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Critiques de Cyril Pedrosa (657)
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L'âge d'or, tome 1

Whaou les dessins sont incroyables ! Surtout ceux en double page !

On est dans une histoire assez classique d'une princesse qui est écartée de son trône et cherche des alliés pour le retrouver, trahie par des proches. En chemin elle apprend qu'un mouvement populaire prend de l'ampleur, qui veut un retour à l'âge d'or, ce temps où tous étaient à égalité. Un scénario très intéressant et des personnages qui se dévoilent au fur et à mesure : on s'attache à eux très vite mais ensuite on doute un peu. C'est bien ils ne sont pas tout blanc, il y a du gris ! En tout cas j'aime déjà le message et les rebondissements et j'ai hâte d'avoir la suite entre les mains !

Challenge BD 2021
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Trois ombres

Comment dire ?

Je n'ai pas vraiment compris ce qu'étaient ces trois ombres...

Je n'ai pas vraiment compris la fin...

Et je n'ai pas vraiment eu envie de m'y replonger pour tenter d'y comprendre enfin quelque chose...

J'ai pourtant apprécié le graphisme et les personnages principaux plutôt attachants...

Dommage !
Lien : http://bouquins-de-poches-en..
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Portugal

Cette bande dessinée est un pavé, un ouvrage lourd, qui contient beaucoup de pages, mais surtout beaucoup d’histoires, de sentiments, de réflexion.



Portugal est un récit sensible sur les origines et la filiation et toutes les difficultés qui entourent le passé. L’auteur nous mène à la rencontre de Simon, un trentenaire en manque de motivation que ce soit sur le plan professionnel ou personne. Peu à peu, il glisse dans la torpeur se laisse porter par le quotidien sans jamais accepter de s’engager dans quoi que ce soit.



Une invitation à un mariage, anodine de prime abord, lui servira de déclic pour partir à la découverte de son passé familial et de lui-même. Ce passé, il l’avait oublié par manque d’intérêt, parce que pour lui ce n’était pas important. Petit à petit ce voyage au Portugal, qu’il entreprend un peu à l’aveuglette, va le transformer, lui révéler bien plus que ce qu’il espérait.



L’illustration peut paraître au départ un peu brouillonne, nonchalante, elle est en fait très riches en détails oscillant entre réalisme et onirisme, nous entrainant dans l’univers de Simon, à travers la France et le Portugal. Les couleurs sont parfois vives, parfois pastelles et changent en fonction des atmosphères, pour notre plus grand plaisir.



Cyril Pedrosa est une vraie révélation, pour moi, j’avais déjà lu Trois ombres que j’avais apprécié, et je suivrai maintenant cet auteur de près !
Lien : http://calokilit.wordpress.c..
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Les équinoxes

Equinoxes raconte des tranches de vies de personnes qui ont réussi ou pas, qui se posent des questions sur le sens de la vie, le poid de la solitude, le destin. C’est un gros pavé, presque 400 pages pour une bande dessinée, ponctuée par quelques pages en proses, et les saisons. C’est ambitieux, sensible, servi par un graphisme élégant, utilisant le crayon de couleur, le dessin parfois ébauché, où le décor vient se superposer en transparence sur les personnages, pour bien montrer qu’ils ne sont qu’éphémères. Il y a un peu du cinéma d’Alain Resnais ou d’Agnès Jaoui, d’ailleurs Vincent, l’orthodontiste désabusé, m’a fait beaucoup penser à Jean-Pierre Bacri. Quatre saison, une déambulation dans ces vies, c’est contemplatif, ce n’est qu’observation, l’aventure du quotidien, faite de petites choses, petites phrases ou non-dits, de silences. Le personnage de la photographe rmiste fait un peu le lien entre tous les autres, c’est aussi une mise en abyme, Pedrosa observe des petits bout de vie, dont celle de cette personne qui observe à travers l’oeil de son reflex d’autres petits bouts de vie… C’est une lecture qui semble un peu neutre, par le ton, les dialogues inachevés, et qui pourtant ne nous laisse pas indemne, parce cela parle de nos vies, des regrets, des choix que nous n’avons pas fait, de nos lâchetés, de nos errances...
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Portugal

Indispensable ! Cet ouvrage devrait avoir sa place dans toute bibliothèque parce qu'il nous parle de nous avec pudeur et émotion d'un trait fin et de splendides couleurs qui expriment la beauté des saisons, des lumières du petit matin comme celles ombrées d'un garage-cellier quand sa porte s'ouvre par un bel après midi d'été .

Il est à la mi-temps de sa vie, pas loin de la maturité (?) quand un voyage professionnel va le plonger dans le Portugal de ses origines, déjà un peu lointaines. Et les parfums et les sons de son enfance, quand il y venait en vacances, lui reviennent en bouquet. Il pourrait en rester là, sauf que quand le "destin", le "hasard" s'y met...Un mariage d'une cousine perdue de vue le précipite (presque au sens chimique du terme) dans ces histoires de famille, celles que tout un chacun a écouté d'une oreille distraite et qui tout à coup l'interpellent, le font se décider à profiter d'une opportunité pour aller rencontrer ces cousins du Portugal qu'il n'a jamais rencontrés. Et là ce n'est que du bonheur, pour lui ce héros de tous les jours et pour nous, lecteur émerveillé.

Le texte est tout en émotions et pudeurs, complètement servi par le graphisme. Ces traits légers dessinent des silhouettes presque transparentes, noyées dans la foule ou isolée sur une plage par une belle nuit d'été, juste le trait fin sur un fond de couleur. Ce sont des pages entières qui ont la même couleur de fond, si bien choisie pour évoquer un moment, une ambiance.

Et quand il se sent perdu, mal à l'aise, cette difficulté, cet ennui, cette souffrance l'auteur nous la fait palper en dessinant son personnage en train de se trouver de plus en plus immergé dans une eau froide qui monte, monte, le recouvre et lui flotte dans un monde nautique où il divague...

Rares sont les auteurs comme Cyril Pedrosa capables de maîtrise la couleur avec autant de brio, d'en faire un vecteur d'émotions, au point de faire ressentir au lecteur les odeurs, entendre les bruits environnant, sentir la chaleur ou le froid ou l'humidité ambiante.

A lire et à relire pour peut-être trouver une réponse à la question philosophique "Est-ce que je suis le pays où je suis né ...ou Est-ce que JE SUIS, peu importe le pays ?".
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Paroles sans papiers

Neuf témoignages d'immigrés sans-papiers, illustrés par autant d'auteurs-dessinateurs différents. Quelques paroles, pas forcément tout un parcours. Ils sont venus de Tchétchénie, du Sénégal, du Congo, du Maroc, du Brésil, d'Algérie... pour fuir une guerre ou la misère. Ils étaient confiants : l'avenir dans un pays riche et démocratique serait forcément meilleur. La plupart ont voyagé clandestinement. Certains ont été refoulés violemment aux portes de l'Europe, d'autres ont dû se cacher une fois arrivés en France, l'une est devenue prostituée, l'autre esclave chez des membres de sa famille...



Très bel album, poignant sans jamais tomber dans le mélo. Des paroles qui semblent recueillies telles quelles, des adaptations en images très réussies. La postface est particulièrement intéressante pour situer le contexte politique, la législation et les événements des vingt dernières années. Et rappeler aussi quelques principes économiques : l'immigration n'appauvrit pas un pays, ne prive pas d'emploi les "de souche" (après combien de générations sur un territoire est-on "de souche" ?). Elle est au contraire un facteur d'essor économique et culturel.



Une BD importante et instructive sur un thème d'actualité.



--- Les différentes approches des illustrateurs donnent envie de les découvrir davantage via d'autres albums.
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L'âge d'or, tome 2

Ce tome fait suite à L'âge d'or, tome 1 (2018) qu'il faut avoir lu avant, car c'est la deuxième moitié d'une histoire complète. La première édition date de 2020. L'histoire a été coécrite par Cyril Pedrosa & Roxanne Moreil et mise en images par Pedrosa. Il s'agit d'une bande dessinée en couleurs comprenant 183 planches. Pedrosa a réalisé les couleurs du livre avec l'aide de Joran Tréguier et Marie Millotte.



Sur une mer démontée, un grand navire à voile est ballotté. Une chaloupe est mise à la mer avec à son bord Bertil, et une autre personne. Ils sont accueillis sur la côte par une troisième personne qui les mène au château du prince Edwald. Sur les remparts de ce même château, Poudevigne et Petit Paul ont été enrôlés de force pour être soldats et ce soir-là, ils montent la garde sur les remparts. Le premier indique au second qu'il le laisse surveiller, pendant que lui pique un petit roupillon. Le second le réveille de suite parce qu'il s'est rendu compte qu'il ne sait pas comment s'y prendre. Puis ils se mettent à parler d'une bonne soupe chaude, d'être soldats, et de ce qui va se passer quand ceux d'en bas vont attaquer. Petit Paul se met à trembler d'angoisse à l'idée d'une bataille, et Poudevigne lui promet qu'il le protègera. Puis ils parlent de Languile qui est resté en Péninsule et qui doit être un homme libre, peut-être avec un petit lopin de terre à lui, et la panse bien remplie. La neige tombe sur les remparts, sur la ville à l'intérieur des fortifications, et sur les assiégeants à l'extérieur des fortifications. Au printemps le siège est toujours en place, et la princesse Tilda en armure mène un nouvel assaut sur le mur d'enceinte. Les flèches pleuvent depuis les remparts et font quelques morts parmi les soldats. Un beffroi a été amené et mis à proximité des remparts, avec une passerelle atteignant presque le mur d'enceinte. Les soldats qui s'avancent dessus essuient une pluie de flèches : une partie meurt, une autre se replie dans la tour. Tilda donne l'ordre de faire reculer le beffroi, sous le regard amusé de son frère Edwald qui contemple la scène depuis une tour à l'intérieur de l'enceinte.



Le soir venu, autour de la table du repas, Edwald se plaint de ne plus supporter de voir ces cloportes au pied des remparts. Son conseiller Loys de Vaudémont l'informe que leurs bataillons de la Péninsule ne sont plus qu'à une dizaine de jours de marche, et qu'ils pourront ainsi prendre Tilda en tenailles. Un autre noble à la table demande pourquoi ces troupes n'ont pas été rappelées plus tôt, au lieu de les disperser en Péninsule. Vaudémont répond qu'il aurait été absurde de lancer la contre-attaque au milieu de l'hiver, et que l'occupation de la Péninsule a permis de maintenir la pression sur les provinces insurgées. Un cousin d'Edwald arrive pour lui montrer, un tract placardé sur les murs. On peut y lire : Souviens-toi des hivers passés, jamais des tyrans rien ne fut donné, l'âge d'or est revenu ! Sur la côte, un compagnon d'arme accueille Hellier le tabellion et lui indique qu'il pourra rencontrer Languile au rendez-vous convenu. Dans la grande salle à manger de la tour en hauteur, Edwald contemple la grand-place, ainsi que les lumières de la citadelle. De son côté, à l'étage d'une auberge, Tilda contemple les lumières des feux de camps de son armée. Elle se rend devant la cheminée et regarde les marques sur son cou. Elle enlève la partie supérieure de son armure et constate que la blessure sur son bras gauche saigne encore. Elle passe dans la pièce voisine pour aller ouvrir le haut coffre qui contient l'Âge d'Or.



Comme il s'agit d'un diptyque, le lecteur revient pour avoir la fin de son histoire. Il se rend vite compte que les auteurs ont construit cette deuxième partie avec une unité de lieu et d'action : l'armée de Tilda fait le siège du château de sa famille pour le reprendre des mains de son frère Edwald, plus jeune qu'elle, donc illégitime sur le trône. En trame de fond, se trouve la question de l'Âge d'Or, à la fois un livre bien réel qu'il est possible de tenir dans ses mains, à la fois une métaphore, celle de l'organisation d'une société bénéfique pour tous ses citoyens. Comme dans le premier tome, les auteurs déroulent clairement leur intrigue : elle suit le schéma classique de l'héritier du trône évincé par une guerre de succession qui revient reprendre son dû. Tilda est une véritable héroïne, combattante émérite, prenant la tête de ses armées sur le champ de bataille et lors des affrontements, devant forger des alliances. En face, son frère commande son armée sur la base des conseils de Loys Vaudémont qui est le véritable chef de l'exécutif, qui prend les décisions permettant d'assurer la continuité du pouvoir en place. La narration visuelle reste toujours aussi originale, avec une palette de couleurs qui sort de l'ordinaire, et une façon de représenter les personnages et les décors qui évoque un temps mythique, pour raconter un conte.



Par rapport à la découverte du premier tome, l'effet de surprise des dessins est passé. Pour autant, le lecteur retrouve bien la mise en images qui impressionne par son foisonnement, par ses couleurs surprenantes, par sa forme aventureuse, et par sa rigueur et sa précision, ainsi que par les détails concrets. Ce deuxième tome commence comme le premier par un dessin qui s'étale sur 7 pages. Le lecteur y retrouve la précision des éléments représentés : le trois-mâts, les hautes murailles qui entourent la citadelle, les tentes du camp des assiégeants, la tour de siège (appelée beffroi par les personnages), l'auberge, la campagne et les bois alentours, le coffre haut abritant l'Âge d'Or, la grand-place avec son gibet, la tour dans laquelle Edwald s'est réfugié avec sa garde rapprochée. En fonction de la séquence, l'artiste peut réaliser une représentation plus ou moins simplifiée, tout en conservant un bon niveau de détails. Les personnages évoquent parfois une représentation à la Walt Disney, mais avec plus de détails et plus de texture, à nouveau une approche visuelle entre conte pour enfants, et nuances pour adultes. Le lecteur constate également que l'artiste a conservé son processus de mise en couleurs si particulier, ainsi que les teintes inattendues. En fonction des pages et des cases, certaines formes sont détourées par un trait de contour, dont la couleur varie en fonction des éléments, très rarement noir. Le contour de la plupart des formes n'est défini que par la couleur, comme dans un procédé de couleur directe. L'étrangeté des dessins est accentuée par le fait que l'artiste utilise essentiellement des aplats de couleurs, sans dégradé progressif, mais avec des juxtapositions pouvant évoquer des dessins animés des années 1960, ou des effets infographiques.



S'il s'agit bien de la suite du tome 1, il n'y a pas de répétition, et le lecteur se retrouve surpris à bien des moments qu'il s'agisse de la narration visuelle ou de l'intrigue. Il se souvient bien de passages somptueux dans le premier tome, et il en découvre d'autres tout aussi somptueux ici, de nature différente : les remparts, la charge des armées contre les murailles, le rayonnement de l'Âge d'Or, la végétation dans les bois, les deux incendies, le crépuscule pourpre, la révélation pleine et entière de l'Âge d'Or, autant de moments où il en prend plein les mirettes. Le dessinateur ne se montre pas démonstratif, il donne à voir des sensations, des ressentis, des phénomènes, leur apportant une consistance extraordinaire qui transporte réellement le lecteur dans cette vision entre conte et onirisme. Il réalise à nouveau de magnifiques pages sans texte, environ une trentaine au total. Il n'y a pas de répétition non plus dans l'intrigue. Dans un premier temps, le lecteur peut être un peu décontenancé par l'unité de lieu, par l'absence de nouveaux voyages. Il constate qu'il y a peu de nouveaux personnages (messire Landeproix), tout en retrouvant avec plaisir ceux déjà présents dans la première partie : Tilda, Edwald, Tankred de Malefort, Languile, Petit Paul, Poudevigne, Hellier le tabellion, Loys de Vaudémont, Bertil. Il se rend compte que chaque protagoniste dispose de sa personnalité, de son caractère, de son positionnement social. Il apprécie qu'une soldate mentionne Abigaëlle et sa communauté.



Le temps est également venu de mener l'intrigue à son terme, à la fois pour l'issue de la reconquête du trône par Tilda, à la fois pour le potentiel avènement de l'âge d'or qui donne son titre à la bande dessinée. D'un côté, le lecteur trouve une partie des conventions de genre auxquelles il s'attend : le courage de l'héroïne, les hauts faits d'arme, la cruauté des méchants, l'assistance des compagnons de l'héroïne, les combats dont les bons sortent victorieux contre les méchants. D'un autre côté, les auteurs restent bien dans un registre adulte : même si les archers d'Edwald ne sont pas très doués (ils n'arrivent pas à toucher Tilda qui est en première ligne), ils font des ravages parmi les soldats qui meurent réellement. Il y a même une séquence où Tilda est à côté d'un de ses soldats qui rend son dernier soupir, décédant de sa blessure. En outre, la princesse est confrontée à la nécessité d'une alliance avec un ancien opposant, ce qui joue sur le fait que les relations de pouvoir ne sont pas manichéennes et qu'elles sont évolutives. Enfin l'héroïne elle-même n'est pas à la hauteur de l'idéal de l'Âge d'Or, et elle en souffre physiquement. Le thème de fond du récit sur l'utopie est développé de manière adulte : les morts au combat, l'obligation de mener une lutte mortelle, une prise de pouvoir sanglante au nom d'un idéal, l'engagement actif au péril de sa vie (être du côté de ceux qui n'ont rien, ou de leurs maîtres), la nécessité de participer à la vie de la société. Il subsiste une ambiguïté majeure, celle du meneur. Le récit remet visiblement en question les motivations de Tilda, sans pour autant proposer d'alternative à construire ou théorique à la désignation d'un chef temporel.



Ce deuxième tome tient toutes les promesses du premier. Cyril Pedrosa réalise des planches toujours aussi enchanteresses, combinant spectacle et narration personnelle, avec une sensibilité rendant vivants et attachants tous les personnages. Le scénario suit un chemin tout tracé relevant du conte classique, avec des composantes adultes et une réflexion sur les conditions politiques pour un âge d'or des êtres humains.
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L'âge d'or, tome 1

Rien ne va plus dans le royaume! Le roi vient de s’éteindre et sa fille, Tilda, qui devait prendre sa succession, vient d’être trahie par son jeune frère qui a comploté dans l’ombre pour s’emparer du pouvoir. Heureusement, grâce à l’aide de Tankred et de Bertil, deux fidèles serviteurs, la jeune femme, qui était condamnée à l’exil, parvient à s’échapper.

Parallèlement à ce coup d'État, la colère gronde parmi le peuple. Un vent de révolte a sonné. Mené par Hellier de Tabellion, un mouvement révolutionnaire, placé sous le sceau de l’ ge d’or, est en train de se mettre en place. Le peuple crie justice et vengeance et ne veut plus être asservi. Il revendique l’égalité entre les hommes, menaçant le pouvoir en place en prenant les armes. Une guerre s’annonce et c’est dans ce climat houleux que chacun va devoir choisir son camp…



“L’âge d’or” est un dyptique imposant avec ses tomes de 230 pages chacun publiés dans la prestigieuse collection “Aire Libre”, chez Dupuis. Cyril Pedrosa et Roxanne Moreil nous plongent ici dans un univers moyenâgeux tout à fait reconnaissable avec ses châteaux forts, ses seigneurs, ses vassaux et l’utilisation du champ lexical qui va avec: “gueux, pourceau, vilains, manants…” et qui nous met dans l’ambiance dès les premières pages. On retrouve certains codes récurrents à ce genre: une dimension fabuleuse à travers la quête d’un trésor caché (le Graal et ses saintes reliques ne sont peut-être pas loin!), la guerre et ses croisades avec ses chevaliers en armures ou encore les intrigues de palais et les jeux de pouvoir…Néanmoins, j’ai apprécié que les deux auteurs modernisent le tout en plaçant une héroïne au cœur de l’histoire! Exit le Roi Arthur, Yvain, Merlin et Lancelot et place aux femmes! Ici, telles des Amazones, les femmes sont indépendantes et prêtes à en découdre si l’on vient leur chercher querelle, vous voilà prévenus!



Mais Tilda est un personnage ambivalent, partagé entre son envie de gouverner son peuple avec justice et équité, sans le noyer sous les taxes et les impôts, et sa soif de légitimité qui passe par la récupération du pouvoir... Une position ambigüe qui va peu à peu l’éloigner de Bertil, son plus fidèle ami et qui ne nous la rend pas toujours très sympathique…



Mais cette épopée guerrière est surtout l’occasion de défendre des idées révolutionnaires (pour l’époque!) et utopistes, basées sur un texte ancien, fondateur, dissimulé par les acteurs du pouvoir pendant des siècles afin de mieux le conserver… Un texte politique finalement, qui parle d’égalité entre les hommes, d’harmonie et de faire tomber les tyrans (et qui peut s’appliquer aux démocraties…). Alors comment ne pas se laisser séduire et emporter par un tel sujet?



Une aventure passionnante donc, portée par les illustrations incroyables de Cyril Pedrosa! Je n’imagine même pas le nombre d’heures qu’il a fallu pour parvenir à un tel résultat… Un style unique, avec des personnages et des décors tout en courbes, des traits descriptifs bien souvent exagérés, voire carrément caricaturaux, des couleurs surréalistes, qui oscillent entre onirisme et psychédélisme et un découpage des cases irrégulier qui rend l’histoire et la narration particulièrement vivantes! Que l’on aime ou pas le style de Cyril Pedrosa, le rendu est impressionnant et somptueux!



Une bande dessinée saluée par la critique (et on comprend pourquoi!), qui donne envie de se jeter sur le volume 2!
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L'âge d'or, tome 2

Ma lecture du 1er tome remontant à plus de 2 ans, j’avoue que j’ai eu un peu de mal à m’y retrouver en entamant ce second volet. Cette impression s’est estompée au fur et à mesure de ma lecture et bien vite, j’ai pris grand plaisir à ma lecture. Les petites réserves que j’avais à l’issue du 1er tome sont toujours là, je trouve toujours qu’il manque un petit brin de quelque chose, j’ai toujours cette impression qu’on a frôlé le chef-d’œuvre sans l’atteindre. Comme dans le 1er volet, je n’ai pas été séduite par les personnages, il y a comme une distance entre eux et moi qui m’empêche de me sentir véritablement concernée par ce qui leur arrive. Ceci dit, cela ne gâche pas le plaisir de lecture. Ce conte à la fois épique et philosophique reste captivant. Et puis surtout, visuellement c’est très beau. Moi qui suis plutôt hostile à l’utilisation des nouvelles technologies pour les illustrations, je reconnais qu’ici le résultat est superbe, notamment les magnifiques couleurs. En plus, les auteurs offrent régulièrement des planches pleine page qui sont un régal pour les yeux.
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Les équinoxes

« Je réalise pour la première fois qu'un jour tout va s'arrêter. Je pense à toutes ces vies qui auraient été possible. Et j'ai l'impression de ne pas en avoirvécu une seule. Au moins une. » C'est la petite musique qui se dégage de cette BD : ce moment de désarroi qui traverse l'esprit de tout un chacun quel que soit l'âge.

Au cours des quatre saisons d'une année, ce sont plusieurs vies qui vont se croiser, se répondre.

C'est l'automne qui ouvre ce bal ; cette saison qui est le véritable début d'année, ce début d'année qui oblige à regarder en arrière sur ce qui a déjà été vécu (et dont les années sont perdues à jamais) et qui oblige à se projeter dans un avenir inconnu.



Deux fils conducteurs l'enfant de la préhistoire et la photographe.

Les aventures de cet enfant de la préhistoire sont en prologue à chaque saison, vignettes sans paroles et blindées d'émotion. Mais comment fait Cyril Pedrosa avec juste quelques dessins et quelques couleurs ? Et pourtant, on reprend son souffle avec l'enfant qui a échappé au tigre, on pleure de fatigue et de désespérance avec lui qui ne peut traverser ce cours d'eau gelé et dont la glace se fend, avec lui dans la fraîcheur du printemps on découvre des fresques rupestres et l'été, toute sa joie de vivre.

La photographe est une silhouette discrète, si discrète, que l'on suit de page en pages. On ne voit jamais son visage ou partiellement, furtivement un profil ou le bas du visage, et quand elle prend le cliché, son visage est caché par son reflex. C'est peut-être elle la véritable héroïne avec son mal-être, avec ce coup de folie qui lui a fait dépenser son peu de fortune pour acheter ce reflex qui la cache mais qui nous ouvre par un simple cliché l'intimité de ceux et celles qu'elle photographie à l'improviste d'une rencontre. Elle a le coup d'oeil d'une Vivian Maier, et pour cause ! L'instantané d'un visage, clé d'une vie, d'un souvenir. Elle croise quelques uns des personnages mais aussi des inconnus comme la petite fille du caddy préoccupée de bien ranger les courses du super marché dans le coffre de la voiture de son papa. L'éphémère dans toute sa signification . Et cette admiration pour tous ces photographes qui réussisent, eux, à arrêter le temps, même artificiellement.



«Les Equinoxes » est un véritable Roman Graphique puisque la qualité des textes est à la hauteur du graphisme, tant dans les bulles que dans les pages où l'écrit prend le relais du dessin pour mieux développer mais aussi pour passer du visuel à l'intériorité du personnage.

Créativité de la syntaxe graphique comme ces notes de musique qui s'échappent d'une église un soir de Noël et qui ce même soir se déversent de l'ordinateur de Louis. Ou ces deux vignettes vide pour l'une, juste avec le mot Louis dans la seconde qui marquent qu'il s'agit de la même nuit au cours de laquelle Vincent occupe son insomnie à rêver devant sa baie vitrée donnant sur la mer, et à l'autre bout de la France, Louis répond à Vincent. Ce cliché vignette en noir et blanc, situé dans le coin inférieur droit de la page de droite et quand cette page est tournée plusieurs petites lucarnes aussi en noir et blanc, qui nous racontent les flashs qui traversent l'esprit du photographié avant que le texte ne prenne le relais.



Ces objets aimés que l'on se transmet comme ce livre de Louis à Vincent, ce tableau de Louis à Catherine et ce stéréoscope qu'offre Pauline à son père



Tous les dialogues sonnent juste, comme ces situations que nous avons tous connues où au cours d'une fête, d'un repas d'une visite de groupe, nous avons le besoin de nous mettre à l'écart, tous ces mots consentuels et flagorneurs nécessités par la vie en société...La complicité des deux frères qui se retrouvent àprès plusieurs années, les seuls capables de partager le fond de leurs pensées.

Et puis cet attrait pour un art ,musique ou peinture ou photo, qui enchante toute une vie.





M. Pedrosa est un capteur de lumière. Lumière qui inonde notre monde, où se découpent des paysages habités par des personnages dessinés d'un trait léger mais qui sont transparents, presque évanescents. Ce sont des silhouettes derrière lesquelles en apparaissent d'autres ; même les constructions dégagent une sensation d'éphémère, de décors prêts à disparaître. La temporalité est là. Alors, il n'est pas surprenant que ce livre traite du temps qui passe, de nos vies qui nous filent entre les doigts, de nos vies qui en croisent d'autres mais qui en définitive laissent chacun à son individualité pour ne pas dire solitude. Il y a ce que l'on croit savoir de soi et des autres mais au fond, c'est souvent un inconnu qui captera ce moment d'intimité comme cette photographe qui nous entraine du Musée d'Orsay, à un littoral breton ou....

Notre temps se comptent en années et elles commencent toutes à l'automne, la Rentrée pour se terminer dans la flamboyance de l'été. Quatre saisons où l'auteur nous offre ici toute l'émotion, l'intimité du sillage du passage des ans gravé dans nos vies.



Enthousiasmée par la lecture de « Portugal » de Cyril Pedrosa, j'ai participé à la dernière masse critique et j'ai eu le bonheur d'être sélectionnée. Je n'avais pas pris le temps de m'informer sur son dernier ouvrage et la surprise fut totale. L'ouverture du colis m'a laissé échapper un sifflement d'admiration et de gourmandise. Exactement comme un gamin le soir de Noël.

Un énorme pavé, plein de textes et d'images et de couleurs toutes les unes plus belles que les autres. Même pas l'ombre d'un doute : cette lecture allait être un régal. Et ce fut un régal.
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L'âge d'or, tome 1

Je lis souvent des BD. Mais je manque parfois d’inspiration pour en faire un commentaire, contrairement à des amies babeliotes qui sont très "bavardes" sur les livres imagés qu’elles lisent.



Mais cette BD de 230 pages fait exception à la règle.

Déjà c’est un beau cadeau que mon fils m’a offert pour Noël et que ce livre est d’une grande beauté graphique.

Les dessins sont d’une grande qualité artistique, très expressifs. Et J’ai été admiratif de constater avec plaisir et envie je dois dire, tous les détails et le soin que Cyril Pedrosa le dessinateur et Roxanne Moreil la co-scénariste, ont apporté à ce superbe livre.

C’est une BD d’une grande qualité esthétique et je suis qu’au premier tome. Je suis convaincu que les autres qui suivent sont tous aussi du même style harmonieux.

*



Cyril Pedrosa et Roxanne Moreil m’ont fait faire une plongée merveilleuse dans le monde médiéval et fantastique.

C’est histoire de Tilda, la fille du roi Ronan du royaume d’Artrevers, qui vient de mourir.

Elle pensait bien succéder à son père mais son fourbe de jeune frère s’accapare du trône et la condamne à l’exil.

Ce livre raconte donc les aventures de la princesse Tilda, écartée de son royaume et qui va faire bien des rencontres, dans différentes contrées. Tilda qui est déterminée à bien récupérer le trône usurpé par son mauvais frère.

*



Il y a des bulles certes, mais pas à profusion comme dans certains livres, qui cachent parfois trop les dessins. Dans cette BD, les bulles sont suffisantes pour comprendre l’histoire et l’état d’esprit des personnages.

Mais ce sont surtout pour moi les planches qui m’ont attiré l’oeil.

Elles ne se limitent pas à plusieurs vignettes. Parfois le sublime dessin est fait sur toute une page, parfois même sur une double page.

Il représente de fabuleux paysages ou tout un village en plongée, un jour de marché avec plein de petits personnages dessinés avec précision, qui s’affairent dans les rues.

C’est beau ! C’est gigantesque !

Quel travail ! Mais quel énorme travail !



Que dire aussi du sublime coloriage qui met en valeur tous les dessins de cette BD. Dans laquelle on voit un cheval en pleine course qui ressemble à un cheval, ou une maison du Moyen-âge qui ressemble à une maison de cette époque.

*



Félicitations à Joran Treguier et à Claire Courrier, qui ont aidé à la mise en couleurs avec un très savant mélange de nuances et contrastes.

J’ai admiré des pages entières sur fond noir où les forêts, les feuillages et les personnages sont coloriés rien qu’en rouge, jaune d’or et orange. Ce qui donne une ambiance enflammée aux planches et à l’histoire.

Et puis il y a aussi ces couleurs plus douces mais aussi jolies, dans les tons pastel d’un dégradé de vert jusqu’au jaune clair, avec des personnages et leurs montures en couleur beige ou d’un brun plus sombre.

Avec encore des paysages qui s’étendent à perte de vue sous un ciel bleu délavé. Ce qui donne encore plus de douceur aux dessins.

*



Avis à tous les admirateurs de BD avec des dessins aux couleurs chatoyantes

Et si vous n’êtes pas convaincu de la beauté de cette BD, jetez un œil sur la première couverture pour juger du talent de Cyril Petrosa.

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L'âge d'or, tome 2

Bien décidée à reprendre son pouvoir à l'usurpateur, Tilda et ses troupes encerclent et attaquent le château.

C'est donc sur et siège et l'assaut que se concentre pour ainsi dire toute la bande dessinée. Les planches sont très visuelles et dynamiques et jouent sur les contrastes intérieurs/ extérieurs, isolés/ exposés pour illustrer la fable des puissants et des petites gens - sur ce point, on peut dire que j'ai préféré ce tome au précédent. Qu'ils soient tyrans ou mû par un idéal chacun est dans sa bulle, seuls certains soldats se voient tomber.



Sans l'effet du surprise du premier tome, on peut dire que j'ai été un peu moins emballée par cette lecture qui n'en reste pas moins une fable intéressante sur la quête de pouvoir et le Temps.
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Trois ombres

Celle-ci, ça fait longtemps qu'elle attend dans ma PAL.

Comme souvent avec moi, j'hésite à la lire, pressentant le coup de coeur mais craignant d'être déçue ou, au contraire, de tellement aimer que je regretterai un peu de ne plus pouvoir le découvrir.

Et bien, j'ai beaucoup beaucoup aimé et, oui, je regrette de ne plus pouvoir la découvrir...

C'est une histoire qui commence par une sorte de paradis sur terre. Une petite famille qui vit heureuse, loin de tout, se suffisant du bonheur d'être ensemble, du peu qu'ils possèdent et de ce que la vie leur offre au quotidien. Jusqu'à ce que, un jour comme un autre, trois silhouettes apparaissent sur la colline. Trois ombres qu'on ne peut atteindre et dont le but devient vite évident. Le narrateur, le père, refuse de se soumettre à ce que la mère a accepté et il décide de fuir. De plus en plus vite, de plus en plus loin, afin de leur échapper...

C'est beau, c'est triste et ça nous encourage à une vraie réflexion.

J'ai couru avec les personnages, j'ai pleuré, j'ai espéré, j'ai compris...

Une fois la dernière page tournée, j'ai pleuré encore.
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Trois ombres

Joaquim vit joyeusement avec ses parents dans les collines. Mais un jour, trois ombres surgissent à l’horizon. Qui sont-elles ? Que veulent-elles ? La petite famille devient craintive et se demande quoi faire pour échapper à celles-ci.

C’est la première fois que je lis le bédéiste Pedrosa, les dessins sont particuliers mais les traits sont doux et je bien ressenti les émotions que cette histoire, ce conte, faisait passer. Une vie joyeuse, loin de tout et les ombres qui effacent soudainement cette gaieté. J’ai trouvé le déroulement un peu long, les personnages très mystérieux (trop ?). J’ai refermé cette BD, vraiment émue en songeant au message qu’elle fait passer.

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L'âge d'or, tome 1

C'est en parcourant la liste du challenge BD que j'ai découvert L'âge d'or et que je me suis fait un plaisir de l'offrir à mon papa pour Noël. Bien évidemment, j'ai doublé le plaisir en lui empruntant dès sa lecture achevée ;-)



J'ai beaucoup aimé ce premier tome et je suis impatiente de découvrir la suite.

L'histoire est classique mais rondement menée et elle recèle son lot de rebondissements (surtout la fin !).



Ce qui est le plus surprenant, c'est le dessin. Il est sobre mais les couleurs sont flamboyantes. On en prend plein la vue. On se retrouve avec des doubles pages chatoyantes qui font office de case. C'est impressionnant.



Cet âge d'or est une belle découverte que je vous recommande chaudement !



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L'âge d'or, tome 1

Ce tome est le premier d'un diptyque qui forme une histoire complète et indépendante de toute autre. La première édition date de 2018. L'histoire a été coécrite par Cyril Pedrosa & Roxanne Moreil et mise en images par Pedrosa. Il s'agit d'une bande dessinée en couleurs comprenant 224 planches.



Dans le bois d'Armand, des nobles avec leurs serviteurs se livrent à une chasse à courre, les chiens pourchassant le gibier. Un peu à l'écart de la progression de la meute, trois gueux discutent : Poudevigne (le gros), Languille (le grand maigre), Petit Paul le bossu. Ils évoquent ce qui est arrivé au père Mathurin qui avait récupéré le cadavre encore frais d'une biche dans un fossé. Il l'avait faite préparer par sa femme, mais Ancelin, l'intendant du château, était arrivé alors qu'ils s'apprêtaient à la manger. Ils estiment qu'il n'est pas juste qu'ils ne puissent pas eux aussi manger des parties nobles du gibier. Ils entendent le cor du seigneur d'Alancelle et en déduise que la bête a été mise à mort et qu'ils pourront avoir un peu de tripailles. Ils pensent qu'ils pourraient jouir d'une vie plus douce dans le royaume de la Péninsule. Leur discussion est interrompue par un noble, accompagné de son épouse et de son équipage, qui leur demande comment rejoindre la roue d'Antrevers. Les gueux leur répondent, mais Petit Paul ayant des propos malheureux, la récompense pour cette information leur échappe.



Tous les seigneurs dont la santé le leur permet sont venus au château du roi, pour assister à ses funérailles, et participer à la cérémonie d'intronisation de son successeur. Dans la grande salle, Tankred de Malefort accompagné de l'écuyer Bertil croise Loys de Vaudémont qui le toise avec mépris, et l'asticote pour ses bons sentiments. Dans la salle du pouvoir, Tilda (la princesse) reçoit un seigneur pour régler une affaire d'impôts. Elle ne cache pas son mépris pour cet individu grassouillet, même si sa mère lui fait observer qu'elle n'est pas encore reine. Dans ses appartements, le petit frère de Tilda reçoit des pages qui lui enjoignent de revêtir ses habits de deuil. En se rendant dans ses appartements, Tilda fait un malaise sur le seuil. Elle tombe dans les bras de Tankred. Une fois remise, elle évoque avec lui sa montée sur le trône et le fait qu'elle va recevoir en héritage un royaume en souffrance. Le lendemain elle se rend seul devant la dépouille du roi avant la cérémonie, mais elle est arrêtée par les soldats car le seigneur Loys Vaudémont réalise un coup d'état, en installant le jeune prince sur le trône, avec l'appui de la reine mère. Tilda est condamnée à l'exil sur l'île de Malefosse.



Cyril Pedrosa a acquis sa renommée avec des bandes dessinées intimistes comme Portugal (2011) et Équinoxe (2015). Le lecteur ne s'attend donc pas à ce qu'il réalise un récit de chevalerie dans un moyen-âge de pacotille, sans velléité de reconstitution historique. Dans des interviews, Roxanne Moreil et lui ont déclaré qu'ils souhaitaient raconter une véritable épopée ce qui justifie la pagination abondante, ce tome n'étant que le premier d'un diptyque. Le lecteur découvre effectivement une histoire de succession au sein d'un royaume étendu. Il y a une princesse qui est l'héritière naturelle du trône. D'un côté, c'est l'enfant la plus âgée du roi ; de l'autre côté, la coscénariste souhaitait qu'il y ait des personnages féminins forts. Il croise une princesse, un prince, une reine mère, plusieurs seigneurs régnant sur leur fief, des soldats, des gueux. Il est question d'impôts, de famine, de serfs, de guerre. Les tenues des personnages évoquent une sorte de bas moyen-âge, que ce soit les tenues civiles ou les tenues militaires. L'architecture des constructions (châteaux, maisons, cabanes) reste assez vague, avec une influence hispanisante par endroit.



L'intrigue repose sur une quête claire : Tilda veut retrouver le trésor indiqué par son père. Elle dispose d'une lettre d'un de ses vassaux indiquant qu'il détient une information relative au trésor, dans son fief de la Péninsule. Contrainte et forcée par le coup d'état ayant placé son frère sur le trône, elle se met en marche, secondée par 2 fidèles compagnons : un chevalier ayant été au service de son père, et son écuyer ayant joué enfant avec elle. Comme dans toute quête qui se respecte, il y a des obstacles sur la route, et des épreuves à passer. La particularité réside dans le fait que Tilda n'est pas au meilleur de sa forme, blessée dans sa fuite, et sujette à des visions qui altèrent sa perception et la font défaillir régulièrement. Du coup, les épreuves prennent des formes qui sortent de l'ordinaire : ce n'est pas une épreuve physique (même s'il y a des affrontements à l'épée), ni des épreuves d'intelligence (même si les personnages sont amenés à réfléchir). Les épreuves que doit surmonter Tilda sont d'un autre ordre : elle doit se confronter à des communautés au mode de fonctionnement plus ou moins éloigné de celui du domaine de son père, ainsi qu'à ses visions qui semblent annoncer un futur belliqueux et sanglant.



Dès la couverture, le lecteur se rend compte que la narration visuelle va aussi s'avérer inhabituelle. Il regarde des personnages aux morphologies exagérées, que ce soit la silhouette longiligne de Tilda, la carrure extraordinaire de Tankred, la difformité de Petit Paul, la silhouette décharnée du seigneur Albaret. Quand il observe les visages, il voit des traits simplifiés et des expressions un peu exagérées, que ce soit l'air idiot du bossu, ou les yeux ronds de Bertil. L'artiste peut également exagérer d'autres parties du corps, comme la longueur du nez de Tankred, ou le double menton de Jeanine, la servante du seigneur Albaret. Ainsi le lecteur a parfois l'impression de regarder des personnages de dessin animé pour la jeunesse, avec une influence de l'esthétique des princesses Disney comme la belle au bois dormant. Dans le même temps, il apprécie l'expressivité des visages et se rend compte de l'étendue de la gamme des états d'esprit qu'ils reflètent, et des émotions qu'ils montrent. Le lecteur ne s'attend pas forcément à lire un mépris distancié aussi convaincant sur le visage Loys de Vaudémont, ou une assurance tranquille sur le visage de Tankred de Malefort, ou encore une telle souffrance sur celui de Tilda reflétant de terribles tourments intérieurs.



Le lecteur est encore plus surpris par la mise en couleurs qui peut être intensément flamboyante (pour la chasse à courre), ou étonnamment expressionniste (pour la progression de Tilda sous les eaux). Dans la vidéo promotionnelle de l'ouvrage, le lecteur découvre que Cyril Pedrosa a réalisé ses planches de manière traditionnelle, en détourant les formes par des traits encrés, et en appliquant des aplats de noir. La suite sort de l'ordinaire puisqu'il a numérisé toutes ses planches, et appliqué les aplats de couleurs à l'infographie, en inversant le contraste pour certaines planches, les aplats de noir devenant alors une surface avec une couleur. Le lecteur plonge dans ce qui lui semble être un tourbillon de couleurs souvent pastel, rarement naturalistes. Il est également déstabilisé par le fait que les traits de contours ne sont presque jamais noirs, et souvent de différentes couleurs au sein d'une même case. L'artiste a su ainsi créer une apparence à nulle autre pareille, totalement originale pour une bande dessinée. Cette approche chromatique génère une sensation de lecture à la fois riche et troublante. Le lecteur se retrouve sans cesse à ajuster son état d'esprit, passant d'une scène rouge et orange (la chasse à courre) avec une impression d'incendie, à une scène violette et taupe dans le château (pour une sensation feutrée et vaguement féminine), puis à une séquence très rose dans la chambre de Tilda (alors que son comportement n'est pas celui d'une petite fille féminine). Au fil des séquences, le lecteur éprouve des sensations étranges, suivant que la mise en couleurs est en adéquation avec les couleurs naturelles (vert foncé et bleu foncé dans une clairière la nuit), ou en sans rapport évident (un violet sombre pour des rochers en montagne).



Il faut donc un temps d'adaptation au lecteur pour qu'il se rende compte que derrière ces apparences à l'esthétisme très marqué et très personnel, Cyril Pedrosa réalise des dessins descriptifs avec un fort niveau de détails. Le lecteur peut ainsi prendre le temps de regarder l'ameublement des différentes pièces du château du défunt roi, le détail des bâtiments du domaine d'Abigaëlle, ainsi que son potager, les ouvrages entassés dans la bibliothèque, les ornements du carrosse du jeune roi et de la reine mère, l'architecture de la demeure du seigneur Albaret, ou encore les étonnantes ruines qui abritent le trésor. En découvrant la première scène le lecteur se rend également compte que l'artiste a composé une suite de 3 dessins en double page qui en fait n'en forment qu'un seul sur 6 pages. Il représente un décor en toile de fond sur lequel se déplace les personnages, sans délimitation de case. Sur un unique décor, il représente donc à plusieurs reprises (endroits) les mêmes personnages en train de progresser. Il a indiqué s'être inspiré des peintures de Pieter Brueghel l'Ancien (1525-1569), et en particulier de son tableau Chasseurs dans la neige (1565). En outre la pagination lui permet de développer des scènes à sa guise.



Le lecteur s'immerge donc un conte à la forme baroque, aux côtés de personnages complexes dépassant le clivage bien /mal. En effet, dans la scène introductive de la chasse à courre, la discussion entre les 3 compères comprend une dimension politique affirmée, soulignant que les gueux n'ont droit au mieux qu'aux restes de la classe dirigeante, et encore si les représentants de cette dernière sont dans un bon état d'esprit. La scène suivante avec l'aéropage du seigneur et de sa dame vient enfoncer le clou. La scène mettant face à face Tilda et un seigneur repu explicite la charge que font peser les impôts sur le peuple. La notion de classe fait surface à de nombreuses reprises, faisant apparaître les privilèges des nobles, mais aussi une barrière infranchissable quand Tilda (personne royale) remet à sa place Bertil (simple manant), un moment d'autant plus cruel qu'il n'y a pas d'intention méchante. Petit à petit, l'existence d'un texte décrivant un âge d'or fait progresser l'idée que cette société de classe n'est pas un ordre naturel et qu'il est possible d'imaginer une autre organisation qui a déjà existé par le passé. Il se produit alors un effet des plus déconcertants concernant le personnage de Tilda. Au début du récit, il ne fait nul doute qu'elle en est l'héroïne au sens romanesque du terme. Mais elle incarne aussi une forme de société inégalitaire et oppressive. Il apparaît que le précédent roi est tombé malade juste après avoir été mis en contact avec ce précieux trésor lié à l'âge d'or, comme s'il n'avait pas pu supporter la remise en question de la société de puissants et de serfs, comme s'il avait été contaminé par un virus, celui d'un ordre social plus juste et équitable.



Le portrait de Tilda devient de plus en plus ambigu au fur et à mesure du récit. Elle incarne la domination des nobles sur le peuple, et aussi le principe que sa naissance lui donne le droit de vie et de mort sur ses sujets. Dans le même temps, Tilda ne souhaite qu'améliorer la condition de son peuple, éradiquer la famine, lever des impôts plus justes, ramener une autre forme d'âge d'or. Son corps porte même les stigmates physiques de sa souffrance psychique. Mais c'est au lecteur de se demander si cette souffrance est générée par les épreuves à surmonter pour arriver au trésor qui lui permettra d'entamer la reconquête du trône, ou par l'intuition qu'elle va se retrouver face à un changement de paradigme, par l'incompatibilité entre la royauté et le bonheur de tous. S'il y prête attention, le lecteur constate que le seigneur Albaret porte lui aussi un stigmate révélateur : il est aveugle. Il a régné comme un seigneur éclairé et bienveillant, mais il est resté aveugle aux injustices consubstantielles d'un gouvernement de type royauté.



Cette première moitié de l'âge d'or propose un voyage sortant de l'ordinaire, un conte à la forme à la fois classique et inhabituelle. La mise en images impressionne par son foisonnement, par ses couleurs surprenantes, par sa forme aventureuse, et par sa rigueur et sa précision, ainsi que par les détails concrets. Il s'agit bel et bien d'un conte se déroulant dans un moyen-âge imaginaire, mettant en scène une princesse, son preux chevalier et son écuyer. Il s'agit bien d'un conte avec un deuxième niveau de lecture relatif à la forme d'une société. Dans le même temps, il n'y a pas de héros, même s'il y a des personnages au cœur pur. Il n'y a pas de hauts faits mettant en avant la valeur et le courage de l'héroïne, mais des épreuves plus complexes et moins directes. Roxanne Moreil & Cyril Pedrosa ont réalisé une histoire captivante et envoûtante, au charme esthétique original.
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Auto bio, tome 1

Premier avertissement: si vous avez lu Portugal, ne vous attendez pas à un album de la même qualité graphique!

Deuxième avertissement: si vous ne vous attendez qu'à du tout bio tout bon, ben...

J'avoue, aux premières pages, j'ai eu peur! Cette petite famille qui choisit le meilleur, le bio, l'écolo, le jardin sans pesticides, la piscine naturelle (pleine de bébêtes dégoûtantes) qui tolèrent le proprio trop gentil mais aussi trop "pesticides", l'école du grand à la Freynet-Montessori... il y a de quoi énerver, rendre jaloux, et puis dans une bande dessinée Fluide Glacial, c'est trop joli! Finalement, Cyril Pedrosa reconnaît que le tout bio tout écolo n'est pas toujours facile à respecter ni à revendiquer. Le voilà à devoir expliquer devant la classe de ses enfants la reproduction des méduses, à se priver de fromage de vache et pire, à cuisiner à la vapeur (heureusement, les saucisses cocktail cuisent à la vapeur... non?).

Mais, derrière cet humour et les questions qu'il se pose, l'ironie qu'il met derrière ses diverses déconvenues, il y a un message assez nouveau dans la BD sur l'écologie à l'échelle quotidienne et familiale à laquelle j'adhère tout-à-fait. Je suis passée par nombre de ses tentatives, je ne suis pas d'accord avec toutes ses conclusions, mais cette BD est tout-à-fait dans l'air du temps.

Et c'est tant mieux!!

Ah oui, un détail que j'aime: le décalage entre ses propos et la réalité des faits. Mais je vous laisse le lire pour le découvrir.
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Sérum

Paris, 2050. La population est sous sérum de vérité, même les politicards ! Imaginez ce monde où personne ne peut mentir… Kader, vit seul et déprimé, n’attendant que les visites de sa femme et de sa fille. Je n’ai pas bien saisi l'histoire ni le message qui passait pour cette BD où j’ai admiré le graphisme au peu de texte.
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Sérum

En 2056, dans un environnement entre Matrix et le meilleur des mondes, Kader se traîne, morose, car depuis qu'on lui a injecté un sérum qui l'oblige à dire la vérité, sa vie a totalement basculée.



Graphiquement, le découpage est très visuel et développe l'intrigue de manière très intéressante. On croise de nombreuses références culturelles, litéraires et cinématrographiques principalement. Mais j'ai trouvé les dialogues trop peu travaillés, trop lents, ce qui donnait une impression de déjà vu.



Dommage.
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L'atelier Mastodonte, tome 1

J'ai aimé les dessins de cette bande dessinée et surtout le fait que les planches proviennent de différents auteurs, cependant je doit avouer qu'en tant que novice de la bande dessinée j'ai du passer à côté de certaines choses.



Je suis heureuse en tout cas d'avoir pu voir les dessins d'auteurs jusqu'alors inconnu à mes yeux et j'ai passé un bon moment de détente. Le plus de cette bande dessinée les auteurs se répondant les uns aux autres en dessins.
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