Citations de Michael Ondaatje (129)
Ce que je regrette le plus, concertant mon père, c'est de n'avoir pas eu le temps de lui parler en adulte.
Pleurer fait perdre plus d'énergie que toute autre activité.
Les tunnels de la taupe sont écrasés par les roues,
Les œufs de l’alouette dispersés, leur propriétaire envolée,
Et le sapeur-mineur descelle le foyer du hérisson à grands coups.
L’escargot se rétracte sous l’horrible poussée
Mais en vain ; il est écrasé par le rebord de la jante malsaine.
Le lombric demande ce qu’il entend là-haut dans la mêlée
Et s’enfonce dans le sol pour ne plus voir cette lugubre scène,
Et il se croit en sécurité…
(Thomas Hardy sur le carnage des petits animaux dans les quelque soixante-dix champs où se livra la bataille de Waterloo)
Le désert ne pouvait être ni revendiqué ni possédé : c'était une pièce de drap emportée par les vents, que jamais les pierres n'avaient su retenir [...].
... comment survivre à la longue et difficile traversée de l’adolescence, que nous entreprenons sans véritable connaissance de nous-mêmes ? « Le moi n’est pas ce qui compte le plus », m’avait un jour murmuré Olive Lawrence.
Quand on est jeune, on est moins gêné par la réalité de sa situation qu’effrayé à l’idée que d’autres la découvrent et nous jugent.
Les guerres ne sont pas glorieuses.
Les moments avant de s'endormir sont ceux où elle se sent le plus en vie, elle saute par-dessus les fragments de la journée, emportant au lit chaque instant, comme l'enfant y emporte livres de classe et crayons.
On ne trouve Dieu que dans le désert [...].
La bouche révèle le manque de confiance en soi, la suffisance, ou tout autre nuance de caractère. Pour lui, elle est ce qu'un visage a de plus complexe. Il n'est jamais sûr de ce qu'un oeil révèle. Mais il peut lire la façon dont la bouche peut s'assombrir jusqu'à la dureté, suggérer la tendresse. Il est aisé de se méprendre sur un oeil [...].
- [...] Il n'y a que les riches qui ne puissent pas s'offrir le luxe d'être malins. Ils sont compromis. Ils se sont laissé enfermer dans leurs privilèges depuis de longues années. Ils doivent protéger ce qui leur appartient. Personne n'est plus méchant que les riches. Tu peux me faire confiance. Ils doivent se conformer aux usages de leur monde civilisé de merde. Ils déclarent la guerre, ils ont leur honneur, ils ne peuvent pas partir.
N'oubliez jamais : votre histoire n'est qu'une histoire parmi d'autres, pas nécessairement la plus importante. Le moi n'est pas ce qui compte le plus.
Le désert ne pouvait être ni revendiqué, ni possédé : c'était une pièce de drap emportée par les vents, que jamais les pierres n'avaient su retenir, à laquelle on avait donné une centaine de noms éphémères
Une histoire d'amour, ce ne sont pas des êtres qui perdent leurs coeurs mais plutôt des êtres qui découvrent cet habitant acariâtre qui, lorsqu'on se heurte à lui, laisse à entendre que le corps ne saurait tromper qui que ce soit, ni quoi que ce soit : ni la sagesse du sommeil, ni l'habitude des courbettes. C'est une destruction de l'être et du passé.
Quand on grandit dans l’incertitude, on ne s’embarrasse pas des gens plus d’une journée, voire plus d’une heure. On ne se préoccupe pas de savoir ce qu’il convient ou conviendrait de se rappeler à leur sujet. On ne peut compter que sur soi-même. Je mis donc longtemps à apprivoiser le passé et à reconstruire des repères qui me permettent de l’interpréter.
Dans le Tassili, j'ai vu des gravures rupestres remontant à l'époque où, sur des barques en roseaux, les habitants du Sahara chassaient des chevaux marins. A Wadi Sura, j'ai vu dans des grottes des fresques représentant des nageurs.
Le bateau déboucha de la brume et ils embarquèrent. Toutes les choses nouvelles dans la vie étaient censées arriver ainsi...
(Extrait tiré de la page des remerciements)
En tant que professeur dans quelque centre urbain, il mènerait sans nul doute une vie frugale. Mais il manifestait une sérénité en accord avec l’existence qu’il avait choisie. Cette sérénité et cette assurance, je ne les ai trouvées que chez ceux qui sont protégés par le bouclier des livres.
Enterrés 2
1
Nous avons transporté clandestinement la dent du Bouddha
de temple en temple pendant cinq cents ans, 1300-1800.
Un jour nous avons enterré nos bibliothèques
sous les grands arbres médicinaux
que les envahisseurs ont brûlés
‒ quand nous avons perdu les livres,
les poèmes de la science, les invocations.
La dent tirée de l'argile brûlante
puis cachée dans nos cheveux et de nouveau enterrée
sous les rapides d'un fleuve.
Quand ils sont partis nous avons plongé la rechercher
et l'avons emportée dans nos cheveux.
p.49
Toute sa vie, Patrick a vécu dans les marges des romans et de leurs histoires trop simples, les auteurs concédant à leurs héros des mobiles primaires. Les événements mondiaux tiraient les personnages de la déchéance et, à la fin de l’ouvrage, justice était faite et les romances en bonne voie.
(Payot, p.105)