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Citations de Christian Garcin (132)


Plus que le rire, la station debout ou le pouce opposable, le propre de l’homme est de vivre à l’intérieur des fictions qu’il se crée (fictions intimes, familiales, collectives, historiques qu’il bâtit comme il bâtit des cabanes où s’abriter) et d’en construire sans cesse de nouvelles, auxquelles il s’efforce de trouver un sens, une ligne directrice qui, par d’obscurs détours, viendrait éclairer sa propre vie.
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L'humain lorsqu'il apparaît sur terre est désorienté par l'impensable du réel: l'impensable de la nature, l'impensable de la force animale, l'impensable de la complexité végétale, l'impensable des réseaux à travers lesquels tout cela s'organise, l'impensable absolu de la mort.
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Christian Garcin
Avant, le pouvoir était vertical et autoritaire, aujourd'hui il est horizontal et consensuel, par le fait même de toutes ces manipulations médiatiques : l'information n'existe plus, il n'y a plus que de l'"événement", le "témoignage" a remplacé l'analyse, la recherche de l'émotion la relation objective des faits, le divertissement crétin envahit tout, et la doxa libérale est devenue seul discours. Tôt ou tard il faudra renverser tout cela, dit ma grand-tante en s'agitant quelque peu, moi je n'ai plus l'âge, mais qu'est-ce que vous attendez, vous autres, pour assiéger les chaînes de télévision et la plupart des radios et des journaux, qui tous diffusent en boucle les mêmes mensonges avec les mêmes mots ? La véritable révolution aujourd'hui, ajouta-t-elle, ce serait cela : supprimer la télévision. Fini, tout ce cirque du pouvoir et de l'image. En tout cas ce serait un bon début.
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On fait aussi remarquer que dans la langue des Yaghans par exemple, dont le révérend Thomas Bridges avait établi un dictionnaire bilingue en anglais, il n’y a pas de mot pour « bonheur » – ni pour d’autres notions morales telles que « péché » ou « salut de l’âme », ce qui posait problème pour leur enseigner les vérités de la Vraie Foi. Mais on pourrait aussi bien penser que le simple fait de vivre ce qui, pour eux, était la seule vie possible, la vie même, celle de leurs parents, leurs ancêtres, avec leurs joies et leurs peines, était en soi suffisant, sinon à leur « bonheur.....Du reste les concepts abstraits tels que « bonheur », « malheur », « bien », « mal » ou « péché » semblent, dans cette langue, devoir s’appuyer exclusivement sur les objets du réel. Le langage en somme, dès l’origine métaphorique, l’est ici à un point extrême.
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Aujourd’hui, El Chaltén accueille en moyenne 120 000 visiteurs par saison mais demeure néanmoins une assez petite station.....La rue principale (il n’en existe guère d’autres) consiste en une enfilade de boutiques pour montagnards, de bars branchés, d’hôtels à bas prix pour routards et de restaurants qui proposent ou des burgers ou des plats vegan. La déferlante mondiale de cuisine vegan et sans gluten a donc atteint les contreforts des Andes et le plus jeune village d’Argentine… La moyenne d’âge doit à peine dépasser les trente à quarante ans ici, l’été. De jeunes randonneurs et randonneuses BCBG venus de Buenos Aires ou du monde anglo-saxon, anorexiques et notant dans leur carnet chaque calorie qu’ils ou elles ingèrent, se retrouvent dans ces établissements, le soir, après une randonnée, pour consommer avec modération quelques feuilles de laitue.
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C’est à partir du moment où Menéndez met le pied en Terre de Feu et y installe sa première « société d’exploitation » que commence véritablement l’anéantissement des Indiens Onas, ou Selk’nam. La logique est imparable : on installe des clôtures partout ; les guanacos, sur quoi est basée la vie des Selk’nam, commencent à changer de territoire, puis à disparaître ; les moutons les remplacent ; les Selk’nam, qui ne s’expliquent pas vraiment comment cet animal si facile à capturer est apparu sur leurs terres, et n’ayant par surcroît aucune notion de ce que peut être une propriété privée, chassent les moutons et s’en nourrissent, parce qu’il faut bien manger ; ce qui est intolérable aux éleveurs, qui chassent et exterminent les Indiens. Menéndez est le principal commanditaire de ces massacres, et engage des hommes à cet effet.
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....comme disait Jean Prévost à propos de Stendhal :"la puissance du sentiment ne sera bien rendue qu'en oubliant totalement l'exactitude des faits". ( parlant de la fiction utilisée pour raconter la réalité ). p.51
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" Les dictatures fomentent l'oppression, les dictatures fomentent la servilité, elles fomentent la cruauté.Mais le plus abominable est qu'elles fomentent l'idiotie." (Borges) p.123
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Privé de lecture je serais réduit à n'être que ce que je suis.
J.B.Pontalis
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Au début il se disait que c’était une ville qui puait aux narines, mais pas uniquement : aussi aux yeux et à la morale et à l’entendement. Il y avait ceux qui comme lui faisaient la manche, assis ou debout, immobiles, silencieux, brandissant leurs cartons qui indiquaient souvent qu’ils étaient d’anciens marines, devant les panneaux lumineux des spectacles débiles : les Chicanos qui distribuaient tous les dix mètres des cartes de fille à poil pour des spectacles de strip-tease plus ou moins cheap ; les blonds à brushing, les gros types à casquette, les obèses, les groupes d’Australiens, de Français, de Russes, de Chinois qui défilaient un verre ou une bouteille à la main ; les filles bunnies genre Playboy à moitié nues qui se gelaient les soirs d’automne ou d’hiver en attendant qu’un touriste vienne se faire prendre en photo entre elles. Les musiques dégorgeaient sur les trottoirs, se chevauchaient pour lui sauter dessus, sans discernement. Les casinos étaient toujours pleins, le boulevard aussi. Les gens se bousculaient sans se voit, ivres souvent, rigolards, extravertis et bavards.
Telle est la misère de notre monde, se disait-il alors, l’immense déprime, le royaume du factice, du vide et du désespoir monnayé.
Et puis il s’y était habitué.
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Toujours dans mes carnets, une citation d'-En marge des nuits-: " J'ai pensé à ces mots de Pascal Quignard auxquels j'aimerais tant être fidèle: "J'écris parce que j'ai besoin de dire quelque chose que j'ignore". Non, décidément, un livre ne se fabrique pas. Il s'écrit, il s'avance tel un aveugle qui palpe les murs et les objets invisibles autour de lui. (p.57)
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Cette absence de tout, ce silence massif, ce ciel un peu trop mauve, le souvenir de la jeune femme tousse, des deux enfants à vélo, la Chevrolet grenat … Il se demanda si, à son insu cette fois, il n’avait pas fait un saut dans le temps, et basculé sans le savoir de l’autre côté. Depuis ses incursions dans le printemps de son enfance, se dit-il en souriant intérieurement, il avait peut-être activé un mécanisme temporel permettant de brefs surgissements d’une réalité dans une autre. Peut-être la scène à laquelle il avait assisté la veille, avec cette jeune femme répondant au prénom de Maureen qui grimpait dans une Toyota verte, n’avait-elle pas eu lieu la veille mais quarante ans plus tôt, et il avait été le seul à la voir – le seul qui pût la voir. Peut-être alors était-ce vraiment Maureen qu’il avait aperçue, Maureen venue passer un week-end à Las Vegas avec son mari un jour de 1968 ou 1970. Peut-être la ville était-elle à présent truffée d’intersections entre passé et présent, de filons dans la niche temporelle qui ne demandaient qu’à être forées.
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Une fois, lorsque j'étais enfant, j'ai découpé des fourmis à l'aide d'un couteau. C'est le seul acte de violence ou de cruauté que j'aie jamais eu, et j'en ai éprouvé des remords pendant de longues années. Jamais par la suite je n'ai ôté la vie, jamais je n'ai usé de violence, jamais je n'ai frappé quiconque, ni ne me suis battu pour quelque cause que ce soit.
J'ai toujours eu tendance à me mettre à la place d'autrui, et à anticiper les remarques, les points de vue, les réflexions et réactions de ceux avec qui à un moment donné je me suis trouvé en conflit, même minime. Je suis ce qu'on peut appeler un être pacifique et sociable, profondément attaché à ce que les relations avec ses amis, sa famille, et même de parfaits inconnus, se déroulent sans heurts, prompt à prendre sur lui, comme on dit, pour désamorcer toute situation hypothétiquement conflictuelle.
Et pourtant, depuis quelque temps, je me dis assez souvent que je devrais tuer ma femme.
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Trois valises, et c'est tout. Elles ne sont pas très encombrantes. Ce sont le souvenir de mon frère, le visage d'un écrivain inconnu, et celui d'une actrice anglaise, que rien n'aurait pu réunir sinon la commune douleur enfouie dont ils témoigneraient, chacun à sa manière. Quant à moi, je disparais déjà, comme un peintre chinois dans la brume d'un paysage qu'il a peint. J'entre dans l'autre monde. Ce n'est pas un renoncement - juste une pierre posée. Car je me dis que dans les plis de cet autre monde qui m'attend il doit bien y avoir un lieu vierge où démarrer quelque chose.
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"J'emplis mes poumons de nuit, dans le calme infini d'une pensée en suspens.....C'était une rue à maisons basses, qui signifiait au premier regard la pauvreté; au second pourtant, sans doute possible, le bonheur." Un mur rose s'étend devant lui, et" rien , je pense, ne saurait nommer la tendresse que ce rose". Devant cette simplicité, Borges a soudain l'intuition, ou la révélation, que cette nuit est identique à une autre nuit, trente ans auparavant. Pas similaire, mais, sans altération, la même....je me soupçonnai en possession du sens réticent ou absent de ce mot inconcevable : l'éternité ." p.83
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Il avait toujours eu avec les livres un rapport intime et presque amoureux, très possessif en tout cas, ne les prêtant qu'avec mauvaise grâce, et supportant mal de ne pas avoir chez lui un livre qu'il aimait- ce qui l'avait quelquefois conduit à omettre volontairement d'en rendre certains.
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"Non mais tu les as vus, tu les as entendus ?", me demanda ma grand-tante lorsqu'après une tasse de thé et deux macarons je voulus en savoir plus sur ces mots, "passez votre chemin", scotchés à sa porte et suivis d'un point d'exclamation, "il faut éteindre la télé et la radio, ne plus lire les journaux, il faut fermer les yeux, les oreilles et voilà tout. C'est ce que j'aurais du faire depuis longtemps, ajouta-t-elle, depuis que je me suis rendu compte que tout cela nous salissait les yeux et l'esprit avec infiniment plus de subtilité que tous les moyens mis en oeuvre dans toutes les dictatures pour anéantir l'esprit critique de chacun.
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Le temps est une pâtisserie
C'est la conscience qu'on en a: du passé au futur. Maintenant, imagine que tu replies la pâte sur elle-même, une fois, deux fois, dix fois, pour en faire une pâte à millefeuille. Des points initialement très éloignés les uns des autres vont se chevaucher – mais nous, nous continuerons à n'avoir conscience que de la pâte toute simple, étale, que l'on parcourt d'un point A à un point B. Si tu transperces de part en part la pâte ainsi repliée, tu feras se rejoindre entre eux deux. trois, dix points qui au départ étaient très éloignés les uns des autres et qui le demeurent, selon une conception simplement linéaire de la pâte. C'est ce qui s’est passé. Tous les mystiques ne le diront: le temps est plié, mais on n’en a conscience que dans certains états d’illumination, ou de transe. En ce qui te concerne, un point situé aujourd‘hui s’est trouvé en relation avec un autre situé au même endroit quarante ans plus tôt. Tu étais là au bon moment.
Hoyt hocha la tête. Enfin, conclut Myers, c’est ma façon de voir.
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Je me souviens que tu me disais combien le couple Sartre-Beauvoir avait étouffé, asphyxié de personnes autour d'eux-écrivains ou pas. Sans le vouloir, du reste, et en affirmant le contraire. tu les comparais à Valmont et Merteuil, mais sans leur cynisme. Une destruction qu'ils opéraient à leur insu. (p.53)
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Christian Garcin
Rouge-gorge quantique



par la fenêtre de la datcha je vois
trente-trois marguerites
        et un merle au milieu

j’entends le pinson et la fauvette
à tête noire et hier soir assez tard
        il y avait le chant liquide

et perlé d’un rouge-gorge
dont les capacités à s’orienter
        dans l’espace proviendraient

ai-je lu quelque part
d’une sorte de boussole quantique
        présente dans sa rétine

je me demande ce qu’aurait fait de cette information
Emily Dickinson elle-même boussole
        poético-quantique pouvant aider

un rouge-gorge affaibli the one in red cravat
au poitrail imprégné du sang de Jésus-Christ
        à regagner son nid
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