Dans le laboratoire de Poésie Pratique, Jean Mambrino
Là
Fenêtre pleine
de couleurs de parfums
d'espaces en fleurs.
S'ouvre aussi l'espace
dans ton coeur
tissé d'odeurs et d'oiseaux.
La lumière se retire
dans l'ouvert
par les feuillages.
Tu ne vois que le jardin.
(" Ainsi ruse le mystère ")
La poésie est un langage silencieux
qui efface ses propres traces, pour qu’on
entende ce que les mots ne disent pas.
Enfin fleurit l'asphodèle
Enfin la montagne ruisselante
abonde jusqu'au fond des plaines
enfin enfin l'hirondelle
fait son nid dans la couronne du soir.
Mais ne méprise jamais pèlerin
dans les derniers replis du soir
au bord des lacs où dorment les montagnes
la femme plus odorante que les pins
au corps de pollen et de raisin noir.
L’automne
L’automne sur les ailes des oiseaux
Couleur de feuille et de forêt qui meurt
Une tendre rousseur
Une braise qui s’avive
Dans un lambeau de vent arraché à l’automne
Et les ailes qui volent
Avec les ailes délivrées.
Le temps s’achève dans un orage clair.
Un seul mouvement qui arrive
Une seule liberté
Feuilles et plumes fondues dans l’air
Flammes qui descendent
Envol sur les terrasses du soir.
Un seul envol d’automne et de cendres
Une submergeante lumière.
IV/VANITAS VANITATIS
Je chante pour moi tout bas.
L'air mange mes mots.
Trop de silence les enchante.
Ils ressemblent aux couleurs
des fleurs du jardin
que le ciel dévore, ou bien
le temps. L'aurore arrose
de sa rosée les choses qui
meurent avant d'avoir été.
La bouche de la lumière
mâche les fruits, les pensées.
Pour le ventre de la nuit.
p.60
Lire comme on se souvient
Se souvenir, c'est non seulement rassembler des faits épars dans le passé, des événements, des rencontres, des visages disparus, mais, ce faisant, retrouver la source même de notre être, et le sens du chemin qui nous a faits tels que nous sommes. (...)
Je parle ici des livres dans le même esprit, et privilégie une forme de lecture proche de la méditation et de l'écoute musicale. elle implique une certaine distance d'avec soi-même, une solitude heureuse et reposée, ouverte sur les profondeurs de la vie. (...)
Il est des ouvrages qui ne relèvent ni de l'information ni du divertissement, même s'ils nous instruisent de l'essentiel en nous charmant, et nous communiquent le sentiment que nous avons découvert à travers eux ce que nous avions de plus intime et de plus caché. (p. 16)
MINE DE RIEN
Disséminer les grains
sur les rocs, au rain
des ronces dissimule,
ou simule
la fertilité.
Les mots à fragmentations
sont dangereux. Leur sens
miné.
On est toujours atteint
lorsque le jour s'annonce
trop clair. Si le gaspillage
des grains
dans les signes ensemense
de nouveaux trésors. Les mots
savent disparaître. Disant
le vrai du faux.
La menace couve au creux de l'être.
p.48
ASSISTANCE A PERSONNE
Encore le nid
des pierres,
le lit blessant.
Le gîte des gens
sans terre.
Peut-on se blottir
dans un désert de pierres ?
Survivre nourri
de la poussière du vent ?
Peut-être à deux ?
Esseulés, enlinceulés
sur le présent
de notre cendre,
rendre ensemble
l'âme-poussière.
Dans le lit scabreux.
p.26-27
Le vent coule si paisible
sur le sommeil de la prairie
que les herbes semblent
inventer la brise en rêve.
Et les nuages passent sans bouger
tellement ils sont haut et loin
de nos pensées .
Et les pensées se perdent
Dans le bleu d'un autre ciel.
Alors respire le rien.
( Ainsi ruse le mystère. Poèmes)