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Critiques de Jean-Claude Forest (47)
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La jonque fantôme vue de l'orchestre

Jean-Claude Forest, je pense que ça été une de mes plus grandes découvertes dans les années 90 (oui, bon, j'étais pas en avance sur mon temps). J'ai commencé par Barbarella, vu que ça a toujours été sa série la plus connue. Puis je me suis aventurée un peu plus loin, et là, paf, je tombe sur Enfants, c'est l'Hydragon qui passe et La Jonque fantôme vue de l'orchestre. C'était bizarre, c'était enchanteur, et c'était de l'inédit pour moi. J'en ai gardé depuis un souvenir très singulier, comme une sorte de combinaison entre l'émerveillement et l'incompréhension. Et j'ai donc beaucoup attendu avant de relire l'album.





Ce qu'il faut savoir sur Jean-Claude Forest, ce n'est pas seulement qu'il est le père de l'audacieuse Barbarella (parce que ça, vous le saviez déjà, ou vous l'aviez déjà compris). Savoir de quelle façon il travaillait (ce dont j'ai eu connaissance très récemment) se révèle très intéressant, parce que ça permet de mieux appréhender un album de bande dessinée comme La Jonque fantôme vue de l'orchestre. Après tout un travail de tri de notes accumulées au cours du temps, et une fois qu'il tenait une idée générale, Forest écrivait un texte comme s'il s'agissait d'un roman ou d'une nouvelle. E.P. Jacobs procédait lui aussi de la même manière, mais on sait que Jacobs n'a jamais fait confiance au medium de la bande dessinée, alors que Forest, lui, y était très attaché depuis son enfance. C'était donc après avoir écrit son texte qu'il se mettait à concevoir son album. D'où un style très littéraire. Ce qui ne fait pas de Forest un meilleur ou un moins bon auteur de BD que d'autres - loin de moi de penser que ce qu'on appelle "roman graphique" (quoi que ça veuille bien dire, mais c'est un autre sujet) se situerait au-dessus du reste de la production de BD ! En revanche, il est clair que ce style "littéraire", ça a été une des grandes particularités de Forest, à une époque où la BD française était très imaginative et tentait pas mal d'expériences nouvelles.





Et La Jonque fantôme dans tout ça ? Titre curieux, pour une histoire curieuse, racontée de manière curieuse. Une histoire qui a visiblement pour cadre la Première guerre mondiale, et pour personnage principal Gaston Gamine, un jeune marin qui échoue sur une côte de la Saravonie Argovine (ce qui doit vous faire penser à un pays qui existait encore il n'y a pas si longtemps), décide de déserter, et rencontre Winnic Radbod, un vendeur de fenêtres hygiéniques, accompagné du coati Sabayon. Qu'est-ce qu'une fenêtre hygiénique ? C'est bien là que réside le mystère et le cœur de tout cet album. Gaston passera un sacré bout de temps à se poser la question, à n'oser la poser à Radbod, jusqu'à ce que lui et nous, lecteurs ahuris, saisissions, au moins en partie, de quoi il retourne. Sachez pour l'instant qu'une fenêtre hygiénique vous montre une villa sur la mer. Sachez qu'une fenêtre hygiénique, ça fait rêver ou ça fait peur. Sachez qu'une fenêtre hygiénique, c'est tout un monde.





Au-delà des dessins assez impressionnants et très travaillés, rappelant plus ou moins les gravures qui illustraient les romans de Jules Verne (ce qui n'est pas un hasard, puisque Forest adorait Jules Verne), c'est l'ensemble du travail graphique qui est très soigné. Pas tant le découpage, après tout classique, que la mise en page, clairement décorative ; j'en veux pour preuve la toute première planche. Mais... Mais le travail graphique perdrait beaucoup de son sens s'il n'y avait pas le texte, davantage développé en voix off que dans des dialogues entre personnages. On alterne sans cesse entre le narrateur omniscient (qui n'est autre que Forest, qui fait tout pour se montrer derrière un pseudo-narrateur anonyme) et ce que Gaston se raconte dans sa tête. C'est presque toujours teinté d'humour, malgré des thématiques sombres. Et surtout, il y a un jeu constant entre texte et dessin, Forest s'amusant à vous faire remarquer que oh, comme c'est pratique, alors que Gaston se noie, un escalier apparaît comme par magie, avec en sus un anneau pour s'y accrocher ! Ou encore que le dessinateur (mais qui peut-il être ?) a judicieusement placé un corbeau sur un paysage de neige dans l'image pour donner le ton. Vous avez de la méta-BD, ce qui n'est pas si courant. Mais de la méta-BD qui ne se prend pas au sérieux. Bref, c'est un peu comme si Forest se comportait en critique d'une peinture (il nous fait bien remarquer que certaines de ses images sont construites comme des tableaux), ou d'un roman, en insistant sur la façon dont il a choisi de conduire la narration. Sauf que c'est bel et bien un jeu, qui, cela dit, demande un peu de concentration de la part du lecteur. Voire beaucoup.





Je vais m'arrêter là pour le côté méta, parce que ça deviendrait lourd, mais avant j'ajouterai que la thématique théâtrale, centrale, rajoute du méta au méta. La Jonque fantôme vue de l'orchestre va en effet nous emmener assez loin, du côté de la guerre, toile de fond dont il est impossible de se dépêtrer, du spectacle (guerre ou théâtre), du côté de la mort, du temps qui se fige ou qui passe trop vite, du côté de la réalité à laquelle on aimerait échapper, et, par conséquent, du côté des rêves et d'un monde onirique qui est aussi un mirage (d'où le nom "Théâtre chimérique" qui va apparaître en cours de route). On pourrait d'ailleurs penser à Pirandello et à ses Géants de la montagne, avec le personnage de Cotrone qui a choisi de vivre parmi ses illusions. Ou on pourrait penser au film Céline et Julie vont en bateau, avec ses acteurs de théâtre qui rejouent indéfiniment les mêmes scènes. Ou aux Cités obscures. Ou bien, on peut juste se laisser porter par l'imagination de Jean-Claude Forest, entre rêves et réalité, avec la mort en plein milieu.

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Barbarella : Suivi de Les colères du Mange-Mi..

Quelle déception. Si vous cherchez une BD qui a extrêmement mal vieilli, elle est toute trouvée c'est celle-ci !!



L'histoire est décousue et n'a pas grand intérêt. Je comprends bien que cette héroine ai fait scandale a sa sortie. Et c'est très certainement ça qui en a fait son succès. Elle est quasi a poil tout le temps. Pas dérangent en soit mais son seul but est de coucher avec les plus beaux spécimens mâles de l'espace. Certes sa plastique parfaite en fait une très belle femme, mais complètement nympho et du coup sa crédibilité de super héroine est complètement foirée.

Et que dire des graphismes qui semblent peu travaillés. Un feutre, une esquisse et le tour est joué. Moi, qui aime les traits fins et très détaillés c'est plutôt raté.



Sans intérêt a mon sens et pourtant cette BD est recensée dans les BD de SF a découvrir. J'en reste sceptique.
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Leonid Beaudragon, tome 1 : Le fantôme du Mand..

Une BD qui m'a laissé un sentiment particulier. D'un côté, c'est l'une des oeuvres les plus drôles que je n'ai jamais lu ; mais de l'autre, ce qui s'annonçait comme le début glorieux d'une série débordante d'humour et d'imagination c'est in fine révélé une prouesse sans lendemain suivie de seulement deux tomes largement en deçà.



Triste. Il y avait un humour fou dans ce détective du surnaturel complètement à l'ouest confronté à un guerrier mandchou du Moyen-Age ayant décidé de venir hanter un immeuble haussmannien de la banlieue parisienne. La brochette de clients venue acheter l'immeuble valait son pesant de riz cantonnais, et l'explication finale était perchée comme un bateau sur la Mer de Glace. Et bien sûr, c'était la fidèle assistante du détective qui rattrapait régulièrement le coup.



Le dessin, au style assez caricatural et aux couleurs vives, pas forcément ma tasse de Souchong, avait l'avantage de présenter un excellent sens du mouvement et un art de la composition encore meilleur. Il y avait donc un sacré potentiel ; on ne peut que regretter qu'il n'ait pas été exploité plus avant.
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Ici même

Jean-Claude Forest (1930-1998) est un auteur de BD français, célèbre pour son imagination débordante, la finesse de son dessin et le sex-appeal de ses héroïnes telle Barbarella (portée à l'écran en 1968 par Roger Vadim avec Jane Fonda

dans le rôle-titre)

Il a participé au bouleversement de la BD francophone, en particulier de la bande dessinée dite « adulte » (voir Pif-Gadget, Pilote, L’Echo des Savanes, Métal Hurlant, Fluide Glacial…)

Ici avec le talent immense de Tardi il signe avec brio une BD-Roman graphique magnifiquement drôle, étrange, déjantée, onirique, politique style IVème république, érotique et héroïque avec ce Monsieur Même, incroyable personnage inattendu et si attachant! Une superbe découverte!
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Ici même

Monsieur Même est un personnage bien étrange. Pas seulement à cause du chapeau melon et de sa redingote élimée. Peut-être parce qu'il marche sur les murs avec sa casserole au bout d'un manche à balai. Il passe ainsi ses journées à ouvrir des portails sans descendre à terre. Ladite casserole servant à la pièce de monnaie rétribuant son étrange service.

Un ermite sur les murs.

L'impudique Julie va le sortir de sa torpeur en le faisant souffrir d'amour. Mais ça c'est compréhensible.



Mais que viennent faire un marinier-épicier et un président de la 3ème république avec son gouvernement et son armée dans cette histoire?



Pour cela il faudra lire ou relire ce que Tardi et Forest ont concocté il y a bien longtemps. Ce roman graphique, devenu un classique, où un homme se retrouve esclave d'une situation kafkaïenne.

Un chef d'oeuvre ici même.















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Ici même

Que le roman graphique soit! Et le roman graphique fut. C'était en 1979. Forest avait écrit, Tardi avait dessiné. Ici Même était né. Une déflagration dans l'univers de la BD, une explosion qui lissait la houppette tintinesque, déculottait Sylvain, déplumait la mouette rieuse, passait au bulldozer toutes les cours de récré.

Soudain, la bande dessinée faisait les yeux doux du côté de Kafka. Sans cafards, sans château, sans procès (ou presque). Avec des murs, des grilles, des clés, des bouts de propriété, des politiciens véreux. La bande dessinée glissait vers un absurde en noir et blanc , piétinait les plates-bandes d'Ubu, dynamitait les clichés de la vieille école à lorgnon et blouse grise. La bande dessinée se hissait vers les sommets.



Oui, des sommets! D'ailleurs, Arthur Même vit sur des murs. Exclusivement sur des murailles élevées et dans un mirador. Arthur Même surveille le domaine de Mornemont, véritable camp retranché, composé de parcelles labyrinthiques aussi closes que des oubliettes royales. Nul habitant ne peut franchir les grilles sans l'assentiment d'un Arthur, dépositaire des clés. Aristocrate de naissance, Arthur fut dépossédé des terres familiales mais conserva la jouissance des murs. Amer, revanchard, Arthur taxe les propriétaires d'un morceau du domaine à chaque ouverture de grille… Aux fins de financer un nouveau procès qui lui restituerait son dû. C'est dire que l'on se déteste à Mornemont. Fort heureusement, la propriété a les pieds dans l'eau d'un lac, ce qui permet l'approvisionnement du roi Arthur (sans couronne) par bateau épicier, sans danger. Le mur touche le lac.

S'obstiner c'est se condamner au funambulisme mural. A aimer Julie, l'unique amie qui l'aime bien comme elle aime les hommes. A échanger deux mots avec maman au téléphone. A rompre la solitude avec un épicier poursuivant le destin familial "de lac en lac, toujours plus à l'ouest" avant naufrage. A se faire chahuter par le président de la république dans un épisode surréaliste.



Lire Ici-même, c'est se frotter à des dialogues improbables et savoureux:



"- Vous voulez boire quelque chose ?

- Bah , si vous insistez …

- Je ne me souviens pas avoir insisté et je ne me souviens pas non plus avoir jamais compris pourquoi les gens boivent tant … je me demande si un jour quelqu’un m’expliquera ce qu’il y a dans le vin … Pour moi le vin et l’huile c’est pareil … avec le vin sur la langue les gens dérapent de la tête comme avec l’huile sur le pavé on dérape de la semelle ! Comment discuter avec des gens qui dérapent et qui, à tort, m’attribuent de l’insistance … Pourquoi pas de l’entêtement ?  »



La littérature a ses classiques. La bande dessinée également. Cette BD parue initialement dans "A suivre" me suit encore.
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Ici même

De toutes les BD de Tardi, Adèle Blanc sec ou Nestor Burma, adaptations de Léo Mallet ou mises en perspectives d'une période de l'histoire -14-18 , 39-45, la commune...- Ici-Même reste celle que je préfère.



Poétique, inventive, à la fois décapante d'ironie et pleine d'imagination, cette saga du haut des murs, cet enfermement perché (à tous les sens du mot) est un ...monument de fantaisie et de profondeur! Le scénario, absurde et décalé, est de J. Forest et la mise en images, lunaire et mélancolique, est de Tardi.



"Même"- c'est le nom du héros- arpente son territoire de faîtes-de-murs labyrinthique: il s'est fait gentiment spolier, depuis des générations, de tous ses terrains, il ne lui reste en (nue) propriété que les murs.



Le haut des murs, exactement. Il relève inlassablement les taxes, les péages de ses murs, c'est son seul revenu, son gagne-pain, toute sa journée y passe mais au péril de sa vie, toujours: en bas l'attendent chausses-trappes et chiens féroces... Donc jamais un pied à terre, il y a danger!!



Il est le funambule maniaque des créneaux, l'acrobate tâtillon d'un domaine en pointillé...



C'est aussi l'histoire d'une névrose qui guérit, d'un repliement qui s'ouvre, d'un solitaire quasi-autiste qui découvre l'autre, le sexe, l'amour, la vie..et redescend sur terre...



Une petite merveille en noir et blanc. A déguster avec immodération!
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Barbarella : Suivi de Les colères du Mange-Mi..

J'aimais bien Barbarella, avant de lire ses aventures. Je ne pouvais prononcer son nom sans penser aux cheveux blonds de Jane Fonda et aux bottines noires chères à Serge Gainsbourg. J'ai lu ses aventures il y a quelques jours. Je n'aurais pas dû.



Je ne m'attendais pas à une telle déception. L'héroïne, calquée sur la plastique de rêve de Brigitte Bardot est à moitié nue la plupart du temps et n'a quasiment qu'une chose en tête : coucher avec les plus beaux gosses de la Galaxie. Je comprends que ses aventures sans queue -si elle est toujours nue, ces messieurs, eux, sont évidement tous habillés- ni tête aient émoustillé une génération entière de lecteurs mais tout de même, je m'attendais à ce que les aventures aient un peu plus de "tenue" que ça. Parfois, la simple résolution d'une intrigue ou d'une mauvaise passe repose sur le dévêtement de son héroïne. L'auteur devait être fou amoureux de Bardot et on espère pour lui que son inspiratrice aura été aussi légère avec lui que son héroïne avec ses ennemis, amis, amants.



Sinon, bon, on ne comprend pas grand chose à ce qui se passe mais pire, on n'a pas tellement envie d'en savoir plus. Les enjeux sont ridicules, tirés par les cheveux, absurdes. Si cela a jamais été bon un jour, ce dont je doute, on va dire que cela a terriblement mal vieilli.



Le réalisateur de Drive va adapter la Bd en série télé. On lui souhaite bien du courage.



Barbarella. garde tes bottines (et tes histoires !)
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Les Naufragés du Temps, tome 1 : L'Etoile end..

Pour présenter Jean-Claude Forest, le (un temps) scénariste de cette série, il suffit d'accrocher son nom à celui d'une des plus célèbres héroïnes de BD, Barbarella, pour qui il réalisa aussi la part graphique. Cette fille de papier, en 1962, surprenait le lectorat par son univers futuriste, débridé et fantaisiste. Il n'en reste pas moins que 4 des 10 premiers tomes des "Naufragés du temps" constituent un autre pan important de sa bibliographie où il reprend ses idées science-fictionnesques déjantées et atypiques.

Il s'y acoquine avec Paul Gillon, le dessinateur, qui finira seul la série. Ce dernier y apporta sa patte irremplaçable.

La série s'amorce en France, en 1964 et en feuilleton dans le premier numéro du magazine Chouchou, le temps de 9 numéros; puis en 1974 en album.



"Celui qui dort parmi les étoiles"



1990. La Terre subit le Grand Fléau: de gigantesques spores (E.T. ?) explosent en basse atmosphère, tuent et menacent la survie de l'humanité. L'idée germe et prend corps d'un couple, Christopher et Valérie en Adam et Eve des temps modernes, mis en état d'hibernation dans deux cocons de cristal en orbite elliptique terrestre. Les oeufs de survie frôleront la Terre tous les 125 ans jusqu'à ce que le Berceau puisse à nouveau "protéger leurs existences et celles de leurs enfants".



2990. la Terre et les hommes, contre toute attente, ont survécu, le Grand Fléau s'en est allé. Les Hommes sont désormais en capacité de s'affranchir des distances interstellaires et s'apprêtent à coloniser d'autres planètes hors Système Solaire. Christopher est récupéré vivant dans son cocon. La capsule de Valérie a disparu des écrans-radars un siècle plus tôt. "Les hommes de l'avenir sauront t'ils recueillir les survivants du passé ?". Le Grand Fléau, mille ans assoupi, amorce une seconde vague; les hommes doivent quitter le Système Solaire. Christopher ne peut s'y résoudre en Adam abandonnant Eve.

"Son visage est le dernier visage de femme qu'il m'a été donné de voir au XXème siècle. Je crois qu'elle était belle..."

Une jeune scientifique de 2990, va l'aider à retrouver Valérie. Son prénom; Mara pour qui s'amorce une longue histoire d'amour contrarié ... sortez les mouchoirs.



Le postulat de départ est posé. Il est classique, fut sans doute novateur pour l'univers BD de l'époque, même si on pense au roman "La nuit des temps" de Barjavel (1969) qui lui-même ... Mais l'essentiel des influences à l'oeuvre n'est pas tant dans ce syndrome "au bois dormant" que dans la description fouillée, graphique et écrite, de mondes tels que Jack Vance en avait dévoilé dans ses romans et nouvelles. Sur le fil d'idées inspirées faune et flore se posent des dessins novateurs de toute beauté. Les personnages vont visiter un système solaire plus rêvé que réel, mais si crédible et réaliste. C'est, ici, ce qui devait plaire en 1974 (et plait encore sans réelle nostalgie): une relative fraîcheur de thème, une forme hors sentiers battus ... un fond au second plan qui n'avait guère d'importance.



Une multitude d'étrangetés spatiales: lieux pour le moins pittoresques, faune, flore, humains et E.T. associés (même si on a affaire ici à de banals rats en guise de petits hommes verts), s'étale sous les yeux du lecteur étonné et ravi. S'amorcent des rencontres surprenantes d'une planète à l'autre. Se tisse, peu à peu, un étonnant bestiaire visuel de space-opera, d'êtres tour à tour menaçants ou sages, burlesques ou plausibles, absurdes ou réalistes. On entrevoit une faune de l'espace qui, on l'espère s'étoffera d'autres spécimens au cours des épisodes ultérieurs.



On rencontre par exemple:

_ ces étonnants Métalopodes: mille-feuilles de lamelles métalliques agglutinées, glissant les unes sur les autres et amorçant les silhouettes mobiles de fantômes menaçants.

_ Des simili dauphins, aux ailes/voiles de raies-manta, capables de transporter dans une poche dorsale leur progéniture et accessoirement nos héros vêtus de scaphandres.

_ Des vaisseaux E.T. comme de lourdes chauve-souris mécaniques (presque semblables aux ornithoptères du Dune de David Lynch) accrochées, au repos, tête en bas, aux falaises surplombant les océans de Venus.

_ Un fleuve annulaire satellisé autour de Limavan, satellite de Saturne. Son nom: Thanator, le Fleuve des Morts, "aux eaux noires et transparentes comme l'espace", sur lequel flottent des atolls-chrysanthèmes, les péniches des morts et des trains de cercueils conduits par des"carons" qui font passer le Styx.

_ Des robots qui ressemblent aux R2D2 des Starwars à venir.

_ Sur Venus, sans doute terra-formée car devenu océan, des villes flottantes fouettées de vents de méthane et de soufre, drossées par temps de tempête ...



Ce fut me concernant une relecture, une redécouverte amusée et emballée d'une BD qui n'a pas pris une ride et qui, sous les yeux du lecteur retrouve tout ce pourquoi elle fut créée: la surprise, l'étonnement, le dépaysement ... en un mot l'émerveillement.

En un mot je conseille.



A suivre.
Lien : https://laconvergenceparalle..
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Les Naufragés du Temps, tome 1 : L'Etoile end..

A la fin du XXe siècle, un grand fléau menace la Terre. Pour sauver l'humanité on endors un couple qui survivront dans l'espace indéfiniment jusqu'à ce enfin la Terre soit de nouveau accueillante. Mille ans plus tard on réveille l'homme, Christopher, et pourtant l'avenir de la Terre est plus que jamais compromis.



Les naufragés du temps est un space opéra qui date de 1974.

le héros, Christopher, est resté endormi pendant mille ans et retrouve une planète en proie au Grand Fléau. Il s'enfuit avec Mara avec une idée en tête : retrouver la jeune femme endormie pendant 1000 ans avec lui dans l'espace.

Notre couple va donc sillonner l'espace, découvrir des mondes et des civilisations et affronter bien des dangers. De la science-fiction classique qui reste un basique plaisant à lire malgré le vieillissement de la narration. Les lieux et les actions s'enchainent très vite et il y a peu de place pour les personnages secondaires.

Le dessin réaliste fait un peu démodé dans les constructions futuristes mais pour le reste il n'a pas trop mal vieilli en dehors de la colorisation plutôt vilaine et terne.
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Les naufragés du temps, Tome 3 : Labyrinthes

Suite des aventures de Chris-Orphée poursuivant à travers la galaxie son Eurydice-Valérie . Il la retrouve en curieuse posture en danseuse érotique dans la taverne du Tapir ,le boss mafieux cosmique. La scène préfigure la situation de Leia dans la taverne de Jabba le Hutt . Beaucoup de personnages féminins , Quinine la féline, Mara la teneuse de chandelle, Bébé la cracheuse de feu (Forest laisse libre cours à son imagination sensuelle) qui compliquent la vie du héros . Péripéties improbables (et l’inévitable savant fou ) et inventivité débridée mais toujours ces couleurs peu ragoûtantes
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Ici même

Mon premier Tardi. J'avais 15 ans. Et j'avoue que je ne comprenais rien.

Je l'ai relu depuis et je ne sais si c'est parce que c'était le premier, parce qu'il m'avait paru étrange, mais c'est un de mes préféré.

Le monde d'Ici-même est ubuesque, inventif, érotique, poétique. Il n'a pas de sens, mais est-ce toujours utile ?

Pour Tardi, sans doute pas.

C'était aussi une de mes premières BD en noir et blanc et surtout une sortie violente mais extraordinaire du monde de la BD franco-belge classique (Spirou et compagnie).

Les chocs sont toujours salutaires en matière de lecture. Ils font grandir.

Développez votre imagination, c'est ici-même que ça se passe.
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Ici même

À défaut de régner, Arthur Même marche sur le pays clos de Mornemont. Morne pays duquel Arthur est le prince attitré , depuis une décision farfelue d'un antique roi, Mornemont est haché en propriétés dûment séparées par de hauts murs et de hautes grilles que possède et qu'ouvre Arthur, y gagnant là sa vie et ses misères. Car Arthur, tout prince sans trône qu'il soit, n'a pas renoncé à recouvrer son bien. En procès interminables il attaque, seul, ceux qui l'ont dépouillé, et dont il prononce les noms avec un mépris souverain. Sans personne à ses côtés, Arthur se méfie de tout et tous, exècre les chiens qui aboient, jure contre le mauvais temps qui le rendra malade, peste contre ces gens qui souhaitent sortir de chez eux à des heures indues.



Trois personnes trouvent une grâce toute relative à ses yeux. L'épicier, d'abord, qui non content de ravitailler et de délivrer le courrier, n'est jamais avare de bons mots ou d'aphorismes. Le petit garçon du Bout, lecteur de Mickey Magazine, est le garant d'une innocence simple et salvatrice. Enfin, Julie Maillard, fille d'une famille honnie, dont tombe amoureux Arthur, l'ayant surprise nue, dans sa salle de bain. Fille aux amours libres et assumées, Julie suscite une adoration et une jalousie aussi violentes l'une que l'autre chez Arthur, le seul à ne pas la toucher. Le huis-clos du pays clos gagne finalement une dimension internationale, lorsque le Président de la République voisine, pressentant les futurs résultats désastreux de la prochaine élection, se met en tête de trouver une porte de sortie pour lui et les siens, et une base arrière pour sa reconquête du pouvoir. Mornemont, pays en tout point fictif, y compris dans le récit, rencontre alors la grande Histoire et c'est sur l'autel de la raison d'Etat que la quête d'Arthur Même sera finalement résolue.



Ici même est un roman graphique riche, tant du point de vue du graphisme que du verbe. Quiconque connaît un peu l'œuvre de Tardi sait les détails que l'auteur y met, et connaît le trait si particulier, volontiers appuyé et sombre, qui le rend immédiatement reconnaissable. L'esprit des deux auteurs, Forest et Tardi, plane aussi sur cette œuvre, résolument nouvelle (par son format, par son découpage) à l'époque où elle fut publiée, et notamment sur son aspect littéraire. L'histoire un peu absurde de cet homme, Arthur Même, trouve une résonance dans les dialogues, volontiers absurdes et truculents, où l'on joue avec les mots, où l'on les prend au pied de la lettre, bien que toutes les lettres n'aient pas de pieds. Les mots, dans Ici même, ont une vie propre ; ils servent l'histoire, bien-sûr, mais ils digressent aussi, ils divaguent, ils reviennent à leurs sens premiers comme pour mieux rappeler la légèreté avec lesquels on les emploie. Tout ceci donne à la bande-dessinée une dimension poétique, conférant une profondeur à chaque case dont on peut examiner le détail graphique ou le sens littéral.



Ici même dresse le portait tragique d'un homme seul. Son quotidien est quelque peu triste, son combat est à la fois héroïque et absurde. Pour recouvrer un domaine que les infortunes familiales ont perdu, Arthur Même use de toute son énergie et de toute sa raison. Il est l'individu face à la collectivité qui le moque, qui joue avec lui comme on joue avec un pion, et il suffit que la politique s'en mêle pour que sa situation soit bouleversée. En cela, la politique est vue par son côté essentiellement machiavélique : le calcul politique, tout habillé de beaux mots et de belles intentions apparentes qu'il soit, reste tout petit. Au fil de l'œuvre, Arthur Même, dans ce Mornemont qui est pour lui une prison, un endroit qu'il n'a jamais quitté, ainsi que le lecteur, découvrent les équilibres instables de la vie (ainsi cette détestation mutuelle entre les habitants et Arthur Même qui fondent pourtant l'équilibre de Mornemont), les amours imparfaites (la relation entre Arthur Même et Julie Maillard), les amitiés insoupçonnées (celle entre Arthur et l'épicier), tout cela formant une imperfection salvatrice.
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Ici même

L' alliance du regretté Forest et de l'immense Tardi, donne un récit poétique et onirique très original.

C'était la grande période du mensuel A SUIVRE.

Mention pour la maison d' Arthur Même!

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Ici même

Galimatias et brouillamini !





Sorti en 79 sous forme d’un album, ‘Ici Même’ ou ‘La vie sans cassoulet’ est un véritable roman graphique avant l’heure : 200 pages en noir et blanc scénarisées par Jean-Claude Forest (1930-1998, le père spirituel de ‘Barbarella’, auteur des ‘Naufragés du temps’ pour Paul Gillon) et mises en images par Jacques Tardi, juste après ‘Griffu’ et avant ‘Le secret de la salamandre’.





Mr. Même, installé dans sa minuscule guérite au sommet de l’un des nombreux murs du domaine de Richemont, dit le ‘Pays clos’, qui a appartenu autrefois à sa famille, et dont il ne possède justement plus que les murs de séparation entre les multiples propriétés qui le composent, passe sont temps à ouvrir et à refermer, contre argent comptant, les portes et les grilles du vaste domaine qui permettent à ses habitants de circuler à l’intérieur du domaine et bien sûr d’y entrer et d’en sortir. En procès avec les occupants de son ancien bien dans le but de récupérer celui-ci et amoureux de la belle et facile Julie, Mr. Même passe une grande partie de son temps à discuter avec l’épicier flottant sans savoir que le Président de la République, persuadé qu’il va perdre les prochaines élections, se prépare à envahir le micro-état du Pays clos pour s’y réfugier…





Sympathique réflexion sur le temps qu’il fait et le temps qui passe, ‘Ici Même’, comme on dirait ‘Ici Londres’, est le dernier ilot de résistance contre le ‘bédéiquement’ correct : un scénario à la mords-moi le nœud versant dans la plus pure poésie-folie sur fond de politicards pervers et corrompus (déjà ?), bénéficiant des élégants dialogues de Jean-Claude Forest et du dessin érotico-onirique complice de Jacques Tardi, et ce pour le plus grand plaisir des amateurs d’histoires extraordinaires !

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Les Naufragés du Temps, tome 2 : La Mort sinu..

On retrouve Christopher le survivant sur l’étrange planète Limavan , son fleuve des morts où naviguent les Carons et les sépultures. Il recherche Valérie son alter égo féminin , objet de culte de la part des rats envahisseurs du système , les Trasses. Il y rencontre des quantités d’êtres surprenants : batraciens , anguilles , myriapodes géants .Il y côtoient des personnages non moins étranges : Chinois bleu , femme-panthère, savant fou . Et toujours partagé entre ses deux femmes Valérie la blonde issue d’un ovoïde de cristal et Mara la brune enfermée dans un cube opaque . Toujours beaucoup d’invention ,des couleurs gerbatoires et au total ça se relit avec plaisir .
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Les Naufragés du Temps, tome 1 : L'Etoile end..

Une Terre dystopique menacée par un fléau à dégaine de virus qui revient avec régularité (curieux , ça ne vous rappelle rien ?) . Le héros ,mis en conserve dans l’espace mille ans auparavant pour ,éventuellement, préserver l’espèce humaine est récupéré . Cet Adam virtuel ( renommé Christopher) a perdu son Eve (alias Valérie) disparue dans l’espace. Sa recherche sera le moteur de la série (reprise d’Orphée et Eurydice) .Côté positif une imagination débridée et originale , recyclant avec talent les mythes traditionnels , qui multiplie les êtres ( métallopodes,trasses, cyborgs ..) , les paysages ( le fleuve Styx ,splendide ,les océans de Vénus) ,les peuples et leurs coutumes étranges . Côté négatif , des couleurs assez hideuses, une dramatisation excessive (personnage de Mara) ,des dialogues ampoulés . C’est tout de même de qualité.
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Il faut y croire pour le voir

Le début de ce récit est plutôt sympathique d'un premier abord. Un vieil écrivain arrive dans un village breton à la demande du curé afin d'y éclaircir un mystère lié à des déplacements de tombeau. On se dit qu'on va lire une grande aventure intéressante mais hélas il n'en est rien...



Très vite, les cases sont remplies de bulles extrêmement bavardes pour pas grand chose. Nous avons droit également après le maïs transgénique, à des chats génétiquement modifiés qui parlent et qui savent même téléphoner. Bref, on sombre dans la pire de mes horreurs : l'absurde !!! Je ne le fais pas exprès de tomber dessus, c'est un hasard. Rien ne prédisposait à cela quand on commence cette lecture.



Bon, on a droit également à la star du porno italien la Cicciolina qui s'amourache de notre vieil homme. Et cette histoire qui n'en termine plus... Je ne donnerai pas la note minimale car les dialogues bien qu'assommants restent de qualité avec un rendu assez sympathique. Je comprends que cela puisse plaire.
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Ici même

Le roman graphique du jour est un one-shot de 170 planches en noir et blanc. Sa première édition remonte à 1979 dans la collection « Les romans (A suivre) » de Casterman. Elle a été prépubliée dans les numéros 1 à 12 de la revue (A suivre) entre février 1978 et janvier 1979. Le dessin et l’encrage sont le fait de Jacques Tardi tandis que le scénario est de Jean-Claude Forest.



Notre promenade aura parfois le goût de la chasse au trésor (ou du geocaching), certaines parties de l’intrigue seront donc forcément dévoilées.



La France, terre de contrastes, terre de fantasmes, propose un tel choix de destinations pittoresques que vous vous retrouvez un peu par hasard dans le Pays Clos, un endroit dont vous n’aviez jamais entendu parler jusqu’à présent, une bourgade coupée du monde sur le sol français. Après quelques minutes de navigation sur un vaporetto rappelant Venise, vous voici accueilli par un guide tout aussi pittoresque. Le type, grand, mince, portant un chapeau melon et un costume froissé, un long bâton de bois terminé par un panier posé négligemment sur l’épaule, ne descend pas de son mur duquel il vous contemple.



- Bonjour à toutes et à tous, je me présente, Arthur Même, propriétaire et guide de ces lieux ! Je suis ici pour vous faire le tour du Pays Clos, vous relater son historique, ses habitants, sa situation unique ! Si vous voulez bien vous donner la peine de monter …



Avec vos camarades de bateau, vous vous exécutez, et à votre grande surprise, vous marchez sur cet étroit mur en toute assurance. La visite commence et votre guide se retourne vers le groupe qui marche en file derrière lui.



- Vous vous trouvez actuellement sur ma propriété, celle des Même, et tout ce que vous pouvez voir autour et dans ces murs également. Malheureusement, par une suite de circonstances que seule l’administration française peut générer, toutes les habitations ainsi que les terrains compris entre ces murs ne sont plus miens… Pour tout vous dire, je suis en procès avec la totalité de la population pour les récupérer ! En attendant, ils ne peuvent aller et venir sans mon consentement, c’est pourquoi je fais payer un droit d’ouverture à chaque entrée et sortie. C’est la raison d’être de mon escarcelle, dit-il en désignant son panier.



Autour de vous, vous voyez de belles propriétés, plutôt bourgeoises, totalement entourées de murs, formant un labyrinthe de plusieurs kilomètres carrés. Des chiens jappent et aboient au loin, tandis que vous vous rapprochez d’une sorte de cagibi construit sur le mur lui-même.



- Voici ma demeure, que nous allons traverser. Merci de ne pas faire attention au désordre.



Ridiculement petite, la demeure d’Arthur Même semble pourtant très confortable et effectivement très encombrée. Une pile de tracts, présentée par un panneau SERVEZ-VOUS, trône juste à la sortie. Vous en prenez un et commencez à lire.



"Dans la préface de ICI MÊME, nous apprenons que la collaboration entre les deux auteurs fut plus floue qu’un simple partage des tâches : les personnages et leurs caractéristiques viennent de Tardi, tout comme la mise en page, et très peu d’échanges furent tenus pendant la livraison de ces planches : une symbiose presque parfaite a donc mené cette œuvre déroutante.



N’étant pas un grand spécialiste de Tardi, ni même un bon client de cet auteur, cette bande dessinée a pourtant toujours été présente dans mon inconscient et je regrette de ne pas avoir pu la posséder dans la collection originale, un grand format souple identique aux Corto Maltese de Hugo Pratt. Avec une patine et un nombre de pages identiques, elle fait partie des livres uniques en leur genre, générés par la créativité des années 70, tenant autant des fumetti que des films de Bertrand Blier ou de Claude Chabrol.



Nous faisons ainsi connaissance avec un panel de personnages hauts en couleurs : il y a Julie, jeune fille nymphomane extravertie et libérée, le gamin du Bout très attaché à ses numéros de Mickey, l’épicier qui vient régulièrement par bateau approvisionner Arthur, le Président du Conseil (l’histoire semble se passer dans les années folles), et tout un tas de familles dysfonctionnelles, méchantes comme les Monstres de Dino Risi.



Arthur chasse les papiers monnaie et ceux qui lui rendront sa propriété, avec l’aide d’avocats proches du pouvoir en place. Forest en profite pour introduire une faune politique dépravée, nous transportant soudainement à Paris, et laisse libre cours à sa plume pour produire des discours pompeux, trop protocolaires, sournois comme une législation obscure et annotée de toute part.



En discutant avec l’épicier, il développe un humour absurde, et laisse de larges parts de non-sens dans les images fantasmées par Même du haut de ses murs. Il faut dire que les onze chapitres de ICI MÊME ont été prépubliés sans filet. Les auteurs n’avaient pas de deuxième chance, ce qui existait ne pouvait être défait.



Il arrive donc que quelques longueurs et digressions rendent le tout un peu indigeste, l’histoire n’avançant pas énormément, les personnages paraissant par moments un peu coincés dans leur décor irréel. J’y vois les prémices de Marc-Antoine Mathieu et de son Julius Corentin Acquefacques, la cité étant remplacée par un très petit état souverain moyen-âgeux.

Il est sans doute préférable de lire ICI MÊME chapitre par chapitre, afin de retrouver l’univers à petites doses. Le noir et blanc de Tardi n’a rien de flou ou de stylisé, il est dans la tradition de la ligne claire, mais dose parfaitement les ombres et inverse parfois les tons, les constructions ou la végétation formées en noir écrasant. Il a son trait caractéristique, plus gras déjà mais pas très éloigné de celui Adèle Blanc-Sec, et sa caractérisation des visages fait des merveilles visuelles : par moments, on y décèle des images qui pourraient directement provenir d’un épisode du Monty Python’s Flying Circus."



Vous entendez une cloche tinter. C’est Arthur Même qui a terminé la visite, pendant que vous étiez perdu dans son tract.



- N’oubliez pas le guide messieurs dames ! Et n’hésitez pas à revenir ! Qui sait, la prochaine fois, je pourrai peut-être vous faire visiter toutes ces demeures…
Lien : http://www.brucetringale.com
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Mystérieuse, matin, midi et soir

L'Île Pourquoi

Avec ce titre énigmatique, est-ce d'une femme dont parle Jean-Claude Forest ? presque, en fait il s'agit d'une île - en hommage à l'Île Mystérieuse de Jule Verne - où nous allons suivre les aventures fantastiques d'un groupe d'aventuriers, ces derniers la nomme l'Île Pourquoi, parce qu'elle a l'exacte forme d'un point d'interrogation. Les récits de science-fiction de Forest ont un charme particulier, son trait est immédiatement reconnaissable, la finesse de son humour, son bestiaire et sa poésie nous transportent complétement dans un "ailleurs" qui nous semble pourtant familier. L'invention de l'Arbre Minuit, est tout simplement génial, cet arbre, labyrinthe gigantesque, devient un micro-monde à lui tout-seul, l'incarnation d'un fantasme de gosse. Forest s'amuse à parodier le roman de Verne, tout en respectant sa trame classique, les pirates y sont aussi présents ainsi qu'un personnage qui remplace celui de Nemo de manière surprenante, cet ange protecteur de nos aventuriers tisse un lien avec autre ouvrage (cultissime) de Forest, et certains d'entre eux se retrouveront d'ailleurs dans une autre série, dont la dinguerie m'enchante : Hypocrite. D'abord découvert dans l'excellente collection Histoires Fantastiques chez Dargaud, mais dans une version colorisée ignoble - sauf si on est un inconditionnel du vintage seventies - on a maintenant la chance de pouvoir relire ce titre dans la collection Éperluette de L'Association, retour au noir et blanc, ouf, et dans la version définitive de l'auteur et dans un format différent.
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