Citations de Mazarine Pingeot (323)
Papa et maman ne connaissaient rien de mon existence au lycée, de mes cours, de mes camarades : j’y suis comme orpheline, déracinée, détachée de tout référent. Seule avec mes secrets et mon désir d’adaptation, avec aussi cette timidité et cette angoisse de l’autre, cette fermeture qui m’était une prison.
Je ne sais pas ce que je cherche. Connaître mieux celui que j’ai aimé ? Mon amour n’est pas en jeu. Et je ne souhaite rien que de laisser aux énigmes leurs qualités d’énigmes, au mystère du personnage sa force et sa séduction. Ce sont les passions qu’il a générées et génère encore dans le cœur des autres qui m’intriguent. Peut-être se seront-elles pacifiées quand tu seras en âge de comprendre. Faut-il le souhaiter ?
Pourquoi vouloir à tout prix préférer? On n'est pas obligé de choisir.
On pouvait se voir, se toucher, s'appeler « papa maman chéris » sans oreilles indiscrètes, en toute liberté. Au-dehors, il fallait se cacher. Et quand son père la conviait à marcher dans les rues de Paris, elle appelait à la rescousse les mille stratégies pour se cacher en se montrant. Par le regard, elle éloignait les autres. Il suffisait de les regarder pour qu'ils ne la voient pas. Les voir les transformait en pierre. La toute-puissance du regard qui rend le regard lui-même invisible.
La technologie est faite pour ça, vous donner l'impression d'un changement possible dans votre vie, sans effort, un miracle, de la magie moderne.
Les rêves s'épuisent de n'être pas nourris de possible. Jamais il ne vous est venu à l'esprit que vous pourriez vivre une autre vie, ou la même avec quelques données différentes. Jamais vous n'avez revendiqué quoi que ce soit pour vous, parce que de vous-même, il n'y en avait pas.
Le roi est mort, vive le roi. Mais le « père », l'unique, celui dont vous êtes issue, papa, a cessé de vivre, et personne ne le remplacera. C'est ce qui distingue la fonction de père de celle de président.
Vous vous préserviez comme on soigne un trésor, vous ne pouviez pas les décevoir. Mais vous ne vous demandiez pas s'il était normal de croire qu'on peut décevoir ses parents. Après tout, on ne déçoit qu'à l'aune d'un idéal, d'une image fixe, ou d'une idée
On n'habitue pas le corps à ce qui le distrait
On ne peut pas demander à une femme ce qu'on ne lui donne pas.
Le passé vous abrutit de son silence.
Il demeurait lui-même, cet homme imposant et silencieux, confiant et méfiant à la fois, profondément bienveillant, sauf sur la scène politique, mais cela restait un jeu, une nécessité à l'intérieur des règles de ce jeu, et qui n'entamait pas sa confiance en l'homme – non pas une confiance en l'homme générique, mais en celui qu'il rencontrait. Enfin votre père était quelqu'un de secret. Et il avait incarné son secret en vous. Même avec son secret, il avait des secrets. Et ses secrets étaient le point nodal de toutes ses histoires, le lieu où elles se rencontraient, ce lieu que personne n'a jamais pénétré.
"Le silence, quand on y est accoutumé, n'empêche pas de savoir les choses tues."
"La peine a cet avantage qu'elle ne se confond jamais avec ce qu'on voit d'elle."
"Avec le temps, même la mort s'en va."
En me rendant à Assouan (...) j'ai su qu'il ne mourrait jamais, à condition que je vive pleinement.
Je n'ai pas la manie des archives, des preuves écrites de mon existence ou de celle des autres. Les mots manuscrits passent, ceux qui sont imprimés restent. Il y a la vie et la littérature. Je ne jette jamais rien mais j'égare.
Tu es un survivant puisque tu as été épargné...
Le silence, quand on y est accoutumé, n'empêche pas de savoir les choses tues. Il y a un autre mode de communication, je l'avais expérimenté, alors pourquoi ne fonctionnerait-il pas au-delà de la vie ?
Une sieste ne va pas sans culpabilité. J'ai été fabriquée par l'industrie de la mauvaise conscience - à la chaîne, lycée, concours, maman hyperactive. On ne "gâche" pas le temps.