacieux, publié en 1988, qui parle de désir, de sexualité, mais aussi d'une histoire d'amour peu banale entre un marin breton et une intellectuelle parisienne. Le texte est tour à tour cru, direct, plein de drôlerie, mais aussi poétique, sensible...



A ne pas manquer...|jusqu'à début mars] surtout lorque l'on apprend que l'actrice, Josiane Pinson, s'est battue deux années pour faire aboutir le projet...
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Ainsi soit-elle

Livre issu de la bibliothèque de Jules. Feuilleté un jour en 2013 et lu entièrement cet été 2015. Je suis fière que qu'un gars (le mien) possède un tel manifeste de volonté de libération féminine dans ses bouquins... Pas mal non ?

Le livre de Benoite Groult date des années 70, mais il est terriblement actuel sur de nombreux plans hélas ... Nous nous conformons encore (40 ans plus tard) à l'image que les hommes ont de nous, même en France ou aux USA. Nous sommes devenues plus libres et plus sexy, nous travaillons pour la plupart d'entre-nous, nous faisons du sport, écrivons des livres, nettoyons, cuisinons et élevons des enfants. C'est un emploi du temps bien rempli. Parfois trop ! Qui ne c'est jamais senti otage de cette image de "femme parfaite", bonne nounou, business woman, amante insolente et pudique, belle, sportive, ménagère, gourmande et mince, cultivée et discrète... N'en jetez plus la coupe est pleine ! La femme parfaite est une C---- .

Bien sûr, certains hommes (je suis plutôt bien lotie) font le ménage et la cuisine (ce qui reste un service rendu alors qu'il s'agit de notre quotidien), ils s'impliquent de plus en plus avec les enfants (surtout dans les jeux) et ne racontent pas (en notre présence) de blagues salasses sur les femmes alors que nous en avons de nombreux exp dans le livre de Benoite Groult. Cependant, pour de multiples raisons, je trouve que cet essai est révélateur. La parité en politique repose sur des quotas, l'avortement est un droit mais, dans les faits, il n'est pas tjs facile d'accès, la femme est toujours considérée (même par les autres femmes) comme "la mère" et difficilement reconnue si elle ne désire pas d'enfants. Nos salaires ne valent toujours pas ceux de ces messieurs. Le combat est loin d'être gagné !

De plus, j'ai redécouvert de grandes figures féminines qui auraient grand besoin de justice dans l'histoire, les programmes scolaires et d'autres récits : Olympe de Gouges, Françoise Giroud, Hildegarde de Bingen, les suffragettes... Femmes de toutes époques dont certaines ont payé de leur vie la lutte pour plus de liberté et d'égalité. Je trouve que nous avons de la chance de vivre ici (en occident) après leur passage. C'est la raison pour laquelle nous devons être femmes et fières de l'être.

Enfin, l'auteur fait un point sur les autres pays, la conditions des femmes dans le monde, l'excision, la ségrégation entre les sexes, le manque d'éducation et je crois qu'il est inutile de rappeler à quel point ce combat est plus que jamais d'actualité.

Merci Mme Groult de nous rappeler la chance que nous avons et les pas qu'il nous reste à faire pour devenir "femmes".
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Ainsi soit Olympe de Gouges

Ainsi soit Olympe de Gouges est un ouvrage en deux parties, la première est une biographie dans laquelle Benoîte Groult s'attache au profil politique d'Olympe de Gouges. Ne sachant ni lire ni écrire quand elle arrive à Paris, elle apprendra progressivement et utilisera des assistants à qui elle dictera ses nombreuses interventions. Au travers de ses combats, nombreux, de la réduction de la dette par une contribution volontaire de chacun, à la défense des plus faibles - femmes, fille-mères, femmes célibataires, veuves, indigents, lutte contre l'esclavage des noirs qu'elle exprime dans une pièce de théâtre qu'elle fait jouer à la Comédie française, c'est une femme entière, courageuse et d'une énergie à toute épreuve que l'on peut découvrir. Fourmillant d'idées souvent pragmatiques, elle embrasse toutes les problématiques, aucun des combats qu'elle entreprend ne l'épuise, mettant en œuvre sa propre fortune et tous les moyens de communication de l'époque au service des causes qu'elle défend : journaux - elle créé même son propre journal - placards sur les murs, pièces de théâtre, courriers directs aux intéressés ou aux décideurs.

La deuxième partie reprend les textes originaux où elle expose ses idées avant-gardistes, altruistes quelques fois simples à mettre en place mais un purisme, une véhémence de propos et surtout une opposition politique de ses détracteurs vont la desservir. On ne peut en aucun cas lui reprocher son manque de courage, elle en déborde en touchant aux sujets sociétaux : elle rédige le contrat social de l'homme et de la femme (une nouvelle mouture de contrat de mariage complètement novateur) et, anticipant la critique, ajoute dans son langage fleuri et tout personnel "Voilà à peu près la formule de l'acte conjugal dont je propose l'exécution. A la lecture de ce bizarre écrit, je vois s'élever contre moi les tartuffes, les bégueules, le clergé et toute la séquelle infernale". Elle demande le droit au divorce et un statut pour les enfants naturels (qu'elle était elle-même).

Mon seul bémol est le style de l'époque et j'ai eu quelquefois du mal à suivre ses démonstrations mais elle reste une personnalité incroyable et j'ai eu plaisir à découvrir, Olympe de Gouges sa vie de combattante et sa mort presque revendiquée, une progressiste pure et dure.
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Ainsi soit-elle

Benoîte Groult est une grande Dame, intelligente, sincère et sensée. Ce n'est pas une passionaria du féminisme. La cause qu'elle défend est très haut-dessus de "Qui doit faire la vaisselle à la maison ?".

Et, même si elle harponne hommes et femmes sans concession mais avec une tendresse amusée, elle dénonce, pose de vraies questions, soulève de vrais problèmes, dont, malheureusement, nombre d'entre eux persistent et durent encore 45 ans plus tard.

Et quel humour ! Je vous laisse découvrir, entre autres, sa savoureuse description des attributs masculins. Irrésistible !

C'est avec beaucoup d'objectivité qu'elle nous fait prendre pleinement conscience de la réalité de la situation : le respect et l'harmonie entre les êtres... ce n'est pas pour demain.
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Les Vaisseaux du coeur

Dans la vie, les seuls engagements politiques de Benoîte Groult ont été liés à la cause des femmes, et c’est pour cela que j’avais tant apprécié la lecture de son autobiographie « Mon évasion ». A soixante-huit ans, elle décida d’écrire un roman d’amour fou basé sur le plaisir féminin. En sa qualité de jouisseuse de la vie, hédoniste, terrienne, lettrée, son roman (qui s’appuyait sur sa propre expérience-passion hors-mariage) ne pouvait que prendre cette orientation, celle d’une femme libre affranchie du « qu’en dira-t-on ? ».



Très peu de romancières avait osé pénétrer ce registre à l’époque (1988). Les mots crus n'y manquent pas, et ils ont profondément choqué lors de la sortie du livre. Après son succès « Ainsi soit-elle », elle dira avoir eu besoin d’une autre parole de liberté, plus individuelle. Alors saisie d’une longue expérience de la vie, du vécu de l’amour fou et de l’amour au quotidien, de la notion de durée, de l’attente, elle avait pu se saisir du mystère de la passion qui, même au temps des ordinateurs, des réseaux sociaux, reste magique, bouleversante, dévastatrice.



En prénommant Gauvain, du nom d’un chevalier du roi Arthur son personnage masculin, le marin breton errant sur les mers, elle a voulu rejoindre l’archétype de l’amour-passion, celui de Tristan et Iseult, de Roméo et Juliette, et d’autres qui sont de tous les temps. Après leur première nuit, Gauvain et George sont ensorcelés l’un par l’autre, comme s’ils avaient bu un philtre d’amour, comme Tristan. Et leur amour sera absolu, car ils n’ont rien à échanger, pas de contrat ni oral ni écrit, de services réciproques à se rendre, de vie sociale à mener. Leur relation restera intense, à condition de ne jamais s’inscrire dans le réel.



L’antagonisme des deux classes sociétales que les amants représentent est décrit avec justesse et profondeur. C’est la seule chose que j'y appréciée.

Ce roman que je considère davantage comme un brûlot que comme un chef-d’œuvre littéraire (bien qu’il soit parfaitement rédigé comme toujours avec Benoîte Groult) a été écrit pour éclairer un principe fondateur pour son auteur : il faut savoir être infidèle aux autres parfois pour ne pas l’être à soi-même.

« Ce livre est pétri de féminisme. Sans l’amour et la liberté dans l’amour, il manque une part du sens de la vie et une dimension de l’épanouissement d’une femme. Et c’est une histoire féministe, parce que, pour une fois, la passion n’entraîne pas de malédiction et que l’héroïne ne sombre pas dans la folie, le malheur ou le suicide, ET n’encourt pas de châtiment céleste … A la fin de l’histoire, c’est une femme qui a réussi sa vie et un peu plus que sa vie. » Benoîte Groult


Lien : http://justelire.fr/les-vais..
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Les Vaisseaux du coeur

Benoîte Groult l'annonce en avant-propos : « le langage ne viendra pas en aide pour exprimer le transport amoureux ».



Alors pourquoi écrire ? L'écriture n'est-elle pas la forme pérenne du langage, autant que son support résiste à l'usure du temps. Pourquoi faire durer les traces d'un langage qui n'exprimera jamais ce qu'est ce « frisson mystérieux » de l'amour ? Pourquoi d'ailleurs cette incapacité de l'être intelligent à décrire ce qui constitue sa quête de toute une vie ?



Benoîte Groult connaît bien l'écueil. Elle franchit pourtant le pas. Elle le fait dans ce roman qui m'a prouvé que si le langage a cette insuffisance de ne savoir décrire la quête suprême de l'intime, il est certaines personnes pour le décrypter mieux que d'autres et le suggérer. Les poètes sont de celles-là. Benoîte Groult est de celles-là. Je conserve le présent à dessein à son propos, n'avons-nous pas encore le fruit de son ressenti à notre disposition dans ses écrits.



J'ai aimé que ce soit une femme qui aborde la nature de la relation amoureuse y compris et surtout lorsque cette relation s'exprime par la communion des corps. L'homme a ce boulet au pied qui le décrédibilise sur le sujet. Avec lui, l'amour s'assimile trop spontanément au sexe. Il ne pense qu'à ça, nous disent-elles. Et pourtant Benoîte Groult ne dissocie pas l'amour du sexe, bien au contraire. Elle le fait dans ce roman en confidence crue d'un amour adultère : la relation qui réunit George, sans s comme George Sand, une écrivaine universitaire en histoire et Gauvain, un pêcheur breton. Ils se sont connus adolescents, feront leur vie chacun de son côté et se retrouveront périodiquement. Obstinément. le sujet est abordé sans fausse pudeur. S'interrogeant de savoir si ce n'est que pour le sexe qu'elle et lui font autant d'efforts pour se rencontrer. George [elle] y répondant aussitôt avec un franc démenti : « ça vient de plus loin, de plus profond … c'est aussi puissant qu'une communion mystique ».



George [elle] est toujours à l'initiative pour provoquer leurs rencontres avec pourtant la ferme conviction que c'est l'absence qui sauve leur amour. « Attendre un amant est bien meilleur qu'accueillir un mari. » Elle veut bien se priver de son amour mais pas le perdre. « À vivre longtemps éloignés, il est vrai qu'on se laisse emporter par ses rêves. On finit par aimer quelqu'un qui n'existe plus tout à fait mais que dessine votre désir. » L'idée que son amant existe quelque part et pense à elle l'aide à vivre. Il en est de l'amour comme de toute chose, il ne pourrait résister à l'usure du quotidien.



Pour cerner au plus près l'évidence irritante du désir amoureux, alors que l'ensemble de l'ouvrage est narré à la première personne, dans certains chapitres évoquant la rencontre charnelle, George abandonne le « je ». Elle s'extrait de la narration et parle d'elle à la troisième personne, se plaçant alors en contemplatrice objective de leurs corps enlacés. S'employant par la même occasion, en féministe obsessionnelle qu'est Benoîte Groult, à ce que nul n'exerce d'ascendant sur l'autre : « nos sexes n'étaient plus mâle et femelle, nous nous sentions hors de nos corps, un peu au-dessus plutôt, nous balançant très vaguement, âme à âme, dans une durée indistincte ». Consciente que dans l'histoire de l'humanité les femmes se sont fait flouer, elle s'attache à abolir toute tentation dominatrice de l'un ou l'autre dans la joute amoureuse. Avec quand même une petite pique revancharde affirmant que « contrairement à ce que l'on prétend, c'est l'homme qui se donne en amour. le mâle se vide et s'épuise tandis que la femelle s'épanouit. »



Mais « le sexe n'est pas aussi sexuel qu'on le dit » la rencontre des corps quand elle ne répond pas une obligation de fréquence et de performance est « un vertige qui fait perdre la notion du bien et du mal ». C'est en construisant ce roman d'une relation amoureuse idéalisée que Benoîte Groult nous parle le mieux de cette « délicieuse drogue d'être adorée », d'être l'objet d'un « désir qui n'a pas de configuration descriptible. »



C'est donc une femme qui dédiabolise le sexe. le féminisme c'est aussi cela. C'est conférer aussi aux femmes l'initiative dans ce domaine. Ne plus le subir, à condition toutefois de restituer à la rencontre charnelle cette dimension qui en fait non pas une obligation mais une preuve d'amour. C'est en en parlant sans se voiler la face, avec tout le vocabulaire que le langage peut gauchement y appliquer que chacun peut parvenir à son épanouissement propre. Faire que s'aimer ne soit pas « une banale union des corps … mais rester deux jusqu'au déchirement ». Son amant « n'est pas et ne sera jamais son semblable. C'est peut-être ça qui fonde leur passion. »



Benoîte Groult a réussi l'exploit de me parler de sexe dans l'amour, aussi crument qu'on peut le faire, parce qu'il est chose humaine, mais sans être jamais obscène. Il n'en reste pas moins que la sublimation du sentiment tient beaucoup au désir et au rêve qui seuls fomentent la plus sublime des extases. La rencontre occasionnelle des corps ayant cette forme d'aboutissement indispensable pour entretenir la mémoire et stimuler l'imaginaire. Benoîte Groult ne m'a pas parlé d'amour au féminin. Elle m'a parlé d'amour entre deux êtres qui ont trouvé leur point d'équilibre, à égale convoitise, égal accomplissement. Ni homme, ni femme. L'amour a tout nivelé. Ensemble ils sont passés de l'autre côté de la vie « quand elle tient tout entière dans l'instant. »



Reste un autre mystère : pourquoi eux ensemble, pourquoi elle, pourquoi lui ? Mais là force est d'admettre avec Benoîte Groult qu'il n'y a rien de plus impossible à comprendre et raconter que l'amour.

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Ainsi soit-elle

"J'imagine les lecteurs de bonne volonté que leurs femmes auront décidés à parcourir ce livre…" Ainsi s'engage le chapitre V d'Ainsi soit-elle.



Hé bien moi, je vous le dis Madame Benoîte Groult, il y a des hommes qui auront lu votre ouvrage de leur propre initiative. Je suis de ceux-là. Ce n'est en outre pas la première fois que je lis un ouvrage féministe. J'avais commencé par Le Deuxième sexe de Simone de Beauvoir, voilà bientôt deux ans. Vous me rétorquerez que c'est un peu tard. Je vous donnerai la réplique que l'on fait toujours à pareille admonestation. Mieux vaut tard que jamais. Je prendrai toutefois mes distances en déclarant ma neutralité. Je ne suis ni féministe ni misogyne. J'ai sur la nature humaine un regard asexué qui me fait parfois déplorer que la physiologie animale, qui est à la base de sa constitution, se soit vue affublée d'une intelligence laquelle la fait souvent agir en sa défaveur, quand ce n'est pas contre nature. Nature dans laquelle je confonds les deux sexes.



Benoîte Groult publierait son ouvrage en 2021, qu'y retrancherait ou ajouterait-elle ? Quel progrès ou quelle régression y ferait-elle valoir ?



Il y certes de nos jours une présence féminine plus importante à la représentation nationale. 8 femmes députées lors de la publication d'Ainsi soit-elle en 1975, 224 aujourd'hui. Mais serait-ce un progrès suffisant pour faire admettre à Benoîte Groult que la position de la femme a évolué dans le bon sens en notre pays, avant d'élargir le débat à la condition féminine de par le monde. Je suis un homme, j'aurais tendance à dire oui. Mais je suis aussi quelqu'un de prudent, qui se sait progresser en terrain glissant et ne veut pas se prononcer à la place d'autrui (substantif neutre fort heureusement). Allons-y donc à pas comptés.



Car j'ai lu en effet à la page 212 de l'édition Le Livre de Poche toutes les occasions édictées pour un homme d'être taxé de misogynie, selon Benoîte Groult. J'ai donc peur d'aller plus avant dans cette chronique, au risque de faire un faux pas et être vertement recadré par les contributeurs de Babelio, dont on sait que la grande majorité est constituée de contributrices.



Je me suis risqué à lire Ainsi soit-elle. Le risque étant, en qualité de représentant de la partie incriminée que je suis, de s'entendre dire des vérités quelque peu dérangeantes. Plongé dans cet ouvrage, j'avais l'impression d'être ce jeune homme que Benoîte Groult avait rencontré dans la Librairie des femmes, rue des Saints-Pères à Paris. Un intrus, un égaré ? Peut-être pas. Il avait osé franchir la porte de cette boutique qui n'affiche que des ouvrages d'auteures (ou autrices, que je trouve moins heureux) dans ces rayons. J'allais préciser auteures féminines. Mais je me suis rendu compte à temps que notre contexte linguistique ayant évolué – dans le bon sens ? – je m'empêtrais dans le pléonasme puisque le substantif se suffit désormais à lui-même pour indiquer le genre de celui ou celle qui tient la plume, plus souvent le clavier de nos jours. Il y a toujours des exceptions qui confirment la règle. Je ne me risquerai pas à féminiser sapeur-pompier.

Je me rappelle mon passage sous les drapeaux à une époque où les femmes faisaient leur entrée dans le métier. Jeunes enorgueillis de notre triomphante virilité sous l'uniforme, nous nous sommes entendus dire par un gradé qu'il y aurait désormais des femmes hommes du rang. L'institution a mis quelques mois à corriger le discours par une directive officielle. Il s'agissait alors de dire des femmes militaires du rang, et que cela valait pour les hommes.



Je n'étais donc plus vierge de lecture traitant du féminisme après m'être ouvert au sujet avec l'ouvrage de Simone de Beauvoir comme je l'ai déjà dit. Ouvrage qui m'avait ouvert à ce que mon éducation de garçon m'avait laissé concevoir comme naturel de traiter l'Autre avec morgue, avant que ce ne soit avec convoitise - l'Autre étant la femme et représentant quand même la moitié de l'humanité nous dit Simone de Beauvoir – que cette vision de la femme était le résultat d'une histoire datant de l'origine des temps depuis que l'homme s'est octroyé un statut de supériorité sur la femme. Statut dont elle peine encore à démontrer le caractère infondé, usurpé. Je ne vais pas dire que je tombais de haut. Mais s'entendre clamer des vérités propres à déchoir son acquit, inculqué, gravé dans la personne par une éducation ad' hoc - puisqu'il ne saurait être question d'inné en ce domaine - est toujours un peu déstabilisant. Il s'agissait donc d'une remise en question fondamentale.



Et pour ce qui est des vérités déstabilisantes, il y a ce qu'il faut dans l'ouvrage de Benoîte Groult. Elle nous les assène avec un langage certes moins policé que celui de Simone de Beauvoir dont le propos est aligné sur le registre philosophico-historico-sociologique édulcoré. Benoîte Groult n'hésite à renvoyer le mâle à ses insuffisances, à lui faire constater l'assoupissement de ses attributs virils à peine a-t-il volé un plaisir égoïste à celle à qui il n'a pas été capable de faire partager son extase fugace. Laquelle a quant à elle l'indulgence coupable de ne pas faire état de sa frustration. Le verbe est cru avec Benoîte Groult. L'inventaire des motifs d'usurpation de supériorité est exhaustif. Et de déplorer que des millénaires d'injustice ne se corrigeront pas en quelques années, qu'il faudra encore attendre des générations avant le complet mea culpa masculin et espérer obtenir l'égalité des sexes. Au constat de l'inertie masculine, le compte n'y est donc pas encore en 2021 alors que je prête une oreille distraite à ce phénomène culpabilisant que quelques courageuses s'époumonent à clamer parfois au péril de leur vie.



On ne naît pas femme, on le devient nous a dit Simone de Beauvoir. Vous naissez hommes et voulez le rester et ne rien lâcher de votre statut usurpé nous dit Benoîte Groult. À quand ce que nous a promis la grande Révolution gravant sur le fronton de nos édifices publics une devise nationale qui peinent à se réaliser : Liberté Égalité Fraternité. D'autant que les Jacobins et autres Montagnards de service au pied du rasoir national s'étaient rendus compte, entre deux charrettes en chemin vers le supplice ultime, s'être quelque peu avancés quant aux prétentions égalitaires, réalisant ce qu'ils avaient à perdre. Dans leur esprit la devise n'incluait donc pas forcément nos consœurs et il convenait de rabaisser les prétentions d'une Olympe de Gouge, pionnière du féminisme, à déclarer à la face des badauds avides de voir sa tête rouler dans la sciure que si la femme peut monter à l'échafaud, elle doit avoir le droit de monter à la tribune.



Même prévenu du blâme qui planait au dessus de mon incrédulité masculine, que d'aucunes pourront déclarer feinte, je dois quand même avouer être quelque peu abasourdi, si ce n'est effaré, par ce qui a pu être dit ou écrit par des personnes éminentes - des hommes bien entendu mais pas seulement lorsqu'on lit les propos de certaines femmes dont la reine Victoria - et dont Benoîte Groult nous fait l'inventaire dans son ouvrage, sans parler des mutilations sexuelles qui cantonnaient les femmes à la seule procréation les privant de toute sensualité . Écrivains, hommes politiques, psychanalystes (Freud a particulièrement les faveurs de notre auteure féministe), médecins et hommes de sciences et autres marabouts, tous y ont contribué, sans parler des hommes d'église qui bien entendu intervenaient quant à eux qu'en porte parole de Dieu, tous à proférer ignominies, insanités et menaces qui leur vaudraient aujourd'hui la saisine des tribunaux mais qui en leur temps ont conforté l'idée que "l'absence de pénis, c'est con". Dixit Benoîte Groult qui n'y va pas par quatre chemins pour dénoncer ce postulat faisant de la misogynie un racisme encore plus tenace, plus universel et surtout plus facile à exercer que tous les autres.



Voilà donc avec Ainsi soit-elle de quoi déchoir qui pêche par mâle attitude. Cette survivance d'un passé encore présent que n'ont pas encore nivelée les lois sur la contraception et l'interruption volontaire de grossesse chèrement acquises par celles qui ont eu le courage d'affronter des assemblées très majoritairement masculines. Ces dernières légiférant sans vergogne sur des questions spécifiquement féminines auxquelles ils ne pouvaient par nature rien comprendre puisqu'affaires de femmes. Femmes dans leur vécu intime, leurs entrailles comme le veut la physiologie mais plus surement dans leur cœur tant ces questions ont fait couler de larmes.



Et Benoîte Groult de secouer le cocotier, y compris la variété femelle de l'espèce, pour faire comprendre à ses consœurs qu'elles ont leur part de responsabilité à se laisser enfermer dans le statut de dominées. J'espère Madame Groult que l'observation de votre postérité vous laisse quelque espoir, si cette notion a un sens dans l'au-delà, pour que ce cri de colère gravé dans les pages d'Ainsi soit-elle et abandonné à notre entendement désormais éclairé fasse enfin accéder la femme à cet état psycho-affectif que vous briguiez pour elle, en forme d'un idéal qui ne serait finalement que normalité : l'accomplissement de la personne enfin déconnectée de la notion de genre.



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Les trois quarts du temps

Un magnifique roman sur la relation entre mère et fille, surtout si la mère est une pétulante ambitieuse qui voudrait transmettre cette fibre à sa fille, et que la fille n'est qu'une rêveuse sensible qui ne demande qu'une chose à la vie, c'est aimer simplement. C'est aussi un cri de coeur pour la liberté, une quête de soi, une quête d'identité, une ode sur l'accession de la femme à la liberté qui, justement, a évolué sur le temps au cours du XXe siècle.

Les trois quarts de temps est l' histoire de Louise, née d'une mère peintre, ambitieuse qui s'est forgée une personnalité imposante. Une nature que la mère n'a pas su transmettre à sa fille ou c'est simplement la loi naturelle, celle de dire qu'on ne met pas toujours soi- même au monde. Louise, plus modeste, plus réfléchie, ne manifestant aucune ambition d'escalader les marches du succès, elle veut simplement vivre, aimer. Que même le choix de son premier mari déplaît à Hermine sa mère... Jean-Marie, ledit mari, va entre temps souffrir de la tuberculose, une maladie incurable à l'époque....
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Les Vaisseaux du coeur

Une histoire d'amour assez spéciale, pas de romance à mourir dans deux jours si tu n'es pas là, je t'aime à tout bout de champ, je te veux à moi seul, pas question de te partager. Que peuvent entretenir deux personnes de deux milieux différents, et conscients de leur différence si ce n'est le sexe. C'est le genre de relation que va vivre un marin et une femme universitaire, ils s'acceptent tels qu'ils sont. Sans prise de tête, sans effort de façonner l'idéal, leur passion va subsister au temps au point d'en faire un amour dur comme le roc,..
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Les Vaisseaux du coeur

Je viens de lire la présentation du livre de Benoite Groult et cela me donne très

envie de le relire. "les vaisseaux du coeur," pour moi, c'est le plus beau livre d'amour jamais écrit et je ne remercierai jamais assez Benoite G pour le splendide cadeau qu'elle m'a fait ,je n'ose dire le plaisir qu'elle m'a donné (qu'on ne se méprenne pas). Pour moi ,c'est un livre de passion et de vie.

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Ainsi soit-elle

En écoutant le livre audio Une vie de Simone Veil, j'ai eu envie de relire Ainsi soit-elle de Benoîte Groult, tant il me semblait que sur certains sujets, ces deux femmes contemporaines avaient divergeants.

Il faut dire qu'Ainsi soit-elle a été publié pour la première fois en 1975, alors que Simone Veil n'a écrit son autobiographie qu'en 2007.



Par exemple, en parlant de la loi sur la dépénalisation de l'avortement de 2007, Simone Veil écrit : Je m'accoutumai à entendre les hommes croisés ici ou là me dire : "Ma femme a tellement d'admiration pour vous". Le sens du propos ne m'échappait pas : ma femme vous admire, mais pas moi. En réalité, les hommes ne se sont jamais intéressés à cette loi. Comme souvent, Jacques Chirac avait parfaitement traduit leur opinion: l'avortement demeurait une « affaire de bonnes femmes ».



Tandis que Benoîte Groult, à propos de son livre écrit : "C'est donc bien consciente de mon démérite et sachant que je ne bénéficierai plus du sourire paternel réservé aux ouvrages de dames que j'entreprends d'écrire un ouvrage féministe. Je sais que j'aurais mieux fait d'écrire un roman féminin. On aurait continé à me dire galamment dans les salons.

- Ravi de vous connaître. Ma femme a adoré vos livres, le Piano à quatre mains surtout...

Et j'aurais continué à esquisser un humble sourire de remerciement, résignée au fait que les auteurs à seins ne soienet lus que par des lecteurs à seins. Et si dans un sursaut d'amour-propre, tout en maintenant mon sourire aimable car une femme doit rester charmante, j'avais ajouté : "Parce que vous, bien sûr, les livres de femmes ne vous intéressent pas ?" les maris en question auraient souri avec courtoisie en s'excusant de n'avoir de temps que pour les choses sérieuses. Ils lisent bien sûr, ces hommes-là, mais des livres d'hommes, des livres normaux, quoi! Evidemment, mes livres à moi parlent d'amour. C'est un sujet si féminin... quand il est traité par une femme. Mais quand c'est Flaubert qui décrit l'amour, cela devient un sujet humain. Il n'existe pas de sujet masculin pour la raison irréfutable que la littérature masculine c'est LA littérature ! Quant à la littérature féminine, elle est à LA littérature ce que la musique militaire est à LA musique.



Aucune de ces deux féministes ne s'étonne que les maris parlent au nom de leur femme, comme si celle-ci était incapable de s'exprimer par elle-même. Comme la femme de Colombo, la Française des années 1970 demeure la grande invisible, car comme disaient les militantes du MLF en 1968 : "Il y a encore plus inconnu que le soldat inconnu : la femme du soldat inconnu".

















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La Touche étoile

Alice est une vieille dame avec enfant, petit-enfant, arrière-petit enfant et jette un regard bien désabusé sur la vie.

J'ai donc dû confronter sa philosophie très négative avec la mienne même si je n'ai encore que des petits-enfants.

C'est ainsi qu'elle parle de jeunisme dans son métier de journaliste.

On peut passer le relais aussi. On a d'autres passe-temps, non?

Des vendeurs jeunes et dédaignant les vieux?

Connais pas. Ils adorent renseigner les plus âgés mais il faut un minimum de communication de chaque côté. Le vieux n'est pas roi.

Bref, j'ai retenu une leçon

Surtout, en vieillissant, gardons notre jeunesse d'esprit et le plaisir de voir les jeunes évoluer.

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Ainsi soit-elle

Etonnant que certains hommes et même certaines femmes dédaignent le féminisme qui essaye par tous les moyens (pas toujours les bons) de faire entendre la voix de celles qui souffrent sous la domination punitive et dégradante du pouvoir masculin. En lisant Benoite Groult on ne peut être que révolté par les témoignages qu'elle appuie tant ils résonnent comme une injustice flagrante de leur liberté et de leurs droits humains.
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Les Vaisseaux du coeur

George croit qu'elle sortira indemne d'une passion amoureuse et charnelle en préservant sa clandestinité. Elle ne souhaite pas s'établir avec Gauvin de peur que ce marin rustre ne trouve pas sa place dans sa vie de femme cultivée, où plutôt de peur qu'elle ne puisse plus l'aimer.

Alors ils se consument soit lors de retrouvailles fusionnelles qu'ils passent au bout du monde au gré des escales du marin, soit lorsqu'ils patientent loin l'un de l'autre.



Je n'ai tout à fait été conquise par le personnage de George, même si son honnêteté, sa légèreté et son envie de vivre séduit. Mais l'auteure traverse ses ambiguïtés avec constance et couvre Gauvain d'un regard de tendresse. Son écriture est sûre, libre et elle nous entraîne dans son récit.
Lien : https://partagerlecture.blog..
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Ainsi soit-elle

« La pensée freudienne stipulant qu'il n'existait pas de destin plus noble que celui d'épouse ou de mère, la presse féminine et la télévision se mirent à évoquer à longueur de colonne et d'émissions ces « femmes détraquées et trop viriles qui prétendaient devenir poètes, physiciennes ou cadres d'administration. La vraie femme n'avait pas besoin de faire des études supérieures ou de voter... En un mot elle n'avait pas besoin de cette émancipation et de ces droits pour lesquels les féministes d'un autre âge s'étaient battues. » »



Un essai féministe de haute volée, Benoîte Groult n'a pas mâché ses mots. Ils sont là pour éclaircir le sujet de la condition des femmes, égratigner, amener les femmes à la prise de conscience, pour dénoncer les mutilations génitales féminines entre autres...



« Il faut enfin guérir d’être femme. Non pas d’être née femme mais d’avoir été élevée femme dans un univers d’hommes, d’avoir vécu chaque étape et chaque acte de notre vie avec les yeux des hommes et les critères des hommes. »



Le ton est franc, sec, sans concession.

Et c'est exactement ce qu'il faut; pourquoi faire usage de pincettes ou mettre des gants pour exprimer ce que les femmes ont enduré au siècle dernier et endurent encore de nos jours...



« Le féminisme ne se résume pas à une revendication de justice, parfois rageuse, ni à telle ou telle manifestation scandaleuse; c’est aussi la promesse, ou du moins l’espoir, d’un monde différent et qui pourrait être meilleur. On n’en parle jamais. »



Un livre nécessaire, efficace, pertinent et de surcroît drôle !

Publié en 1975, il reste dans l'ensemble douloureusement d'actualité.



« Pour reprendre une très belle formule de l'ethnologue Germaine Tillion, « il n'existe nulle part un malheur étanche uniquement féminin, ni un avilissement qui blesse les filles sans éclabousser les pères, ou les mères sans atteindre les fils ». Chaque entrave, chaque abus de pouvoir imposés à la femme entraînent leur punition pour l'homme et constituent une cause irréparable de retard pour la société. Le blocage des sociétés musulmanes n'a pas d'autre explication. « Les femmes écrasées fabriquent des sous-hommes vaniteux et irresponsables et ensemble ils constituent les supports d'une société dont les unités augmentent en nombre et diminuent en qualités. » (Dominique Fernandez) »
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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Ainsi soit-elle

« Ainsi soit-elle » Un Livre de Benoîte Groult (Née à Paris le 13 Janvier 1920) aux éditions « le Livre de Poche » Sorti le 02/08/1977 comporte 219 pages.



On s'aperçoit que la lutte pour le Féminisme ne date pas d'hier et qu'on a même accomplis de grande chose dans un passé déjà assez éloigné.



« La femme, comme le juif, l'exclu, l'étranger, est devenue une figure de bouc émissaire, qui concentre sur sa personne les fantasmes les plus aberrants. »



« C'est pourquoi il n'est jamais trop tard pour lire un livre féministe. Ni trop tôt. Ils n'ont hélas pas pris une ride depuis vingt-cinq ans ! »



Ce Livre possède un fort caractère didactique. Il n'a pas vieilli. Ce sont les à-prioris qui nous empêchent de vivre ensembles et de nous respecter. Il est important d'ouvrir le dialogue (dans un Livre comme ici par exemple…).



La plume est assez talentueuse. Tout en gardant son calme et sans détester…



Beaucoup de gens louent la pédagogie de Benoîte Groult et les notes attribuées sont dans l'ensemble fort généreuses.



Bonne Lecture. Bon Vendredi.



Phoenix



++
Lien : https://linktr.ee/phoenixtcg
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Ainsi soit Olympe de Gouges

Ce n’est pas seulement une biographie d’Olympe de Gouge que nous propose Benoîte Groult, c’est surtout un recueil de ses idées de femme lucide sur la condition de son sexe. L’autre sexe ainsi que le qualifie Simone de Beauvoir. Celui qui depuis l’aube des temps vit dans l’ombre de la mâle domination. Idées qu’Olympe de Gouge a traduites en d’innombrables textes placardés dans la capitale ou adressés aux tenants du pouvoir dans la frénésie de son combat. Idées qu’elle a aussi mises en scène dans les pièces de théâtre de son cru.



Des idées très avancées sur son temps. En ce sens qu’il n’était pas prêt à les recevoir. Mais de toute façon très en retard sur ces millénaires d’apparition de l’humanité sur terre. On dirait aujourd’hui qu’elles étaient très modernes ces idées. Sans doute pour dire qu’elles nous semblent encore d’actualité.



Son tort a été de les clamer haut et fort ces idées, à la face de ceux qui, bien qu’eux-mêmes initiateurs de procès en crimes contre le peuple devenu souverain, avaient oublié que le peuple est constitué pour moitié de femmes. Ils n’étaient donc pas prêts à faire leur propre procès pour avoir tenu sous le joug celle à qui ils ont imposé leur supériorité, forcément usurpée. Olympe de Gouge a cru pouvoir initier une autre révolution dans la Révolution. Elle ne réclamait ni plus ni moins que le droit de monter à la tribune puisqu’on lui opposait celui de monter à l’échafaud.



Emancipation de la femme, plaidoyer pour le droit au divorce à son initiative et un statut équitable pour les enfants naturels, mais aussi abolition de l’esclavage, création d’une caisse patriotique, forme de sécurité sociale qui ne disait pas encore son nom, d’un théâtre national en contre-poids d’une Comédie Française monopolisant la création, ouverture de maternité offrant de bonnes conditions sanitaires aux femmes en couche, le tout porté par une déclaration universelle des droits de la femme, tels étaient ces idées d’avant-garde étouffées par des millénaires de soumission. Une révolution qui dans sa grande naïveté irait au bout de celle engagée en 1789. Une révolution que les tenants du pouvoir du moment ont travesti en contre-révolution, afin de ne rien perdre des prérogatives qu’ils venaient de s’arroger à grand renfort de têtes coupées. La monarchie était tombée mais pas le patriarcat.



On n’en attendait pas moins de Benoîte Groult dont on connaît la pugnacité en termes de combat pour que non seulement notre siècle connaisse enfin l’équilibre, mais aussi pour que s’établisse la reconnaissance de l’usurpation de statut au bénéfice du seul mâle. Que soient moqués ceux qui se sont rendus illustres aux yeux de leur congénères en proclamant des sentences du style : « Il y a un principe bon qui a créé l’ordre, la lumière et l’homme. Et un principe mauvais qui a créé le chaos, les ténèbres et la femme. » (Pythagore au 5ème siècle avant notre ère).



Bel hommage de Benoîte Groult à celle dont le courage, poussé à l’inconscience, l’a fait monter à l’échafaud, sans renier ses convictions, convaincue de son bon droit. Ce que Benoîte Groult restitue bien à la lecture de son texte, c’est la solitude de cette femme dans son combat. Abandonnée par son père naturel auprès d’une famille d’adoption, elle forgea elle-même sa propre culture, mena seule son combat pour que soit réservée à la femme une autre condition que celle destinée à élever les enfants de son époux. Elle n’a pourtant pas trouvé le levier propre à soulever l’enthousiasme de ses contemporaines. Même son propre fils l’abandonna à son rêve d’une société juste et équilibrée.



Les deux premiers ouvrages que j’avais lus de la main de Benoîte Groult avait forgé mon engouement pour cette auteure. J’ai été comblé de pouvoir, grâce à elle, faire la connaissance de cette femme d’autant plus méritante que son combat fut solitaire à une époque où l’on ne risquait rien moins que sa vie pour faire valoir ses idées.

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