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Critiques de Mo Yan (332)
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Le maître a de plus en plus d'humour

♫ Compagnon de colère, compagnon de combat

Toi que l'on faisait taire, toi qui ne comptais pas

Tu vas pouvoir enfin le porter

Le chiffon rouge de la liberté

Car le monde sera ce que tu le feras

Plein d'amour de justice et de joie



Accroche à ton cœur un morceau de chiffon rouge

Une fleur couleur de sang

Si tu veux vraiment que ça change et que ça bouge

Lève-toi car il est temps



Tu crevais de faim dans ta misère

Tu vendais tes bras pour un morceau de pain

Mais ne crains plus rien, le jour se lève

Il fera bon vivre demain ♫



(Michel Fugain – Le chiffon rouge -1977)



Précieux petit roman que voici …



Il dresse, à travers les mésaventures de maître Ding, un portrait grinçant de la Chine moderne, tiraillée entre ses idéaux communistes de justice sociale pour tous, de glorification du travail honnête et d’abnégation pour l’Etat bienfaiteur et son ultra-libéralisme où seul le profit compte. On découvre une Chine empêtrée dans ses contradictions et sclérosée par une administration kafkaïenne, par la corruption et par le népotisme.



Heureusement le maître déborde d’humour (même s’il rit jaune) et de ressources: après son licenciement, qui a lieu à un mois de sa retraite (les patrons voyous de nos multinationales ont fait des émules en Chine), il sait rebondir car « si les vers ne meurent pas de faim sous terre, jamais nous autres de la classe ouvrière ne mourrons de faim ». Quelle violence dans cette phrase, quand même!



A épingler aussi la manipulation honteuse des dirigeants qui, devant la foule des ouvriers en colère, vont jusqu’à détourner l’exemple de cet ouvrier modèle à leurs fins. Mais maître Ding peut aussi compter sur la fraternité et la solidarité entre les ouvriers, qu’on retrouve d’ailleurs dans tous les pays.



A noter aussi les petites notes de bas de page qui éclairent sur la culture chinoise et aident à la compréhension de ce géant d’Asie qui ne cesse de me fasciner et de m’intriguer.



Je remercie mh17 d’avoir guidé mes pas vers ce petit roman de Mo Yan, auteur que j’apprécie de plus en plus !



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Beaux seins, belles fesses : Les enfants de..

Bien plus que le difficile sevrage du jeune Jintong, c'est tout le XXe siecle chinois qui va défiler, l'invasion des japonais, les différentes phases du communisme, les camps de redressement pour 'droitistes'...un monde où les hommes sont souvent des petites fiottes alors que les fortes ce sont les femmes!



Les mots candides et d'une merveilleuse poésie du jeune Jintong m'ont régalé, des images fortes comme ces cinq muets et leurs cinq chiens noirs, la battaille 'de la merde et de l'urine' contre les Allemands sans genoux, le marché de la neige où aucun mot ne peut être prononcé, la démonstration de vol du commandant Sima Ku, mais le côté désopilant peut basculer quand s'écrase l'immortel oiseau, quand la famine oblige d'aller vendre ses enfants.



Malheureusement, le style et l'histoire s'appauvrissent et s'alourdissent dans la deuxième moitié, disparaissent les délicieux aphorismes, sans doute les textes écrits plus tard à Pékin.

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Le maître a de plus en plus d'humour

Après 43 ans de bons et loyaux services dans l'Usine de fabrication de matériel agricole de sa ville, Maître Ding est licencié à un mois de la retraite. Les larmes ou la colère n'y changent rien, l'usine a fait faillite et il lui faut désormais trouvé une nouvelle source de revenus. Mais Maître Ding est un vieil homme, usé par son dur labeur et les opportunités s'en trouvent réduites. après des jours d'errance désespérée dans les rues de la ville, le salut arrive lors d'une promenade entre le cimetière et le lac artificiel. Maître Ding trouve l'idée qui, sans efforts physiques, pourra lui assurer un revenu suffisamment confortable pour assurer ses vieux jours. Mais saura-t-il faire taire ses scrupules et dépasser le sentiment de honte qu'il ressent?





Sous ses airs faussement naïfs, ce petit conte sans prétention cache une critique acerbe du néo-capitalisme chinois. Il décrit cette nouvelle société où l'Etat n'est plus providence, où c'est le profit qui commande, où les patrons s'enrichissent sur le dos des ouvriers. Rude constat pour Maître Ding, vieux communiste, ouvrier exemplaire plusieurs fois médaillé qui s'est voué corps et âme à son usine et qui n'a aucune valeur au regard du profit et de la productivité. Pour les ouvriers comme lui, c'est désormais le règne de la débrouillardise. Les salaires et les pensions sont versés de façon aléatoire et pour vivre décemment on trouve un petit boulot plus ou moins légal. Maître Ding qui avait placé toute sa confiance en son patron découvre les nouvelles lois de la société où l'individualisme a pris le pouvoir. Pour lui, c'est un choc mais il ne se révolte pas, il a honte d'être un poids et finalement il s'adapte.

Ce court récit plein de tendresse, d'humour et d'optimisme est une ode à ce peuple chinois si souvent opprimé mais qui ne baisse jamais les bras et, de petites combines en bouts de ficelle, se construit un avenir qui se veut radieux.

Ecrit par le Nobel de littérature 2012, c'est un petit livre abordable et plaisant que je conseille pour qui veut appréhender l'oeuvre de Mo YAN en douceur.
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Le vieil homme et le château bleu

Il y a quelques années, un journal français a proposé à des écrivains d'écrire une nouvelle commençant par «Ulysse prit le sentier rocailleux qui monte à travers bois, du port vers la falaise. Il allait à l'endroit qu'avait dit Athéna…»

Mo Yan a , comme à son habitude , magnifié l'exercice , montrant en quelques paragraphes l'étendue de son talent, sa capacité à mêler l'onirique au réel . La nature est toujours étincelante, les métaphores justes et brillantes .

Ici , Mo Yan raccroche Ulysse à son pays et fait intervenir Paul Andreu, architecte du grand théâtre de Pekin (2007).

C'est bref, beau, intense .

Merci à mh17 pour le partage.
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Grenouilles

Impression partagée. Bouquin assez étrange et inattendu.



C'est un mélange de réalisme et d'imaginaire (peut-être à la façon de Garcia Marquez ?), ce qui en fait un roman très original, mais je me suis aussi beaucoup ennuyée par moment, ne voyant pas où l'auteur voulait m'emmener, ne décelant pas de véritable intrigue, en tout cas pendant la première moitié du récit.



Heureusement il y a le personnage de la tante, gynécologue, faiseuse d'anges, rebouteuse et grande stérilisatrice au service de l'idéologie communiste, qui ne peut laisser indifférent. Et surtout il y a la Chine, un personnage en soi, qui se métamorphose tout au long du roman, où les gens passent de paysans crevant de faim aux nouveaux riches crapuleux, de la misère matérielle à la misère morale.



Et je me suis laissée aller, j'ai essayé d'ouvrir mes oeillères et d'abandonner – autant que faire se peut- mes repères pour découvrir cette Chine tellement exotique et déroutante. Je ne suis pas déçue du voyage, même si c'est une expérience étrange et épuisante. Et je me dis que c'est peut-être le premier vrai roman chinois que je lis.

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Le clan du sorgho

Mon nom est rouge. Ce n'est pas le titre du roman. Mais il s'en est fallu de peu. Le titre original est (paraît-il) "Champs de céréales rouges". C'est en tout cas le titre de l'édition allemande. Rouges sont les champs de sorgho en fleur. Rouge le sang qui coule à flots. Guerres entre bandits, troupes rivales luttant contre l'envahisseur japonais. Sans oublier la criminalité quotidienne d'une société rurale féodale. Le résultat est le toujours même : sang, cervelle, viscères, excréments, tout cela engraisse la terre noire sur laquelle pousse le sorgho qui nourrira les survivants. Ce sorgho qui est la base de l'alimentation et sert aussi à produire l'alcool consommé en grandes quantités par tous. Ce n'est pas un livre pour âmes sensibles! Et encore moins pour les amis des chiens ou des chevaux.

L'écriture est soi-disant baroque. Elle est parfois très lyrique, ainsi quand il est question de la nature et de la place de l'homme dans l'univers. Réalité et mythes se mélangent pour donner des scènes inoubliables tel l'enterrement de la grand-mère.

On a reproché le manque de profondeur des personnages. Il me semble au contraire que ce livre donne une voix à des figures autrement condamnées à l'anonymat dans une culture pour laquelle une vie humaine n'est décidément pas grand-chose.

Mais la plus grande surprise pour moi est la grande similitude entre ce livre "officiel" et les oeuvres interdites que je connais. Le débat autour de l'attribution du premier prix nobel de littérature à un Chinois à Mo Yan, auteur "officiel", n'en devient que plus stérile.

Un grand auteur. Un grand roman chinois.

(Lu en allemand, la version allemande a près de 500 pages)
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Le Veau - Le coureur de fond

C'est sans doute un réflexe pavlovien que de se retourner vers des valeurs sures en période anxiogène. Mo Yan et sa littérature entrent clairement pour moi dans ce domaine et c'est avec délectation que je me suis plongé dans ces deux nouvelles .

Mo Yan n'est jamais aussi bon que pour décrire le monde paysan sous Mao. Monde paysan d'où il vient.

Si le théâtre des opérations des deux nouvelles est le même, les sujets en sont bien différents.

Dans la première nouvelle, le Veau,un village s’apprête à castrer trois veaux et attend le vétérinaire officiel. Nouvelle très drôle, enfin avec les critères locaux , qui montre très bien le fonctionnement du pouvoir et des hiérarchies sous Mao. L'activité principale en cas de problème est de trouver un bouc émissaire pour sauver ses fesses ! On retrouve les caractéristiques des récits de Mo Yan , insultes entre personnages, situations cocasses, peinture acerbe de la société chinoise sous le communisme, mais aussi grande place à la description de la nature. L'auteur nous confronte aux absurdités du système : Impossible de tuer les veaux parce que le parti ne l'autorise pas , mais impossibilité de les garder en vie parce qu'on ne peut pas les nourrir!

Enfin , on y apprend que dans les campagnes , les paysans mettaient la gnôle dans des bouteilles (vides !!!) d'insecticide . Il parait que ça donne du goût !!!



La deuxième histoire est centré sur un instituteur remplaçant du village en 1968. Laid comme pou, raillé de tous , il s'avère être un grand sportif , avec son air con et sa vue basse !!

La aussi , plongée dans la révolution culturelle avec ce village rempli de "droitiers", ou plus vulgairement d'instruits envoyés se rééduquer à a campagne.

Beaucoup de truculence, d'humour , de situations absurdes et toujours ce regard sans complaisance sur la Chine maoïste.



Merci Mo Yan pour ton aide en ces moments ô combien singuliers.
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Le maître a de plus en plus d'humour

Première incursion dans l'oeuvre de ce maître chinois de la littérature, prix Nobel 2012, et je découvre avec grand plaisir une écriture qui se veut à la fois simple et truculente, faussement naïve quand elle critique la société chinoise contemporaine.

Récit universel de cet homme à un mois de la retraite qui, après des années de loyaux services, se fait licencier sans ménagement de son usine en faillite. Mais contrairement à d'autres pays, en Chine, dans ce cas-là, ce que l'état vous propose en dédommagement, c'est un "démerdez-vous" à peine déguisé par un sourire humide.

Maître Ding doit donc trouver une solution pour survivre, mais à son âge, beaucoup de choses ne sont plus possibles et il lui faudra faire preuve d'imagination avec les matériaux en sa possession.

C'est tendre, drôle et cruel aussi et me donne envie de découvrir d'autres romans plus importants, ou en tout cas plus connus de cet auteur.



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Le maître a de plus en plus d'humour

A quelques semaines de la retraite, maitre Ding est remercié par son employeur pour sa longue carrière de quarante-trois années de service irréprochable.

Après avoir bercé dans le creux d’une vague mélancolique, le vieil homme se ressaisit et décide de trouver une occupation lui permettant de poursuivre avec son épouse une vie descente.

L’inspiration vient souvent lorsque l’on sait ouvrir les yeux. C’est ce que fait Ding dans sa nouvelle projection lucrative.

Ce petit livre à teneur de conte n’est pas moins porteur d’un message politique et économique de la Chine durant sa période sombre.

L’écriture de Mo Yan est agréable, simple et efficace réservant une lecture plaisante.

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Le radis de cristal

Deux nouvelles chinoises pur jus, tout à fait dans le style de Mo Yan … Chacune d'elles se déroule dans la Chine rurale.



La première, « le radis de cristal » (titre splendide, non ?), se déroule dans une Chine pauvre mais néanmoins administrée de main de maitre par le régime central, où chacun doit contribuer, selon sa force et ses moyens, à la construction de la grande Chine moderne. Et pourtant, cette Chine reste profondément campagnarde, avec ses veillées où un « chant amer, dramatique et doux à la fois, fouettait le coeur des jeunes filles comme une pluie d'automne ». le spectacle de la forge est tout simplement envoûtant : « L'enfant actionnait le soufflet à deux mains. Son mouvement était souple, harmonieux et emphatique. On avait l'impression que c'était l'objet qui le manipulait. Son corps se balançait d'avant en arrière et sa tête faisait penser à une pastèque flottant sur les eaux paisibles de la rivière. Deux points lumineux montaient et descendaient dans ses yeux noirs comme deux lucioles dans un envol gracieux ».



La deuxième, « déluge », beaucoup plus courte, met en scène nos pulsions les plus coupables, dans un décor de début du monde, pour un dénouement assez inattendu. Mais on y chante aussi ….



Des histoires où la temporalité est floue, un peu à l'image de la langue chinoise où il n'y a pas de temps dans la conjugaison, et donc pas de futur, pas de passé …



C'est un subtil mélange de poésie, de sensibilité et de fantastique.

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Le maître a de plus en plus d'humour

Le maître a de plus en plus d'humour marque mes premiers pas dans l'univers littéraire de Mo Yan. J'ai commencé petit...

Certes petit format mais qui donne un aperçu intéressant et alléchant de la prose du Nobel chinois.

Dans un récit entre le conte et la satire sociale, l'auteur dépeint le brave Ding, employé modèle aux multiples récompenses dans l'usine d'État de matériel agricole. La Chine se mettant à l'heure du capitalisme, le pauvre bonhomme, tout de mesure, se retrouve licencié à un mois de sa retraite. Dure chute s'il en est... Force est de devoir vivre et faire bouillir la marmite. Lui vient une idée invraisemblable au terme d'une déambulation mais qu'il va mettre en pratique avec l'aide de son fidèle Lü Xiaohu, son ancien apprenti à l'usine. Peu orthodoxe et sans doute moralement bancale, sa solution ne lui donne pas moins satisfaction... et de plus confortables revenus.



Drôle et cynique, Mo Yan décrit dans ce court roman les dérives du capitalisme, les systèmes hiérarchiques dans la société et l'évolution de celle-ci en cette veille du XXIème siècle. La plume de l'auteur est pleine de verve et de mordant, émaillée de proverbes plein de bon sens ou de type confucéen. Une véritable invitation à découvrir plus avant l'oeuvre de cet écrivain.
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Quarante et un coups de canon

Un roman qui est une véritable ode à la viande !

Mo Yan nous raconte la vie du village des « Bouchers », un petit village chinois dédié à la viande sous toutes ses formes : que ce soit l'élevage des animaux, leur abattage, la découpe, la préparation, la cuisson et enfin la dégustation.

L'auteur nous décrit à merveille les odeurs de cuisson, nous avons le nez empli d'effluves savoureuses de porc, de mouton, de boeuf, de sauces épaisses, d'épices, d'herbes aromatiques, durant toute la lecture, j'ai eu la sensation de sentir les jus de cuisson embaumer la pièce dans laquelle je lisais.



Avec un humour décapant, Mo Yan nous relate le quotidien des habitants : père absent, bagarres entre voisins, coups bas, luxure, jalousie, cupidité… aucun travers des habitants ne nous sera épargné, à notre grande joie !

A ne pas conseiller aux végétariens :)



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Le Veau - Le coureur de fond

J'ai beaucoup aimé les deux nouvelles. Mo Yan est un conteur hors-pair qui s'attache à réinventer avec truculence le petit monde rural de son enfance à l'époque de la révolution culturelle (années 60). Il recrée dans les dialogues une langue du peuple brute et savoureuse, pleine de mots crus et de métaphores hilarantes. La narration est tantôt tendre tantôt ironique quand il s'agit de mettre en scène l'absurdité des discours idéologiques et le zèle de certains pour les appliquer.

1) le veau

Le narrateur Luo Han est un double de Mo Yan. Un adolescent avec un bagou terrible qui cherche sans arrêt à se rendre intéressant. il est obsédé par les fesses de la fille du père Du et il est toujours affamé. Maître Du, soixante-huit ans est responsable de l'élevage dans la brigade de production. Il arrive en tenant trois veaux par une corde. Luo Han les aime bien surtout Double Echine. Un sacré chenapan qui essaye à tout bout de champ de monter les vaches. Le père Du les amène sur ordre de l'oncle grêlé, chef de brigade de la production, au camarade Dong, le vétérinaire de la commune populaire. Celui-ci doit castrer les veaux. Soyez rassuré, le camarade Dong a coupé plus de roustons que vous n'avez bouffé de pains de maïs, j'en suis certaine. Mais je vous connais les amis, vous vous demandez certainement pourquoi ils tiennent tellement à torturer ces pauvre bêtes . L'année précédente d'après son chef l'oncle grêlé (qui est une vraie peau de vache), le père Du a laissé le troupeau de vaches entier se faire engrosser et à présent ils n'ont plus de quoi nourrir toutes les bêtes. Et l' on ne peut pas les chasser dans la nature non plus car cela revient à saboter les moyens de production et là on vous accuse d'être un contre révolutionnaire et vous vous retrouvez en camp de rééducation à la pépinière, autrement dit en enfer...Donc il faut castrer les trois veaux et ensuite veiller à la cicatrisation. Cette mission périlleuse est confiée au vieux Maître du et au jeune Luo Han...

2) le coureur de fond.

C'est un texte autobiographique dédié à la mémoire de Zhu Zongen, l'instituteur remplaçant de son école primaire. On est en 1968, à quelques kilomètres du village se trouve un camp de droitiers de la province, tous titulaires d'une expertise reconnue. Lorsque qu'une vache ne broute pas, qu'une poule ne pond pas, qu'une femme est stérile, on appelle un droitier.. Il y a là un journaliste, un chef de service de médecine, une vedette de l'opéra de Pékin, un ingénieur, un professeur de mathématiques, des sportifs de haut niveau,... et les étudiants de toutes les facs étiquetés droitiers. S'ils n'avaient pas été classés droitiers jamais au grand jamais les gamins du village n'auraient pu les rencontrer. Et cela aurait été bien dommage. La galerie de portraits qui suit est haute en couleur. Mo yan raconte tout ce qu'ils apportent au village avec des anecdotes savoureuses puis il se focalise sur le personnage de Zhu Zongen, C'est un bossu extraordinaire et le héros de son enfance. En ces temps là, chaque année, le premier mai, son école organise une rencontre sportive qui inclut élèves, enseignants et droitiers...
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Au pays des conteurs

Le 8 décembre 2012 Mo Yan prononce son discours de réception du Prix Nobel de littérature. C'est un discours simple et émouvant qui débute par un très bel hommage à sa mère décédée en 1994. Une femme humble et sage, capable de pardonner les injustices et les violences subies durant les années Mao. Mo yan poursuit son discours en racontant la naissance de sa vocation. Dans son petit village, les jours de marché, arrivent les conteurs. "Le petit dernier" les écoute d'abord en cachette mais comme il a beaucoup de bagou, il raconte à sa mère ce qu'il a entendu en enjolivant les épisodes et bientôt tout le village accourt pour l'écouter. Cette tradition orale est le terreau de son oeuvre. Il ne reçoit de formation littéraire qu'en 1984, à l'armée. Ensuite il explique qu'il est un écrivain refusant de "laisser le politique l'emporter sur le littéraire". Il est et demeurera un homme qui conte des histoires.

https://www.nobelprize.org/prizes/literature/2012/yan/25466-mo-yan-conference-nobel/
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La Joie

Alors que les romans de Mo Yan que j’avais lus jusqu’ici étaient pleins de fantaisie et d’humour… "La joie" est certainement, et de loin, le moins joyeux.

Il est même carrément glauque.

Voici un narrateur, un jeune gars de la campagne (enfin, il se raconte à la deuxième personne), qui ne nous épargne rien de sa vie de misère : il est couvert de poux, on a la description de ses diarrhées, ses vomissements et son ver solitaire. On saura tout des puces grouillant sur sa mère. Sa voisine se suicide de façon horrible, et est enterrée sous la pluie dans un cercueil qui fuit. Etc, etc.

Plus glauque que ça, je ne vois pas. (Le film de zombies ?)

Comment le héros pourrait-il se sortir de là ? En repassant l’examen d’entrée à l’université, qu’il a déjà loupé quatre fois ? C’est sa toute dernière chance.

Au passage, on nous signale que son prénom, Yongle, signifie "Joie éternelle"...

Il n’y a pas que du glauque toutefois : l’épisode de la police des naissances, faisant une descente chez le frère aîné qui vient d’avoir un troisième enfant, est férocement drôle. Le texte est ponctué de citations, poétiques, comiques, incongrues parfois. Et les errances du pauvre étudiant dans la campagne qu’il déteste, font l’objet de descriptions bucoliques d’une très, très grande beauté : "Une brume diaprée s’est levée, tu as soudain discerné un chant lointain et désolé provenant d’une époque où tu n’étais pas encore né, où la terre était recouverte de broussailles, de fleurs, de hautes herbes, de marécages, de dinosaures et d’ambre, toute ruisselante de transpiration sous un soleil ardent. Une forêt vierge touffue exhalait un puissant parfum de résine de pin."

Traduction impeccable de Marie Laureillard.

Challenge Nobel

Challenge gourmand (Mendiant : Le thème de la pauvreté est abordé dans ce livre)
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La Joie

Franchement la Joie, ce n'est pas la Joie du tout, du tout.

C'est un monologue de 180 pages à la deuxième personne, sans coupure. On est dans la conscience de Yong ( joie éternelle) un fils de paysan misérable du nord-est de la Chine. Il vit au milieu de la fange, de la boue et de la vermine rouge. il rêve d'entrer à l'université pour échapper à son destin misérable mais il a déjà échoué plusieurs fois...

Ce monologue est un calvaire, un cri qui vous noue les tripes. Alors il y a certes de la poésie mais mêmes les couleurs sont celles du désespoir qui domine jusqu'au bout.
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La Belle à dos d'âne dans l'avenue de Chang'an

Le prix Nobel 2012, surtout connu pour ses romans signe ici un recueil de nouvelles…et c'est magistral !

Quatre récits et autant d'aventures palpitantes, pas banales du tout, entièrement auréolées d'une forme de « réalisme magique », mâtinées tantôt d'humour, tantôt de cruauté. J'ai eu le sentiment de contes nimbés d'une sorte de fauvisme littéraire, tellement l'univers de Mo Yan est chatoyant de couleurs, employées en dépit du bon sens prévalant dans le monde réel. Le mouvement est là dans ces rêves éveillés, il y a une certaine poésie, mais rien n'est statique, l'heure n'est pas à la contemplation. La narration est simple, vive, le lecteur est immédiatement placé sous la fascination de la puissante personnalité d'un personnage, souvent une femme, en majesté dans ses habits éclatants de couleurs, accompagnée qui d'un âne, qui d'un chien eux-mêmes domptés par cette superbe maîtresse. Mais très vite, l'inquiétude gagne, évoluant vers une sorte de panique, de folie. Le rêve se mue en cauchemar. Pour faire naître cette impression anxiogène, Mo Yan déploie une arme aussi étonnante que redoutable : le goût du détail dans la description, comme si le zoom sur une partie d'un corps, d'une plante par exemple, la description précise et parfois assez trash d'une souffrance, provoquait l'angoisse voire l'horreur…Du grand art !



Rapidement, pour simplement évoquer en deux mots le pitch de chacune des histoires : la nouvelle titre, La Belle à dos d'âne dans l'avenue de Chang'an…nous en fait voir de toutes les couleurs. Une belle et mystérieuse femme aux beaux habits, juchée sur un âne, arpente fièrement l'avenue susnommée (soit dit en passant, longue de 22 km, à Pékin, ce qui en fait semble-t-il la plus longue avenue du monde et extraordinairement embouteillée), derrière un homme en armure monté sur un cheval. Ce double couple improbable, comme sorti des temps anciens, trouve le moyen dans sa majestueuse déambulation d'hypnotiser la foule qui s'agrège fortement autour, en auto, à vélo, à pied, gagnée petit à petit par un désir hystérique et bientôt paroxystique d'approcher, de toucher ces quasi-divinités…pourtant, le facétieux Mo Yan saura nous ramener à la réalité toute nue, dans ce théâtre d'artifices à ciel ouvert…qui peut-être est une habile et mesurée moquerie non seulement de ceux qui se prétendent les guides du peuple, mais aussi sans doute du peuple lui-même qui se laisse prendre aux mirages…



Dans la femme au bouquet de fleurs, le personnage masculin, homme d'âge mûr amiral de vaisseau se trouve nez à nez avec une toute jeune et jolie femme, accompagnée d'un chien noir. Robe verte, cheveux…bleus, l'homme est terrassé d'amour, sur le champ. Ce brave homme sent bien que ce n'est pas raisonnable, et préfère ne pas aller plus loin, mais la belle va le poursuivre partout avec son canidé. Cette double présence permanente et le sourire muet absolument indéfectible de la Belle vont faire virer le conte de fée naissant à l'angoisse, jouant sur les nerfs de l'homme harcelé, tiraillé par sa conscience, entre des envies de meurtre et de sauvetage romantique…stressant et haletant !



Les Poucettes, ce sont les menottes de pouces qu'on mettra au petit Ayi, parti au loin chercher des médicaments pour sa mère mourante. Des paysans méfiants vont l'attacher à un arbre de cette manière, le laissant à l'abandon. le supplice de l'enfant est terrible, la torture est autant psychologique que physique, tant parce qu'il espère à plusieurs reprises dans un moyen de s'en sortir que parce qu'on sent la fin approcher, dans une ambiance d'angoisse où les esprits maléfiques semblent s'incarner dans la vie animale et végétale environnante…s'en sortira-t-il, et pourra-t-il sauver sa mère ?



Si j'ai adoré les trois précédentes, j'ai moins accroché sur le Combat dans la peupleraie. Pour une histoire d'âne noir qui mordit un enfant, deux bandes vont s'affronter de manière réitérée dans une peupleraie. L'une menée par le fils de la tante Zhao, armée de couteaux de cuisine, l'autre par le fils du secrétaire (local du Parti bien sûr), armée de massues. Je ne suis pas sûr d'avoir bien compris le propos de ce récit qui détonne des précédents. Ce qui frappe avant tout, c'est le prétexte à aligner des expressions et proverbes chinois, tels que certains sont cités par ailleurs.



Au total, d'excellents récits qui assurément imprimeront dans ma mémoire !

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La Joie

Ce n’est pas la joie, pas facile la vie de Yongle, le héros de ce roman, une lecture pas facile non plus.



Il s’agit d’un étudiant pauvre, tourmenté par l’amour, avec sa mère mendie pour payer ses frais de scolarité. S’il échoue aux examens encore une fois, il ne pourra jamais devenir fonctionnaire, il sera un pauvre paysan et devra épouser la boiteuse.



C’est parfois drôle, parfois vulgaire, mais c’est souvent sinistre : un suicide en avalant de l’insecticide, un autre qui se fait sauter la cervelle, avec des pouls dans les dortoirs et des vêtements qui sentent mauvais.



Pas facile à lire car c’est une trame décousue, passant d’un sujet à l’autre comme peut le faire le fil de nos pensées, en longs paragraphes et sans chapitres. Des citations ou des allusions à des textes classiques chinois qui sont indiquées par la traductrice, mais qui n’appellent aucun écho chez moi, lectrice occidentale qui n’a pas cette culture.



Un court roman, dans une ambiance très chinoise, mais il faudra lire ailleurs pour y trouver la joie…
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La Belle à dos d'âne dans l'avenue de Chang'an

Le recueil contient quatre récits qui mêlent mythe et réalité. J'ai surtout aimé la première nouvelle. Les trois autres m'ont désarçonnée et je me suis sentie perdue en plein cauchemar. Il faudrait que je les relise mais je n'aime pas les cauchemars. Aussi je ne vous parlerai que de la Belle à dos d'âne dans l'avenue de Chang'an (1999). Ce récit qui a des allures de conte est une satire de la Chine contemporaine et une fable politique.

Un après midi d'avril Hou Qi humble travailleur pékinois sort du métro et s'apprête à rentrer chez lui. Il décadenasse avec difficulté son vieux vélo quand il lève la tête et, tournant son regard vers l'ouest, aperçoit soudain.... ...une jeune femme en robe rouge, juchée sur un âne noir brillant de mille feux. Elle se faufile dans le flot de voitures. suivie de près par un homme à cheval. Il porte une armure argentée dont le plastron scintillant diffuse une aveuglante lumière blanche. Il tient dans sa main une longue lance. Ils avancent lentement, grillent les feux sans vergogne provoquant des carambolages. Hou Qi éberlué décide de les suivre sur son petit vélo. Et les autres Hou Q aussi les rejoignent captivés, aimantés, hypnotisés le long de l'avenue de Chang'an qui traverse Pékin...

La nouvelle est magistralement construite. Mo Yan vous ensorcèle et vous le suivez en vous demandant où cela va vous mener. La chute est mémorable, drôle et absurde. le texte entier mêle onirisme sensuel et réalité bassement triviale. La foule sentimentale en quête de merveilleux et de grâce est aussi très bête et très manipulable.

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Chien blanc et balançoire

Ce livre est un recueil de six nouvelles, écrites entre 1983 et 2004. C'est l'ouvrage le plus récent de Mo Yan publié en France.

Pour commencer à connaitre un peu cet écrivain, ce livre me semble une bonne entrée dans l’œuvre de ce maître.

On y retrouve l'univers de son enfance dans la région de Gaomi (Shandong, région cotière entre Pékin et Shanghai. région où se trouve la célèbre Qindao, ville construite par les allemands en 1898 et où se brasse depuis 1903 la célèbre Tsingtao, la moins mauvaise des bières chinoises!).



Le point commun à ses nouvelles : La ruralité, la vie et ses difficultés à la campagne.

Les personnages sont entiers, marchant vers leur destin sans qu'aucune force ne puisse les arrêter.

Devant la beauté de l'écriture, on se demande si le décor est posé pour permettre à l'auteur d'étaler son talent ou si c'est l'écriture qui magnifie le paysage. Mo Yan est extrêmement doué quand il s'agît de peindre la ruralité avec des mots.

Les histoires sont brèves , 80 pages maximum, indépendantes . La tristesse et la dureté de la vie qui y sont exposées sont à nouveau ici compensées par cette faculté chinoise à accepter son destin et tenter de rebondir avec fatalité et persévérance.

Coup de cœur pour la nouvelle au titre éponyme à l'ouvrage, une histoire dont la chute est bouleversante .



Mo Yan est un auteur connu certes , mais qui n'a pas la notoriété qu'il mérite malgré son prix Nobel.

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Mo Yan

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