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Citations de Claudio Magris (225)


Tu as toujours aimé écrire, peu importe quoi, écrire, un point c'est tout ; c'est le geste qui compte, geste de poète, geste de roi, souverain arbitre sur les pauvres voyelles et consonnes qui bondissent sur commande et se mettent en rangs, en avant marche, à droite, droite, rompez les rangs. Bouchonner la feuille et la jeter à la corbeille ; mais ça, là-bas, à la caserne, tu ne pouvais pas le faire ; chaque feuille était juste et sensée et tu la mettais à sa place dans les classeurs et dans les registres. Ah s'il avait pu en être toujours ainsi, même en dehors de la caserne, même après ton service militaire ; chaque mot chaque phrase chaque page justifiés et nécessaires comme dans ces registres, une belle et forte chanson de la vie.
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Dans le dictionnaire de la langue des Onas il n'y avait pas et il n'y a jamais eu le mot abuelo, grand-père, parce que, étant donné la durée moyenne de leur vie, aucun d'eux ne parvenait à connaître le père de son père ni le fils de son fils.
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Un musée de la Haine. C'était une autre de ses idées, il y a beaucoup de notes à ce sujet. La guerre à vrai dire n'a pas grand-chose à voir avec la haine, aucune des deux n'a besoin de l'autre. Des bombes tombent sur la tête de gens qu'on ne hait pas, et c'est si vrai qu'une fois la guerre finie ceux qui les lançaient et ceux qui les prenaient sur la tête se serrent la main, et qu'on se retrouve dans des réunions nostalgiques d'anciens combattants naguère ennemis y compris au nom de ceux qui sont morts au combat, les tombeaux s'ouvrent, les morts se lèvent et se donnent la main. La haine est plus vraie, plus pure que la guerre ; elle n'est pas sentimentale, elle ne chante pas Lili Marlene, elle n'a besoin ni de champs de bataille ni d'armes. Il lui suffit d'un cœur et d'une tête.
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Souligner combien la guerre moderne ressemble de plus en plus aux combats énormes et effroyables de la Préhistoire, forteresses volantes et dragons ailés, ptérodactyles fondant sur des allosaurus ; reptiles cuirassés, ichtyosaures dans les marécages du crétacé supérieur, tanks dans la jungle, excavatrices géantes démolissant des immeubles comme les dinosaures dans les films, monstres marins des abysses, il y a des centaines de millions d'années et aujourd'hui. Impossible, alors et de nouveau de chanter dans les tranchées comme nos pères et nos grands-pères Ils n'passeront pas, on les aura !
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L'eau, dans la baie d'Along, est couleur de jade, dense sans être trouble, d'une tiédeur tropicale; une dernière gorgée d'été, un été qu'on ne ressent pas comme une saison passagère, mais plutôt comme une façon d'être, un état. Des îles enchanteresses et des rochers sertissent le vaste golfe; la barque effleure des grottes mouvantes et friables, boueuses.
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Est-il possible de retrouver les morceaux de nous-mêmes que les continuels déchirements du vivre, individuel et collectif, nous arrachent et jettent dans le fleuve qui s'enfuit? La paix, c'est aussi cela, la réconciliation avec tout ce qui fait partie de soi-même, avec son propre pays, avec sa propre histoire.
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Voyager est une école d'humilité; on touche du doigt les limites de sa propre compréhension, la précarité des schémas et des outils avec lesquels une personne ou une culture s'imaginent en comprendre une autre ou la jugent.
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Aujourd'hui plus que jamais, vivre signifie voyager ; la condition spirituelle de l'homme comme voyageur, dont parle la théologie, est aussi une situation concrète pour des masses de plus en plus importantes de personnes.
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L'éthique de la responsabilité, qui pense non seulement à la pureté des idéaux mais aussi à leurs conséquences pour les autres, est l'un des fondements de la vie civile et de la démocratie. Mais on ne sent jamais autant qu'en voyage combien est fort le risque qu'elle ne se dilue en complicité involontaire ou du moins en neutralité coupable. Les résidents, les sédentaires, sont obligés de faire à fond leurs comptes avec la réalité au sein de laquelle ils vivent, sans se dérober, comme peut, en revanche, facilement le faire celui qui, la nuit suivante, dormira sous d'autres cieux. Voyager est immoral, disait l'inflexible Weininger. Mais il le disait au cours d'un voyage...
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Le court-circuit progrès-régression; le prétendu choc des civilisations, cette mystification qui devient réalité par le biais du mensonge ; la continuelle transmutation de la lutte pour la liberté en oppression, la nécessité et la difficulté de la laïcité, les choses dernières et l'éphémère actualité quotidienne effacée par l'arbitraire de l'information : les problèmes brûlants du monde ressortent dans ces pays avec une particulière intensité et impriment une tonalité particulière au voyage. Les phénomènes inhérents à tout voyage la fuite, le retour, l'immoralité, la fraternité, le risque, la cruauté du voyager prennent, avec ces itinéraires, d'autres tons, de nouveaux accents, des nuances différentes.
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C'est comme avec les chilotes là-bas en Patagonie, à cette différence près que les chilotes savaient seulement mourir, alors que ceux-ci, comme il est juste, savent aussi tuer; on dit que sur la Neretva et sur le Kozara les Allemands sont stupéfaits de devoir reculer devant des loqueteux sortis des bois.
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Schubert-Soldern est parti, il est en Autriche privé de toute nationalité et répugnant à en choisir une, après avoir perdu deux empires, Gorizia devenue italienne et sa Prague natale devenue tchécoslovaque.
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Mario ressemble à Carla, il a le même front haut que sa sœur, le même regard tendre et hardi, la même bouche rebelle. Quand il le voit, surgi soudain du lointain, avec les yeux bleus de Carla, Enrico pense qu'on n'aime pas une femme ou un homme, mais un regard, la mer qu'il contient, un sourire en deça du sexe.
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L'histoire nous apprend que le San Marco a été ouvert le 3 janvier 1914 - en dépit des résistances du Consortium des cafetiers de Trieste, qui s'était vainement adressé, pour l'empêcher, à la Lieu tenance impériale -royale - et est tout de suite devenu le lieu de ralliement de la jeunesse irrédentiste et aussi une fabrique de faux passeports pour les patriotes anti-autrichiens qui voulaient s'enfuir en Italie.
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Il existe des gens qui savent être attentifs aux valeurs d'un lieu sans se laisser contaminer par cette infatuation viscérale pour son clocher qui rend aujourd'hui si obtuse et si régressive la redécouverte des identités et des ethnies, dans toute l'Italie, pour ne pas dire dans toute l'Europe, et donc aussi dans le Frioul comme à Trieste, où l'on se sent souvent étouffé par la frioulanité et la triestinité.
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La forêt est à la fois exaltation et effacement des frontières. Une pluralité de mondes différents et opposés, jusque dans la grande unité qui les embrasse et les dissout. Même la lumière, dans la forêt, a des contours nets, qui créent des paysages différents et, au même instant, des temps différents. La lumière est noire au plus profond de la forêt et d'un vert subaquatique sous une voûte de branchages entrelacés au dessus d'un sentier ; tandis que dans l'or des clairières règne encore le grand jour, une transparence légère, a quelques mètres de là, dans la forêt, c'est déjà le soir l'ombre pesante.
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La correction de la langue est la prémisse de la netteté morale et de l'honnêteté. Beaucoup de filouteries et de prévarications brutales naissent quand on fait de la marmelade avec la grammaire et la syntaxe, quand on met le sujet à l'accusatif et le complément d'objet au nominatif, brouillant ainsi les cartes, intervertissant les rôles des victimes et des coupables, altérant l'ordre des choses, attribuant des faits à d'autres causes ou à d'autres auteurs qu'à ceux qui en sont effectivement responsables, abolissant les distinctions et les hiérarchies dans l'imposture d'une copulation collective effrénée de concepts et de sentiments, corrompant la vérité.
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Mais l'identité piémontaise n'est pas moins idéologique ni précaire que l'identité italienne ; toute identité est un agrégat et le décomposer pour arriver au prétendu atome indivisible n'a guère de sens. Estimer, comme le suggérait Thovez, qu'il suffit d'être piémontais pour échapper à la rhétorique, c'est peut-être encore de l'emphase, de la rhétorique.
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Si l'identité est le produit d'une volonté, elle est la négation d'elle-même, puisqu'elle est le geste de quelqu'un qui veut être ce qu'à l'évidence il n'est pas et donc veut être différent de lui-même, se dénaturer, se métisser.
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Krasnov haïssait et méprisait Vlassov, parce qu'il pressentait qu'il était son miroir, le miroir véridique qui reflète le vide où on se regarde et où on ne voit rien. (page 80)
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