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Citations de J.M.G. Le Clézio (1813)


Les paysages sont vraiment beaux. Je ne m’en rassasierai jamais. Je les regarde, comme ça, le matin, à midi, ou le soir, parfois même la nuit, et je sens mon corps m’échapper, se confondre. Mon âme nage dans la joie, vaste, immense, dans la joie étendue de plaine jaune bordée de montagnes, arbres, ruisseaux, lits de cailloux, arbustes effilochés, trous, ombres, nuages, air dansant gonflé de chaleur. Plénitude ou vide total, je ne sais pas, qu’importe ? Mon esprit est là, collé étroitement aux contours des rochers, à l’écorce des arbres. Il vit avec lui, il vit avec moi, il vaque, il est espace, relief, couleur, érosion, odeurs, bruissements, bruits. Et il est plus que cela : il est le contemporain de ma vie. »
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Nous étions bousculés par les bourrasques qui nous faisaient pleurer.
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Quand j'étais celui dont on se nourrit, et non pas celui qui se nourrit, celui qui compose et non pas celui qui est composé. Je n'étais pas mort. je n'étais pas vivant. Je n'existais que dans le corps des autres, et je ne pouvais que par la puissance des autres. Le destin n'était pas mon destin. Par secousses microscopiques, le long du temps, ce qui était substance oscillait en empruntant les voies diverses. A quel moment le drame c'est-il engagé pour moi ? Dans quel corps d'homme ou de femme, dans quelle plante, dans quel morceau de roche ai-je commencé ma course vers mon visage ?
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Ce que je cherche, c'est mon reflet dans les miroirs. Il me fait peur, et il m'attire. C'est moi, et ce n'est plus moi. Je tourne sur moi-même, je regarde les couleurs vives, les tissus qui brillent. Mes yeux ne sont plus mes yeux. Ils sont pareils à des dessins, longs, arqués, en forme de feuille comme les yeux de Nada, en forme de flamme comme les yeux de Simone. J'ai déjà les petites rides qui sourient aux coins des yeux de la vieille Tagadirt. Ou les cernes profonds de Houriya quand son bébé allait naître sous la terre.
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Elle voulait retrouver les paroles de Geoffroy, tout ce qu'il disait en ce temps-là. C'était avant leur mariage, il y avait si longtemps. Il n'y avait pas eu la guerre, il n'y avait pas eu le ghetto de Saint-Martin, ni la fuite à travers les montagnes, jusqu'à Santa Anna. Tout était si jeune alors, si innocent. A San Remo, dans la petite chambre aux volets verts, l'après-midi, avec le bruissement des tourterelles dans le jardin, l'éclat de la mer. Ils faisaient l'amour, c'était long et doux, lumineux comme la brulure du soleil.
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Esther faisait attention à chaque détail, à chaque ombre. Elle regardait avec un soin presque douloureux tout ce qui était près ou lointain, la ligne de crête des Caïres sur le ciel, les pins hérissés au sommet des collines, les herbes épineuses, les pierres, les moucherons suspendus dans la lumière. Les cris des enfants, les rires des filles, chaque mot résonnait en elle bizarrement, deux ou trois fois, comme les aboiements des chiens. Ils étaient étrangers, incompréhensibles
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Elle ne savait pas pourquoi elle voulait ce silence. Simplement, c'était bien, c'était nécessaire. Alors, petit à petit, la peur s'en allait. La lumière du soleil, le ciel où les nuages commençaient à gonfler, et les grands champs d'herbes où les mouches et les abeilles restaient suspendues dans la lumière, les murailles sombres des montagnes et des forêts, tout cela pouvait continuer, encore, encore.
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Le bonheur n’existe pas ; c’est la première évidence. Mais c’est un autre bonheur qu’il faut peut-être savoir chercher, un bonheur de l’exactitude et de la conscience. S’il vient, en tout cas, c’est quand la vie a terminé son ouvrage. C’est quand la vie, par instants, ou bien jamais, ou bien dans une continuelle ardeur de la conscience, a cessé de lutter contre le monde et se couche sur lui ; c’est quand la vie est devenue mûre, cohérente et longue, chant profond qu’on cesse d’entendre ou de chanter avec sa gorge, mais qu’on joue soi-même, avec son corps, son esprit, et le corps et l’esprit de la matière voisine.
Alors il est bien possible que l’individu qui était sourd et aveugle laisse entrer en lui une force nouvelle, une force nouvelle qu’il avait pour ainsi dire toujours connue. Et que dans cette force, il y ait l’esprit des autres hommes, l’esprit des autres vies, l’unique onde du monde. Cela se peut. Etant accompli, étant la somme de tous les malheurs et de tous les espoirs, cette vie pourra n’être plus recluse. A force d’être soi, à force d’être soi dans le drame étroit, il se peut que cet homme dépasse tout à coup le seuil de sa prison et vive dans le monde entier. Ayant vu avec ses yeux, il verra avec les yeux des autres, et avec les yeux des objets. Ayant connu sa demeure, angle par angle, il reconnaîtra la demeure plus vaste et il vivra avec les millions de vies. Par le singulier, il touchera peut-être à l’universel. (…)
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Mais aucune de ces deux forces n’est vraiment favorable à l’homme. La nuit et le jour, le vide et le plein, ainsi conçus, sont deux monstres avides de faire souffrir et de détruire.
L’angoisse du jour est peut-être encore plus terrifiante que celle de la nuit. Car ici, nous ne sommes pas en proie à un ennemi visqueux qui se dérobe sans cesse ; nous sommes face à la dureté, à la cruauté, à la violence impitoyable du réel. Notre peur n’est pas d’un inconnu qui creuse son gouffre, mais d’une exaspération de l’être, d’une sorte de vertige d’existence qui nous extermine à force de s’étaler, de se montrer. Le trop visible est encore plus hostile que l’invisible. (…)
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NEZAHUALCOYOTL
OU LA FÊTE DE LA PAROLE



… cette poésie [de NEZAHUALCOYOTL] est aussi celle
d’un homme simple, qui nous dit avec force les choses
les plus émouvantes et les plus vraies de la vie de tous
les jours :



« Revêts-toi des fleurs
Des fleurs de l’ara des lacs,
Brillantes comme le soleil,
Des fleurs du corbeau,
Pare-toi, ici sur la terre,
Seulement ici.
Il en est ainsi
Pour un bref instant seulement,
Les fleurs, pour un instant,
Nous les avons apprêtées :
Déjà, on les porte vers la demeure du dieu,
Vers la demeure des Décharnés »…

p.134
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Tout ce qui en moi avait été endurci par les années d'attente, dans le dortoir froid de la pension Le Berre, à Rueil-Malmaison, toute cette cohorte de souvenirs et de mots que je portais comme des pierres, maintenant s'est effacée.
La nuit est longue, elle s'ajoute à toutes les nuits, au glissement des jours sur les îles de pierre, au mouvement de la mer, et je m'éloigne de ce feu qui me brûlait, qui m'avait armé au cœur.
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Et l’ivresse de la lumière entre en moi. Le soleil frôle l’horizon, mais sur la mer la nuit n’apporte pas d’inquiétude. Au contraire, il y a une douceur qui vient sur ce monde où nous sommes les seuls vivants à la surface de l’eau. Le ciel se dore et s’empourpre. La mer si sombre sous le soleil du zénith est à présent lisse et légère, pareille à une fumée violette qui se mêle aux nuages de l’horizon et voile le soleil.
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D'une façon générale, ce sont les éléments naturels qui les inspirent : les feuilles des arbres, les lignes de la forêt, les ruisseaux, les lacs, ou les rochers. Qu'y voyaient-ils que nous avons désappris à voir ?
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Elle entend réellement, à l’intérieur du bruit de la mer et du vent, dans les cris aigus des mouettes qui cherchent leur plage de la nuit, elle entend la douce voix qui répète sa complainte, la voix claire mais qui tremble un peu comme si elle savait déjà que la mort va venir l’éteindre, la voix pure comme l’eau qu’on boit sans se rassasier après les long jours de feu. C’est une musique qui naît du ciel et des nuages, qui résonne dans le sable des dunes, qui s’étend partout et qui vibre, même dans les feuilles sèches des chardons. Elle chante pour Lalla, pour elle seulement, elle l’enveloppe et la baigne de son eau douce, elle passe la main dans ses cheveux, sur son front, sur ses lèvres, elle dit son amour, elle descend sur elle et donne sa bénédiction.
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C’est seulement la voix du vent, la voix de la mer, du sable, la voix de la lumière qui éblouit et grise la volonté des hommes. Elle vient en même temps que le regard étranger, elle brise et arrache tout ce qui lui résiste sur la terre. Ensuite elle continue plus loin, vers l’horizon.
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Il n’y avait pas de fin à la liberté, elle était vaste comme l’étendue de la terre, belle et cruelle comme la lumière, douce comme les yeux de l’eau. Chaque jour, à la première aube, les hommes libres retournaient vers leur demeure, vers le sud, là où personne d’autre ne savait vivre… Ils s’en allaient, comme dans un rêve, ils disparaissaient.
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Tous hommes, enfants aux pieds ensanglantés, ils avançaient sans faire de bruit, comme des vaincus, sans prononcer une parole. On entendait seulement le bruit de leurs pas dans le sable, et le halètement court de leur souffle. Puis ils s’éloignaient lentement, en faisant rouler leurs fardeaux sur leurs reins, pareils à de drôles d’insectes après la tempête
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Il y a tant de silence ici, tant de solitude ! Seul le passage du vent dans les rochers et les broussailles, apportant la rumeur lointaine de la mer sur les récifs, mais c'est le bruit d'un monde sans hommes.
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C'est un monde sans mystère, et c'est pour cela que je sens ce regret.
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Au loin, les mirages flottaient entre ciel et terre, villes blanches, foires, caravanes de chameaux et d’ânes chargés de vivres, rêves affairés. Et les hommes étaient eux-mêmes semblables à des mirages, que la faim, la soif et la fatigue avaient fait naître sur la terre déserte.
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