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Critiques de François Bégaudeau (781)
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L'Amour

Je n'avais jamais lu Bégaudeau romancier et par conséquent aucun a priori positif ou négatif.

Mais voilà, j'ai vu passer une critique des Inrocks titrant “le livre le plus condescendant de l'année” blabli blabla, me divulgachant au passage quelques éléments de l'histoire… J'y ai vu la revanche de celles et ceux que Bégaudeau a épinglé il y a quelques années, à savoir une certaine bourgeoisie de centre-gauche macro-compatible, qui feint de s'ignorer comme telle.



Les classes moyennes se glissent depuis des lustres dans la peau de papier d'aristocrates en proie aux affres de la passion, sentiment universel certes, mais drames qui ont toujours l'élégance de se passer dans des palaces, sous le regard interdit de domestiques anonymes.

Mais qu'une critique puisse parler de “sociologie de bas étage” dès lors que les personnages principaux sont peu ou prou autour du SMIC, les ramenant bassement à un objet d'étude sociologique, c'est quand même vraiment malaisant… une critique qui prend pour des “clichés” la vie, la vraie, de millions de français, à la fin qui est “condescendant” ?

Et la lire s'étouffer à la seule mention du mot “camping car”, validant, bien malgré elle, à nouveau et de façon flagrante, grossière, le portrait que faisait d'elle l'écrivain dans Histoire de ta Bêtise je dois avouer que ça a furieusement attisé ma curiosité.



“Dans le même genre, Jacques ne comprendra jamais qu'elle préfère entamer le pain frais plutôt que de finir le pain d'hier. Et pas la peine de venir nous raconter qu'elle en fera du pain perdu, elle n'en fait jamais. Ce que Jeanne peut éventuellement reconnaître, mais pour aussitôt observer qu'à ce compte-là ils ne mangeront jamais de pain frais. Si on mange le pain du jour le lendemain du jour, on mange toujours du pain d'hier. Ce à quoi Jacques objecte que ben voyons.”



Je tiens à présenter en avant-propos mes excuses à l'auteur qui ne goute guère les petits billets littéraires si j'en juge par cet extrait d'interview “Je mets en évidence la vacuité de certains discours sur la littérature, qu'ils soient tenus par les critiques, les profs, les écrivains eux-mêmes… Et les lecteurs !”, l'écrivain nous enjoignant à “l'analyse de détail” pour renouveler la critique littéraire. Et de détails, l'ouvrage n'en manque pas, c'est souvent aussi comme ça qu'on se rappelle les choses, sur les parkings des centres commerciaux, devant tel jeu télévisé, à tel point que je me demande si c'est un livre aisément traduisible tant les références sont souvent hexagonales.



"Et sans s'immoler chaque jour. On ne conserve point l'union fruitive. Que donne le parfait amour." Écrivit Corneille, bon on est pas tout à fait dans ce schéma-là. D'abord, jamais le mot “amour” n'est prononcé, si ce n'est lors d'un discours de mariage citant Saint-Paul. C'est évidemment une trace de l'ambition de l'écrivain pour ce livre : pas de passion, pas de pathos, pas de mélo, pas de noces de sang.



C'est que Bégaudeau le matérialiste, n'est jamais loin. Pour l'auteur on ne peut s'extraire des conditions matérielles de l'existence. Aussi, il remarque que ce sont souvent les histoires d'amour de la bourgeoisie qui ne font jamais état des questions d'argent, les personnages étant en quelque sorte en lévitation au-dessus d'une réalité matérielle très peu évoquée, libres de se consacrer aux caprices du coeur.



Ce n'est pas seulement dans l'intrigue que Bégaudeau colle à la situation sociale de ses personnages, mais c'est dans la narration toute entière, le style fait classe moyenne, un très beau style d'ailleurs.



Bon mais alors, à quoi est-ce qu'on assiste ? Eh bien à une vie de couple, sur moins d'une centaine de pages, avec ses rugosités, son intimité, son existence sociale (comme parents, comme amis etc) et ses conditions de vie, qui s'écoule non sans anicroches, mais dans une fluidité temporelle complète et qui dessine quelque chose de vertigineusement authentique, d'ailleurs, citant Saint-Paul, Bégaudeau l'écrit : l'amour “trouve sa joie dans ce qui est vrai.”



Quand on prend un peu de recul sur le tourbillon de la vie quotidienne que constitue ce bref roman on a presque l'impression de quelque chose de cinématographique, un peu comme ces scènes de flashback de toute une existence qui défilent à la fin du film avant que les personnages ne ferment définitivement les yeux. C'est intéressant de voir les souvenirs qui restent et ceux qui n'ont pas résisté au temps qui coule, étrange tri de la mémoire et de ce que le narrateur veut figer ou au contraire laisser libre au lecteur d'imaginer.



J'ai beaucoup aimé le début du livre, Bégaudeau touche immédiatement juste sur ces coups de coeur unilatéraux qu'on garde en soi, et qui se nourrissent vainement de notre imaginaire et de pensées magiques pour venir, comme une vague contre une digue, s'écraser et se retirer platement face au réel. On reconnait bien les vains calculs, les mesquins plans qu'échafaudent les adolescent(e)s pour se faire remarquer, si je passe par ici demain à telle heure, il ou elle me verra passer, et si je ris un peu fort là il va se retourner, si je me fais ami avec bidule je me rapprocherai de lui ou d'elle etc…



Je me demande si François Bégaudeau ne rend pas hommage quelque part à ses parents et, à travers eux, à ces millions de parents de la “classe moyenne” qui se sont mis ensemble dans ces années soixante-dix et qu'on a vu faire famille et rester ensemble (par amour, entre autre…) dans les décennies suivantes. La maturité sentimentale de l'auteur étant postérieure d'une génération au moins par rapport aux personnages du livre, toutes ses observations, ses inspirations n'ont pu être que celles du regard d'un enfant sur les couples que formaient les adultes de son l'époque, voyez.



C'est un livre qui, parce qu'il évite l'amour-passion, qu'il montre l'amour-patience, est extrêmement sensible et mélancolique dans sa pudeur, son quotidien, son “être auprès” comme le soulignait le philosophe François Jullien, et sa banalité (la vérité de n'être “que” ça c'est aussi quelque chose de puissant). Efficacement émouvant. En tout cas, moi, j'ai pleuré.



Qu'en pensez-vous ?
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L'Amour

J’avais envie de lire un roman pas trop long et je suis tombé sur ce roman dont le titre voit par contre très grand. Une contradiction qui m’a intrigué et qui m’a poussé à l’ouvrir, à le lire, à m’étonner du style tellement expéditif qu’il semblait vouloir m’empêcher de rentrer dedans… un comble alors qu’il ne fait que 90 pages. Mais finalement, je me suis laissé prendre au jeu, me laissant bercer par le quotidien presque soporifique de Jeanne et Jacques et tombant amoureux de leur longue complicité, tendre et finalement assez belle…



C’est en effet de l’amour avec un petit « a » que François Bégaudeau nous parle, celui qui ne se déclare pas et ne déchaîne pas les passions. Celui des Moreau, qui se rencontrent au début des années 1970, presque par hasard et sans véritable idylle, mais qui passeront une cinquantaine d’années côte à côte. Des années qui défilent, faites de routine, événements majoritairement anodins, de petites attentions, rares, mais sincères, de disputes et de compromis, jusqu’au bout, quoiqu’il arrive…



À l’image de cet liaison banale dépourvue de vagues, l’auteur déroule un style sans artifices, sans trop de ponctuations, accompagnant à merveille le vide et l’ennui de ce quotidien dénué d’effervescence. Et pourtant, au milieu de cet amour sans « je t’aime », mais rempli de « je suis là », sans trop de mots, mais avec beaucoup de présence, la magie finit par opérer. De cette banalité émerge finalement quelque chose de beau, mélange de fidélité et de tendresse… de l’amour, certes sans majuscule, mais tout de même émouvant…
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En guerre

Une guerre qui ne dit pas son nom



En novembre 2015, la France vient d'être frappée de plein fouet par des attentats terroristes dont l'ampleur et l'atrocité vont marquer les esprits pour longtemps.



« La France est en guerre » déclare le Premier ministre à la télévision. Mais pour François Bégaudeau, la guerre est ailleurs.



Entre Romain Praisse et Louisa Makhloufi, que tout oppose, une rencontre fortuite va faire basculer le destin personnel de ces deux êtres et dérouter de façon infinitésimale le déterminisme social qui les conduit et surtout rendait impossible tout rapprochement.



« Plus juste serait de dire que Romain Praisse et Louisa Makhloufi n'habitent pas la même ville », tant la probabilité d'un contact entre cet homme et cette femme est infime.



Pour résumer vulgairement : il est riche ; elle est pauvre.

Ils n'ont pas les mêmes valeurs. Rien de commun.



De son regard d'entomologiste humain, l'auteur explore, à partir de la rencontre de ces deux personnes, nos fêlures psychologiques et nos fractures sociales.



De leur « incompatibilité affective » en « clivage idéologique », François Bégaudeau dresse un portrait sans concession de la France d'aujourd'hui.



« L'homme est une créature sociale » : entre la ville et sa périphérie, une démonstration anthropologique et sociale magistrale.



Une grande et belle surprise pour moi qui n'avait pas encore eu la chance de goûter à la prose sensible et intelligente de cet auteur surtout connu pour son roman "Entre les murs".

Un grand merci donc à Babelio et aux éditions Gallimard/Verticales pour ce très beau cadeau !



Lu en août 2018.



Mon article sur Fnac.com/Le conseil des libraires :
Lien : https://www.fnac.com/Une-gue..
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L'Amour

L'amour de François Bégaudeau est un petit roman de 90 pages seulement dans lequel l'auteur raconte les cinquante années qu'ont vécu ensemble Jeanne et Jacques Moreau tous deux issus d'un milieu modeste, depuis leur rencontre au début des années 1970.

Au fil des pages, on peut voir peu à peu comment, avec le temps qui passe, se tisse et se façonne entre Jeanne et Jacques un lien plus serré qu'au départ et se construit une véritable histoire d'amour sans pour autant que cet amour ne soit jamais nommé.

C'est au travers de leurs goûts, leurs habitudes des manies forgées au fil du temps, de la routine qui s'installe, de leur connivence mais aussi de leurs petites disputes que l'on ressent ce sentiment qui les unit.

Cet amour est une sorte de long fleuve tranquille. Même si à un moment il est quelque peu chahuté, la sérénité est vite de retour.

Le récit m'aurait sans doute assez vite ennuyé s'il n'avait été jalonné de références aux périodes évoquées et rythmé par des chansons pas toujours appréciées par Jacques mais que Jeanne a la délicatesse d'écouter sur son casque branché sur son radiocassette et plus tard sur son discman.

Quel délice pour moi qui suis quasiment une contemporaine de Jeanne, de retrouver ces références, que ce soient avec les voitures, la 3 CV au début du roman, avec les hommes politiques et les allusions au couple Giscard qui s'invitait chez les Français, avec le téléphone et le passage aux smartphones, sans oublier le passage à l'an 2000 et l'évocation du fameux bug tant redouté, et beaucoup d'autres évocations encore que je ne voudrais pas divulgâcher…

Nostalgie et mélancolie ont accompagné ma lecture.

C'est avec une écriture simple dénuée de fioritures mais non d'humour, que François Bégaudeau met en scène cette vie banale, relativement monotone mais allant crescendo, dans laquelle sous des paroles parfois un peu acides entre les deux époux se niche beaucoup de complicité, de sensibilité et de tendresse.

Une fin bouleversante et poétique met un terme à cet amour que vivent sans doute beaucoup de gens comme le pense l'auteur.

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L'Amour

L’amour avec un petit a, celui qui ne fait pas de bruit et porte à peine son nom mais vous rend compagnons de toute une vie : moins de cent pages suffisent à François Bégaudeau pour toucher son lecteur aux larmes avec les cinquante ans de vie commune de Jacques et Jeanne Moreau, un couple on ne peut plus ordinaire de la classe moyenne.





Ils avaient vingt ans lorsqu’ils se sont trouvés au début des années soixante-dix. Pas de coup de foudre ni de passion brûlante, mais une calme évidence apparue au détour d’une promenade autour de leur petit bourg de l’ouest de la France : il fallait bien sortir le chien. S’ensuivent un mariage, un enfant, et un demi-siècle de vie commune. D’extraction ouvrière, elle est devenue secrétaire, lui jardinier municipal. En dehors du travail et du patient tricotage de leur vie matérielle, elle ne rate rien de ce qui concerne Richard Cocciante pendant que lui collectionne les maquettes de fusées. Leur cocker s’appelle Boule, leur fils Daniel comme Balavoine, ils partent en vacances au bord de la mer, et le temps passe, dans une routine qui figent leurs manies et leurs agacements mutuels : « Jacques énerve Jeanne à mettre des cornichons avec tout, à manger la peau du saucisson sec, à remettre un tee-shirt sale... » « Jeanne énerve Jacques à répéter qu’il n’en fout pas une alors que dès qu’il aide elle l’engueule, à nager la tête hors de l’eau pour garder les cheveux secs, à sortir l’aspirateur pour une miette... » Mais rien, ni dispute ni accident – une inconnue débarque un jour, qui vient avouer une ancienne liaison avec Jacques – ne vient jamais remettre en cause la paire que ces deux-là forment. La vieillesse est déjà là, le fils est parti travailler en Corée, ils risquent de ne plus voir beaucoup les petits-enfants. Et puis, c’est la fin, qui les sépare, quoique…





Est-ce seulement l’amour qui les unit, un amour qui jamais d’ailleurs ne se met en mots mais prend la forme muette des gestes du quotidien, ou plutôt la force d’une alliance, affective et matérielle, en quelque sorte un plus ou moins conscient calcul sécuritaire, pour mieux traverser la vie ? En tous les cas, ces deux-là sont tout à fait représentatifs de leur génération, qui ne divorçait pas beaucoup, souvent parce que de toute façon la sécurité matérielle interdisait la séparation. Entre hasard et nécessité, ils se sont reconnus et, sans éclats ni grands sentiments, ont décidé une fois pour toute de leur cheminement côte à côte. Par petites touches rapides et autant de détails datés qui nous font reconnaître aussi vrais que nature nos parents ou nos grands-parents, l’auteur en trace avec tendresse un portrait quasi sociologique, en même temps qu’il nous émeut du mélancolique passage du temps, imperturbable métronome de notre fugitive et généralement anonyme condition humaine.





François Bégaudeau dit avoir pensé à Un coeur simple de Gustave Flaubert. Il réussit un livre universel, court et d’un seul trait comme la vie : une sorte de film en Super 8, sans discours ni analyse mais vaste de ses ellipses, qui condense dans son sautillement accéléré le reflet de notre fragile humanité et l’infinie mélancolie du temps qui fuit. Coup de coeur.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
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L'Amour

Rrrrroooonnn piiiicchhhh, rrrooooonn piiiiich …

Bicheeeette, il faut te réveiller, il est l'heure de publier ton billet sur babelio !!!

Heeeiiin ??? déjà !!! mais il est quelle heure ? Haaan, j'ai dormi tout ce temps-là ??

Qu'est-ce qui m'est arrivé ??? Ah mais oui, j'étais en train de lire L'amour de Bégaudeau !

L'amour n'a pas mis tout le monde d'accord sur Babelio, certains sont fans, d'autres crient à l'imposture…

Ma curiosité a été piquée, et j'ai ouvert ce petit livre de seulement 90 pages, lu en moins de deux heures (et encore je ne suis pas rapide, et puis vous l'avez compris je me suis endormie en plein milieu). J'en ressors avec une impression en plein milieu elle aussi, mi-figue mi-raisin à l'image de la note (on ne pourra pas m'accuser de ne pas être raccord).

Le début m'a fait ricaner, et je me suis dit que j'étais partie pour être dans l'équipe qui crie « c'est nul », « c'est n'importe quoi » ou « non mais, franchement quel intérêt ? ».

Dans les premières pages, le livre s'avère plus efficace que n'importe quel somnifère, en plus, même s'il n'est pas remboursé par la sécu, il a l'avantage indéniable d'être 100% naturel et sans effet indésirable (à part l'éventuel agacement que pourraient susciter vos ronflements sur votre voisin, mais bon, l'avantage, c'est que normalement, ils n'empêchent pas le ronfleur lui-même de dormir -sinon je vous conseille de consulter très rapidement).

Oui, oui je digresse, mais en même temps, comme je n'ai pas grand-chose à vous dire sur ce livre, je meuble comme je peux… Qu'est-ce que je vais bien pouvoir vous raconter ? L'amour, c'est l'histoire de Jacques et Jeanne Moreau (oui vous connaissez forcément quelqu'un qui s'appelle Moreau, c'est fait exprès). Jacques et Jeanne (oui aussi vous en connaissez un, même un de chaque pour ma part, et puis de toute façon qui ne connait pas Jeanne Moreau) ce sont M. et Mme Toutlemonde, un peu gris, un peu transparents, un peu vides, un peu beaufs, un peu ploucs, un peu de bedaine, pas méchants, mais pas toujours très malins non plus, … Jacques et Jeanne font leur petit bonhomme de chemin dans la vie, sans faire de vagues, sans éclat, un fils unique, un cocker qui s'appelle Boule (par erreur parce que Jacques avait pas pigé que dans la BD c'est le petit garçon qui s'appelle Boule hu hu), un camping car… autrement appelée La France d'en bas.

Après mon petit somme, au fil des pages, j'ai commencé à bien connaître Jacques et Jeanne, qui en vieillissant m'ont un peu moins énervée. Avec le choix de ces prénoms intemporels, l'auteur, malin, nous permet d'y projeter nos parents, grands-parents, oncle, tante et toutes les personnes d'un certain âge de notre connaissance, voire nous-mêmes dans certaines situations (oui, j'avoue). D'ailleurs que celui qui ne s'y est pas reconnu ou au moins quelqu'un de son entourage me jette la première pierre …

Grâce à son oeil acéré sur notre quotidien, François Bégaudeau sait mettre le doigt sur la réplique qui douche l'interlocuteur dont les couples ont le secret dans leurs petites bagarres du quotidien et les joutes verbales entre Jacques et Jeanne m'ont régalée. Alors, petit à petit, je me suis laissée prendre dans les mailles du filet, et, sur les toutes dernières pages, je me suis surprise à n'être plus très loin de verser ma petite larme.

Si je regrette le style très parlé employé par l'auteur au début de ma lecture qui m'a prodigieusement agacé avec des tournures du style « sa mère l'attend à manger » (p.29), je lui concède un grand talent d'observateur de notre quotidien le plus banal et inintéressant, des petits riens qui font la vie.

« le lendemain au déjeuner elle servira un clafoutis dans les assiettes à dessert. Ce sera comme ça et pas autrement. Pour la faire changer d'avis il faut se lever de bonne heure. Ce n'est qu'après deux ans de déni qu'elle se résout à prendre un rendez-vous chez l'ophtalmo, et après deux autres à égarer ses lunettes partout qu'elle consent à se les accrocher au cou. Tout ça parce que madame trouve que les lunettes à chaîne, ça fait vieille. Alors que ça fait juste son âge.

-T'es vraiment qu'un gros con.

-Il est grand temps que tu t'en rendes compte. » (p.64)



Heureusement que l'humour grinçant et désabusé du couple m'a permis de maintenir les paupières ouvertes. Cependant, il est évident que cet ouvrage ne me laissera pas vraiment de souvenir marquant d'ici 3 semaines et que dans un an, je ne me rappellerai probablement plus l'avoir lu (heureusement que Babelio sera là pour le rappeler à mon souvenir). Un bilan extrêmement mitigé d'autant que les dernières pages montrent de façon flagrante que l'auteur sait provoquer l'émotion et nous faire entrer en empathie avec ses personnages.

C'est pas tout ça, je suis crevée après avoir écrit ce billet, mais ne me réveillez pas cette fois …

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L'Amour

Un roman court, net, efficace, 96 pages lus en en une heure.

L'auteur capte ses lecteurs du début jusqu'au twist final, totalement bouleversant.

La plume est sensible subtile fluide , saupoudré d'un brin d'humour ,entrainant une lecture captivante, addictive .Le genre de roman où le mot fin est frustrant.

Au début , on aurait pu penser que l'histoire était basique, un sujet lu et relu, la vie de deux personnages.

Nous sommes loin de la vérité, ce roman est époustouflant, je viens de prendre un uppercut, une histoire qui m'a scotchée et qui va perdurer dans ma mémoire, pendant en certain temps.

L'histoire de Jeanne et Jacques, un rencontre fortuite , un mariage sans passion, nous sommes dans les années 70.

Un couple qui vont apprendre à mieux se connaitre, une sorte de vie en harmonie, une relation forte, sans vraiment en prendre conscient. Ils s'habituent , avec grande facilité , aux nouvelles technologies. Un couple discret , sans histoire, qui tisse au fur et à mesure de la lecture, une passion intense. Ils sont reliés , inséparables, impossible de vivre sans l'un auprès de l'autre.

La vie continue, la vieillesse arrive rapidement, la maladie, la mort. Comment pourront-ils surmonter ses aléas de la vie?

Une nouvelle étape surmonter, une empathie intense se dégage des ces deux personnages.

Le final est bouleversant, les larmes coulaient toutes seules. La vie de deux être pendant 50, une vie où le mot Amour, prend toute sa valeur.

Lisez ce roman, ne passez pas à coté de le vie de Jacques et Jeanne.
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L'Amour

Je craignais de m’ennuyer en lisant ce bref roman sur la vie « moyenne » d’un couple ordinaire au long cours, celui de Jeanne et Jacques, ce ne fut pas le cas. Le texte est beau, juste, pudique, touchant et habilement construit.



Pourtant pas d’effervescence, d’amour fiévreux, de relations tumultueuses, d’ascenseur émotionnel, c’est d’un amour sans flamme plutôt flegmatique dont nous parle François Bégaudeau mais au final d’un amour solide.

Oh il y a bien quelques disputes, déceptions ou encore vengeance (soft).Mais l’amour ici est surtout silencieux et pérenne, fait de compromis, de petites manies, de routine, d’organisation et aussi d’une affection infinie. Un amour à bas bruit qui se ressent plus qu’il n’est décrit. Le sel de cette relation est la stabilité, l’enracinement des sentiments.

Il y a une mélancolie sous-jacente, une tendresse qui affleure à chaque page. Avec justesse, dans un style elliptique, l’auteur nous livre la trajectoire commune de ce couple depuis leur rencontre jusqu’à leurs vieux jours.



Dans le récit de cette vie à deux sur près de cinquante ans le passage du temps s’effectue moins à travers les dates qu’à travers les objets : catalogue La redoute des seventies, voiture Simca 1000, premiers portables de marques Nokia et BlackBerry … jusqu’au produits d’aujourd’hui. Pour qui est né dans les années 70 comme moi, ces références bien choisies sont vraiment marquantes et lient de manière astucieuse l’évolution technique à la temporalité narrative.



C’est un texte fluide qui se dévore d’une traite, dont la fin poignante vous saisira, construit sans rupture, sans chapitre pour que cette histoire universelle s’écoule un peu avec la même continuité que le temps. Le récit d’une vie banale mais que Begaudeau avec concision et finesse parvient à rendre touchant.



L’amour, le vrai, n’est-il pas dans ces sentiments enracinés plutôt que dans l’exaltation des premiers moments ?

Au fond, peu importe que l’on considère que cet amour « ordinaire » soit digne ou pas de porter un grand A, il n’en reste pas moins que Jeanne et Jacques sont émouvants, leur relation empreinte d’authenticité et que ce roman subtil vaut le voyage.
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Une vie de moche

Un album dénué de couleurs mais assurément interpelant pour un voyage au long court dans les aphtes de la laideur. Guylaine est née moche, du moins c'est l'image qu'elle porte sur elle, faute aux autres, faute à la société qui édicte les codes de la beauté. Depuis ce jour où les autres enfants de l'école refusent de jouer avec la moche, Guylaine se cherche à travers les autres ou à travers sa solitude.



De rencontres calculées pour tracer son chemin, ce récit féminin fait l'apogée de la beauté, de la laideur, à travers tous les âges.



La quatrième de couverture nous promet un récit jusqu'à l'acceptation de soi, j'ai pourtant ressenti des allures assez fatalistes et sombres ici. L'héroïne semble traîner inexorablement un boulet gigantesque sans jamais vraiment s'en séparer.



On oublie que les gens moins gâtés par la nature sont souvent des êtres exceptionnels, drôles, confiants, intéressants. Guylaine ici traîne sa laideur comme si elle faisait corps avec elle. Un message un peu plus optimiste n'aurait pas été de trop. Même si l'album se lit avec intérêt et que j'en ai apprécié l'analyse des codes esthétiques.



Merci à Babelio et aux éditions Marabulles pour cette masse critique bien agréable et singulière.
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L'Amour

Encore un peu de temps avant le début de la LC. Vite je pioche dans ma liste spéciale, et pourquoi pas ce titre qui suscite des retours très variés sur Babelio.

Ce ne sera pas un coup de coeur, mais je ne me suis pas endormie, Bichette. Je l'ai même lu très vite, de plus en plus vite, et je les ai aimés de plus en plus, ces deux compagnons.



Ils ont partagé le pain, les balades en foret, la première voiture, l'enfant, et puis le temps qui passe, la vieillesse qui arrive, les maux qui souvent l'accompagnent. Il est beau ce mot, compagnon, compagne, celui , celle avec qui l'on partage. et si c'était l'amour tout simplement.



Ils se sont mariés presque par hasard, ils ont vécu la vie de madame et monsieur tout le monde, pas d'événements notoires, des moments heureux, d'autres un peu moins, les jours qui s'enchainent et puis les années qui passent.



Et l'on sent peu à peu la force du sentiment qui les unit, même si pour m'exprimer ils préfèrent aux Je t'aime de cinéma, se chamailler, se dire les petites remarques qui se voudraient assassines, mais qui ne sont que l'expression de leur complicité. J'ai souvent souri en les entendant, je me suis souvenu d'autres couples que ces échanges unissaient beaucoup plus que des paroles d'amour.



François Begaudeau a réussi son pari, nous parler d'amour sans le dire.
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L'Amour

L'amour entre les lignes



Jeanne et Jacques, 50 années de vie commune concentrées dans un roman de 100 pages à peine.

Jeanne et Jacques sont des coeurs simples. Les tourments passionnés du "docteur Jivago", les contes de fées et autres histoires à paillettes restent en marge de leur histoire.

Leur amour, c'est un amour obscur et sans exaltation. Une histoire banale débitée sans fioritures, presque énumérée, pour éviter le relief et sublimer la monotonie.

Une foule de détails pour survoler des décennies de sentiments rarement avoués voire parfois désavoués.

Des sentiments qui resistent tant bien que mal à l'usure du temps mais qui donnent à ce couple toute sa raison de vivre.

Avec Jeanne et Jacques, on sourit, on s'attendrit, on s'apitoie parfois, on s'attriste aussi.



"L'amour" est un roman naturellement austère, un album aux photos un peu défraîchies exhalant une douce odeur de nostalgie et de mélancolie. Et l'amour, lui, discret, qui ne saute pas aux yeux et pourtant tellement présent.

Avec François Bégaudeau l'amour qui carbure à l'ordinaire sait se faire émouvant.

Malheureusement, je le trouve un peu trop déprimant pour lui rester fidèle et lui préférer des aventures plus grisantes.
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Une vie de moche

Un grand merci à Babelio et aux éditions MARAbulles...



Enfant unique choyée par ses parents, la petite Guylaine vit harmonieusement et pleinement sa vie de petite fille. Elle est inséparable de Gilles, le fils des voisins d'en face, et passe beaucoup de temps avec lui. Comme un frère et sœur, dont ils aiment entretenir la confusion du lien. Lorsqu'ils aperçoivent un trio de garçons de leur âge jouer au ballon, Gilles leur demande s'ils peuvent venir avec eux. Et là, c'est un coup au ventre pour Guylaine. Ils ne veulent pas de la moche ! Désappointée, attristée, la petite fille court se réfugier chez elle. Serait-elle moche ? Évidemment que non aux yeux de sa mère. Mais une phrase maladroite de la part de son père finit de l'assommer. Un véritable coup de poignard. Dès lors, il en sera ainsi pour Guylaine tout au long de sa vie : elle est moche et le restera...



Un petit mot. Tout simple. Impénétrable. Inexplicable... Et la vie de Guylaine, jusque-là gamine insouciante et pleine de joie, s'en trouve à jamais bouleversée. Aux yeux de qui est-elle moche ? Par rapport à qui ? En quoi son nez, sa bouche, ses yeux sont-ils disgracieux ? Et pourra-t-on seulement l'aimer un jour si elle est moche ? Guylaine va ainsi vivre sa vie à partir de ce simple fait et traîner sa "mochitude". François Bégaudeau cosigne avec Cécile Gaillard un récit introspectif, pertinent et habile sur la notion de beauté. En ces temps où les publicités et les magazines mettent en avant la beauté (quelque soit le produit), où la chirurgie se banalise, où l'on nous vante tout le temps le culte de la minceur (là encore, on ne peut visiblement pas être beau si on est "gros"), il semble difficile de grandir et vieillir au cœur de la société. Cet album met en avant également la notion d'acceptation de soi et la violence des mots. Le dessin monochrome de Cécile Guillard, tout en délicatesse et courbes, allège la dureté du propos et des mots.



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L'Amour

Sobriété du titre, sobriété du texte, sobriété des personnages, ce roman est bouleversant par ce qu’il suscite d’émotions à partir d’un propos simple. Le déroulement d’une vie d’amour ordinaire, avec ses temps forts et l’installation d’une routine, tout au long de quelques décennies dont les repères sont très bien posés, anciens tubes, objets du quotidien ou modèle de voiture. Ce roman me fait penser à la chanson de Benabar, Quatre murs et un toit, où l’on assiste en accéléré, à travers la vie d’une maison à un défilé des générations.



Il faut finalement très peu de pages pour faire le tour du sujet, et pourtant tout y est, des amours adolescentes à la fracture numérique, jusqu’aux douleurs liées au temps qui passe sans état d’âme.



Difficile de retenir ses larmes dans les dernières pages…





96 pages Gallimard 17 août 2023
Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Un enlèvement

Voilà une farce bobo réjouissante!



Le narrateur est un père de famille résolument dans son époque, utilisant un jargon digne d’un manager d’entreprise 3.0 y compris pour essayer de mener la barque chancelante de sa famille, composée de son épouse, qui n’est pas dupe ses cornes, d’une pré-ado, qui perfectionne son anglais en permanence, et d’un gamin de 6 ans dont on n’est pas sur que le but du CP, apprendre à lire, ait été atteint. Ils ont en vacances, dans une location haut de gamme, comme aime à le préciser notre bon père de famille.. La disparition d’un jeune ado perturbe la quiétude de la station balnéaire et de ses hôtes estivaux.





C’est extrêmement drôle, caustique et les situations puisées dans le quotidiens, revues et corrigées avec la charabia branché du père sont réjouissantes.



C’es heureusement assez court pour éviter la lassitude qui ne manquerait pas de s’installer sur plusieurs centaine de pages, Et heureusement, le narrateur est capable de perdre pied, le vernis de son langage policé craquant alors pour un pétage de plomb jubilatoire.



C’est un véritable exercice de style, qui met en valeur une histoire qui aurait pu être banale et sans intérêt, les vacances d’une famille ordinaire, pimentées par un fait divers qui réveille pour un temps la torpeur de vacanciers léthargiques. C’est très réussi.
Lien : https://kittylamouette.blogs..
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L'Amour

Jeanne est jeune et fantasme sur un beau basketteur. Jacques est jeune et tient la chandelle à son copain Frédéric. Jusqu'à ce que Jeanne croise Jacques.



88 pages qui racontent une vie. Une vie simple , où les mots de Bégaudau écoulent le temps sans pitié , sans voyeurisme mais avec un réalisme qui nous renvoie à nos propres vies.

La brièveté du texte agît comme un accélérateur de nos vies, la séduction , le cul et l'insouciance, le mariage, les enfants, la routine, le départ des enfants, les premiers signes de la mort à venir.

Entre temps , les visites d'amis se sont espacées, le sexe a disparu et les dialogues tournent aux joutes éculées dont chaque époux connait le texte par cœur.

Pour certains, la banalité de la vie qui est décrite peut rebuter. "Surtout pas moi". Non, sans doute pas grand monde à 18 ans , mais avec l'âge; les jugements s'affinent.

Bravo et merci à l'auteur pour toutes ces émotions à travers ce texte magnifique dont la force n'a d'égal que la simplicité de ce qui y est raconté.

Merci aussi de m'avoir fait traversé les époques , Giscard, les 2CV, les touches sur le téléphone , l'avènement du portable..
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L'Amour

AMOUR DES GENS ORDINAIRES



L'Amour de François Bégaudeau n'est pas l'amour torride. Il n'est pas l'amour passion, il ne l'est plus. Ce n'est pas l'amour qui se déchire. C'est l'amour qui dure, l'amour au long cours.



Jeanne, au début du roman, est réceptionniste. Elle rêve devant les muscles de Pietro, l'amant d'une autre. Elle rencontre Jacques. Jacques c'est le gars normal. Ils vont se promener avec le chien, il l'embrasse.

C'est le début d'une relation d'une vie.

D'abord la passion, les corps qui s'emmêlent, on se nourrit de la peau de l'autre. Puis vient le premier emménagement ensemble. La vie de bohème des jeunes couples. Vient l'enfant, que l'on éduque, que l'on regarde grandir.

Viennent parfois les bas aussi, parce qu'une vie de couple ce n'est pas que regarder dans la même direction. Il y a des tentations, des écarts de conduites. Il y a le pardon implicite aussi.

L'amour c'est aussi accepter les petits défauts de l'autre, toutes ces choses qui agacent. L'autre accepte aussi les nôtres. C'est la balance.

L'amour ce sont les petites attentions

L'amour c'est ensemble et au quotidien

L'amour c'est vieillir ensemble sur le même chemin.



Tout au long de ces trop courtes 93 pages, nous suivons la vie de Jeanne et Jacques, leur amour indéfectible. Un amour ordinaire jusqu'à la mort. Celui que beaucoup de gens vivent... Un peu celui que je vis depuis 30 ans avec mon compagnon.



C'est à la fois beau, touchant, émouvant

Un grand roman.
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Une vie de moche

Guylaine naît d'un père et d'une mère qui l'ont beaucoup attendue.

Elle restera fille unique.

Le petit trésor de ses parents.

Elle grandit auprès d'eux, si aimants et de son petit voisin avec qui elle fait les 400 coups.

Insouciante.

Insouciante, jusqu'à cette réflexion d'un petit groupe de garçons.

"La moche !"

La vilaine...

Et vilaine, ça rime avec Guylaine...

Il en faut pas plus à la petite fille pour chambouler sa vie.

Ses parents ne sont d'aucun réconfort.

Parce que, on est toujours les plus beaux pour ses parents.

L'adolescence arrive.

Avec ses transformations physiques et tous les complexes qui vont avec.

Guylaine est la rigolote.

Mais jamais la fille avec qui les garçons ont envie de sortir, de s'afficher.

Trop moche.

Elle s' éloigne de tous.

Guylaine se renferme. S'efface.

Se sous-estime.

Tout en se cherchant une place.

De moche...

Elle expérimente.

Vieillit.

Seule.

Avec ce corps, qu'elle a en horreur.



Jamais Guylaine ne se plaint.

Elle constate seulement.

Il y a des vérités. Oui.

Mais surtout des complexes qui pourrissent l'existence.

Des réflexions, des mots de gamins, aux répercussions désastreuses.

Qui te changent la vision que tu as de toi, du monde, de la vie.

Qui te changent à jamais.

Qui te mettent dans une situation de doutes perpétuels.

Cette bd m'a touchée.



Guylaine, c'est un peu moi.

Guylaine, c'est un peu toutes les femmes.

Guylaine, c'est l'imperfection de toutes les femmes, qui n'est pas permise.



Une femme se doit d'être parfaite.



Mais les femmes sont pleines de ressources.

Et savent prendre leur revanche tôt ou tard....



Admiration à François Bégaudeau pour ce scénario, si proche de la réalité. De mon vécu de femme, peut être, surtout.

Tous mes honneurs à Cécile Guillard pour cette mise en images d'une sobriété et d'une justesse si touchantes.

(Et dire qu'à quelques jours près, j'aurais pu vous rencontrer tous les deux, aux quais des bulles de St Malo... )

Merci à Babelio et à MARAbulles pour ce somptueux cadeau.

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Entre les murs

C’est bizarre, généralement, les adaptations de livres au cinéma sont souvent moins réussies.

Avec « Entre les murs » c’est tout le contraire.

Pourtant le sujet est forcément intéressant, d’autant que Bégaudeau a vécu de l’intérieur les problématiques liées au métier d’enseignant. Comment faire comprendre à des mômes que la connaissance et la culture peuvent être un atout pour réussir sa vie et les sortir d’un milieu loin d’être idéal, comment garder la niaque lorsque la moitié de votre temps consiste à recadrer, à réprimander, à sanctionner ? Comment cotoyer ces collègues qui n’ont pas forcément la même vision que vous ?

Ou le film trouve sa force dans l’échange incessant entre les élèves et leur prof (Bégaudeau et les ados du film sont formidables), le roman lui, semble par moment désincarné. Bégaudeau dans son livre est plus dans le détachement, le cynisme, l’humour aussi, comme si l’auteur regardait tout cela avec un certain désintéressement aussi et c’est ce parti pris voulu ou pas qui m’a empêché d’apprécier complètement son roman, Le film de Cantet palme d’or cannoise est autrement plus emballant. Un petit trois étoiles tout de même.



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Notre joie

Livre bien décapant livré ici par l'écrivain essayiste qu'est M. Begaudeau. En deux parties, nommées respectivement confusion et boussole.

La première s'articule autour d'une discussion avec un mystérieux M, désireux de rencontrer l'une de ses idoles (l'auteur donc) après une rencontre publique de ce dernier. La question posée est « Les amis de mes livres sont-ils mes amis ? ».

L'auteur dissèque méticuleusement, avec une acuité réjouissante les mécanismes à l'oeuvre dans les positionnements de son interlocuteur et l'illusion qui lui fait croire qu'ils partagent des idées.

« Mais alors le fascisme prétend toujours dépasser les vieux clivages pour ouvrir une troisième voie . Refusant les étiquettes, le sémillant M fait ce que le fascisme fait toujours à son émergence : semer la confusion. »

Cette partie est ardue à la lecture, mérite qu'on y revienne (je le fais en écrivant ces lignes) car M. Begaudeau « envoie du lourd ».

Tous les engagements, toutes les causes passent successivement à la moulinette du questionnement inquisiteur suscité par sa discussion à bâtons rompus.

Si vous vous pensez « de gauche » (seule condition pour lire Bégaudeau avec gourmandise) vous serez forcément sous le feu de certains de ses traits et contraints de vous arrêter pour y réfléchir. De ce point de vue, malgré la densité du propos, c'est réussi.

Mais moins que la seconde partie, Boussole, où il se livre à une introspection subtile et riche d'enseignements, analysant son rapport à l'engagement, au sens de ce qu'on appelle couramment « des causes », en gardant toujours le cap, son cap : « J'ai ma boussole. Ma boussole sociale – ma boussociale ? Ma boussole prolo ».

Pour finir par un magnifique éloge du temps perdu, le seul temps anticapitaliste.

C'est un très bel essai, très réussi pour qui ne rechigne pas à remettre en cause ses certitudes.
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Une vie de moche

Une Vie de Moche fleure bon le récit optimiste et guilleret, crois-je pouvoir affirmer sans trop m'avancer.

Bon, je viens de le terminer. Je crois qu'on est parti sur de mauvaises bases. Surtout moi.



Elle le pressentait, la Guylaine. Avec un tel prénom rimant avec vilaine, difficile d'échapper à la disgrâce.

Il aura suffi d'une malheureuse (souvent synonyme de parfaitement conne et déplacée) phrase lapidaire lâchée par une bande de gamins malveillants pour instiller le doute. « La moche ».

Même plus un prénom. Encore moins une personne. Juste moche. Réducteur. Parfaitement inapproprié mais suffisamment blessant pour tarauder un être en construction en proie au doute et à l'introspection. Ajoutez-y une phrase malheureuse de la part d'un géniteur qui ne pensait pas à mal pour confirmer ce pseudo état de fait. Moche j'étais. Moche je resterai.

# VDM.com !



Le dessin n'est pas le plus léché qui soit.

L'encrage n'est pas le plus claquant qui soit.

Il n'en reste pas moins un superbe portrait féminin très actuel.

Qu'est-ce que la mocheté ?

Qu'est-ce qui la définit ?

Une société ultra codifiée du beau et du paraître suffit-elle à briser les rêves d'un être encore balbutiant ?

Oui. Mille fois oui tant la pression exercée par les médias, la mode, de pseudos esthètes...de noeuds contribuent à ce mal-être ambiant et persistant.



Le récit se veut amer et monstrueusement injuste mais il est un miroir sociétal de plus en plus actuel. Pire, un marqueur social, un prescripteur de vie qui fait de la vôtre un véritable enfer. La quête du beau à tout prix. Celle que l'on chérit plus que tout. Celle sans qui l'on est rien. Ah si, une invisible, une chimère. Un anachronisme déplacé dans ce monde de grâce absolue.



Récit sur la souffrance qui vous ronge tel un acide mais également sur l'acceptation de soi.

Une quête identitaire de longue haleine qui parlera au plus grand nombre. Ami nombriliste, poseur patenté et légèrement imbu de ta p'tite personne, je te dispense tout de go de cette lecture parfaitement vaine à tes yeux de perfection incarnée.



À la fois d'une douceur et d'une tristesse confondante, une vie de moche parvient à trouver le juste équilibre entre émotion et questionnement.



Très joli moment...
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