AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Pascal Manoukian (354)


Elle ne parle plus qu'à des guichets et des hygiaphones, n'appelle plus que des numéros à quatre chiffres, surtout le 3949, ne s'adresse plus qu'à des répondeurs et à des voix numériques, articulant lentement son identifiant à sept chiffres et ses mots de passe, punie, bannie, coupable d'avoir simplement la quarantaine juste à la pliure entre l'économie d'hier et celle de demain.
Commenter  J’apprécie          90
Aline avait dû chercher dans le dictionnaire. Un truc pour sauver le monde, comme Léa. Qu'est-ce qu'ils avaient tous à vouloir le rendre meilleur ? Il faut dire que sa génération la leur laissait en mauvais état. (p. 83)
Commenter  J’apprécie          90
La route est une longue enfilade de villages sans nom et de terres séchées à perte de vue. De temps en temps, un barrage de l'armée rappelle que la frontière est toute proche.
Elle a été arbitrairement tracée, sur un bout de papier, comme beaucoup de frontières, pour le bonheur des uns et le malheur des autres, sans tenir compte des peuples, de leurs différences, de leurs souffrances et de leur histoire.
C'était au début des années vingt, après la première des guerres mondiales, celle à neuf millions de morts.
La France, l'Amérique, l'Italie et l'Angleterre redessinaient le monde en taillant allègrement dans l'Allemagne et l'Empire ottoman vaincus.
L'Irak devenait indépendant mais placé quelques années sous mandat britannique, la Syrie aussi, mais amputée du Liban et sous mandat français.
Les Allemands perdaient l'Alsace et la Lorraine.
les Kurdes retrouvaient un Etat sur le papier qui n'existera jamais.
Les Arméniens, victimes du premier génocide du XXe siècle, eurent droit à une indépendance fragile à laquelle les Turcs mirent fin deux ans à peine après sa proclamation.
Car la Turquie, vaincue, par un tour de passe-passe dont elle a le secret, finit par se retrouver vainqueur, promettant en échange de sa victoire d'en finir avec l'obscurantisme des sultans et de mettre à la disposition de l'Europe une république laïque et démocratique capable de jouer les gendarmes dans la région.
(p. 142-143)
Commenter  J’apprécie          90
— ... Ne vous arrêtez jamais de marcher. Ne possédez rien. Les biens sont l'ennemi du bien. L'abondance est partout si vous pratiquez la sobriété.
Commenter  J’apprécie          80
Ainsi vivaient les Yacou, connectés entre eux mais déconnectés du monde, dans le bonheur de leur dénuement, convaincus intuitivement que moins était mieux, plus supportable pour tous, les hommes, les plantes, les bêtes et la fragile branche sur laquelle ils s'étaient établis, un territoire grand comme le Luxembourg à la frontière du Brésil et de la Guyane. Un monde circulaire, sans angle, sans commencement ni fin, un mouvement perpétuel, une boucle parfaite, claquée sur les troncs, la lune, le soleil, le ventre des mères et les ronds dans l'eau, un monde où le carré austère n'existait pas et où les Yacou s'interdisaient de l'inventer, pour ne pas rompre l'harmonie, l'unité parfaite entre les êtres, et garder le Cercle intact, comme Madame Lune leur en avait arraché la promesse le jour, où pour éviter d'enfanter la terre, elle leur avait offert la chose la plus précieuse au monde : le femme.
Commenter  J’apprécie          80
Car, comme il n'existait aucun mot pour désigner la fonction [de chef], il n'existait point de bénéfice non plus à l'exercer. Au contraire même, afin qu'aucun volontaire n'en abuse, le poste devait présenter plus d'inconvénients que d'avantages et n'apporter que dénuement et pauvreté. Chaque jour le sage désigné devait solliciter le renouvellement de son mandat par un vote et son autorité pouvait à tout instant être questionnée devant le Rassemblement dans l'Intérêt du Clan, une assemblée mobilisable jour et nuit.
Commenter  J’apprécie          80
Dans ses jambes, elle sent encore les vibrations des tricoteuses. Même éteintes, les machines continuent à la torturer, une douleur fantôme, des heures supplémentaires après la fermeture, "l'offrande aux patrons", disent les ouvrières.
Commenter  J’apprécie          80
-Alors tu ne veux toujours pas adhérer?
-Non, répond Aline plus gravement. Ce n'est pas quand on est mort qu'on s'assure sur la vie.
Commenter  J’apprécie          80
Elle a beaucoup pleuré, comme le matin de l'enterrement de Staline. D'interminables sanglots, un chagrin sans fond où Christophe l'a laissée se noyer parce qu'il faut bien ménager un chemin aux sources de la tristesse, sinon elle stagne à l'intérieur en une mare de sentiments croupis et nauséabonds.
Commenter  J’apprécie          80
L'Anglais lui montre d'autres photos. Toujours les mêmes regards paniqués, les mêmes seins d'adolescentes, serrés les uns contre les autres comme les raisins d'une grappe.
[...]
« C'est quoi ?
- Le butin, lui dit James. On peut en faire ce qu'on veut. On les a gagnées, mon pote. »
Karim se souvient d'un article là-dessus dans la revue de Daech. Il soutenait que, contrairement aux juifs et aux chrétiens, les yézidis n'avaient aucun droit. Ni celui de payer un impôt pour rester vivre au pays de Shâm ni celui de se convertir. Ils n'avaient le choix qu'entre la mort ou l'esclavage.
Après leur capture, les femmes [yézidis] devaient être partagées entre les combattants. Un cinquième du butin allait à l'émir du groupe. Il pouvait les consommer sans modération bien sûr, enfermer les plus jeunes jusqu'à ce qu'elles soient correctement formées et, une fois satisfait, les laisser mourir ou les revendre.
[...]
« Tu vois celle de gauche ? »
C'est une toute jeune fille aux cheveux charbon et aux yeux bleus.
« Je vais la chercher demain, c'est la mienne. L'émir me prête une chambre pour la journée. C'est dommage qu'on n'ait plus le droit sinon je me serais bien fait sucer devant un match de foot. »
C'est vrai qu'en terre de Shâm allumer la télé est puni de la peine de mort.
(p. 176-177)
Commenter  J’apprécie          80
" Parce que Allah en a décidé ainsi ", lui avait répondu un vieux qui faisait le voyage avec eux.
C'est aussi ce qu'avait prétexté la vieille pour exciser Iman avant de la coudre. Allah commençait à le fatiguer avec ses commandements stupides. Il aurait dû laisser une trace écrite plus lisible, moins sujette aux interprétations qui mettent le monde à feu et à sang.
Aujourd'hui, le premier analphabète venu prenait une arme et parlait au nom d'Allah. Ça donnait à l'islam une bien mauvaise haleine. Celui que jadis son père lui avait appris, agenouillé au fond d'un boutre, face à la Mecque toute proche, valait mieux que cela et n'avait pas ce sang sur les mains.
Commenter  J’apprécie          80
Il se souvint d'une phrase d'Einstein, lue un jour dans le magazine d'une compagnie aérienne entre Doha, Manille et trois whiskys: "Tout le monde est un génie. Mais si on juge un poisson sur sa capacité à grimper à un arbre, il passera sa vie à croire qu'il est stupide." La pensée s'appliquait à lui et aux Indiens. On est toujours le poisson de quelqu'un.
Commenter  J’apprécie          70
Même ce qui semble terne chez vous brille à nos yeux ! Plus vous vous rendez la vie belle et plus vous nous attirez comme des papillons. Et ça ne fait que commencer, nous sommes les pionniers, les plus courageux. Vous verrez, bientôt des milliers d'autres suivront notre exemple et se mettront en marche de partout où l'on traite les hommes comme des bêtes. Il n'y aura aucun mur assez haut, aucune mer assez déchaînée pour les contenir. Parce que ce qu'il y a de pire chez vous est encore mieux que ce qu'il y a de meilleur chez nous.
Commenter  J’apprécie          70
[Karim] a peur de l’accueil qu’on lui réserverait en France, mais plus peur encore d’affronter l’immense vide d’un monde sans Charlotte.
Là-bas, il le sait, son souvenir se cache derrière chaque mot, chaque lumière, chaque rue, chaque livre.
Commenter  J’apprécie          70
Il est amoureux de son usine. La fermer, ce serait lui arracher le coeur, et aujourd'hui, à son âge, dans l'Oise, il le sait, aucune greffe n'est possible, il n'y a plus de donneurs d'ordre, les seuls à faire repartir le coeur des chômeurs sont les restos du même nom.
Commenter  J’apprécie          70
En face, les volets sont clos depuis plus d’une année. Personne n’a rien vu venir. Une charrette en plein mois de juin, la veille des vacances. Trente licenciements secs. La direction a prévenu les employés par un SMS groupé. Élise, la voisine, et Jérôme, son mari, faisaient partie de la liste. Huit mois après, un huissier vidait leur maison et posait des scellés. Trop de dettes
Commenter  J’apprécie          70
Chacun tremble de devoir renoncer à sa manière de vivre, d’être obligé de sacrifier la scolarité d’un enfant sur deux, de ne plus pouvoir s’occuper dignement de ses parents. La marée monte, inexorablement, inondant les classes moyennes
Commenter  J’apprécie          70
Aline maudit l'alignement désordonné des Caddie serpentant jusqu'aux caisses. On dirait une colonne de chenilles processionnaires dévorant les rayons. Dans ses jambes, elle sent encore les vibrations des ticoteuses. Même éteintes, les machines continuent à la torturer, une douleur fantôme, des heures supplémentaires après la fermeture, "l'offrande aux patrons", disent les ouvrières.
Commenter  J’apprécie          70
Même ce qui semble terne chez vous brille à nos yeux ! Plus vous vous rendez la vie belle et plus vous nous attirez comme des papillons. Et ça ne fait que commencer, nous sommes les pionniers, les plus courageux. Vous verrez, bientôt des milliers d’autres suivront notre exemple et se mettront en marche de partout où l’on traite les hommes comme des bêtes. Il n’y aura aucun mur assez haut, aucune mer assez déchaînée pour les contenir. Parce que ce qu’il y a de pire chez vous est encore mieux que ce qu’il y a de meilleur chez nous.
Commenter  J’apprécie          70
La guerre fabrique des lâches ou des héros, et ceux qui la gagnent à la fin n'ont pas toujours les mains plus propres que ceux qui la perdent, mais la victoire absout leurs crimes et les transforme en actes de courage.
Commenter  J’apprécie          70



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Pascal Manoukian (916)Voir plus

Quiz Voir plus

Quiz des Diables

Asmodée, créée en 1937 est le titre de la première pièce de théâtre de: (Indice: Bordeaux)

André Gide
François Mauriac
Sacha Guitry

8 questions
31 lecteurs ont répondu
Thèmes : diable , diabolique , satan , malédiction , démons , littérature , culture générale , adapté au cinéma , adaptation , cinema , musiqueCréer un quiz sur cet auteur

{* *}