AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Maurice Genevoix (377)


Cela commençait dès janvier, sous les hargnes de grésil et de pluie. C'est l'époque des saumons d'hiver, grands poissons troueurs de courants, au reins bleus, aux flancs d'argents ponctués de noir. Fuseaux de muscles, lourds de laitance, de paquets d’œufs, ils vont par leurs chemins profonds, invisibles, infatigables, vers les eaux de montagne plus légères et plus riches en oxygène, vers les frayères de sable que creusera la caresse de leurs ventres; où les femelles, au frôlement des mâles, se délivreront de leur faix dans le flot trouble des fécondations. Et les nageoires y glissent à lents battements, porteuses d'ombres qui passent, voltent, passent encore au-dessus des œufs libérés.
Commenter  J’apprécie          20
- Humph ! me dit-il. Bonsoir !
- Bonsoir, Castor.
- Bonsoir, Castor ! Reprit-il railleusement. C'est ridicule. C'est comme si je te disais : Bonsoir Homme.
Mon nom est Dag. Quel est ton nom ?
Il n'attendit même pas ma réponse.
Si tu veux je t'appellerai Red à cause de ton makina rouge.
Commenter  J’apprécie          30
Le soleil avait disparu, mais sa clarté emplissait le ciel et se réfléchissait dans l'eau calme. Tout paraissait vraiment en or : l'eau, les feuilles des arbres.
Commenter  J’apprécie          20
Tout s'est passé avec une rapidité fantastique. La vision même du fauve rasé, ramassé avant le bond, m'a précipité en avant. J'ai du aussi crier de toutes mes forces. Le couguar avait bondi. Mais ma ruée inopinée, mon hurlement, on fait gauchir ou flotter son élan. C'est moi qui l'ai reçu, à un pas devant Mildred. (p.333)
Commenter  J’apprécie          00
Les soleils tournaient dans le ciel. L'alternance des aubes et des soirs, dans cette halte aux rives du temps, était comme un vague bercement, d'une ampleur immense et très douce.
Commenter  J’apprécie          70
La lune apparut dans le ciel avant qu'il eût atteint les arbres. Sa lueur blonde se leva derrière lui et coula lentement sur la plaine. Il entra dans la nappe de brume qui flottait au-dessus de l'étang: elle était toute blanche à présent, d'une pâleur froide et pure qui semblait attirer à elle la clarté de la lune montante.
Commenter  J’apprécie          30
C'était maintenant le plein été, l'époque des soirs interminables, des nuits tièdes et transparentes où la pâleur trainante de l'aube prolonge sous l'horizon la clarté du crépuscule.
Commenter  J’apprécie          70
Par de belles nuits, la lumière de la lune y pleuvait en grandes averses blondes.
Commenter  J’apprécie          110
On dit que la nuit descend ; mais ce n'est pas vrai, elle monte. Elle a monté des talus, des sous-bois.
Commenter  J’apprécie          140
C'était le commencement du printemps. Je venais de pousser la petite porte de mon jardin pour aller respirer l'air des pins. J'avais une compagne de promenade, la plus jeune de mes filles qui devait, en ce temps-là, avoir dix ans. Nous allions, entre les arbres aux troncs roses sur lesquels jouait le soleil d'avril. Des coups de brise poussaient dans le ciel bleu de petits nuages ronds, très blancs, et faisaient courir sur la Loire des risées d'un bleu d'ardoise. Sylvie, ma fille, trottinait de çà et de là, cueillant dans I'herbe les fleurs du printemps.
J'étais tout seul quand la chose arriva.

(Incipit)
Commenter  J’apprécie          80
Un peu plus tôt, un peu plus tard, le moment vient toujours où l'homme mûr réinvente sa vie ; ne serait-ce qu'en s'octroyant la souveraine liberté de choix dont le privent des traditions ou des préjugés de famille, le jugement d'un maître d'école ou le hasard des destinées. Qui ne traîne en secret un cortège de nostalgie, ne s'imagine clown pailleté dans un cirque, guérisseur ou marinier d'eau douce ?
Commenter  J’apprécie          321
En mes jeunes années, j’avais lié amitié avec un homme de la forêt, un de ces doux sauvages dont les rouliers se gaussent à l’auberge, parce qu’ils n’ont pas réussi à se déprendre de leur enfance.(…) Ils sont restés pareils à des enfants, préservés des morts silencieuses qui flétrissent le cœur des vivants, fils du printemps encore quand l’hiver neige sur leurs cheveux.
D’autres que j’ai connus aussi, se défendaient par d’humbles moyens, l’innocence, la pauvreté, la bonté. J’en sais un pauvre entre les pauvres, qui cachait jalousement un trésor au fond d’un tiroir. On y lisait : "Ce matin, la première hirondelle. Nous l’avons espérée longtemps." Ou encore : "Sur les trois heures de la nuit, j’ai entendu un vol d’oies sauvages. C’est bien tôt dans la saison. Nous allons souffrir de grands froids." Presque à chaque page, des fleurs séchées, des plumes d’oiseaux, des signets de mémoire qui marquaient quarante années d’une vie.
Commenter  J’apprécie          378
Ceux de 14 ne couvre que la période de 1914 à Avril 1915, et c'est un livre imposant que pour ma part j’ai mis quelque temps à lire.
La forme d’abord: il ne s’agit pas d’un roman, mais bien d’un journal, le quotidien des tranchées et des combats. Des faits linéaires, chronologiques. Le rythme est donc par définition lent et assez monotone.
Mais cette lenteur qu’il faut d’abord apprivoiser permet en fait de mieux s’imprégner d’une atmosphère de terreur, de visualiser les scènes de guerre et de désolation.
Les descriptions dès lors prennent toute leur force et signification.
La pudeur des poilus, leur digne résignation dans l’enfer des tranchées et la boucherie des champs de bataille sont remarquablement dépeintes.

C’est sans aucun doute le récit sur la Grande Guerre qui m’a le plus marqué avec "La Peur" de Gabriel Chevallier. Il est profondément humain.
Commenter  J’apprécie          20
Maurice Genevoix
Ils virent enfin l'espace immense, la solitude éblouissante où les rouleaux frangés d'écume poursuivaient leur course sans fin, la pointe d'île aux trois palmiers, le chenal libre, ma ligne bleue de la Côte sous son pelage de forêts. Alors Damien comprit et peut-être Luc lui-même. Ils demeurèrent longtemps silencieux, écoutant les glissements de l'eau, le battement profond, régulier du ressac infatigable. Même eux, qui ne l'avaient pas vu passer, imaginèrent sur le chenal l'apparition du long bateau blanc, sa course glissante et tendue, son étrave atteignant la pointe de l'île, puis son château, maintenant sa poupe ; et déjà il avait passé, disparu, loin de la guetteur solitaire, la vieille femme qui était là, si lasse, mais dont les yeux brillaient d'une lumière dont ils n'étaient pas dignes.
Commenter  J’apprécie          31
Maurice Genevoix
Ils virent enfin l'espace immense, la solitude éblouissante où les rouleaux frangés d'écume poursuivaient leur course sans fin, la pointe d'île aux trois palmiers, le chenal libre, ma ligne bleue de la Côte sous son pelage de forêts. Alors Damien comprit et peut-être Luc lui-même. Ils demeurèrent longtemps silencieux, écoutant les glissements de l'eau, le battement profond, régulier du ressac infatigable. Même eux, qui ne l'avaient pas vu passer, imaginèrent sur le chenal l'apparition du long bateau blanc, sa course glissante et tendue, son étrave atteignant la pointe de l'île, puis son château, maintenant sa poupe ; et déjà il avait passé, disparu, loin de la guetteur solitaire, la vieille femme qui était là, si lasse, mais dont les yeux brillaient d'une lumière dont ils n'étaient pas dignes.
Commenter  J’apprécie          10
Alors Damien,à son tour, parla : "Tu le verras! Nous viendront encore. À nos congés chaque année, tu le sais.... Notre cœur à tous les deux est ici. Où donc irais-je, moi l'orphelin ? Tu le verras ; nous viendrons toujours..."
Il parlait impulsivement, sans presque avoir conscience des mots qui lui venaient aux lèvres, mais d'une voix si chaude si tendre, qu'un large sourire s'épanouit sur la face mouillée de Khéba et que Cissé, détournant les yeux de son fils, les arrêta sur ceux de Damien. Il poursuivait, dans une exaltation croissante qui le soulevait hors de lui-même :
"Sais-tu que le Kindia prendra toujours la passe, derrière l'île? Il suit la Côte. Tu le verras à chaque voyage, comme par le passé, si tu veux. De la pointe aux Iguanes, juste tournée l'anse aux pirogues, je suis certain que tu pourras l'apercevoir par le travers de la Grande Île.Ecoute..."
Il s'arrêta, surpris par le sourire que venait d'avoir Cissé, un mystérieux et beau sourire, plein de secrets, de certitudes nouvelles.
Commenter  J’apprécie          00
Maurice Genevoix
À peine si Bourgeonnier distinguait par instant une parole ; juste assez pour conjecturer des menaces chargées de mystère, des envoûtement où le Dieu des chrétiens s'associait aux féticheurs noirs. Il haussa les épaules : qu'en eût dit le Père missionnaire qui avait baptisé Francis? En toute autre occasion,il eût souri. Mais cette voix murmurant ne prêtait pas à sourire ; on y sentait une résolution implacable et qui saurait se faire dangereuse.
Commenter  J’apprécie          00
Maurice Genevoix
La vérité, c'était que Laminé avait commencé de lui donner sur les nerfs à peu près vers le même temps où Cissé avait paru. Ce n'était pas un mauvais diable, ce long Ouolof aux jarrets maigres, ce 'tapalé', fanfaron et naïf comme tous les garçons de son âge. Presque toujours une fleur aux lèvres, une cigarette coincée derrière l'oreille, le parler roucouleur et traînant, avec des mots d'argot ramassés sur les docks ou sur les chantiers de travail, il n'avait pas tardé à rôder autour de Cissé, à lui rouler des yeux blancs et à lui chanter la romance. Quoi de plus naturel, et d'ailleurs de moins imprévu ? Il désirait la fille de toute l'ardeur de ses vingt ans, ne dissimulant rien, s'inondant maintenant de parfums et maigrissant de jour en jour.
Commenter  J’apprécie          10
Une petite Sérère du Baol, avait annoncé Juliette. C'est Guyard, ton ami de Diourbel, qui doit nous l'amener demain.
Et le lendemain, en effet, la Fatou était là, poussée par un gaillard cordial, au rire sonore, aux éclats de voix bondissants.
Elle est mignonne, hein, Bourgeonnier? Un peu farouche, mais ça passera. On sait coudre, madame Bourgeonnier, mitonner le 'bassi niébé'; les bonnes sœurs m'ont juré qu'on repassait convenablement. Pas mal, tout ça ? Baptême et première communion, bonne volonté presque éperdue. Approche, Cissé...Si tu t'en donnes la peine, tu seras heureuse ici.
Elle souriait. Elle souriait déjà. Pendant quinze ans ce sourire de Cissé, de poste en poste, avait rayonné sur eux tous. Elle avait appris son métier : Juliette se targuait à bon droit de savoir mener une maison.
Dresser une domestique, fût-elle noire, qui s'en fût acquitté mieux qu'elle ?
Commenter  J’apprécie          00
Songeant à eux, il détestait cette guerre, entrevoyait des jours de ténèbres où triompheraient les pharisiens et les méchants, où les choses saintes seraient en dérision; non plus lumière au fond des coeurs, mais paroles de blasphème qui couvriraient en vérité l'orgueil, la cupidité, la luxure, la sauvagerie de la pire bête qui soit sous le ciel de Dieu : l'homme qui a renié son âme.
Commenter  J’apprécie          141



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Maurice Genevoix Voir plus

Quiz Voir plus

Anne Frank

Dans quel pays est née Anne Frank ?

Autriche
Allemagne
Pologne
Tchécoslovaquie

10 questions
477 lecteurs ont répondu
Thème : Anne FrankCréer un quiz sur cet auteur

{* *}