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Critiques de Jean Hatzfeld (262)
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La stratégie des antilopes

Troisième volet de la trilogie rwandaise : une réconciliation entre bourreaux et victimes ?



Troisième volet de son terrible récit à propos du génocide rwandais. Après "Dans le nu de la vie" (2000), où il recueillait avec une extraordinaire sensibilité les témoignages des survivants des collines de Nyamata, puis "Une saison de machettes" (2003), où avec une étonnante détermination il parvenait à faire parler les génocidaires enfermés dans le pénitencier de Rilima, le voici qui relate en 2007, toujours principalement par la voix des acteurs eux-mêmes, le retour des génocidaires ayant avoué, graciés après 7 à 10 ans de prison dans le cadre de la politique officielle de réconciliation, sur le lieu de leurs "exploits", leurs réactions et celles des survivants confrontés à cette situation...



"On formait une ligne de deux mille prisonniers. Chemin faisant, on entendait des amitiés, des moqueries ou des railleries, raison pour laquelle on rentrait nos chants pour ne pas attiser l'attention. Je me disais dans mon for intérieur : C'est incroyable, avoir pitié de nous à ce point-là, ça ne devrait pas exister."



"Au centre, ce n'était plus chaud comme auparavant. La pauvreté et le découragement avaient nettoyé les petits cabarets des bons mots. Toutefois, je voyais que les deux camps avaient été sévèrement sensibilisés. Les Hutus avaient appris à raccrocher leur méchanceté, les Tutsis à raccrocher leur rancune."



"Au fond, qui parle de pardon ? Les Tutsis, les Hutus, les prisonniers libérés, leurs familles ? Aucun d'eux, ce sont les organisations humanitaires. Elles importent le pardon au Rwanda, et elles l'enveloppent de beaucoup de dollars pour nous convaincre."



"On demandait : que se passe-t-il de nouveau ? Les gouvernants épaulent les Hutus, ils ne nous regardent plus, ils ne nous considèrent aucunement. Comme on ne pouvait montrer de colère, on échangeait des blagues. On racontait : au fond, la chance aime les Hutus : ils tuent, ils ne sont pas tués ; ils s'enfuient au Congo, ils sont ramenés gratuitement ; ils vont en prison, ils sortent gras et bien reposés ; ils brûlent nos maisons, ils retrouvent les leurs sans anicroches, avec à l'intérieur les épouses pour cuire la marmite et faire les amitiés nocturnes."



Dans ce troisième volet, Hatzfeld, avec toujours le même art extraordinaire de susciter et sobrement mettre en scène les confidences, poursuit, avec peu à peu le recul que le temps introduit, sa bouleversante quête du comprendre et du rendre dicible l'indicible... Une œuvre qui remue nécessairement en grande profondeur le lecteur.

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La stratégie des antilopes

Comment survivre à la tragédie du Rwanda ??

A travers divers témoignages, habilement mis en scène, Jean Hatzfeld nous fait découvrir ce qu'a été ce génocide des tutsis par les Hutus

Ils se connaissaient, étaient voisins, anciens camarades d'école... mais une furie savamment orchestrée, s'est emparée des uns qui massacrèrent les autres

Comment peut-on vivre à nouveau ensemble après cela?

Le repentir et le pardon peuvent-ils être sincères?

Autant de questions qui sont abordées avec beaucoup de pudeur et délicatesse

Une bonne approche du Rwanda d'aujourd'hui

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La stratégie des antilopes

« La stratégie des antilopes » est le troisième livre de Jean Hatzfeld consacré au génocide au Rwanda en 1994 et qui prend la suite des deux précédents, « Dans le nu de la vie » et « Une saison de machettes ». Si le premier était consacré au recueil des témoignages des rescapés et le second à ceux des tueurs hutus, ce dernier ouvrage revient, quelques années plus tard, vers tous les personnages des deux précédents tomes, hantés par le souvenir des fantômes qui les entourent désormais.



En janvier 2003, un communiqué officiel inattendu du président rwandais annonce à la radio la libération d'une première vague de 40 000 détenus, tous des grands tueurs condamnés pour génocide, dans six pénitenciers du pays. C'est suite à cette décision que le journaliste retrouve sur les collines entourant Nyamata la bande de Hutus qui a participé à « Une saison de machettes », au côté des rescapés tutsis qu'il avait interrogés dans son premier livre.

Car après le sang et l'horreur, un nouveau voisinage hallucinant s'instaure, celui des bourreaux et des victimes. Tous doivent réapprendre à vivre ensemble au nom de la réconciliation nationale. Cette « réconciliation » est avant tout politique afin de reconstruire un pays qui, pour se relever de ses cendres, a besoin des Tutsis tout comme des Hutus, si ce n'est plus. Parcelles en friche, femmes hutus trop longtemps seules, manque de cultivateurs,… si le pays doit renaître, cela ne peut être qu'avec l'aide des anciens tueurs qui sont une main d'oeuvre et une force vive non négligeable.



Jean Hatzfeld découvre et nous décrit cette cohabitation forcée jamais vue auparavant. D'un ton toujours neutre, l'écrivain interroge, observe et laisse avant tout la parole à ses interlocuteurs. Si l'amour et le respect du journaliste pour ce pays transparaît à travers ses mots, il reste clairvoyant sur la situation présente, extrêmement éprouvante pour les rescapés.

Contraints les uns comme les autres à se croiser, voire à se reparler, Hutus et Tutsis réagissent différemment mais tous ont eu des consignes de la part des autorités. Tandis que les tueurs doivent se faire humbles et discrets, serviables et repentants ; les rescapés, eux, doivent se montrer conciliants et montrer bonne figure… au nom de l'avenir du Rwanda. C'est seulement dans l'intimité de leur foyer que les rescapés osent exprimer au journaliste leur colère et leur tristesse, ainsi que leur immense frustration de ne pouvoir dire clairement ce qu'ils ressentent. N'ayant pas le droit de parler directement à un Hutu des tueries, ils sont lésés de leurs paroles tout comme de leurs émotions.

Si les « gaçaça », anciens tribunaux populaires remis en vigueur dans les villages face à la pénurie de magistrats, permettent aux victimes d'obtenir des aveux de la part des tueurs, ils restent controversés et insuffisants. Mise en scène, mascarade, beaucoup n'y voient qu'un moyen pour les anciens génocidaires de livrer une partie de la vérité mais surtout d'obtenir un pardon politique bien facilement gagné.



Ce troisième ouvrage nous décrit donc le Rwanda post-génocidaire, un Rwanda qui peu à peu reprend vie, retrouve les couleurs de ses marchés, s'ouvre à la modernité mais qui reste peuplé d'une population traumatisée et scindée en deux. Si la cohabitation, fragile, est bien là et révèle parfois des histoires encourageantes, la confiance n'existe plus entre les Hutus et les Tutsis. Les préjugés sur chacun sont d'ailleurs peut-être plus virulents qu'auparavant…Et il faudra certainement plusieurs générations avant que la vraie réconciliation ait lieu…

Enfin, dans ce livre, Jean Hatzfeld pose une question essentielle : comment se reconstruire lorsque l'on doit vivre au côté de son bourreau ? Livre sur le souvenir et le pardon, il est celui qui pousse la plus loin la réflexion sur l'humain.



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La stratégie des antilopes

Rwanda 2003, les Hutus ayant participé aux massacres des Tutsis sont libérés et reviennent vivre à coté des survivants Tutsis des massacres. La politique nationale de réconciliation l’a décidé, poussée par les grandes puissances qui ont financé la reconstruction et les programmes alimentaires.Jean Hatzfel a écrit en qualité de journaliste-écrivain deux autres livres sur le Rwanda. Il a publié « Dans le nu de la vie » en 2000, ouvrage dans lequel il collecte les souvenirs des survivants Tutsi. Deux ans plus tard paraît « Une saison de machettes » , dans lequel il « passe de l’autre côté » et retranscrit ses conversations avec des Hutus emprisonnés, condamnés pour crimes de guerre. N’ayant pas eu connaissance de ces deux autres livres, je ne les ai pas lu avant de lire celui-ci, trouvé par hasard.



L’auteur écrit dans « La stratégie des antilopes » un livre de témoignages des deux parties d’une part et de réflexions communes d’autre part sur cette réconciliation voulue par les pouvoirs publics, sur les conditions de la justice face à ce génocide, à tous les génocides.Témoignages d’une part des Tutsis qui se souviennent de ces semaines où, cachés dans les marécages, tels des animaux, ils craignaient l’arrivée des Hutus qui « coupaient » à la machette, ils fuyaient devant eux en courant dans tous les sens : « la stratégie des antilopes »…Il leur est impossible de pardonner, « Le temps nous oblige à tout avaler ». Ils ont l’impression que leur souffrance n’est pas reconnue : « La chance aime les Hutus : ils tuent, ils ne sont pas tués; ils s’enfuient au Congo, ils sont ramenés gratuitement ; ils vont en prison, ils sortent gras et bien reposés ; ils brûlent nos maisons, ils retrouvent les leurs sans anicroche, avec à l’intérieur les épouses pour cuire la marmite et faire les amitiés nocturnes »

Témoignages d’autre part des Hutus trop contents d’être libérés, qui parlent, mais ne demandent pas pardon, « J’ai été chargé, j’ai été condamné, j’ai été gracié. Je n’ai pas demandé pardon. Au fond, ça ne vaut pas la peine de demander pardon, s’il ne peut être accepté », qui minimisent ce qu’ils ont fait, qui en cachent une partie, qui oublient pour ne pas être de nouveau rattrapés par leurs crimes. Ils n’en parlent qu’entre eux.

Témoignages des deux parties qui suffisent largement à comprendre l’horreur de ce génocide : dans tous ces témoignages un mot employé par tous, acteurs comme victimes : le verbe « Couper »….Dans ces conditions cette réconciliation est-elle possible, est elle illusoire? Dans quelques décennies disparaîtront avec le temps, les survivants, mais la méfiance réciproque entre ces deux communautés disparaîtra t-elle ? Certes il y a des mariages inter-communautés, mais n’est ce pas une réconciliation de façade, une réconciliation fragile, dépendant d’aléas extérieurs? Le feu peut il repartir? Et là encore les témoignages sèment le doute. « La réconciliation, ce serait le partage de la confiance. La politique de réconciliation, c’est le partage équitable de la méfiance »

Un livre fort qui ne peut laisser personne indifférent, sur cette tragédie, une réflexion sur les conditions d’une justice presque impossible en réponse à ces génocides : « Rendre justice serait de tuer les tueurs, mais ça ressemblerait à un autre génocide, ce serait le chaos…..la justice ne trouve pas sa place après un génocide, parce qu’il dépasse l’intelligence humaine……on peut seulement regretter qu’ils ne montrent jamais ni regrets ni bon cœur «

« La justice passera par l’application de la loi et la loi jetterait le pays par terre »

.. Tout est dit…
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La stratégie des antilopes

La réconciliation peut-elle se faire sous la contrainte? Pardonner est-il possible quand on a vu sa famille se faire décimer et quand on a vécu au rang de bête traquée, la menace de la mort toujours plus proche?

C'est autour de ces questions que Jean Hatzfeld tente de nous faire réfléchir, sans jamais prendre d'autre parti que celui de rendre compte. Dans ce livre, les récits s'enchaînent. D'un côté ; ceux des Tutsis, qui racontent le génocide, vécu dans leur âme et dans leur chair. Avec des mots simples, ils nous entraînent dans l'horreur mais aussi dans leur périlleux exercice de résilience, sous fond d’obéissance à la patrie puisqu'on a décidé pour eux tous en libérant leurs bourreaux. Le pays doit continuer à vivre et a besoin de toutes les forces humaines. Cette abnégation dont ils font part m'a laissé sans voix.

Les récits des Hutus sont plus "policés". Ce sont des "repentants" aux yeux de leur pays et ils doivent agir en fonction. Si certains n'abordent pas les massacres, d'autres décrivent très bien comment il peut être facile d'emprunter le chemin de la haine et de suivre le groupe.

J'ai aimé cet ouvrage car il délivre une parole vraie, au plus proche, je le pense, de l'authenticité. L'auteur met en avant le contexte historique des années après le génocide.

Les récits des Tutsis forcent l'admiration et nous renvoient indubitablement à cette question: comment avons-nous pu laisser faire cela?

Un livre essentiel à mon avis, pour ne pas oublier.
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La stratégie des antilopes

Comment réconcilier les victimes d'un génocide avec leurs bourreaux ? C'est le défi que s'est lancé le Rwanda en 2003. Le livre raconte les premiers pas de la réconciliation, où les rescapés voient revenir ceux qui ont voulu les massacrer dix ans auparavant. Il raconte les efforts des tueurs pour se faire accepter et la frustration des survivants de voir leurs tourmenteurs s'en sortir après quelques années de prison.

Jean Hatzfeld rassemble les témoignages de tous les protagonistes. Ils lui racontent leur histoire et, malgré le traumatisme qu'ils ont subi, analysent l'histoire avec la clairvoyance d'un observateur extérieur.

Ce livre est d'une force incroyable, et il aide à comprendre la tragédie qu'a vécu le Rwanda
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La stratégie des antilopes

Un livre exemplaire à mes yeux, qui laisse la place aux témoignage et à l'humanité. Les témoignages de l'horreur vécue pendant les massacres du Rwanda en 1993 sont très durs. L'auteur aborde le thème du pardon, mais pas d'un point de vue théorique. Que se passe-t-il dans la tête des uns et des autres, lorsque les victimes et les bourreaux doivent à nouveau cohabiter?
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La stratégie des antilopes

Il est difficile de faire un résumé concis de ce 3ème livre de Jean Hatzfeld sur le génocide rwandais tant la violence des mots, la furie des actes sont hors-normes, tant on pensait qu'un tel massacre au XXème siècle ne pouvait plus être possible après la Shoah de la 2ème GM. Mais malheureusement, l'être humain, dans ce domaine, n'apprend jamais rien apparemment et sait se rendre inventif.

Le chapitre sur la vison noire des Africains est si éclairant, cette lucidité sur comment les Blancs les voient, comment eux-même se voient et sur leur évolution et leurs différences. Les témoignages, des 2 bords, sont si forts, poignants ou effarants ou les 2 selon les points de vue.

Encore donc des témoignages sur ce passage très douloureux de l'Histoire rwandaise qui cicatrise lentement, grâce à une politique de réconciliation qui ne résout rien mais qui laisse le pays avancer vers une autre destinée plus apaisée.

Il semble si incroyable qu'aujourd'hui se côtoient quotidiennement ceux qui ont tué avec ceux qui ont survécu mais peut-être est-ce ça aussi la résilience mise en avant aujourd'hui. C'est très touchant la sincérité des réponses des rescapés, à faire venir les larmes aux yeux tant on voudrait les protéger et leur rendre plus de justice....

A lire, avec les 2 autres opus (Dans le nu de la vie et Une saison de machettes) car si parlant, fascinant et apprenant.
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La stratégie des antilopes

Dernière partie d’un ensemble consacré au génocide des Tutsis en 1994 au Rwanda, La stratégie des antilopes traite avant tout de la douloureuse cohabitation entre tueurs et victimes suite à la libération des bourreaux par l’Etat rwandais et à sa politique de réconciliation.

Comme dans les précédents livres, Jean Hatzfeld expose avec une grande rigueur et un grand respect les témoignages des protagonistes. Par contre, il n’hésite pas à se montrer dans son travail d’écriture, ce qu’il ne faisait pas auparavant, peut-être pour justifier sa démarche auprès des personnes interrogées, mais aussi pour exposer la difficulté de la retranscription pour qu’elle soit, du mieux possible, fidèle aux paroles des témoins. La confrontation des différents points de vue met en lumière le besoin des uns et des autres, pour des raisons différentes, d’oublier le passé, même si cet oubli reste fragile. Malgré les bonnes paroles de réconciliation récitées comme une leçon, une tension persiste jusqu’au dernier mot, confirmant les peurs engendrées par l’exposition première des actes atroces commis par les Hutus. La peur, cette fois, de voir un tel drame se reproduire.

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La stratégie des antilopes

SI l'auteur est encore en vie, je lui propose de faire des recherches et faire des recherches objectivement, et nous écrire le quatrième tome.

Voilà ce que je lui propose pour qu'il en tienne compte:

- avoir des témoignages des Tutsis et Hutus qui vivaient au Rwanda avant le génocide

- Avoir des témoignages des Hutus et Tutsis qui étaient au Rwanda pendant le génocide

- Avoir des témoignages de ceux qui ont été au Zaire dans les camps de réfugiés

- Avoir des témoignages des hutus et Tutsis qui vivent au Rwanda actuellement

- Avoir des témoignages des Tutsi qui ne vivent pas au Rwanda , qui sont en exil`et qui ont quitté le Rwanda après 2015.

- Avoir des témoignages des Hutus qui ne vivent pas au Rwanda , qui sont en exil`et qui ont quitté le Rwanda après 2015.



Je pense qu'après avoir recueilli ces témoignages, il pourra nous en faire un beau livre...
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La stratégie des antilopes

Jean Hatzfeld avec « La stratégie de l’antilope » continue d’explorer la barbarie humaine à travers le génocide Rwandais. Les tueurs sont de retour, dans les villages de leurs méfaits reprendre leur place laissée en 1994. Pour les survivants de leurs exactions, comment accepter de vivre à côté de leur bourreau ?

Hatzfeld avec la même rigueur, la même justesse donne la parole aux victimes et aux assassins, ces témoignages sont d’une force, d’une émotion palpable inimaginable. Au nom de la réconciliation est-il concevable une seule seconde de pardonner ou faire acte de contrition ?

Hatzfeld s’interroge aussi sur le sens de son travail, comment rendre au plus près les confidences des deux ethnies ? Comment ne pas les trahir en restituant leurs témoignages ?

Un livre douloureux, qui nous mets, nous occidentaux, devant notre responsabilité, notre trahison, notre lâcheté, comment nos gouvernants ont- pu fermer les yeux sur cette barbarie sans nom ?

Une tragédie intolérable, un livre indispensable.



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La stratégie des antilopes

Presque personne au Rwanda, Hutu ou Tutsi, n'a échappé à la sauvagerie quand, en avril 1994, les milices hutu ont commencé à massacrer les Tutsi et les Hutus modérés.

Hatzfeld trouve les survivants psychologiquement brisés et vides, se sentant comme s'ils avaient été 'trahis par la vie - [et] qui peut supporter cela?'

Son récit s'ouvre en 2003, avec le spectre d'une colonne mince, poussiéreuse et interminable de 40 000 hommes, libérés des camps et des pénitenciers après avoir purgé leur peine pour leur rôle dans le génocide. Quelques-uns des internés, dit l'un, jubilaient.

D'autres, niant tout acte répréhensible, étaient furieux d'avoir été emprisonnés.

Tous étaient confrontés au problème de reconstruire leur vie, au milieu des proches et des familles de ceux qu'ils avaient tués. Certains répondent par la boisson, certains par le silence, certains par l'isolement et certains par la colère.

De peur qu'il n'y ait une explosion de femmes battues et de violence après l'amnistie, les fonstionnaires du gouvernement ont conseillé : 'Restez calme avec votre conjoint coupable, soyez pacifique avec votre voisin, patient avec ceux qui sont traumatisés, obéissant avec les autorités. Et ne tardez pas à vous mettre au travail pour nettoyer vos champs envahis par la végétation.'

Les conseils, semble-t-il, ont été suivis,

et si peu de Rwandais semblent heureux et que les soupçons perdurent, la plupart des gens semblent reprendre lentement la vie comme d'habitude, même si, comme le dit un homme, 'j'ai peur des rêves'. Grâce au travail des Rwandais qui insistent pour obtenir justice - un projet ardu, compte tenu de l'absence d'un système judiciaire pleinement fonctionnel et de la difficulté de trouver une simple équité dans les allers-retours entre accusation et défense - une certaine normalité est en place. enfin réalisable dans ce malheureux pays.



Un rapport révélateur de plus et un ajout substantiel à la littérature sur la violence ethnique.

Ce livre, comme tous ceux de Jean Hatzfeld sur les massacres du Ruanda, est indispensable.



Pendant les massacres, l'occident regardait, mais avait envoyé les casques bleus...
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La stratégie des antilopes

Le récit de Jean Hatzfeld se situe au bord des marais de Nyamata au Rwanda. Dix ans après le génocide. Les populations vivent sous le poids de la mémoire. Mais elles vivent aussi auprès des assassins d’hier revenus après les gaçaça, les tribunaux populaires.



Entre les propos de rescapé-e-s et de tueurs, la vie possible et impossible du présent contraint d’un passé indicible et douloureux. Comment vivre entre les mort-e-s, les découpé-e-s, comment se regarder rescapé-e-s, regarder les autres, ceux qui ont tenu les machettes.



Comment vivre après avoir survécu ?



Un récit ouvert aux réflexions sans cesse inabouties des victimes et des assassins. Un terrible livre sur l’humanité.
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La stratégie des antilopes

Récompensé par le Prix Médicis 2007, sans doute l’un des livres le plus bouleversant consacré au génocide rwandais !



Jean Hatzfeld, ancien grand reporter à Libération, s’était déjà penché sur cette affreuse tragédie dans « Le nu de la vie » d’abord, qui racontait le massacre des Tutsis par les miliciens Hutus et recueillait la parole des survivants de cet horrible drame ; puis dans « Une saison de machettes », qui donnait cette fois la parole aux tueurs, ces derniers racontant froidement toutes les atrocités qu’ils avaient commises.



« La stratégie des antilopes », troisième opus sur ce génocide, décrit cette fois d’étranges retrouvailles.

Moins de 15 ans après les terribles évènements du printemps 1994 qui ont vu 70% de la population Tutsis massacré à coup de machette, l’Etat rwandais entame une politique de réconciliation, libérant ainsi des pénitenciers les grands tueurs condamnés pour génocide.

Voilà donc les victimes obligées de vivre aux côtés de leurs bourreaux !

Bon gré mal gré, les uns et les autres sont contraints de se retrouver, de cohabiter, dans l’amertume, la tristesse, la peur.



Jean Hatzfeld donne de nouveau la parole aux principaux protagonistes, survivants ou tueurs de ses atrocités.

Et si les anciens bourreaux montrent plus de gêne que de remords, les victimes, elles, expriment avec beaucoup d'émotion, dans une langue empreinte de belgicisme et étonnement poétique dans son oralité, les difficultés de ces retrouvailles forcées.

Les survivants parlent ici des difficultés de croiser au jour le jour ceux qui, il n’y a pas si longtemps, décimaient leurs enfants, leur famille.

Victimes et survivants, qui ont mené l’existence du gibier et connu la peur de l’animal traqué, contemplent maintenant la réussite de leurs assassins au quotidien.



Jean Hatzfeld nous livre avec « La stratégie des antilopes » un témoignage certes un peu répétitif mais non moins bouleversant, un livre qui porte en lui un terrible enseignement : le prix bien peu élevé d’un génocide !

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La stratégie des antilopes

Un livre que j'ai lu il y a quelques jours et je suis toujours sous le choc... Hatzfeld nous emmène au coeur du génocide rwandais à travers les témoignages de victimes mais aussi de bourreaux. A la fin, on ne peut s'empêcher de penser que la réconciliation est impossible et que cela peut recommencer...
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La stratégie des antilopes

J’avais beaucoup entendu parler de ce livre (paru en 2007) concernant le génocide au Rwanda. Mais je ne savais pas qu’il s’agissait, pour l’essentiel, de témoignages de Hutus et de Tutsis. Je pense que, d’une manière générale, la plupart des Français restent assez ignorants au sujet de cet épisode qui a ensanglanté ce petit pays africain en 1994.

Après ces mois de folie, les nouvelles autorités rwandaises ont interdit à leurs citoyens de parler des tueries directement entre eux; seuls sont permis les témoignages individuels au cours des enquêtes concernant des suspects, puis lors des procès des accusés. De toute façon, les Hutus ne demandent pas pardon aux Tutsis. Et pour les rescapés du génocide, il est presque impossible de dire ce qu’ils ont sur le cœur, car les tueurs d’autrefois sont redevenus leurs voisins - ceux-là mêmes qu’ils côtoient à nouveau quotidiennement. La "coexistence pacifique" de maintenant a quelque chose de vraiment surréaliste. D’ailleurs, une Tutsi a dit à J. Hatzfeld: « Quand il y a eu un génocide, il peut y en avoir un autre, n’importe quand dans l’avenir ».

En effet, pratiquement tous les Hutus valides ont "coupé" (= tué à coups de machette) des Tutsis, en 1994. Chaque jour, des centaines d’hommes partaient joyeusement vers les forêts et les marais pour achever l’extermination commencée dans les villages. Parmi les fuyards Tutsis, les très jeunes, les vieillards et les mères chargées d’enfants n’avaient aucune chance de survivre à tous les ratissages. Seuls les très bons coureurs parvenaient à s’échapper en suivant la "stratégie des antilopes": s’enfuir dans toutes les directions devant les prédateurs.

Interrogés par J. Hatzfeld, les rescapés se souviennent de ces semaines épouvantables. « On était là comme des marionnettes, on ne faisait que courir, manger, se reposer, attendre… Je n’ai plus de mémoire de ça, je ne veux même plus chercher... Je n’arrive pas à me rappeler si même je pensais ». Quant aux Hutus, voici ce dont ils se souviennent: « En nonante-quatre, on avait quitté les Tutsis sur des paroles très méchantes. On les traitait de cancrelats consorts. Pendant les tueries, on chantait des chansons féroces, on leur criait des insultes en levant les machettes ensanglantées, on ricanait quand ils demandaient merci ». Il y en a ainsi des pages et des pages, et le lecteur se sent piégé par cet ouragan de violence. Mais il serait évidemment stupide de croire que l’Enfer, c’est les autres. N’importe quel peuple peut être dévoyé et succomber à la folie criminelle…

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La stratégie des antilopes

Livre interessant mais cependant decevant car pas assez bien presente au debut. L'ensemble reste confus.
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Où en est la nuit

Un journaliste, Frédéric, retrouve à la frontière de la Somalie et de l’Éthiopie en guerre un marathonien, Ayanleh Makeda, déchu de son titre olympique pour dopage. Ancienne gloire de son pays qui l’a puni pour cette faute, il porte maintenant le fusil et creuse des tranchée sous les bombes. Double champion olympique il a gagné avec facilité le marathon de Sydney, de Boston ou d’Athènes… Pourquoi, en pleine gloire, toujours invaincu a-t’il succombé à la tentation du dopage?

Alors que tout lui souriait il est devenu paria. Déchu de son titre olympique, il a du affronter les regards mauvais, il a perdu ses autorisations de séjour, ses titres honorifiques, il a du quitter Paris sans rien emporter, son passeport lui a été retiré…



En journaliste, Frédéric va essayer de comprendre en recherchant et en interrogeant le prêtre qui l’a détecté, qui l’a poussé à courir, Tirunesh l’épouse du champion, Hanna son ostéopathe tchèque, le champions lui-même….

Tous parlent de son intégrité morale, de sa propreté, de son honneur : « Il n’a pas pu se doper ». Alors pourquoi?

A l’occasion de ces rencontres, Frédéric nous fait partager ses impressions de journaliste, sur les pays traversés, les déserts et ses hommes et femmes, les situations rencontrées, la Somalie, l’émancipation des pays satellites de l’Urss, la chute du mur de Berlin, etc., mais aussi la préparation, la course des champions, leur vie, le système sportif, les « écuries de champions » appartenant à de richissimes hommes d’affaires

J’ai découvert Jean Hatzfeld avec ce livre, ancien journaliste puis auteur, qui sans doute s’est inspiré de son passé pour écrire ce livre que j’ai lu presque d’une traite.

Depuis, j’ai découvert ses autres ouvrages notamment ceux sur le Ruanda et j’ai toujours apprécié
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Où en est la nuit

Un roman très intéressant qui nous plonge dans les coulisses du monde sportif, notamment de l'athlétisme! Le monde de la célébrité qui parfois demande un prix trop fort pour rester dans la course! Un monde où une chute vertigineuse peut survenir sans crier gare...
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Où en est la nuit

Un bon roman sur le monde du sport et du dopage

A la lecture du quatrième de couverture je pensais plus lire un livre sur la guerre mais non.

Je me suis prise de sympathie pour notre héros et tout son entourage

Le monde du sport est aussi un monde impitoyable .

Il faut gagner c'est une véritable spirale si vous perdez vous n'êtes plus rien.

Je vais essayer de découvrir un autre livre de Hatzfeld qui m a enchanté avec ce roman.
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