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Critiques de Georges Darien (38)
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Biribi

Biribi n'est pas fait pour les bénis oui oui mais pour les fortes têtes des "Bat d'Af" comme Jean Froissard qui y sont envoyées manu militari. Là bas, tu chômes pas mon p'tit apache, tu casses du matin au soir comme au bagne des cailloux, pas beaucoup la croûte, tu construis des routes sous le soleil de midi et quand t'obéis pas aux Chaouchs ou que t'es pas en forme du genou, y'a la torture comme la crapaudine. On t'attache les pieds et les mains dans le dos et on te fait griller comme une sauterelle au soleil. Et t'as super soif. Alors Froissard , il dénonce tout ça. Les gradés comme ce sergent corse, ce sont de belles enflures, ils t'envoient aussi sec au peloton ou au mitard pour un oui ou un non mais faut pas ramper devant eux qu'il dit, tu restes la tête haute avec le petit sourire narquois. Ils veulent te mater pour que tu rentres dans le rang mais ils peuvent se rhabiller les cochons...

Biribi est un roman antimilitariste en grande partie autobiographique. Il sent le vécu ! Georges Darien en a bavé comme un chameau pendant quelques années à Biribi et y raconte l'enfer des camps disciplinaires et de la hiérarchie militaire .L'auteur enrage à toutes les pages. L'insoumis du XIXe siècle n'a pas pris une ride contrairement à d'autres auteurs . Lui, c'était un vrai, un dur, un tatoué. Allez, je vais écouter la complainte de Biribi d'Aristide Bruand et puis je rempile avec Bas les cœurs ! et Le Voleur.

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Le voleur

Le narrateur part d'une amère constatation : la propriété, c'est le vol, plus on a d'argent, plus en veut, ce sont quelques familles qui possèdent tout et les autres sont condamnés à vivre dans la misère. La société est fondée sur cette criante injustice, la corruption est partout, chez les politiciens, les hommes d'église, les juges, les médecins… Les pauvres sont réduits à l'esclavage, à moins de se faire voleurs… Un voleur honnête, qui dérobe aux riches ce qu'ils volent aux autres, évitant toute violence, toute effusion de sang. Voilà après tout un métier rentable et peu nuisible à la société…



C'est celui que Georges Randal a choisi après que son oncle lui ait dérobé son héritage. En toute légalité, sous l'apparence charitable d'accueillir un orphelin et pour pouvoir marier sa propre fille Charlotte. Charlotte dont le mariage est annulé… suite à un cambriolage chez sa future belle-mère et qui se retrouve enceinte...de son cousin puis chassée de chez son père.



Récit à rebondissements dans le pur style du roman feuilleton, c'est aussi une dénonciation de la société bourgeoise du 19ème siècle - et qui reste tout à fait actuelle -. Georges Darien y démontre que les vrais voleurs ne sont pas forcément ceux que l'on croit, que l'appât du gain pousse les hommes aux pires actes. C'est aussi la condition féminine qu'il défend, la femme n'étant qu'une monnaie d'échange, un faire-valoir, vendue à un mari contre une dot, à un amant contre une rente, la femme mariée rejoignant la cocotte dans cette prostitution généralisée qui lui ôte toute véritable indépendance.



Personne n'est épargné : ni les hommes politiques prostitués au pouvoir, les socialistes hypocrites, les médecins vénaux, les bourgeoises perfides, les hommes de lois, les fonctionnaires, les hôteliers, l'armée, l'école, l'église… De Londres à Paris puis à Bruxelles, en passant par la province, partout la même constatation : tous sont des voleurs. Seul le voleur a l'honnêteté de l'admettre…



Beaucoup d'humour évidemment dans ce roman rocambolesque, de la philosophie aussi, la défense de la liberté de l'individu face à une société qui bride tous les instincts de l'homme. Dès le plus jeune âge l'enfant est réprimé, embrigadé, conditionné, soumis à l'idéologie triomphante, et finalement décervelé pour rentrer dans le moule. Le voleur a la liberté du hors-la-loi de créer sa destinée et de décider de sa vie. Mais avec des risques et à la fin souvent seul. Car le voleur aussi porte son fardeau...et risque sa peau. Un roman anarchiste qui va jusqu'au bout de sa logique. A re-découvrir d'urgence !
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Le voleur

Georges Randal est un fils de bourgeois, éduqué pour aimer l'argent. À la mort de ses parents, il est confié aux soins de son oncle, qui dilapide sa fortune. Quand il atteint l'âge de la majorité, son bilan n'est pas brillant : les années de collège et d'armée ont détruit sa personnalité, l'ont forcé à l'hypocrisie, et son oncle l'a dépouillé, purement et simplement, avec la bénédiction de la loi. Qu'à cela ne tienne : Georges décide de se faire voleur. Pas par vengeance ou par appât du gain, mais par conviction, pour dire non à la société et à ses codes de conduite absurdes.



Par ses activités, Georges gratte le vernis des gens biens et révèle ce qui se cache derrière : les industriels malveillants, les philanthropes qui ne cachent pas leur mépris pour les pauvres, les bourgeoises qui louent ses services pour dérober la fortune des amies, les politiciens véreux, … Tous les masques tombent.



Georges se fait quelques amis, plus ou moins voleurs aux aussi, qui l'approuvent dans son choix de vie, et théorisent avec lui du rôle essentiel du voleur dans la société. Les démonstrations sont assez succulentes, pleines d'ironie et d'auto-dérision.



Il est difficile pour Randal de trouver un mode de vie qui lui convienne parfaitement : le capitalisme, c'est non, il a l'occasion d'en constater les dérives dans chacun de ses larcins ; les voleurs eux-mêmes ne valent pas spécialement mieux que les « honnêtes » gens ; le socialisme et l'anarchisme ne l'attire pas beaucoup plus, il n'y trouve que des grands théoriciens et des beaux idéalistes, mais rien de concret. À la fin du roman, son constat est amer : il n'a pas été beaucoup plus libre que les gens auxquels il voulait échapper.



Le voleur est un cri rageur pour la liberté qui ne laissera personne indifférent.
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Le voleur

Bien que ce roman fasse presque 500 pages,je suis tentée de le qualifier de pamphlet. Bien sûr ,la trame romanesque existe. Randall,devenu orphelin se retrouve sous la tutelle de son oncle qui va le ruiner à son propre profit. Abjecte à tous niveaux il va être déterminant dans le choix délibéré de Randall à devenir Voleur. Il rejette avec charisme,la morale et les lois d'une société pour laquelle il n'a que mépris. Son credo est la liberté. Dès lors il rejette non seulement le système capitaliste mais s'interdit également toute appartenance soit elle au Socialisme ou à l'Anarchisme " non,pas d'idéal, d'aucune sorte. Je ne veux pas voir ma vie obstruée par mon ombre." Il ne veut pas que le citoyen tue l'homme. Les lois et la morale ne reposent selon lui que sur l'asservissement et l'oppression et exaltent " la puissance de la bétise" " à grand coups de goupillons ou à grand coup de crosse". Car toutes les institutions sont au service de cette bassesse,l'Eglise, l'armée et l'Etat bien sûr ! Randall se défend bien de toute appartenance politique mais le lecteur entrevoit bien l'héritage de son créateur bien proche du mouvement anarchiste : l'amour de la liberté,le rejet du militantisme,du pouvoir étatique et de l'assouvissement des peuples et de la violence considérée " comme un procédé grossier et anachronique qu'un véritable voleur doit répudier absolument."

Si je parle de pamphlet c'est qu'il y a une réelle critique acerbe de la société mais cela se traduit de façon jouissive et pleine d'humour,avec des situations parfois même burlesques. Que ce soit lors de ses larcins ou dans des joutes oratoires dans lesquelles il se joue de façon magistrale de ses interlocuteurs ! Notre homme ne manque pas de rhétorique et j'ai adoré sa façon de présenter son rôle de voleur,un peu à la manière des images d'Épinal. Le voleur devenant un régulateur social et surtout économique en rétablissant un équilibre " faussé par le capitalisme" avec une production qui excède la consommation. Il y a surproduction " mais le voleur ne se contente pas de consommer,il gaspille. Et on lui jette la pierre. Quelle inconséquence !".

Car, que l'on ne s'y trompe pas, Randall ne vole pas pour s'enrichir mais pour rester libre et ne rien cautionner d'un système qui méprise les pauvres au seul profit de la racaille légale. Si notre homme nous offre la légèreté et le bonheur de la Farce, il n'en demeure pas moins un être sensible et attachant qui va dévoiler peu à peu une réflexion plus intime sur le sens de la vie. Quelque soit le Chemin choisi,en vaut il la peine s'il doit bannir les sentiments ? La Liberté doit-elle s'affranchir de tout et même de L'Amour ?

Ce texte écrit en 1897 par Adrien,de son vrai nom Georges Hippolyte Adrien, n'a rien perdu de sa force ni même de son actualité ! C'est un roman peu lu,en tout cas sur le continent Babelio et c'est dommage car c'est un véritable plaisir que de le découvrir. Je vais d'ailleurs me procurer au plus vite L'Ami de l'ordre, pièce sur la Commune,écrite en 1898 et jouée au Grand Guignol la même année. Elle fut très mal accueillie...tiens donc!?
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Bas les coeurs! (1870-1871)

1870, la foudre d'abat sur Paris : la Prusse déclare la guerre à la France ! Alors qu'ils ne sont que prussiens, tandis que leurs adversaires sont tout de même français ! Une fois la stupeur passée, on se réjouit de pouvoir enfin donner à ces êtres frustres la bonne leçon qu'ils méritent. Une seule question fait débat : combien de temps faudra-t-il à l'armée française pour atteindre Berlin ? Quelques jours ? Quelques semaines ?



Le jeune Jean, 12 ans, s'enthousiasme avec sa famille, dans laquelle chacun fait surenchère dans la glorification de l'armée française. Jusqu'à ce qu'il se rende compte que la ferveur patriotique de son père, de ses amis et de ses voisins est directement proportionnelle à la distance qui les sépare de l'ennemi. Criant hier « Vive l'empereur ! », ils n'hésitent pas à crier « Vive la République » quand celle-ci est officiellement proclamée. Prêts à verser leur sang jusqu'à la dernière goutte pour la patrie quand l'ennemi était encore aux frontières, ils s'enthousiasment pour la discipline teutonne quand leur ville est envahie, n'hésitant plus à commercer avec le nouveau maître des lieux, et d'obtenir au passage quelques avantages personnels dûment mérités, ou l'élimination de quelques adversaires gênants.



Moins d'un siècle plus tard, on retrouvera les mêmes comportements : certitude d'une victoire facile, stupeur devant la défaite, collaboration rapide avec l'occupant par ceux-là même qui manifestaient le plus fort leur attachement à la patrie. Darien s'attaque vivement à la morale bourgeoise, accusée de tous les maux : hypocrisie, lâcheté, cupidité, trahison, … La critique est amère, d'autant que l'auteur s'est inspiré de sa propre enfance pour ce roman. Le patriotisme et les va-t-en-guerre bruyants, mais bien planqués au chaud, en prennent aussi pour leur grade. Là encore, on ne voit pas très bien ce qui a changé depuis un siècle.
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Biribi

Jean Froissard, avatar de Darien lui-même, devance l'appel et s'engage volontairement dans l'armée pour cinq ans. Ce choix se révèle vite mauvais : incapable de s'adapter au formatage de la personnalité qu'on lui impose, il ne prend pas au sérieux les tâches absurdes qu'on lui fait faire. Il conserve toujours un reste de liberté qui le pousse à prendre la discipline par dessus la jambe et à s'attirer les foudres de ses supérieurs. Les punitions s'accumulent et se transforment en une condamnation dans les Compagnies de discipline en Tunisie pour le reste de son engagement, soit trois ans.



Dans ce bagne, tout est bon pour corriger ces mauvais éléments : leur comportement est pris comme excuse pour infliger les punitions les plus sévères. Punitions qui provoqueront un jour ou l'autre un mouvement de révolte chez les prisonniers, aussitôt utilisé comme prétexte pour renforcer la cruauté du traitement : torture digne du moyen-âge, prison avec juste assez de nourriture et d'eau pour survivre (et encore, pas toujours), travail harassant qui mène à la mort les plus affaiblis.



Froissard ne tient le compte que grâce à la haine qui l'habite. Haine envers les supérieurs qui n'ont de compte à rendre à personne et qui profitent largement de leur supériorité, haine envers les gardiens qui ont conscience de l'ignominie du bagne mais qui obéissent aux ordres sans broncher, haine envers les citoyens en France qui ferment pudiquement les yeux sur ce qui se passe dans les bagnes au nom de la sécurité.



Darien ne cherche pourtant à provoquer ni la pitié ni les larmes : ce qu'on retient de son texte, c'est le besoin de liberté et la rage de voir des hommes traités si cruellement pour des fautes si maigres. Cinquante ans après ce récit, la France a fait fermer ses bagnes, mais les Biribi doivent toujours pulluler à la surface du globe.
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L'ami de l'ordre - drame en un acte -

C'est en lisant Le Voleur écrit un an plus tôt que cette pièce en un acte , que j'ai découvert G.Darien et que je suis tombée sous le charme de cet anarchiste mi Robin des bois,mi Arsène Lupin !

L'ami de l'ordre se déroule chez un abbé qui vient d'être libéré de quelques jours d'emprisonnement par les communards . L'action se déroule en huis clos,et arrivent l'un après l'autre,un farouche défenseur de la royauté qui s'inquiète de ce que vient de vivre l'abbé ; d'un bourgeois sans scrupule ni valeur qui se réjouit du spectacle de la chute de la Commune; et enfin d'une pétroleuse qui cherche refuge. Alors que les personnages dialoguent on entend les fusillades qui exécutent sommairement les communards même les plus pacifiques.

Aucun doute sur l'affiliation de G.Darien ! Mais sa bienveillance envers l'abbé m'a surprise. Je l'avais connu plus virulent envers le clergé dans son roman Le Voleur : " le génie du christianisme ? Une camisole de force." "...cette religion...qui chante la béatitude des serfs,la joie des torturés,la grandeur des vaincus,la gloire des assommés !..."

Dans l'ami de l'ordre, G.Darien se penche davantage sur l'homme que sur l'institution cléricale, et c'est une façon de souligner que tout le monde peut se tromper et peut-être trouver le moyen de réparer ?...
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L'ami de l'ordre - drame en un acte -

26 mai 1871, le tocsin résonne dans Paris. La défaite de la "Commune" est consommée. La veille, on s'est battu toute la journée dans les rues et, dans cette artère, la barricade n'est tombée qu'au petit matin.

Les "communards" tiennent encore le haut du quartier mais les soldats de l'ordre sont redescendus vers les boulevards extérieurs afin de les contourner.

L'abbé, accueilli chaleureusement par Marie, est rentré.

Arrêté la semaine précédente, il était depuis prisonnier des insurgés qui ont fusillé monseigneur l'archevêque.

La troupe de l'armée régulière, aux ordres de Thiers, a délivré l'abbé, il y a deux heures.

On sonne. L'abbé va ouvrir.

Entre, sur scène, Mr de Ronceville qui, inquiet pour l'abbé, vient aux nouvelles.

Il est royaliste, intransigeant et droit.

Son idéal est la justice.

Mais, pour lui, en politique la justice est la trique.

Il n'a jamais eu qu'un ami : un garibaldien qu'il avait peut-être percé d'une balle et qui est mort, étendu à côté de lui, dans l'ambulance qui les transportait tous les deux.

On sonne. L'abbé va ouvrir.

Entre, sur scène, Mr Bonhomme qui craignait aussi pour la santé de l'abbé.

C'est un bourgeois. Il est commerçant.

C'est un homme d'ordre, un partisan convaincu de Thiers.

Il n'est pas de la "calotte". Il a lu Voltaire.

Mr Bonhomme raconte ce qu'il a vu en chemin. Il fait une description implacable de l'apocalypse, de ce cruel charnier que sont devenues les rues de Paris.

Il évoque les convois de prisonniers qui, enchaînés, deux par deux, entre deux haies de cavaliers, vont vers Versailles.

Il se réjouit du massacre des communards, des pelotons d’exécution.

Il a vu un prêtre dénoncer Eugène Varlin, un ouvrier relieur, très convaincu, très modéré, qui s'était déclaré hostiles aux mesures de rigueur, opposé aux actes de barbarie.

L'abbé est un homme miséricordieux, un véritable homme de Dieu.

Son église est celle du pardon.

Par cette dénonciation, il porte désormais une tâche sur sa soutane qu'il ne pourra laver que par le salut d'un ou plusieurs proscrits de la Commune.

On Sonne. L'abbé va ouvrir.

Entre, sur scène, une pétroleuse.....

"L'ami de l'ordre" est un drame en un acte qui a été représenté, pour la première fois, sur la scène du Théâtre du "Grand-Guignol" en octobre 1898.

C'est une pièce magnifique écrite par Georges Darien.

Né en 1862, à Paris, Georges Darien, lors des événements de la Commune n'avait pas dix ans. Il semble se souvenir. Il évoque d'une manière lumineuse.

Les personnages qu'il peint dans ce morceau de théâtre, le sont avec force, talent, humanité et honnêteté.

Les conversations, les dialogues qu'il tisse entre eux sont réalistes.

La pièce a peu vieilli.

C'est une pièce, bien écrite, intelligente et forte.

Elle est aussi un cri contre l'injustice.

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Le voleur

George Darien, ça vous dit quelque chose, vous ? Pour ma part, je ne connaissais pas du tout, avant de rencontrer ce nom, par hasard, sur un site de troc. Le Voleur ... Une curieuse illustration (Le thérapeute, de Magritte), une quatrième de couverture plutôt alléchante, et hop ! Je décide de me le procurer. J'ai pensé le recevoir pendant longtemps, mais, manque de chance, le livre semble avoir été perdu dans les limbes de la Poste. Il m'a fallu attendre longtemps avant de le trouver enfin sur les étalages d'une librairie, alors que j'étais de passage à Paris. Après avoir terminé Moll Flanders, je me suis donc empressée de commencer ce roman qui m'intriguait tant et que je comptais lire depuis des mois ... Si j'ai choisi d'enchaîner directement sur George Darien après avoir terminé le roman de Defoe, c'est aussi parce qu'ils partent tous deux d'un thème assez semblable, à savoir la figure du voleur. Il me semblait intéressant de comparer ces deux portraits, tous deux rédigés par un "je" sous la forme de faux mémoires, et ce à presque deux-cent ans d'écart.





Le Voleur : voilà un ouvrage difficile à résumer ... Pourquoi ? Parce qu'aux côtés d'une trame simple et légère se succèdent toute une galerie de personnages et un grand nombre de digressions : portraits à charge, caricatures et histoires secondaires glissés ça et là, ou encore textes d'idées dissimulés au fil de l'intrigue. Georges Randal nous raconte son histoire : celle d'un jeune bourgeois qui, ruiné par son oncle après le décès de ses parents, décide de se faire voleur. Avec ce qu'il lui restait, il lui était sans doute possible de vivre, laborieusement. "Tu chercheras à joindre à tes maigres revenus ceux d'un de ces emplois honnêtes qui, pour être peu lucratifs, n'en sont pas moins pénibles. Ceux qui les exercent ne mangent pas tout à fait à leur faim, sont vêtus presque suffisamment, compensant l'absence des joies qu'ils rêvent par l'accomplissement de devoirs sociaux que l'habitude rend nécessaire ; et, à part ça, vivent libres comme l'air - l'air qu'on paye aux contributions directes." Mais ce n'est pas là le chemin que Randal choisit : lui, il préfère dire non à la société et à ses institutions, non à l'ordre et, surtout, non au silence. Le Voleur, ce n'est pas que ça, mais c'est un non énergique et retentissant au monde tel qu'il fonctionnait à l'époque - et tel qu'il fonctionne aujourd'hui, pour une large part.



Dans un écrit qui emprunte beaucoup - non sans humour - aux codes et aux clichés au roman-feuilleton en vogue à l'époque, Darien nous permet d'explorer le monde des voleurs et des escrocs : s'y croisent criminels officiels, protégés par les lois et brigands véritables. Le lecteur rencontre alors, au détour d'une page, politiciens véreux, voleurs de métier, notaires malhonnêtes, mouchards du gouvernement, faiseuses d'anges, bourreaux, industriels stupides et faussement philanthropes. Et cela, à grands renforts d'extraordinaires facilités de scénario. Mais qu'importe : ce n'est pas la vraisemblance que l'auteur vise en premier lieu. Par la force de la mise en scène, par l'outrance et la noirceur de certains portraits, enfin par l'utilisation libre révolutionnaire d'une forme romanesque donnée, Le Voleur semble rappeler parfois l'esprit des œuvres d'Octave Mirbeau. Comme lui, il se fait arracheur de masques, révélant les vices et les instincts destructeurs des puissants, tout en fustigeant la passivité et l'aveuglement des plus faibles. Et parfois, quand Randal écrit son dégoût du monde, qu'il s'interroge sur son expérience de la vie, on croirait presque entendre Célestine ! Pour exemple : "Ai-je vu des choses mon Dieu ! - même des choses que je ne dirai pas ! ... J'ai passé partout, ou à peu près ; je connais toutes les misères des gens, tous leurs dessous, toutes leurs saletés, leurs secrets infâmes et leurs combinaisons viles, les correspondances adultères de leurs femmes, leurs plans de banqueroutiers et leurs projets d'assassins. Je pourrais en faire des romans, si je voulais ! ..." Cependant, il y a quelque chose de plus touchant, de plus triste même, chez Darien que chez Mirbeau : personnage peut-être davantage autobiographique ; présence, malgré tout, d'un certain romantisme, mais teinté de nihilisme et d'anarchie ; constat amer du narrateur sur son passé et sur ses choix, ... Toujours est-il que je ressens une mélancolie bien plus présente dans Le voleur, alors que les lectures de Mirbeau me semblent davantage roboratives. De ce que j'en ai lu, tout au moins.





Ainsi, comme je l'ai dit, Randal s'oppose à beaucoup de choses, alors qu'il découvre l'envers du décor social et les vrais visages sous les masques ... Seulement, que faire, après avoir constaté tout ça ? Randal se tourne tout d'abord vers ses collègues voleurs et il pense un instant avoir trouvé sa réponse. Réfugié à Londre, il y rencontre Roger-La-Honte et Brousaille, figures positives et charmantes d'un frère et d'une sœur errant sur les toits de la grande ville. Cependant, ces deux-là font figure d'exceptions. Apparaissent d'autres figures, plus inquiétantes, plus grimaçantes ... Randal finit par se dire que "les vices des canailles ne valent pas mieux que ceux des honnêtes gens." Ce dernier est tenté de voir du côté du socialisme : déception nouvelle. "J'ai vu ceux de 48 avec leurs barbes, ceux de 71 avec leurs cheveux, et tous les autres, avec leur salive." L'anarchisme est révoqué également : autant de promesses faites à un peuple qui les attend pour demain plutôt que d'agir aujourd'hui. Le mot est lancé : "Pépinières d'exploiteurs, séminaires de dupes, magasins d'accessoires de la maison Vidocq ..." Qu'est-ce qui compte alors, après tout ça ? Entre toutes ces errances, Darien nous le dit, Randal nous l'assène : c'est l'Individu, c'est le moi, étouffé sous la société, les convenances, les institutions, écrasé par l'éducation, le service militaire, le monde du travail. Et ce qui est important, c'est de vivre, d'exister par soi-même et pour soi-même, uniquement.



Ce qui est tragique, pourtant, c'est que malgré ces intuitions, Randal échoue. Ne parvenant pas à vivre comme il l'entend, peut-être même ne sachant comment vivre, il passe lui aussi, comme tous les autres, à côté de sa vie. Dernière page du roman, dernière feuille de ces confessions, et il jette ce constat amer : "J'ai voulu vivre à ma guise, et je n'y ai pas réussi souvent. J'ai fait beaucoup de mal à mes semblables, comme les autres ;et même un peu de bien, comme les autres ; le tout sans grande raison et parfois malgré moi, comme les autres. L'existence est aussi bête, voyez-vous, aussi vide et aussi illogique pour ceux qui la volent que pour ceux qui la gagnent." Partie intégrante d'un mécanisme plus grand qui lui échappe, le voleur est aussi déterminé que les autres et joue lui aussi un rôle dans la société, quoi qu'il dise.



Le Voleur se clôt alors que George Randal délaisse son manuscrit dans une chambre d'hôtel, laissant là sa valise, abandonnant son métier et ne sachant que devenir. La boucle se referme, et les multiples questions jetées ça et là au fil de l'histoire n'ont pas été résolues. Cependant, quand on referme le livre, elles résonnent encore en nous, douloureuses, inquiétantes. Avec un vrai sens de la formule, Darien nous entraîne dans cette vie menée tambour battant, alternant descriptions de cambriolages, personnages truculents, cavales entre la France, la Belgique et l'Angleterre. L'humour côtoie de près le désespoir, chez cet homme à la fois dandy et vandale.

Une ode à la liberté et à l'individualité, une recherche désespérée de réponses, une émotion et une énergie communicatives.



A découvrir d'urgence !




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L'épaulette

Jean Maubard est tout destiné pour l'épaulette, symbole du grade d'officier de l'armée. Son père est un colonel français, sa mère est prussienne, mais toute la famille est de tradition militaire. Aubaine formidable, la guerre franco-prussienne éclate. L'armée française part en pavoisant, se fait soigneusement mettre en pièce, et revient juste à temps à Paris pour tirer sur les communards, coupables d'avoir eu l'outrecuidance de résister plus longtemps face à l'ennemi que leur armée officielle.



Dans la foulée, l'Empire a été remplacé par la troisième république. Beaucoup de choses changent, mais principalement les opinions politiques des puissants, qui, de fiers défenseurs de l'empereur, deviennent d'ardents républicains. Et conservent leur poste : on ne change pas une équipe qui gagne.



Jean Maubard finit par obtenir son épaulette, et découvre l'envers du décors. Tous les lâches et les traîtres de la dernière guerre ont été gradés, ceux qui se sont battus dégradés ou fusillés : trop encombrants. Les promotions passent principalement par les appuis aristocratiques ou politiques. Le service militaire obligatoire broie les citoyens qu'il est censé former : « A la caserne, on fait d'eux des machines, des abrutis, des larbins, tout excepté des soldats. » On crie haut et fort à la préparation de la « revanche » tout en vidant les caisses de l'état. Les gradés, qui se sont rendus sans combattre à la dernière guerre, n'hésite pas par contre à tirer sur les grévistes.



L'armée et les politiques sont finalement deux faux ennemis : malgré les petits complots, ils s'organisent main dans la main, s'échangent honneurs immérités et pots-de-vin, et font de l'hypocrisie la règle de toute conduite. Tout ça à l'encontre du petit peuple, qui paie les pots cassés et acclament les héros qui le dirigent.



L'épaulette est un régal à lire, tant au point de vue du style, percutant et incisif, que pour les comportements qu'il dénonce. Darien est un auteur qui mériterait largement d'être remis au goût du jour.
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Le voleur

Georges Darien ne se faisait guère d'illusion sur l'égalité en cette fin du XIXème siècle; comme il était du genre combatif, il écrivit cet extraordinaire portrait de la bourgeoisie française et de ses moeurs. Pour n'être pas en reste, il y propose une méthodologie pour ne pas finir "victime" en des temps si mensongers et falsificateurs de la réalité. Toute ressemblance avec des personnages ou des situations actuelles ne serait donc qu'un pur hasard ... C'est d'ailleurs certainement pour cette raison que " LE VOLEUR" est totalement absent de tous les manuels scolaires!

Si ce roman ne gardait aussi remarquablement ce magnifique potentiel de subversion sociale, il serait certainement classé parmi les chefs-d’œuvre de la littérature française. Mais la condamnation des "élites" dirigeantes de notre belle nation est par trop implacable, le dévoilement de cette bêtise constitutive, de cette corruption quasi génétique, ne restant que trop "signifiants" en notre modernité. Haro donc sur Le Voleur, protégeons nos chères petites têtes innocentes d'un savoir qui pourrait nuire à leur sérénité et à l'ordre séculaire de la Nation ...
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Le voleur

Darien. Ce n'est plus un nom, ni même l'acronyme de Georges Hippolyte Adrien. C'est un cri, une injonction, un slogan presque : Da ? Rien ! Pas de compromis ni de voie médiane. Cet homme issu de la petite bourgeoisie va rapidement se mettre en rupture avec ce petit monde et avec la société de manière plus générale. Ecorché, révolté, Darien ! Ne pas respecter les limites établies, barrières opposées à l'homme que l'on veut faire veau.



Lucien DESCAVES le décrit ainsi : « Lèvres minces, regard aigu, moustaches de chat roux, mâchoires serrées et les muscles sous la peau. Le monsieur pas commode auquel il ne fallait pas se frotter.»



L'évènement fondateur de sa biographie est son passage à Biribi, soit les Bat d'Af, à Gafsa, l'un des camps disciplinaires situés en Tunisie pour les soldats insoumis et défiant l'autorité militaire. 33 mois d'humiliation, de vexation, de travaux forcés et d'enfer sous la brûlure d'un climat homicide. Lui, le patriote, engagé volontaire, va subir la violence étatique. Il en sortira écœuré de la société, de l'armée, de l'école, de la religion et surtout déterminé à rendre les coups. L'esprit aiguisé par la violence légale subie, il n'aura pas de cesse d'attaquer, de remettre en cause et de franchir les bornes qu'il n'accepte plus.



Fréquentant les milieux artistiques et anarchiques participant à leurs journaux aux titres évocateurs - L'Escarmouche, L'En-dehors, L' Ennemi du peuple - sous son nom ou sous des alias, il gueule sa haine face aux comportements appris, aux soumissions volontaires.



Il noircit la neige des pages comme d'autres ont posé des bombes. Il échappe aux catégories, se dit anarchiste face aux bourgeois et libertaire face à l'anarchie . Anarcho-individualiste peut-être si cela signifie vraiment quelque chose, à contre-pied sûrement.



Sa biographie ne lui connaissant pas de revenus réguliers, on va vite l'identifier à Georges Randal, le personnage principal du “voleur”. Les deux se rendent en Angleterre, Darien pour fuir les lois scélérates et Randal pour continuer ses larcins de “déloyal européen”.



Les détails, la connaissance de certaines techniques et outils du métier tendent à renforcer cette impression. Le vol, c'est d'ailleurs “ la reprise individuelle”, un autre terrain d'action anarchiste, quand d'autres lancent des engins explosifs.



Le roman craque, semble ne pas suffire à sa rancœur. D'ailleurs, dès l'avant-propos il explique que ses mots ne lui appartiennent pas et qu'il les a volé à un voleur. Il n'a donc pas pu corriger, amender, contredire, étant donné le péché originel dont il était responsable. Un voleur ne peut juger un autre voleur. Ceci lui permettant d'expliquer la violence du propos non contenue.



Comme dans la vie de Darien et l'épisode du bataillon disciplinaire, Randal bascule le jour où il comprend qu'il a été spolié de son héritage par son propre oncle. Son monde s'écroule et il découvre que son éducation, son apprentissage et le rôle que la société lui a assigné ne sont que les barreaux d'une cage où l'on souhaite le voir crever gentiment. Calmement.



C'est la révolte et le début d'une plongée dans les eaux troubles du monde des voleurs d'où paradoxalement sa vision du monde et des gens va s'éclaircir pour devenir lumineuse et sans concession.



Le vol comme libération, destruction de la propriété, triomphe de l'instinct et de l'intuition sur la passivité bourgeoise.



Le roman pour Darien doit être un prélude, une invitation vers l'action et le passage à l'acte. Cet ouvrage est une arme. Il est d'une grande force. C'est direct, c'est percutant, c'est provocant. La société est dans la ligne de mire et Darien appuie sur la gâchette. La balle a été tirée en 1897 et elle atteint toujours sa cible en 2020. Sa verve est si acérée qu'elle blesse encore aujourd'hui et qu'elle nous étonne.



Qui peut encore écrire comme on hurle, aujourd'hui ?



Darien. Cet “animal de combat”



Merci à vous M. Darien pour cette fraîcheur de plus d'un siècle et pour m'avoir fait découvrir en suivant votre sillage, un autre homme étonnant : Marius Jacob.



Et merci à toi Philou pour cette découverte. : )
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L'épaulette

N'imaginez rien. Attendez un peu, et vous verrez. Les terribles leçons de 1870 n'ont porté aucun fruit. On dit que l'expérience instruit les imbéciles; mais les Français ne sont pas des imbéciles, car l'expérience ne les instruit pas.
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Voleurs !

Darien me semble faire partie des plus grands écrivains français et pourtant Darien reste tristement méconnu. Son opposition farouche au "système", à l'establishment, fut constante et non feinte. Il n'était pas du genre à se "convertir" sur le tard. "Le voleur" est un livre admirable, "L'Épaulette" est très bon et le reste de son œuvre est presque toujours intéressant et plein d'enseignements.

Bon d'accord, Darien fut une fort mauvaise tête, guère enclin à la conciliation et à l'apaisement mais voilà le genre de caractère, bien trempé, qui manque fâcheusement en ces temps où le renoncement semble être devenu le seul horizon commun.

Mauvaises têtes, coléreux, insoumis, insatisfaits, rebelles obstinés, lisez Darien car vous y trouverez un frère d'esprit qui à plus d'un siècle de distance saura vous parler.
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Biribi

Darien était un libertaire. Dès le début de ce récit trop authentique pour ne pas être autobiographique, on le voit en conflit avec sa famille, témoignant d'un caractère indépendant et revêche, et même sans connaître le sujet du livre, je suis persuadé qu'au moment où on le voit s'engager dans l'armée, je me serais de toute façon dit : oula, quelle bêtise est-il en train de faire ?

Cette erreur de jeunesse, ce manque de clairvoyance, il va les payer au prix fort. Car dans les années 1880, période dorée pour les "compagnies disciplinaires" d'Afrique du Nord, alias Biribi, on ne plaisante ni avec l'insoumission, ni avec l'indiscipline.

Ayant lu juste avant l'enquête à charge du journaliste Jacques Dhur, ultérieure de plus de 15 ans au "roman" de Darien, je n'ai pas été foncièrement étonné par la nature des sévices psychologiques et physiques subis par ces bagnards (il n'y a pas d'autre mot). Cela ne fait que les confirmer, ce qui ne les rend pas moins gravissimes pour autant.

Ce qui semble incroyable en revanche, c'est que ni le précurseur Darien en 1890, ni Jacques Dhur en 1915, puis 1925, n'aient réussi à mettre fin à ce scandale, malgré leur médiatisation. Il faudra attendre Albert Londres pour voir les choses s'améliorer, et encore, ce qui porte hélas à croire que ces traitements honteux et inhumains étaient communément acceptés par l'opinion publique.

Darien écrit bien. Son style est imagé, parfois poignant, et je lirai certainement quelques-uns de ses autres romans, d'autant qu'ils ne sont pas non plus légion. Parfois, dans ses emportements de colère militants, il se montre un peu trop lyrique, si ce n'est pompeux, se rapprochant dangereusement du style grandiloquent (oh ! ah !) d'un Zévaco par exemple, et c'est dans ces apostrophes introspectives qu'il m'a parfois un peu gonflé.

Nonobstant, le témoignage en lui-même vaut le détour, et il constitue une preuve – s'il en était besoin – du caractère totalement contre-productif de ces usines à torture. Car ce que Darien a rapporté de Biribi, de son propre aveu, ce n'est pas une hypothétique soumission, contrition ou rédemption, pas même un peu d'amendement, non. Ce qu'il en a rapporté, c'est juste une haine inexpiable.
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La belle France

Il faut commencer par saluer les toutes jeunes éditions Prairial qui, plutôt que de nous donner à lire puis jeter, à jeter avant même que de lire, tel ouvrage d'inculte écrivant présenté comme une révélation ou un chef-d’œuvre, révélation et chef-d’œuvre qui seront engloutis, d'ici quelques heures ou même minutes, par une autre révélation et un autre chef-d’œuvre, a cru utile, et a eu évidemment raison de le croire, de rendre de nouveau disponible un texte tout bonnement extraordinaire.
Lien : http://www.juanasensio.com/a..
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La belle France

Des polémistes de cet acabit ,il n'y en a plus beaucoup à notre époque de vierges effarouchées par un mot plus haut que l'autre . Darien de son exil en Angleterre (après les lois scélérates" ) éructe , tonitrue contre ce qui dans la France de l'époque le fait vomir: le sabre (il est bien placé pour en parler de la Grand Muette après Biribi) ,le goupillon, le nationalisme cocardier , les saltimbanques de la propagande ... Et il ne se contente pas de vitupérer , il propose des remèdes au déferlement de la misère et de la bêtise.
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Le voleur

Un livre qui soulève de nombreux questionnements à travers les réflexions de Randal qui décortique la société bourgeoise, notre société, et les différentes réponses, toutes vaines, que l'homme a tenté d'y apporter: socialisme, anarchisme, nihilisme. Les digressions sont percutantes et pertinentes (lire les nombreuses citations) et s'appliquent encore aujourd'hui.

Le parcours et les aventures de Randal ne poussent pas à l'optimisme quand au sens de nos vies mais je me permets d'y lire, entre les lignes, une conclusion pour positiver un peu: face à ce monde où "tous les pas de l'humanité vers le bonheur sont des pas vers l'esclavage et le suicide", quelque soit notre choix de vie (businnessman, ouvrier, député ou voleur), sachons profiter de ce qui ne se monnaye pas, sachons remplir nos vies de ce qui rend notre présent radieux: l'amour et l'amitié.
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Biribi

Biribi nous donne à voir les pires sévices endurés par des hommes, au nom d'une discipline militaire cruelle et livrée à elle-même.

Biribi, apparaît comme le trou sans fond apparent où l'on précipite le malheureux qui s'est trompé de porte en s'engageant dans l'armée, et qui s'est laissé engluer dans l'ennui et la discipline.

Biribi rappelle que de telles abominations on pu perdurer pendant très longtemps, et qu'elles ne sont jamais très loin.
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Biribi

Biribi est un terme aux sonorités qui ne sont pas sans rappeler le babil d’un nourrisson, mais qui désigne tout autre chose; on est plus proche des souffrances de l’enfer que des douceurs des langes. Biribi désigne les camps disciplinaires où on envoyait les militaires récalcitrants, les insoumis, les indisciplinés. Avec se livre, présenté comme un roman, à la veine fortement autobiographique, Georges Darien fait oeuvre pie, en apportant son témoignage, sous forme de réquisitoire, contre un système abjecte de représailles institutionnalisé par le pays des droit de l’homme et du citoyen.



Justement, dans les années 1880, on refusait la qualité de citoyen à l’homme du rang, soumis à tous les caprices éhontés de leurs supérieurs; à peine leur était reconnu la qualité d’être humain, tant la litanie des vexations, des sévices, des tortures, voire des meurtres parfois, dont ces hommes furent victimes, présentée dans cette écrit, en manière de coup de point, est ici édifiante. L’abjection des chaouch, ces gardes chiourmes en majorité corses, torturant leurs camarades et montant des machinations contre leur têtes de turques; la corruption des gradés, faisant leur beurre sur la besogne de réprouvés corvéables à merci; l'hypocrisie foncière d’un système inhumain et injuste prônant la soumission aveugle et totale, la délation et la suspicion entre les soldats; tout est rendu frappant et émouvant dans cette oeuvre qui relève plus du pamphlet, du cri d’indignation, que du simple récit plus ou moins autobiographique.



Un brûlot donc, une bombe incendiaire, que cette oeuvre, dénotant un courage véritable et une belle liberté de conscience - quand on sait quel esprit militariste dominait la société française de cette époque-là -, expression à fleur de peau de la rage et de la colère qu’ont éveillé, en son auteur, l’expérience douloureuse des camps disciplinaires
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