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Citations de Leonardo Padura (892)


Comment était-il possible qu’un penseur juif en soit arrivé à dire que toute cette souffrance constituait une épreuve supplémentaire imposée au peuple de Dieu du fait de sa condition et de sa mission sur terre en tant que troupeau élu par le Saint des Saints ?
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Cette funeste histoire, dont le moment le plus dramatique se joua dans le port de La Havane à peine trois mois avant l’invasion fasciste de la Pologne , et les nouvelles successives, en provenance d’Allemagne et des pays occupés par ses troupes, sur les événements affectant la communauté juive d’Europe, poussèrent l’adolescent Daniel Kaminsky sur le chemin qui ferait de lui un mécréant sceptique. Si depuis l’enfance certaines histoires de la relation de Dieu avec son peuple élu lui avaient semblé excessives ( en particulier le sacrifice de son fils Isaac exigé par Yahvé de son favori Abraham), à partir de ce moment-là il osa se demander, de façon obsessionnelle, pourquoi le fait de croire en un Dieu et de suivre ses commandements de ne pas tuer, ni voler, ni convoiter, pouvait faire de l’histoire des juifs un enchaînement de martyres.
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Il appris aussi, pour toujours, que la libération des pires instincts de la masse manipulée est plus facile à exploiter qu’on ne le croit généralement.
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De la fenêtre de son bureau du troisième étage, le lieutenant Mario Conde observait la solitude d'un laurier fouetté par le vent. Les moineaux qui fréquentaient ses plus hautes branches avaient émigré et les petites feuilles paraissaient sur le point de défaillir après trois jours de rafales ininterrompues : résistez, demanda le Conde aux feuilles, avec une véhémence disproportionnée, combative, comme si dans l'obstination de ces feuilles était aussi engagée la lutte pour sa propre vie.
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page 355...SAINT JEAN D'ACRE...ce qui est en jeu, c'est la domination de la route commerciale la plus importante au monde, un filon débordant de richesses et la raison de la présence de tant de mercenaires avec leurs épées et leurs bannières, fort bien payés par les commerçants vénitiens, génois, pisans. Et l'armée vaticane avec ses lombards sans foi ni loi. Il en va de la possession de ces merveilleuses terres, de leurs forêts de cèdres, de leurs vallées où poussent la vigne et l'olivier, du contrôle des pistes par les caravanes qui vont vers l'Orient, de la domination de dizaines de ports...ce qui se joue, c'est la possibilité de s'approprier les richesses qui feront la grandeur de qui les possédera au nom de Jésus ou de Mahomet, de Dieu ou d'Allah, ce qui revient au même.
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page 275...la peur et l'instinct de survie, avant tout autre sentiment, sont l'essence de la condition humaine, la force qui, lorsque elle fonctionne, est plus forte que tout.
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page 73...leur regard chargé de méfiance était le miroir de leur âme et leur âme était le fruit de leur milieu: la précarité extrême, décuplée au cours des 20 dernières années d'une crise qui avait fauché le rêve d'une vie meilleure à laquelle tant de gens aspiraient.
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page 65...des millions de cubains dont les estomacs avaient été surveillés pendant des décennies par le livret de ravitaillement qui les empêchait de mourir de faim mais qui ne leur permettait pas de vivre sans souffrir de faim.
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Sais-tu que trop souvent des hommes sont morts pour une richesse matérielle en croyant de bonne foi qu'ils se battaient au nom de quelque gloire céleste? Sais-tu que cela arrivera très bientôt ici, devant et derrière ces magnifiques murailles? Et que cela se produira encore et encore au long des siècles que les hommes vivront sur cette terre?
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p. 51 :
En s’engageant dans la rue principale du quartier, la première chose qui surprit Conde fut le nombre de gens, de tous âges, races et allures qui parcouraient les rues, se rassemblaient aux carrefours, tous achetant, vendant ou proposant quelque chose pour gagner leur vie avec le moindre effort. Qui donc ici avait un travail régulier ? Les statistiques, pensa Conde, ne devaient pas être très encourageantes en termes prolétariens.
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Ainsi donc, ce personnage avec lequel je voulais travailler, déjà chargé d’une si haute responsabilité conceptuelle et stylistique, exigeait beaucoup de chair et d’âme pour être à la fois le conducteur de l’histoire et l’interprète adéquat d’une situation aussi singulière que celle de Cuba et de La Havane. Pour créer son indispensable humanité, une des décisions les plus faciles et logiques que je pris alors fut la suivante : choisir comme personnage un homme de ma génération, né dans un quartier comme le mien, qui avait fait ses études dans les mêmes écoles que moi et donc vécu des expériences très semblables aux miennes, à une époque où, à Cuba, nous étions tous égaux (même si beaucoup avaient toujours été « moins » égaux que d’autres).
Cet « homme », cependant, devait présenter un trait différent, une caractéristique qui m’était totalement étrangère, je dirais même repoussante : il devait être policier. La vraisemblance, qui selon Chandler est l’essence du roman policier et de tout récit réaliste, exigeait que mon personnage appartienne à ce milieu professionnel […]. De cette façon, la proximité (que me permettaient le recours à la voix narrative et la composante biographique générationnelle) était relativisée et mise à distance, par une manière d’agir, de penser et de se projeter que, personnellement, j’ignore et je réprouve.
Je crois que ce fut précisément la tentative de résoudre ce hiatus essentiel dans ma relation avec le personnage, qui permit à Mario Conde de respirer pour la première fois comme créature vivante : j’allais le construire comme une espèce d’anti-policier, de policier littéraire, vraisemblable dans le cadre de la fiction romanesque, mais impensable dans le cadre de la réalité policière cubaine. C’était là un jeu que m’autorisait ma condition de romancier et j’ai décidé de l’exploiter. (p. 19)
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Écrire un roman policier peut s’avérer un exercice esthétique de plus grande responsabilité et complexité que ce que l’on attend d’un genre narratif souvent qualifié – à juste titre – de littérature d’évasion et de divertissement. Quand un auteur projette d’écrire un roman policier, il peut envisager différentes variables, ou voies artistiques, emprunter celles qu’il préfère et, surtout, choisir celles qui correspondent à ses capacités et ses objectifs. On peut tout à fait, par exemple, écrire un roman policier pour raconter seulement comment on découvre la mystérieuse identité de l’auteur d’un meurtre. Mais l’écrivain peut aussi se proposer d’explorer en profondeur les circonstances (contexte, société, époque) dans lesquelles cet individu a commis son crime. Parmi les différentes possibilités, il peut décider de recourir à un langage, une structure et des personnages purement fonctionnels. Cependant, il ne doit pas négliger le souci du style, en veillant à ce que la structure de la narration ne se réduise pas à un dossier ou à un simple rapport de police comportant la solution de l’énigme et en cherchant à créer des personnages dotés d’une psychologie et d’une densité spécifiques, des figures inscrites dans une réalité sociale et historique. Bref, il est tout aussi concevable d’écrire un roman policier pour distraire, faire plaisir, jouer avec l’énigme, que, – si on en a la capacité et la volonté – pour s’intéresser, approfondir, révéler, prendre au sérieux la société et la littérature… y compris en oubliant de résoudre l’énigme. (p. 15)
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El Conde miró a Manolo y le dijo que sí con los ojos.
- ¿Donde estuviste el día 31?
- ¿Tengo que contestar?
- Creo que sí, pero no estás obligada. ¿Dónde estabas, Zoila?
- Por ahí, con un amigo. Éste es un país libre y soberano, ¿no?
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Après tout, on n'a trente six ans qu'une seule fois dans sa vie, non ?
Et une seule fois dix huit, quarante neuf ou soixante deux. Et presque jamais quatre vingt huit.
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Ma seule conviction était que cet exercice de sauvetage d’une mémoire escamotée avait beaucoup à voir avec ma responsabilité devant la vie ou plutôt, ma vie ; si le destin avait fait de moi le dépositaire d’une histoire cruelle et exemplaire mon devoir d’être humain était de la préserver, de la soustraire au raz de marée des oublis .
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Les rabbins disent que nous avons de la chance parce que nous vivons sur les terres de la liberté. Ils ont raison. Mais je crois que le mot liberté a perdu tout crédit... Ces rabbins sont justement ceux qui t'obligent à te comporter selon les lois de Dieu, mais aussi les les lois qu'ils ont eux-mêmes dictées, persuadés qu'ils sont les interprètes de la volonté divine. Alors qu'ils vantent la liberté, ce sont eux qui te puniraient sans pitié, s'ils savaient ce que tu fais ici... Même si c'est seulement parce que tu aimes la peinture et pas pour devenir idolâtre...
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- Si tu es capable de te peindre et de mettre dans tes yeux l'expression que tu désires, tu es un peintre, dit-il enfin, sans cesser de manier son pinceau, sans quitter le tableau du regard. Le reste, c'est du théâtre... des taches de couleur l'une à côté de l'autre... Mais la peinture c'est beaucoup plus... Ou du moins elle doit l'être... La plus révélatrice de toutes les histoires humaines, c'est celle qui décrit le visage d'un homme...
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Parce qu'à trente ans, Daniel Kaminsky pouvait se considérer comme un spécialiste en perte : il avait perdu non pas un mais deux pays, celui de sa naissance puis son pays d'adoption ; une famille ; la langue polonaise et le yiddish ; un Dieu, et avec lui une foi et l'engagement dans une tradition fondée sur cette foi et sa loi ; il avait perdu une vie qu'il aimait et une culture acquise ; il avait perdu ses meilleurs et même ses pires amis, certains dans ce monde, d'autres comme Pepe Manuel et Antonio Rico, déjà installée au ciel ; il avait aussi échoué dans sa tentative d'exercer sa justice, même au risque d'en payer le prix, sans obtenir ne serait-ce que le soulagement du défoulement ou la satisfaction d'avoir exécuté le châtiment mérité.
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Un mélange de peur et de frustration lui voila la vue. Depuis le soir du 31 mai 1939 où, à bord d'une barque, il avait vu pour la dernière fois, ses parents et sa sœur, Judith, penchés sur le bastingage du Saint Louis, David n'avait plus jamais pleuré. En ce jour terrible, il était encore enfant et ses pleurs l'avaient empêché de parler à ses parents, à sa petite sœur, et depuis, cette incapacité verbale pesait sur lui comme une faute. Il pleurait maintenant parce que sa peur était en réalité plus forte que tous ces désirs de justice et parce qu'il se sentait soulagé, car ce jour-là un évènement s'était produit qui l'avait empêché de tuer l'homme responsable de la mort de ses êtres chers, dont il connaissait désormais le visage. S'éloigner du danger et pleurer était tout ce que Daniel Kaminsky pouvait faire à cet instant.
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Bien entendu, Batista avait amassé une prodigieuse fortune et créé un réseau d'affaires financières auquel s'était joint un groupe de chefs mafieux nord-américains, parmi lesquels le juif polonais Meyer Lansky dont la présence était devenue habituelle à La Havane. Toutefois, par chance, comme disait l'oncle Joseph, ce personnage, une honte pour les juifs, passait son temps dans les casinos, les cabarets, les conciliabules avec Batista et ses secrétaires, et pas à la synagogue.
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