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Critiques de Eduardo Halfon (112)
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Canción

Halfon est de la lignee de Modiano. Non qu'il raconte toujours la meme histoire, mais que chacun de ses livres devoile une nouvelle facette d'une histoire qui s'etire et s'etire et devient oeuvre. Une oeuvre ou des biographies romancees de ses parents et ses ancetres cotoient son autobiographie romancee ou revee, s'attachent aux confidences que lui font nombre de personnes rencontrees par hasard, comme si ce juif a tete de rabbin defroque se coltinait partout un confessionnal portatif, a l'isoloir transparent, s'entremelent aux derives de l'histoire avec un petit h de differents pays, de differentes regions, pour aboutir a questionner sans cesse son identite. Ou ses identites. Comment commence ce livre? “J'arrivai au Japon deguise en arabe". Et plus loin: “J'etais au Japon pour participer a un congres d'ecrivains libanais. En recevant l'invitation quelques semaines plus tot, apres l'avoir lue et relue pour etre bien certain qu'il ne s'agissait pas d'une erreur ou d'une plaisanterie, j'avais ouvert l'armoire et y avais trouvé le deguisement libanais – parmi tant d'autres deguisements – herite de mon grand-pere paternel, natif de Beyrouth. Je n'etais encore jamais alle au Japon. Et on ne m'avait encore jamais demande d'etre un ecrivain libanais. Un ecrivain juif, oui. Un ecrivain guatemalteque, bien sur. Un ecrivain latino-americain, evidemment. Un ecrivain d'Amerique centrale, de moins en moins. Un ecrivain des Etats-Unis, de plus en plus. Un ecrivain espagnol, quand il etait preferable de voyager avec ce passeport-la. Un ecrivain polonais, une fois, dans une librairie de Barcelone qui tenait – tient – absolument a classer mes livres dans le rayon devolu a la litterature polonaise. Un ecrivain francais, depuis que j'ai vecu un temps a Paris et que certains supposent que j'y vis encore. Tous ces deguisements, je les garde a portee de main, bien repasses et pendus dans l'armoire. Mais personne ne m'avait jamais invite a participer a quoi que ce soit en tant qu'ecrivain libanais”.



Halfon part donc au Japon. Pour quoi faire? Pour y rencontrer des ecrivains qui l'injurient, en un arabe qu'il ne comprend pas, en tant que juif captieux essayant de miner un colloque d'intellectuels libanais. Pour y croiser une jeune femme qui lui transmettra Hiroshima. Pour y raconter le periple de vie de son grand-pere, installe au Guatemala apres avoir fui le Liban et passe quelques periodes en Corse, a Paris et a New York. Pour essayer de se representer le kidnappage de ce grand-pere par la guerilla guatemalteque et ainsi de decoder un tant soit peu l'histoire de ce pays. La violente, calamiteuse, histoire de ce pays, que le grand-pere (qui s'appelle aussi Eduardo Halfon) resume par: “le Guatemala est un pays surrealiste". le jeune Eduardo, ou l'auteur, est quant a lui plein de commiseration, pour tous ses habitants, de tous bords, tous etant, citant Baudelaire, “alternativement victime et bourreau". Et le recit de ce voyage au Japon est entrecoupe de souvenirs d'enfance, et de rencontres, a Paris avec un archiviste consciencieux, a Guatemala-City avec d'anciens guerilleros.



Tellement d'histoires en si peu de pages! Des histoires qui vont dans tous les sens, pour aboutir a plus de questions que de reponses, pour dessiner la carte, forcement imprecise, d'une identite; pour tracer le cheminement de l'auteur dans sa quete, les differentes directions ou il semble se perdre. Mais est-ce vraiment Halfon qui se cherche, ou tout n'est que fiction? Est-ce qu'il s'invente une ascendance, un passe, une histoire? Pour le lecteur que je suis si c'est fiable ou pas n'a aucune importance, ses parcours, ses affabulations, m'interpellent et la sauce a laquelle il accomode tout cela m'est gouteuse. Son ecriture est addictive et je suis devenu accro. Il donne l'impression de ne jamais arriver nulle part? Pas grave, je partirai toujours en voyage avec lui.

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Deuils

Rapide roman (ou récit), aux contours évanescents d'une mémoire à revisiter pour construire son identité familiale, où l'on est embarqué dans une prose délicate et douce, à la recherche de la vérité sur cet oncle Salomon que l'auteur a longtemps cru noyé au fond du lac Amatitlàn dès l'âge de cinq ans. C'est poétique et méticuleux, le passé chaotique de la famille nous fait voyager de Pologne au Guatemala en passant par les Etats-Unis, la France et j'en oublie. Le puzzle se dessine au fil de chapitres courts, mêlant les époques, les souvenirs et l'enquête en cours.

Ça m'a beaucoup plu. J'ai d'abord cru flotter au dessus de cette histoire en l'effleurant à peine (peut-être que les vapeurs de fête m'y ont aidé) et puis peu à peu je m'y suis immergé, pour finir complètement envoûté.
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Clases de chapin

Clases de chapin. Lu en v.o. Pas encore traduit en francais.



Chapin est une sorte de sandale ou espadrille a haut talon, traditionnelle du Guatemala. Par extension, c'est le surnom dont on affuble les guatemalteques.



Les courtes nouvelles assemblees ici, ecrites a differentes periodes, auront presque toutes pour cadre le Guatemala, le pays ou Halfon est ne, le pays ou ses ancetres ont trouve refuge, le pays qu'il n'arrete pas de fuir sans jamais reussir a s'en debarasser. le titre choisi, qui en francais peut etre traduit et compris differemment, ou “Classes (= Lecons) de guatemalteque” ou “Sortes de guatemalteque”, signale le regard qu'il porte, de loin, sur son ancienne patrie, sur son enfance, sur son identite. Ainsi le livre sera divise en trois sections: “Classes de machette", “Classes de dessin", “Classes d'hebreu”.





Deja dans “Cancion” il rapportait les mots de son grand-pere: “le Guatemala est un pays surrealiste”. Dans ces nouvelles c'est un pays effarant. La violence est partout, toujours presente. Les nouvelles commencent en des circonstances anodines mais, a part une qui est carrement tragique, leur fin, ouverte, laisse le lecteur prevoir l'explosion, imminente ou retardee. On a la vision d'une societe ou les enfants, loin d'etre proteges, sont vulnerables, permeables a toute agression, entoures d'une violence latente, silencieuse mais toujours presente, qui impregne toute ambiance, qui les rend eux aussi violents, meme les petits enfants juifs surproteges par leurs parents (comme l'etait le petit Eduardo).



La violence est plus suggeree qu'explicite dans certaines nouvelles, qui, rapportant des souvenirs d'enfance, refletent la confusion et le desarroi dans lesquels se deroule cette enfance. Mais peut-on avoir une vision innocente de la violence?



Quand il met en scene sa judeite c'est encore une fois la confusion qui domine son rapport. Et il s'en degage une impression de tristesse. Sa judeite le poursuit, elle est importante pour lui, mais elle le stresse.





En fait c'est la lecture de ce recueil qui est stressante. Hypnotique et stressante. En quelques fragments minimalistes, a la fin ouverte, ecrits en un style apparemment doux, en un langage precis et paisible, Halfon decrit des univers inquietants. Comme toujours chez Halfon, ces fragments dialoguent avec ses autres livres, les eclairent ou les embrouillent, echafaudant une oeuvre ou il brasse essai, chronique, et fausse autobiographie. Une oeuvre que je trouve passionnante. Et ce recueil est pour moi son echantillon le plus triste. Stressant. Il se lit en une heure. Il est, en une heure, une heure seulement, en une heure, rien qu'une heure durant, beau, beau, beau et triste a la fois.

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Canción

Un écrivain guatémaltèque , Eduardo Halfon , est invité à un colloque d'auteurs libanais au Japon. L'occasion pour lui de revenir sur l'histoire de sa famille et notamment de son grand père né à Beyrouth, et kidnappé lors de la guerre civile qui secoua le Guatemala à partir des années 60.



Un roman court mais exigeant tellement l'auteur mélange les époques, les personnages . Pour autant, le lecteur lui n'est pas perdu et s’accroche aux phrases avec beaucoup de plaisir , la qualité de la plume n'y étant sans doute pas étrangère.

Le grand père kidnappé , c'est l'histoire dans l'Histoire de ce petit pays où là aussi les USA sont venus foutre le bordel, ce coup ci au prétexte d'aider une compagnie productrice de fruits dont les terres en jachère depuis des années venaient d'être redistribuées.



On dégage un démocrate , on met un tyran au pouvoir et c'est le bazar pour des décennies .



Et Cancion alors , c'est quoi donc ? C'est un personnage du livre , sorte de fil rouge entre ce qui semble être différentes histoires . Un champion lui aussi.

Un bon moment de lecture avec ce qu'il faut de dépaysement, de qualité de plume et d’intérêt de l’histoire.
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Signor Hoffman

L'ouvrage porte le titre de la première nouvelle : Hoffman est un écrivain invité pour intervenir dans le cadre de la semaine de manifestation pour la journée de la mémoire de l'holocauste « célébrée » tous les 27 janvier en Italie.

La conférence a lieu à l'intérieur de ce que le narrateur croit être un ancien camp de concentration. Mais, comme toujours, la réalité est tout autre : bien plus complexe et incertaine.

Dans Bambou c'est une atmosphère étouffante : une paillote dans le port d'Iztapa, les bords de l'océan pacifique. L'aridité et la pauvreté guatémaltèque.

Une plantation de caféiers, la frontière du Belize, l'histoire de son grand-père, rescapé de l'Holocauste, qui a ensuite immigré aux Etats-Unis : ce recueil de nouvelles rassemble des évocations de voyages, de misères mais aussi de possibilités de rédemption et de survie.

C'est dans un style très resserré, intime dans l'humain, que l'auteur nous fait ressentir ses doutes et ses angoisses face au monde.

Un très beau livre. A lire et à relire.
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Canción

«  Peu importait désormais ce que je racontais sur mon grand- Père maternel était vrai ou même pertinent , la seule chose qui importait , c’était de parler de lui sans m’arrêter . »



«  Nul n’ignore que le Guatemala est un pays surréaliste » .



Deux extraits significatifs de ce court roman autobiographique qui pourrait ressembler à ceux de Modiano——revenir indéfiniment sur son histoire familiale——-sauf que beaucoup de points resteront en pointillé , l’auteur brouille les pistes en nous invitant dans les méandres mouvementés de son histoire familiale , la mêlant avec humour et talent au récit national….



Il suit les traces de son grand- Père immigré, un commerçant juif’,qui se disait libanais mais qui ne l’était pas, «  enfin pas exactement » au Guatemala , autoritaire , à la voix puissante, mixée d’un fort accent arabe ,un diamant étincelant au doigt.

Ce personnage de roman régnait sur son alcazar jusqu’à son enlèvement un matin froid de janvier 1967, où il est kidnappé par un certain Canción, qui donne son titre au livre, un guérillero au visage d’enfant mais au cœur sanguinaire , de petite taille.

Il s’’exprimait sous forme de phrases courtes , cryptiques , sibyllines , poétiques presque…

Le grand-père , né dans une famille juive au Liban , alors sous domination syrienne , fuit le pays en 1917 au plus fort de la Grande Famine du Mont- Liban ,habite un temps à New- York, Haïti puis Paris avant le Guatemala …



Lors de l’enlèvement , ce pays est alors en pleine guerre civile ,,écartelé entre les Forces Armées Rebelles et les dictateurs qui se succèdent , à sa tête , sous la coupe des États - Unis.



La prose est teintée d’ironie et d’humour, l’auteur nous convie dans différents points du globe de Tokyo , où l’auteur narrateur est convié à un colloque en tant qu’écrivain libanais ,,il nous conte l’aventure de ses ancêtres de Beyrouth à Guatemala - Cuedad , en passant par Ajaccio, New- York, Haïti , Le Pérou , au Mexique puis Paris …



Vous l’aurez compris , difficile de ne pas lire ce livre d’une traite , sinon on perd le fil , à cause des différents espaces temporels, du cheminement de pensées , de l’embrouillamini de la mémoire familiale, des conversations , de la transmission de la mémoire , au rythme effréné , du fait de passer d’une histoire à une autre , une musique des mots où l’auteur ne cesse d’interroger une histoire récente complexe et brutale de son pays …..explore avec fièvre les rouages de l’identité .

Un livre foisonnant entrelaçant autobiographie et fiction , agréable à lire , étonnant et déroutant mais très difficile à décrypter.

Un auteur que je ne connaissais pas .

Je pense à découvrir ses autres œuvres .

Publié au Quai Voltaire traduit de l’espagnol par David Fauquemberg.
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Canción

Le Guatemala, pays surréaliste



Eduardo Halfon brouille les pistes avec un art consommé. Croyant partir avec son narrateur-auteur à la découverte du Japon, on se trouve aux prises avec la Guerre civile du Guatemala, qui a bien secoué son arbre généalogique.



Habile à brouiller les pistes, Eduardo Halfon nous convie tour à tour dans différents points du globe en ouverture de ce roman étonnant à plus d’un titre. Après Tokyo, où l’écrivain-narrateur est convié à un colloque en tant qu’écrivain libanais, il va nous raconter les pérégrinations de ses ancêtres de Beyrouth à Guatemala Ciudad, en passant par Ajaccio, New York, Haïti, le Pérou, Paris et le Mexique. Ces jalons dans la vie du narrateur et de sa famille lui permet d’endosser bien des costumes. Celui qu'il étrenne à Tokyo étant tout neuf. Invité comme «écrivain libanais», il lui faudra toutefois remonter jusqu'à son grand-père pour offrir semblant de légitimité à cette appellation d’origine. Car ce dernier avait quitté le pays du cèdre depuis fort longtemps – il est du reste syrien – et s'était retrouvé au Guatemala où il avait fait construire une grande villa pour toute la famille.

C'est dans ce pays d'Amérique centrale, secoué de fortes tensions politiques, que nous allons faire la connaissance de Canción, le personnage qui donne son nom au titre du roman. Il s’agit de l’un des meneurs de la guérilla qui combat le pouvoir – corrompu – alors en place. En janvier 1967, avec son groupe, il décide d’enlever le grand-père du narrateur en pleine rue, au moment où il sort de la banque où il a retiré l'argent pour payer les maçons qu’il emploie. Canción va négocier le versement d’une rançon et se spécialiser dans ce type d’opérations, passant à la postérité pour la tentative avortée d’enlèvement de l'ambassadeur américain, John Gordon Mein. Car le diplomate tente de s’enfuir et est alors «aussitôt mitraillé par les guérilleros. Huit blessures par balles dans le dos, détaillerait le juge après l’autopsie.» C'est alors que Canción gagne son surnom: le Boucher (El Carnicero).

Avec humour et ironie, Eduardo Halfon montre que durant toutes ces années de guerre civile, il est bien difficile de juger où est le bien et le mal, chacune des parties comptant ses bons et ses mauvais éléments. Si l’on trouve légitime de s’élever contre un pouvoir corrompu, soutenu par les Américains et leur United Fruit Company, pratiquement propriétaire de tout le pays, on peut aussi se mettre à la place de cette famille qui a immigré là pour fuir d’autres conflits et se retrouve, bien malgré elle, au cœur d’un autre conflit. D’autant qu’elle va se retrouver accusée par le pouvoir d’avoir financé les forces armées rebelles en payant la rançon. Pour appuyer cette confusion, l’auteur n’hésite pas à passer, au fil des courts chapitres, dans une temporalité différente. De Tokyo à la guerre civile et à une conversation dans un bar où l’on évoque les chapitres marquants de l’épopée familiale. Le fait que le grand-père et son petit-fils s’appellent tous deux Eduardo Halfon n’arrangeant pas les choses! On file en Pologne pour parler des origines juives, puis au Moyen-Orient qui ne sera pas un refuge sûr avant d’arriver dans un pays «surréaliste», le Guatemala. Il est vrai qu’entre coups d’État, dictature, guérilla, ingérence américaine et criminalité galopante, enlèvements et assassinats, cette guerre civile qui va durer plus de quarante ans offre un terreau que le romancier exploite avec bonheur, tout en grimpant dans les arbres de son arbre généalogique à la recherche d’une identité introuvable.

Le tout servi par un style foisonnant, échevelé qui se moque de la logique pour passer d’une histoire à l’autre et donner une musicalité, un rythme effréné à ce roman où il sera même question d’amour. Voilà une nouvelle version de la sarabande d’Éros et Thanatos, luxuriante et endiablée.




Lien : https://collectiondelivres.w..
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Monastère

Eduardo et son frère arrivent à Tel Aviv pour assister au mariage de leur sœur avec un orthodoxe. Cette confrontation de deux mondes et deux visions si loin de lui et les retrouvailles avec un ancien flirt rencontré quelques années plus tôt vont bouleversé le narrateur/auteur dans sa perception de lui-même et de son histoire familiale. A partir de cet instant, l'auteur se souvient. L'histoire de ce voyage devient alors une errance spirituelle et existentialiste pour le narrateur, un constat un peu amer de son expérience de ce qu'est l'humanité.

Le mariage de la sœur passe donc très vite à la trappe, et c'est bien dommage car ce point aurait pu être développé - pour avoir LA cinquième étoile - mais malgré ça.... Pour un roman que j'ai trouvé par hasard, cette lecture a été une sacrée surprise, un choc même.



C'est un roman qui m'a émue par sa simplicité, mais pas seulement, en réalité ce que j'ai éprouvé est difficilement descriptible. On sent que l'auteur a mis son cœur au bout de sa plume pour écrire cette histoire.



Certes, on ne peut pas dire que ce soit un chef d’œuvre d'écriture, mais qu'importe. Ce roman s'apparente plutôt à un instant volé, comme une conversation avec un inconnu à l'aéroport avec qui on discute entre deux avions.

Les thèmes qui sont abordés, bien qu'ils soient assez marqués culturellement restent tout de même universels , car l'auteur parvient à nous toucher au plus profond avec ses réflexions sur le fait de trouver sa place avec ou malgré son héritage familial. Grâce à ses anecdotes de voyages en Pologne, en Israël ou au Guatemala, il parvient à toucher du doigt ce qui peut rapprocher et éloigner les individus.



Une très belle découverte et j'ai vraiment hâte de découvrir d'autres livres d'Eduardo Halfon tant je me suis sentie proche de cette histoire.
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Halfon, Boy

Ma femme a ramené il y a quelques mois (avant le confinement) ce tout petit livre, trouvé dans une petite (et poussiéreuse, c'est elle qui le dit) librairie parisienne. Elle me l'avait tendu à son retour en me disant "Ça se lit vite fait, je l'ai lu dans le train. Tu peux lire, ça te concerne". Le livre voyageait depuis ce moment là entre les bibliothèques et les différentes piles de livres de la maison. Tellement court qu'on se dit qu'on aura toujours le temps de le lire... plus tard.



En le trouvant juste à côté de mon ordinateur hier, je me suis dit que le livre cherchait à parvenir à son destinataire... ou que ma femme l'avait innocemment remis sous mes yeux, on ne saura jamais.



L'auteur y raconte son expérience de père en gestation en même temps que la grossesse de son épouse. Père depuis peu - un an et demi, c'est peu ou c'est déjà beaucoup ? On perd le sens de la durée en devenant parent en fait - le livre a forcément eu des échos particuliers en moi. le parallèle que l'auteur trace entre le fait de devenir père et la traduction de texte peut paraître au premier abord incongru. Mais, est-ce parce que quand on rapproche deux choses on finit toujours pas trouver des liens particuliers... toujours est-il que les images sont saisissantes de justesse.



Avoir un enfant, n'est-ce pas essayer de se traduire au monde ? Ne devenons-nous pas pour lui les traducteurs de ce monde nouveau qu'il va découvrir par les mots que nous lui fourniront pour l'appréhender ? Et le choix de son prénom, n'est-ce pas un moyen en retour de le traduire lui à ce nouveau monde, pour qu'il l'accepte en le nommant, en l'incorporant ?



Nous plonger dans des réflexions philosophico-littéraires d'une telle tenue en quelques pages, c'est une prouesse assez magique. Et donner dans le même temps à la fois envie de découvrir le reste de l'oeuvre d'Eduardo Halfon mais aussi la poésie de William Williams qu'il s'évertue à traduire pendant que son fils pousse dans le ventre de sa mère, c'est un tour de force non moins réussi.



Une riche idée en tout cas qu'ont eu les Editions de la Table Ronde que ce format de la collection la nonpareille, de livres très courts qui permettent d'emporter partout avec soi des petits bouts de littérature, des petits bouts de rêves qui nous parlent en plus ici de nos petits bouts à nous.





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Monastère

L’auteur, Eduardo Halfon, est né au Guatemala et a passé sa jeunesse aux Etats-Unis.

« Monastère » est un beau roman court et prenant , très autobiographique.

Le héros arrive à Tel-Aviv en compagnie de son frère.

Ils vont assister au mariage de leur sœur avec un jeune Juif hassidique de Brooklyn.

Ce sera l’occasion pour Eduardo de retrouver une jeune femme, Tamara, qu’il avait rencontrée au Guatemala.

Avec elle il va faire une excursion sur les bords de la Mer Morte.

Ce sera pour lui un parcours qui lui permettra de se questionner sur ses origines juives et lui permettra d’affronter les « fantômes » de son histoire familiale.

Un beau livre très sensible, j’ai regretté quelques longueurs mais c’est un livre à relire, qui demande de s’imprégner de l’atmosphère particulière.

A lire et à relire…

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Le boxeur polonais

Le boxeur polonais est un recueil de deux nouvelles : Le boxeur polonais et Allocation de Povoa.



Plus que des nouvelles, ce sont presque des chroniques.



La première raconte les souvenirs qu'a l'auteur de son grand-père polonais, déporté pendant la Seconde Guerre mondiale. Et surtout, le motif entêtant de cette nouvelle (comme dans Monastère) , c'est le tatouage. Tatouage qu'il a longtemps prétendu être son numéro de téléphone.

Quant à la seconde nouvelle/chronique, Eduardo Halfon parle d'une conférence qu'il a dû préparer sur un thème qui l'a complètement désemparé : le lien entre la littérature et le réel. Tout un programme...



Après la lecture de Monastère qui m'avait fortement intriguée, j'étais très pressée de lire Le boxeur polonais, livre que l'auteur qualifie lui-même de "clé" dans son œuvre qui permet de comprendre ses autres récits.

Sans être déçue, j'avoue que je m'attendais à autre chose. La première nouvelle n'est qu'un exemple du fait que la vie au camp d'Auschwitz tenait à bien peu de choses. Pas une nouveauté en soi. La pudeur et l'effroi du grand-père concernant cette période de sa vie ne sont pas percées à jour.

La seconde nouvelle complète, d'une certaine manière, la première avec un constat plus "scientifique" que la littérature ne peut être en aucun cas le reflet du réel, car elle ne peut refléter que la subjectivité (ou la "réalité" perçue) de son auteur. Mais finalement est-ce le but recherché ? Non. La littérature est un témoin qui nous permet de nous souvenir (et ce constat vaut pour l'auteur comme pour le lecteur) , et c'est déjà bien.



Un recueil ni passionnant ni vraiment indispensable.
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Monastère

Frustrant





J'ai lu Eduardo Halfon pour la première fois en février avec son roman Canción que j'avais découvert à l'occasion d'une opération Masse Critique. J'avais beaucoup aimé le style de l'auteur guatémaltèque même si j'avais eu plus de réserves sur le fond. Quoi qu'il en soit je voulais retenter l'expérience avec cet écrivain sur un autre de ses livres et j'en suis venu à Monastère.





Le décor est planté dès les premières lignes : Eduardo Halfon arrive en trainant les pieds à l'aéroport de Tel Aviv pour assister au mariage de sa soeur promise à un juif américain ultra-orthodoxe. On croit partir à la découverte du milieu intriguant des haredims mais le narrateur s'en échappera bien vite avec la complicité d'une ancienne amie, la spontanée et sensuelle Tamara, qui le détourne de ses obligations familiales pour un court périple vers la Mer Morte. On pourrait se croire, cette fois, fixé mais le narrateur s'échappe encore et au travers de ses souvenirs nous revenons au Guatemala et assistons à l'agonie de son grand-père, ancien rescapé d'Auschwitz, puis à un voyage au coeur du pays natal de ce dernier, la Pologne. On tourne les pages au gré des souvenirs et anecdotes de l'auteur, toujours en quête de son identité, espérant que certains des points évoqués dans le roman seront creusés... Et bien non, c'est déjà la fin !





J'ai beaucoup apprécié le style de l'auteur qui a décidément une plume remarquable ainsi que l'autodérision mordante dont il fait preuve à son propre égard. Ces deux points rendent la lecture fort agréable et Halfon mélange habilement des scènes assez drôles avec d'autres plus touchantes. Oui mais... d'une part, je suis resté assez plutôt indifférent à la quête d'identité de l'auteur (d'autres y seront sans doute plus sensibles, c'est en tous cas l'enjeu qui semble relier tous ses livres), d'autre part et c'est pour moi le principal défaut du livre, Eduardo Halfon aborde une foule de thèmes intéressants qui mettent en haleine le lecteur mais s'esquive à chaque fois. Ce faisant, j'ai l'impression que l'on ne fait qu'effleurer beaucoup de sujets sans jamais s'attarder et creuser l'un d'entre eux.





Je ressors de cette lecture avec un sentiment de déception, le livre m'a fait penser à ces restaurants qui vous servent des mets délicieux mais qui ne vous rassasient pas pour autant. Je reste sur ma faim.

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Deuils

Vu de France, l'Amérique centrale est une entité territoriale qui a du mal à exister et combien de fois peut-on lire à tort que le Mexique, le Nicaragua ou le Honduras sont des pays d'Amérique du Sud. La littérature de ces pays est vivante mais ne nous parvient qu'épisodiquement, il faut donc savourer les quelques auteurs qui ont la chance d'être traduits régulièrement. C'est le cas du guatémaltèque Eduardo Halfon, dont les courts romans sont publiés dans l'élégante maison Quai Voltaire. Deuils, le plus récent, est écrit sous le mode de l'autofiction, genre un peu trop répandu surtout quand il s'apparente au narcissisme, défaut qui ne semble pas affliger Halfon. A travers le fantôme du frère aîné de son père, mort avant d'atteindre l'âge adulte, l'auteur entreprend une sorte de quête identitaire et nostalgique qui nous transporte dans l'histoire d'une famille juive guatémaltèque, en passant par la Pologne et les Etats-Unis. Comment est mort cet oncle que tout le monde a oublié ? Le mystère s'épaissit à mesure que Halfon convoque ses souvenirs et enquête sur différents lieux, égrenant les rencontres dans une prose chamarrée où l'humour et la poésie sont le contrepoint de la douleur. Un livre dont l'apparente simplicité dissimule une belle profondeur dessinée par la mémoire et le langage.
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
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Deuils

Depuis quelques années, des avis enthousiastes m’avaient fait noter le nom d’Eduardo Halfon, et voilà enfin que je me lance, avec un tout petit livre qui sera sans doute suivi d’autres. L’auteur y revient avec urgence et intensité sur un souvenir qui a marqué son enfance : on lui a (ou on lui aurait) raconté que Salomon, un des frères de son père, s’était noyé dans le lac Amatitlàn, tout proche de la maison de ses grands-parents. Eduardo Halfon retourne sur les bords de ce lac, interroge des riverains pour essayer d’en savoir plus sur cet accident dont on ne parlait pas dans sa famille. Il va faire alors des découvertes surprenantes.



Dès le début, j’ai été séduite, et n’ai pas ressenti le besoin de noter des citations, ou alors j’aurais été obligée de noter plusieurs citations dans chaque paragraphe, tellement tout me parlait. Dans la veine de l’introspection intime et familiale, Eduardo Halfon fait très fort avec une belle économie de mots, assortie de détails qui sonnent toujours très justes. À chaque chapitre, une histoire peut en cacher une autre, et c’est passionnant. L’écriture sobre n’empêche pas le lecteur de s’identifier parfois, de compatir souvent, de s’amuser à certains moments de ces confrontations entre les souvenirs d’enfance et les ressentis d’adulte. À noter le beau travail de traduction qui se fait tout discret au service du texte.
Lien : https://lettresexpres.wordpr..
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Le boxeur polonais

La nouvelle « le boxeur polonais » c’est une partie de l’histoire de la vie du grand-père d’Eduardo.

Eduardo se souvient des cinq chiffres 69752 tatoué sur l’avant-bras de son grand-père celui-ci prétend que c’est son numéro de téléphone, facile de « tromper « un enfant mais à l’âge adulte son grand-père finit par lui raconter la vraie histoire, l’origine de son tatouage.

S’ensuit la seconde nouvelle « l’allocution de Povoa » l’auteur doit faire une allocution lors d’une conférence sur le thème la Littérature écorche la réalité, cela lui permet de revenir sur l’histoire de son grand-père et de faire une pirouette sur le thème de la conférence, que je ne dévoilerais pas.

Dans une écriture simple, concrète, il manie bien l’art de la litote, un très beau texte, la découverte pour moi d’un auteur.

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Le boxeur polonais

Deux nouvelles qui se répondent.



La première raconte cet enfant admiratif d'un grand-père qui a 5 chiffres tatoués sur sa main et cultive le secret ...pour mieux le révéler.



La seconde ou la suite raconte cet écrivain qui se frotte à la "vérité" quelle est-elle , que dit-elle ...



Une jolie ...mais trop courte lecture qui donne envie de découvrir cet auteur à l'écriture fine et sensible.
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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Canción

Sur invitation, Eduardo Halfon part au Japon pour participer à un congrès d'écrivains libanais auquel il est invité. Ayant trouvé dans une armoire un déguisement hérité de son grand-père paternel natif de Beyrouth, il a décidé d'y participer. Or, non seulement il ne parle pas japonais, il n'est pas libanais, et son grand-père ne l'était pas non plus, car né alors que le territoire était encore syrien. Et c'est ainsi que commence le récit d'Eduardo à la recherche de son histoire familiale ! Histoire très mouvementée et passionnante ! Brièvement, pour ne pas tout dévoiler, son grand père émigré aux Etats Unis, puis au Guatemala fut enlevé par des guérilleros… quelles en furent les raisons ? Entremêlant le passé familial, ses souvenirs du congrès de Tokyo, ses rencontres avec une ancienne guèrillera, il tente de faire revivre le passé. Et il le fait bien, car je l'ai lu presque d'une traite, emportée par son style, déjà apprécié dans la lecture de deux de ses précédents ouvrages. A noter qu'Il a aussi l'avantage d'une très bonne et belle édition, chez Quai Voltaire que je remercie pour cet envoi, ainsi que les organisateurs de "Masse critique"
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Canción

Eduardo Halfon, auteur guatémaltèque nous raconte dans ce court roman l’enlèvement de son grand-père immigré juif libanais au Guatemala en 1967.





Grâce à ce livre, je m'attendais à en apprendre davantage sur l'histoire du Liban et du Guatemala. Autant le dire de suite, cet objectif-là est manqué : Ici on n’apprendra rien sur l'histoire du Liban et bien peu de choses sur celle du Guatemala. L'auteur lui-même avoue avec une certaine auto-dérision être un complet imposteur, un "Libanais" qui n'a jamais mis les pieds au Liban et dont le grand-père a quitté le pays quand la région était encore syrienne. Si la guerre civile au Guatemala est évoquée, c'est presque uniquement par le petit bout de la lorgnette et l'on sent un certain malaise, mélange d'attraction et de répulsion vis à vis des guérilleros marxistes qui furent responsables de l’enlèvement du grand père et dont l'un d'eux, Canción, donne son nom au présent ouvrage. Avant tout, le livre nous parle avec justesse d'histoire familiale et de la quête d'identité de son auteur.





Si l'histoire racontée par le livre ne m'a pas transcendé (c'est sans doute le propre des histoires familiales d’être imprécises, de laisser beaucoup de questions en suspens et de ne pas fournir les rebondissements qu'on attendrait dans un roman fictionnel), j'ai en revanche beaucoup apprécié la très belle prose d'Eduardo Halfon teintée d'un humour discret mais efficace. C'est pour moi, le principal point fort du livre et ce qui en fait une lecture agréable. Ce style fin et l’auto-dérision qui l’accompagne m’ont d’ailleurs rappelé (et ce n’est pas là un mince compliment) l’écriture d’Umberto Eco.





Voilà donc un livre sympathique sans être inoubliable dont, une fois n'est pas coutume, j'ai davantage apprécié la forme que le fond. Un grand merci aux éditions La Table ronde pour ce roman reçu dans le cadre de l’opération Masse Critique.
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Monastère

Peut-on naître juif et ne pas être juif ?

Ce court roman à la première personne fouille les ressorts de l'identité juive. Edouardo est né de parents juifs au Guatemala et visite Israel où il est confronté à l'extrémisme mais aussi à l'angoisse. Si sa vie au Guatemala a quelque peu effacé pratiques et références juives, en Israel tout est là pour lui rappeler d'où il vient.

Il a pourtant déjà exploré le passé familial en Pologne et tenté de comprendre les siens mais il semble être entré dans une sorte de neutralité critique.

Un court roman certes mais qui lance de multiples questionnements sur ce que nous sommes ou sur ce que d'autres veulent que nous demeurions.

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Deuils

L'auteur nous livre dans ce roman une partie de son intimité, de son histoire familiale. Nous le suivons dans sa quête de vérité sur la mort de son oncle Salómon quand il avait cinq ans.



À travers son parcours, nous découvrons les épreuves traversées par les membres de sa famille, notamment ses grands-parents, de la Pologne à la France, aux Etas-Unis et au Guatemala. Sa famille a vécu beaucoup de deuils (d'où le titre), notamment pendant la seconde guerre mondiale, même s'ils en parlent très peu à l'auteur. Sa famille est très originale puisqu'elle a des origines polonaises, libanaises, et ils parlent hébreu, arabe, français, espagnol et anglais.



La plume est belle, intimiste et intéressante. Je me suis laissée porter par ce court récit et cela m'a donné envie de découvrir d'autres oeuvres d'Eduardo Halfon.
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Paysage : Villes

Tolède. Ce peintre né en Grèce l'a quittée à vingt-cinq ans puis a travaillé près du Titien à Venise pour ensuite gagner l'Espagne et rejoindre Tolède où il réalise cette extraordinaire "Vue de Tolède" une des première représentation urbaine se réclamant comme telle (1597/99) :

B. E. Murillo
El Greco

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