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Citations de Ivan Jablonka (426)


J'ai rendez-vous avec Jean-Pierre Picca, conseiller du président pour la justice entre 2010 et 2012, aujourd'hui avocat à Paris dans un gros cabinet d'affaires de la place Vendôme. Alors que je patiente dans un salon avec dorures et parquet ciré, un bel homme en costume-cravate, chaleureux et affable, vient à ma rencontre. D'emblée, il me précise qu'il a pour habitude de na jamais répondre aux journalistes, mais ma démarche d'historien et de sociologue l'a intéressé. Il m'avertit qu'il ne tiendra aucun propos critique sur le président - il tiendra parole, jusqu'à être un peu langue de bois, mais la loyauté est une vertu qui se fait rare aujourd'hui, à une époque où le moindre secrétaire d’État évincé, la dernière compagne en date s'empressent de publier un livre assassin sur celui qui les a fait sortir de l'ombre.
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Ce n'est plus aux femmes de se remettre en cause, de se torturer sur leurs choix de vie, de se justifier à tout instant, de s'épuiser à concilier travail, maternité, vie de famille et loisirs. C'est aux hommes de rattraper leur retard sur la marche du monde. A eux de s'interroger sur le masculin, sans souscrire à la mythologie du héros es temps modernes qui mérite une médaille parce qu'il a programmé le lave-linge. Cette introspection n'aurait aucun sens, ni aucune efficacité, sans le concours de la société entière, dans tous les domaines - législation, fiscalité, protection sociale, organisation du travail, culture d'entreprise, civilité amoureuse, éducation familiale, pédagogie, enseignement, manières de vivre ensemble.
Nos Etats, qui valorisent tant l'égalité et la justice, manquent cruellement d'hommes épris d 'égalité et de justice. Nos démocraties ont un point aveugle : la justice de genre, qui exige de de faire disparaître les inégalités entre les sexes. Le défi pour les hommes n'est pas d'"aider" les femmes à devenir indépendantes, mais de changer le masculin pour qu'il ne les assujettisse pas.
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Il n’était pas programmé que Laëtitia, cette jeune fille radieuse aimée de tous, finisse comme un animal de boucherie. Mais, dès son enfance, elle a été déstabilisée, ballottée, négligée, accoutumée à vivre dans la peur, et ce long processus de fragilisation éclaire à la fois sa fin tragique et notre société tout entière. Pour détruire quelqu’un en temps de paix, il ne suffit pas de le tuer. Il faut d’abord le faire naître dans une atmosphère de violence et de chaos, le priver de sécurité affective, briser sa cellule familiale, ensuite le placer auprès d’un assistant familial pervers, ne pas s’en apercevoir et, enfin, quand tout est fini, exploiter politiquement sa mort.
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Ma liberté a été la capacité de m'abstraire de la satisfaction de mon père - de l'enfance qu'il voulait pour nous et qui était la réplique de son triple sauvetage en tant que survivant d'un génocide, orphelin de ses deux parents et brillant élève à l'école de la République.
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Subvertir le national,fuir les groupes, les voyages organisés,les clubs de vacances,les plages qui sont prises d'assaut, était une manière, pour une prof et un ingénieur, de profiter d'un progrès collectif sans suivre le troupeau, de concilier l'individualisme et le rapport aux autres, le bien-être et la culture, en un mélange qui paraissait atypique à la fois aux classes moyennes et à la grande bourgeoisie installée.
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Ivan Jablonka
Là est la vraie rupture de Nicolas Sarkozy avec ses prédécesseurs : par-delà leurs différences, De Gaulle et Mitterrand avaient la volonté de rassembler, c'est-à-dire de mettre en valeur ce qui unit les Français. C'est désormais le contraire. Sous Sarkozy, les pouvoirs publics ne sont plus des régulateurs de paix sociale. Le crimino- populisme des années Laetitia trahit la recherche de la division, l'instillation de la méfiance et de la haine dans le corps social–un président de la République blessant la République.
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Il n'y a pas besoin de le jeter contre un mur pour détruire un enfant. (...) Le biberon est coincé dans le lit, l'enfant boit tout seul, on ne le regarde pas, on ne lui parle pas, et l'enfant n'existe pas. (...) Quelque chose en lui va se casser à jamais.
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Un fait divers émerge, naît à la conscience publique, parce qu'il se trouve à l'intersection d'une histoire, d'un terrain médiatique, d'une sensibilité et d'un contexte politique. [..]
Ces convulsions horrifiques et baroques ne flattent pas tant la perversité du lecteur qu'elles le purgent, comme une catharsis, en l'aidant à surmonter les traumatismes du temps et à apprivoiser la mort.
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Les mots ont été, dans la bouche de Nicolas Sarkozy, comme la scie à métaux entre les mains de Tony Meilhon : un instrument de découpe, un tranchoir. Ses discours ont été un acte de division ; la société en est ressortie toute sanglante. C’est en ce sens que, par-delà l’émotion suscitée par sa mort, Laëtitia incarne la France. Pendant l’hiver 2011, elle a prêté son corps à une démocratie.
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Elle riait, pieds nus dans l'herbe, il faisait beau, elle était heureuse.
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Il y a une récidive, endémique elle aussi, mais souvent impunie : celle des délinquants en col blanc, par exemple les hommes politiques qui sautent du trafic d’influence à la corruption active et de l’abus de confiance au financement illégal de campagne.
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Mais Laëtitia ne compte pas seulement pour sa mort. Sa vie nous importe, parce qu’elle est un fait social. Elle incarne deux phénomènes plus grands qu’elle : la vulnérabilité des enfants et les violences subies par les femmes. Quand Laëtitia avait trois ans, son père a violé sa mère : ensuite, son père d’accueil a agressé sa sœur ; elle-même n’a vécu que dix-huit ans. Ces drames nous rappellent que nous vivons dans un monde où les femmes ne sont pas complètement des êtres de droit. Un monde où les victimes répondent à la hargne et aux coups par un silence résigné. Un huis clos à l’issue duquel ce sont toujours les mêmes qui meurent
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Je ne connais pas de récit de crime qui ne valorise le meurtrier aux dépens de la victime. Le meurtrier est là pour raconter, exprimer des regrets ou se vanter. De son procès, il est le point focal, sinon le héros. Je voudrais, au contraire, délivrer les femmes et les hommes de leur mort, les arracher au crime qui leur a fait perdre la vie et jusqu’à leur humanité. Non pas les honorer en tant que « victimes », car c’est encore les renvoyer à leur fin ; simplement les rétablir dans leur existence.
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Pourquoi va-t-on chez l’esthéticienne ?

Après tout, on peut tout faire toute seule : s’épiler, se maquiller, se mettre du vernis. Pour cela, il y a des rasoirs jetables, des appareils électriques, des crèmes, des produits de beauté. On peut aussi s’entraider, en demandant à sa mère ou à sa sœur de faire un henné, d’appliquer la cire au miel. Mais il y a encore une autre manière d’atteindre la beauté : aller chez l’esthéticienne.

L’esthéticienne est détentrice d’une compétence dont l’objet est la beauté et le bien-être. Elle entoure, conseille, rassure, valorise. Elle est la complice qui aide à être belle, plus belle. L’esthéticienne est celle qui prend soin de moi mieux que moi-même.
(p. 7)
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Quand je dis "ma grand-mère" , tout le monde pense à une mamie aux bajoues duveteuses qui me prend sur ses genoux pour me lire un conte ; mais Idesa est morte à l'âge de vingt-huit ans et je suis déjà plus vieux qu'elle.
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La mémoire collective a retenu l'engagement de Genet en faveur des nationalistes algériens, mais pas ses envolées lyriques à la gloire de la SS. Cette occultation est due, entre autres, à la vulgate selon laquelle ses romans ne seraient pas politiques, au contraire de son théâtre. Or non seulement les romans de Genet sont profondément politiques, mais ils reflètent sa fascination avouée et assumée pour le fascisme italien et surtout pour le nazisme. Il suffit, pour s'en convaincre, d'ouvrir "Pompes Funèbres", écrit en septembre 1944 et publié anonymement en 1947, qui comporte toutes les trente pages une apologie des SS, d'Hitler, de la Milice ou d'une tuerie commise par les trois précédents. Dans tous les autres romans, on perçoit les affinités de Genet avec le nazisme et ses métastases françaises.

En quoi consiste cette sympathie ? Est-elle comparable à celle des écrivains fascistes et des publicistes collaborationnistes ... ? Dans quelle mesure l'univers littéraire de Genet correspond-il à la Weltanschauung nazie ? La première étape consiste à déterminer les contours d'une célébration à la fois politique et esthétique ; mais on doit également s'attacher à fixer les causes de cette prise de position.

p. 155
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Non seulement les femmes travaillent davantage en cumulant leurs deux journées, mais elles ont aussi "la famille dans la tête". L'organisation du quotidien, incluant achats, inscriptions, rendez-vous, réservations, planifications, d'une vaccination à un anniversaire, d'un cours de judo à un spectacle de fin d'année, constitue une charge mentale qui n'entre dans aucune statistique. Les mères de famille gèrent donc plusieurs emplois du temps à la fois : celui du bureau, celui des enfants, celui de la famille et, quand elles y arrivent, le leur, prenant après tout le monde leurs propres rendez-vous chez le médecin, le dentiste, le coiffeur, etc. La vraie révolution aura lieu lorsque les hommes partageront cette charge mentale, en plus des tâches domestiques.
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Grâce aux conquêtes du XXème siècle, les femmes se sont progressivement libérées des servitudes et des stéréotypes. On pourrait rêver la même liberté pour le masculin : la possibilité de sortir du modèle de virilité obligatoire sans être exposé ni à la honte ni au ridicule.
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La vraie subversion est calme, réfléchie, obstinément indocile, elle se construit livre après livre en déplaçant les lignes derrière lesquelles nous sommes parqués.
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J'aimerais bien savoir en quoi je suis un homme - et même, si j'en suis un.
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