Citations de Jean-Luc Bizien (253)
Le magicien chinois se produisait au Ba-Ta-Clan, un bâtiment massif en forme de vaste pagode, qui s’était reconverti, comme tant d’autres depuis quelques années, en café-concert. Clowns, équilibristes, gymnastes s’y succédaient à un rythme effréné. Le Ba-Ta-Clan, parce que son directeur avait su sélectionner les meilleurs artistes de caf’conc’, ne désemplissait pas.
Sur la porte de ces établissements était placardé un écriteau « Entrée libre » qui incitait les badauds à pénétrer. Chacun s’installait à sa convenance, on pouvait rester au bar ou préférer une table au ras de la scène. Les serveurs se matérialisaient alors et prenaient aussitôt commande. C’était la règle dans tous les caf’conc’ : on était obligé de consommer. Certes, ce n’était pas donné – de un à trois francs, selon la place occupée – mais, pour ce prix-là, on pouvait s’offrir plusieurs spectacles !
Le gamin aimait ces techniques modernes d’investigation. Il était capable de ramasser des brins de tabac, de récolter des reliquats de repas, de conserver les traces d’empreintes… et de s’en servir pour formuler des déductions qui forçaient le respect.
Vous autres, Anglais, avez le mot juste pour chaque chose. C’est probablement ce qui fait de vous un peuple de chercheurs et de techniciens. Vous privilégiez la concision, allez droit au but. En France, nous avons au contraire privilégié l’art du discours. Nous sommes férus de rhétorique, nous adorons argumenter. Rien ne nous passionne plus qu’une discussion : nous aimons imposer notre point de vue, notre vision des choses, nous sommes prêts à nous battre pour des idées. Vous imaginez dès lors la difficulté à cerner la psychologie d’un homme qui peut exprimer ses sentiments de plusieurs manières, selon l’humeur ? Sans doute est-ce la raison pour laquelle les autres nations nous pensent arrogants. Nous vénérons les mots, les poèmes, les écrits. Le tempérament artiste des Français en découle. Le peintre n’impose-t-il pas sa perception du monde ? Il dispose du pouvoir de faire naître l’émotion, il raconte une histoire…
Pharaon t’a remercié en te déposant au bord de la rivière. Tu es reparti dans le labyrinthe de la pyramide. Ces momies sont attaquées par des serviteurs d'Apophis. Aide-les à s'en débarrasser, en démêlant leurs bandelettes, mais trouve un moyen d'agir sans être mordu par un serpent !
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La première question c’est : Qu’est-ce qui pousse des hommes et des femmes de la haute à se réunir autour du mythe égyptien ? Et la deuxième : Pourquoi forcer un pauvre bougre à se faire tatouer la couenne avec des images impies qu’ils ont sélectionnées dans un de leur manuels ? Enfin, la dernière énigme consiste à trouver pour quelle raison on a charcuté le macchabée de la Morgue.
La lumière révéla le cortège de figurines démoniaques qui encombraient murs et étagères. L’égyptologue en avait collecté des dizaines, qu’elle entassait à loisir dans la maison. Les monstres avaient pris possession des lieux. Ils jaillissaient des murs, couraient sur les plateaux de la bibliothèque, épiant les visiteurs. Ici, les créatures étaient de tailles moins imposantes que celles du rez-de-chaussée. Pourtant, à bien les regarder, les gardiens de l’antre d’Elzbiéta étaient de loin les plus abominables. C’était à croire que la maîtresse des lieux s’était attachée à graduer l’horreur et que l’on n’accédait à son bureau qu’après avoir surmonté l’épreuve du couloir.
On conservait précieusement les cadavres des meurtres, afin de permettre aux services de police d’enquêter. De plus, la Morgue n’exposait que les cadavres identifiables, ceux qui étaient jugés « décents » : pas question d’étaler des défigurés, des éventrés ou des malheureux fracassés par les roues d’un omnibus. Idem pour les nombreux désespérés qu’on arrachait aux eaux troubles de la Seine. Les plus présentables avaient une chance d’être reconnus par un badaud. Les autres, ces silhouettes verdâtres aux traits boursouflés, étaient condamnées la plupart du temps à l’oubli de la fosse commune.
Si tu penses comme un samouraï, tu ne tarderas pas à mourir comme un samouraï.
- Je ne supporte pas les ninjas. Je les hais. Ce ne sont pas des combattants, ce sont des assassins doublés de couards qui n’aiment rien tant que d’attaquer leurs victimes par surprise.
Onô attendait. Son visage exprimait la sérénité… et une envie d’en découdre. Ses yeux n’étaient plus que deux cicatrices sombres, au fond desquelles brûlait un feu ardent. A l’observer ainsi, on eût dit un chat ayant découvert toute une famille de rongeurs… et se réjouissant à l’avance du carnage.
- La plupart des samouraïs du daimyo ne sont que des veules qui ont choisi la facilité. En entrant au service du seigneur le plus redouté, ils intègrent la plus formidable des armées, ils jouissent d’une puissance qui n’est pas la leur. Ce sont des hommes bien nés qui se sont retrouvés là par hasard. Pas des guerriers voués corps et âme au maniement dus sabre.
- Le malheur, c’est que de valeureux guerriers soient passés du côté sombre, en offrant leur lame à un adepte de la magie noire.
Un colosse vêtu d'un pantalon de treillis et d'un tee-shirt moulant kaki gardait l'entrée du club privé. Il se tenait adossé à l'une des parois, dans l'ombre, et mâchonnait un cure-dent en bois. Ses yeux étaient cachés par une paire de lunettes noires. Ses bras étaient couverts de tatouages. C'était le genre d'hommes au-dessus duquel on devine le panneau géant : "Ne cherchez pas de problèmes, vous les avez trouvés".
Quinn affectait la décontraction, appuyant parfois son front contre la vitre d'un bus. Il en profitait pour étudier, dans le reflet de la vitre, les autres occupants du véhicule. Il mimait la somnolence et, à travers le rideau de ses paupières légèrement entrouvertes, examinait avec un soin méticuleux les passagers voisins
Ignorant la dépouille à ses pieds, l’homme se tourna vers le coffre, qu’il souleva sans effort apparent.
Il le jeta sur son épaule et s’éloigna sans plus attendre.
Abandonnant sa victime au soleil.
Au vrai, Timmy était un authentique prédateur. Un assassin de la pire espèce. Un jour, P’pa et les autres devraient se rendre à l’évidence et le voir sous son véritable jour.
Elle acquiesça en silence quand Torres lâcha enfin son poignet. Les doigts de l’homme avaient laissé des marques rouges sur sa chair. Elle se massa en espérant que des bleus ne marbreraient pas sa peau.
Harris s’alluma une cigarette et tira une longue bouffée. Il mourait d’envie de se débarrasser de son armure, pour respirer un peu. La route avait été interminable, depuis ses bureaux de NYC1. L’enquête de longue haleine, depuis la disparition de Vito del Piero, les avait conduits jusqu’ici. On savait, de source sûre, que les Italiens prévoyaient d’établir de nouveaux liens avec les cartels mexicains.
D’autres hommes, vêtus de noir et casqués, les yeux protégés par les lunettes réglementaires et le système audio activé, avançaient par bonds successifs autour de la propriété. Dos et poitrails étaient barrés d’une mention blanche FBI ou SWAT. Ils s’étaient répartis en petites unités et eurent tôt fait de rejoindre les points stratégiques qu’on leur avait désignés.
Après avoir refermé discrètement derrière lui, il resta immobile dans l’entrée. Les yeux fermés, il écouta le jet d’eau, le bruit des gouttes ricochant sur la faïence, le chant de la cascade sur la peau de Salma. Il imagina les vagues brûlantes qui embrassaient son corps nu et réprima un sourire. Salma était belle, jamais il n’avait désiré une femme autant qu’il pouvait la désirer.
À pas de loup, il s’approcha de la douche, séparée du reste des appartements par une série de vitres dépolies.
Il s’arrêta face à la baie principale et contempla le spectacle. Salma, inconsciente de sa présence, s’offrait à lui.
Torres eut un rictus satisfait.
Le spectacle méritait bien qu’on lui consacre quelques instants.