AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Laurent Binet (622)


Après tout, il n'y a qu'une seule chose noble ici bas, et c'est le dessin. L'homme, lui, n'est qu'une tache qui pâlit sur un mur.
Commenter  J’apprécie          40
Entendez-moi bien, mon amie : si un tueur de peintres court dans les rues de Florence, je dois le retrouver. Et surtout, je dois trouver le fin mot de cette histoire. Ces fresques et ce tableau que vous haïssez tant, je dois les faire parler, car ils cachent un secret, et il ne peut y avoir de secret pour le duc de Florence. Vous pouvez vous réjouir de la mort de Pontormo, il n’en demeure pas moins que, pour le bien de l’Etat, nous devons éclaircir les raisons de cette mort. Un prince dans le noir est un prince un sursis.
Commenter  J’apprécie          60
Car voir, c’est penser. Le spectateur aussi doit mériter son tableau.
Commenter  J’apprécie          20
Les nazis aiment brûler les livres, mais pas les registres. Efficacité allemande ?
Commenter  J’apprécie          120
Le travail de l'entasseur ressemblait presque en tout point à celui des hôtesses qui vous placent au théâtre. Il menait chaque Juif sur un tas de corps, et lorsqu'il lui avait trouvé une place, le faisait étendre sur le ventre, vivant nu allongé sur des cadavres nus. Puis un tireur, marchant sur les morts, abattait les vivants d'une balle dans la nuque. Remarquable taylorisation de la mort de masse.
P 186-187
Commenter  J’apprécie          80
Cette scène est parfaitement crédible et totalement fictive, comme la précédente. Quelle impudence de marionnettiser un homme mort depuis longtemps, incapable de se défendre ! De lui faire boire du thé alors que si ça se trouve, il n'aimait que le café. De lui faire enfiler deux manteaux alors qu'il n'en avait peut-être qu'un seul à se mettre. De lui faire prendre le bus alors qu'il a pu prendre le train. De décider qu'il est parti un soir, et non un matin. J'ai honte.
P 145
Commenter  J’apprécie          30
C’est en vain que tu tends ton arc si tu ne sais pas où diriger ta flèche » – et moi je savais à cet instant ! Je déclenchais mon tir, et le carreau d’arbalète, suivant une trajectoire parfaite que mon esprit avait calculé et qu’une main invisible avait tracée dans l’air vint se ficher exactement entre ces deux yeux. Il bascula en arrière, le coup de feu se perdit dans le vide, et j’eus l’impression que la détonation me réveillait d’un long rêve d’une seconde.
Mais je n’avais pas rêvé. Je m’étais souvenu de la perspective. Et voilà de quoi je veux m’entretenir, Messire Michel-Ange, mon cher maître. Dans notre soif de trouver une nouvelle manière de peindre pour surmonter, ou plutôt pour contourner la perfection atteinte nos pères et la vôtre, celle de Raphaël et celle de Léonard…
Commenter  J’apprécie          30
Car voir, c’est penser. Le spectateur aussi doit mériter son tableau. J’étais un sot, et si je le suis encore certainement, au moins incliné-je aujourd’hui à rendre justice à qui de droit : Florence, au mitan du XVIe siècle, était un creuset dans lequel bouillonnaient les passions tout autant qu’un terreau où fleurissaient les génies – et ceci, bien entendu, explique cela La manière, voilà tout !
Commenter  J’apprécie          00
Je vais vous révéler un secret que vous connaissez peut-être, car il s'applique aussi à l'art de la guerre : ne jamais rejouer la même partie.
Commenter  J’apprécie          60
Vous souvenez-vous de l'altercation qui avait opposé Cellini à Bandinelli ? Le second avait traité notre intrépide ruffian d'"infâme sodomite" devant Sa Seigneurie, en présence de toute la cour, l'empêchant de fermer les yeux comme Elle l'avait fait jusque-là.

L'impayable Benvenuto s'en était sorti par une boutade : "si seulement Dieu avait permis que je sois initié à un art aussi noble !"

Et de gloser sur une pratique supposément réservée aux dieux de la Rome antique, aux empereurs et aux rois, tandis que lui, pauvre avorton, n'était pas digne d'une chose si admirable.

La bouffonnerie avait été poussée si loin qu'elle dispensait de tout autre réaction qu'un éclat de rire général.
Commenter  J’apprécie          70
Pleinement conscient des impératifs dictés par la raison d'état, et sans pousser jusqu'à lui être reconnaissant de l'avoir congédié et fait enfermer, Messire fransesco n'en tient pas rigueur à son maître. Nul n'ignore que les grands aussi ont leurs propres servitudes et nous autres de la patrie de Machiavel l'ignorons moins que quiconque.
Commenter  J’apprécie          120
C'est la perspective qui permet de voir l'infini, de le comprendre, de le sentir. La profondeur sur un plan coupant perpendiculairement l'axe du cône visuel, c'est l'infini qu'on peut toucher du doigt. La perspective, c'est l'infini à la portée de tout ce qui a des yeux. La perception sensible ne connaissait et ne pouvait connaître la notion d'infini, croyait-on. Eh bien, grâce aux peintres qui maîtrisent les effets d'optique, ce prodige a été rendu possible : on peut voir au-delà. Permettre à l'œil de transpercer les murs. Cette voûte en demi-cintre à Santa Maria Novella, tracée en perspective, divisée en caissons ornés de rosaces, qui vont en diminuant, en sorte qu'on dirait que la voûte s'enfonce dans le mur : trompe-l'œil, illusion sans doute, mais quelle merveille !
(p.244-245)
Commenter  J’apprécie          160
Je vous avoue que j'aime de plus en plus cette jeune fille : sous les dehors d'une parfaite idiote, qui n'est que le caractère que l'on attend d'elle et le modèle auquel elle s'efforce de se conformer, se cache une intuition assez sûre de ce qu'est la malédiction d'être née femme, doublée d'une volonté de s'y soustraire qui nous sera bien utile, si les choses tournent en notre faveur.
Commenter  J’apprécie          60
Quant à toi, tu as choisi ton camp, celui des grands, dont tu ne feras jamais partie. À défaut de clairvoyance, tu auras eu le courage de la traîtrise. Sans rancune, mon ami, je prie Dieu qu'il te protège et te donne la santé. Garde-toi bien, n'oublie pas de te retourner souvent dans la rue, ne t'approche pas trop des bords de l’Arno, et quand tu iras à la taverne, assure-toi qu'on ne verse pas quelque poison dans ton verre. Tu salueras tes nouveaux amis de ma part. Sois le chien de compagnie de ces gens, Battista, puisque telle est ton ambition. Je te souhaite qu'ils te jettent beaucoup d'os. Mais prends garde, et retiens bien ceci : la mort de Pontormo a montré qu'ils sont des loups entre eux. Es-tu vraiment sûr de vouloir t'asseoir à leur table ? Laisse-moi te donner un dernier conseil : reste un chien, et n'essaie pas de te faire loup. Personne ne devrait porter un costume pour lequel il n'est pas taillé.
De Marco Moro à Giambattista Naldini
(p. 170)
Commenter  J’apprécie          190
...pour nous autres femmes, le scandale du monde est ce qui fait l'offense et, quoi qu'en dirait votre confesseur, si vous aviez la sottise de lui raconter votre aventure nocturne, ce n'est pas pécher que de pécher en silence.
Commenter  J’apprécie          10
Catherine de Médisis à sa nièce Maria, fille de Cosimo de Médicis, duc de Florence:
Nous, femmes, sommes les pièces qu'on déplace sur l'échiquier des empires, et si nous ne sommes pas sans valeur, assurément nous ne sommes pas libres de nos mouvements. Votre devoir de fille de duc est d'obéir à votre père, votre devoir d'épouse sera de servir votre époux selon son plaisir en lui donnant des enfants en bonne santé.
Commenter  J’apprécie          00
Laurent Binet
Nous, femmes, sommes les pièces qu'on déplace sur l'échiquier des empires, et si nous ne sommes pas sans valeur, assurément nous ne sommes pas libres de nos mouvements. Votre devoir de fille de duc est d'obéir à votre père, votre devoir d'épouse sera de servir votre époux selon son plaisir en lui donnant des enfants en bonne santé.
Commenter  J’apprécie          70
Pendant dix ans je suis traitée de tripe sèche par mes ennenis parce que je ne parvenais pas à donner un héritier au nouveau Dauphin et je vécus chaque instant dans la terreur d'être répudiée. Devenue mère puis reine, je n'en fus pourtant pas quitte des injures. Les Français, qui n'aiment les Italiens que peintres ou inventeurs , n'ont jamais cessé de me traiter en étrangère, tandis qu'ils considèrent la favorite d'Henri, ma cousine la duchesse Diane, comme la véritable reine […] Mais c'est moi pourtant qui ai assumé la régence quand Henri est parti faire la guerre dans les Flandres, moi et moi seule qui ai assuré l'approvisionnement des armées françaises, sans quoi les troupes impériales auraient marché jusqu'à Paris. La petite orpheline de Florence a sauvé le royaume de France.
Commenter  J’apprécie          10
Cette histoire possède un point aveugle qui est aussi son point de départ : le déjeuner de Barthes avec Mitterand. C’est la grande scène qui n’aura pas lieu. Mais elle a eu lieu pourtant… Jacques Bayard et Simon Herzog ne sauront jamais, n’ont jamais su ce qui s’était passé ce jour là, ce qui s’était dit. À peine pourront-ils accéder à la liste des invités. Mais moi, je peux, peut-être… Après tout, tout est affaire de méthode, et je sais comment procéder : interroger les témoins, recouper, écarter les témoignages fragiles, confronter les souvenirs tendancieux avec la réalité de l’Histoire. Et puis, au besoin… Vous savez bien. Il y a quelque chose à faire avec ce jour là. Le 25 février 1980 n’a pas encore tout dit. Vertu du roman : il n’est jamais trop tard.
Commenter  J’apprécie          30
Voici un extrait de la page 335, dans une lettre de Michel-Ange à Giorgio Vasari.
« C’est la perspective qui permet de voir l’infini, de le comprendre, de le sentir. La profondeur sur un plan coupant perpendiculairement l’axe du cône visuel, c’est l’infini qu’on peut toucher du doigt. La perspective, c’est l’infini à la portée de tout ce qui a des yeux. La perception sensible ne connaissait et ne pouvait connaître la notion d’infini, croyait-on. Eh bien, grâce aux peintres qui maîtrisent les effets d’optique, ce prodige a été rendu possible : on peut voir au-delà. »
Commenter  J’apprécie          20



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Laurent Binet Voir plus


{* *}