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Citations de Philippe Beaussant (73)


En écoutant cet air que vous aimez, et plus encore si vous le savez par coeur, votre plaisir vous vient,sans que vous en ayez clairement conscience,de ce que vous modelez sur lui, à mesure qu'il se déroule, le décours de votre temps intérieur : car rien n'échappe au temps, et la musique n'est rien d'autre que l'art de donner une forme sonore au temps
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Il n’y a de musique possible que si le son n’est pas un bruit. Il n’y a d’art possible que si la danse n’est pas la marche, que si les mots du poème ne sont pas ceux de la vie.
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Est-ce que les mots que l’on dit valent toujours, quand on pense autre chose que ce que l’on dit ? La vérité, est-ce qu’elle est dans les mots, ou dans ce qu’on pense ?
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Il faudrait pouvoir oublier. Nous savons trop de choses. Nous sommes semblables à ces sculpteurs égyptiens de la période grecque, à Denderah, à Kom Ombo, qui ont appris un autre art que le leur, et qui ne savent plus comment sculpter. Ils croyaient s’enrichir et ils ont tout perdu.
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C’est cela, un homme civilisé : un homme seul pour qui toute vérité est devenue triviale. Il n’y a plus de sorciers. Et les curés ne savent plus. Ils voudraient que les mots aient un sens, ils traduisent les incantations, quelle folie ! Ce n’est pas aux mots d’avoir un sens, c’est aux choses. Ils ont détruit la musique et ils voudraient qu’on croie encore à la vérité !
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Comment peut-on enseigner la musique si l’on n’est pas purifié ? Comment peut-on enseigner la perfection si l’on ne cherche pas soi-même la perfection ?
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En regardant Rolf écouter la musique de Bali, je comprenais que le monde n’est pauvre que pour ceux qui n’en attendent rien. Les choses sont précieuses à proportion que l’esprit s’est aiguisé à déceler leur richesse.
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C’est une flûte magique. Après des années, le mystère de ce qui se passe à l’approche de mes doigts se renouvelle chaque fois que je la touche. Elle capte tout l’insaisissable, l’indéfinissable entre deux sons. On peut tout dire avec ses quatre notes. Non, pas tout : pas Mozart. Très loin, très profond très ancien, inaccessible à la pensée, l’Asie. L’autre Asie, celle d’avant l’Inde, d’avant la Chine, d’avant Angkor, immémoriale, à la racine de l’homme. Le sorcier ne voulait pas que je l’emporte. Il craignait même d’abord que je la touche. La musique qu’il faisait était la voix des dieux, c’était le souffle des ancêtres. En me la donnant, il livrait la voix des ancêtres. Pourquoi la lui ai-je prise ? Entre quatre notes, avec une évidence envoûtante parce qu’elle ne peut pas se dire, quelque chose de l’homme, du mystère de l’homme aujourd’hui, transmis, semblable depuis vingt mille ans, et que personne ne peut dire avec des mots. La peur, le désir, le désespoir, l’appel, la peur surtout, et à l’opposé de la peur, lié à elle, l’ordre du monde édifié sur la peur, construit sur elle, apprivoisant sur une flûte le chaos …
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Ce sont les génies qui ont enseigné aux hommes la musique. C’est pour cela que les sons de la musique sont différents des bruits des hommes, des animaux et de la forêt. Les hommes font du bruit, les singes font du bruit, la pluie fait du bruit, mais la musique n’est pas un bruit comme le leur, parce que les génies l’ont enseignée.
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Je deviens vieux. Je m’approche de la musique. Bientôt j’entendrai la musique.
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Sous ces yeux fermés, sous cette bouche, sous cette peau, sous les paroles et les actes de la vie, sous le temps qui passe, cette grimace comique à sept ans sur une vieille photographie, à cause du soleil dans les yeux, avec de grandes boucles sages et ce sourire timide auquel manquaient des dents de lait, au-delà du temps qui passe, sous ce qui change, au-delà de ce qui change, toi, qui es-tu ?
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N’avez-vous vraiment rien à me dire ? Je vous dis que je vais mourir. Je ne suis pas prêt. Rien n’est prêt. Je n’ai pas le temps. Je n’ai plus le temps. Est-ce qu’on va me dire maintenant qu’il est trop tôt ? Trop tôt, Docteur, entendez-vous ? Trop tôt, j’étais déjà mort… Et pourtant je sais bien que je tombais sur les marches et que j’étais sauvé. Ah ! mon père, ah ! ma mère, pourquoi m’avez-vous abandonné, sur le seuil ?
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Nous jouions ensemble la musique de Bach, avec ces flûtes de bois et d’ivoire qui avaient été faites de son temps, au son pur et rond, habiles à ourler une dentelle de notes, à courber et onduler le chant de ce même gonflement que les peintres de ce temps donnaient au sein des femmes qu’ils aimaient, et dont je retrouvais l’harmonie tendre dans le sein, dans le corps dans le sourire de celle que le destin m’avait fait aimer, ce premier soir, parmi les fruits épanouis amoncelés par la terre et par l’économie de son antique demeure.
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Un jour, les gens du village m’ont accueilli de manière étrange. Ils parlaient fort et faisaient de grands gestes de dénégation. Ils m’ont escorté bruyamment jusqu’à sa maison, mais je savais déjà : elle était morte un mois plus tôt. J’ai acheté sa flûte à Thao Sy, son petit-fils : personne n’aurait pu s’en servir désormais, n’est-ce pas ? J’en tirais des sons qui pour moi seul contenaient la poésie de Nang Suy, la vieille folle. Elle va mourir avec moi, tout à l’heure. Plus personne, plus personne, plus personne jamais ne saura qui était Nang Suy, la vieille Orphée. Moi, je savais. C’est un peu sot, n’est-ce pas ? de se dire qu’avec moi, quelque chose d’elle vivait toujours, qu’elle n’était pas morte tout à fait, que le souvenir… Eh bien, il y a plus bête encore. Docteur, je crois que je voudrais maintenant pleurer, je crois qu’il y a des larmes dans ma gorge, et qu’elles ne sont pas pour moi-même qui suis en train de crever devant vous, mais pour une vieille bonne femme dont je ne savais même pas la langue , et à qui je n’ai jamais parlé. C’est absurde. La mort est la mort. C’est une chose bien claire et bien simple. Quand vous détectez avec vos appareils que rien ne bouge plus, que rien ne bat plus, que tout est désormais bien inerte, que la petite usine a résolument cessé de fonctionner, de produire, de transformer, c’est bien la fin. Le reste, c’est de la poésie. C’est un rêve de vivants. Folie, n’est-ce pas , cette Egypte, ces milliers, ces millions de cadavres dans le sable raidis dans leurs bandelettes, avec leurs trésors, leurs yeux d’onyx et de cristal ouverts dans l’obscurité, ces peintures de danseuses exquises, de moissons et de festins que personne ne verra jamais, si ce n’est moi, l’archéologue qui fouille le sable …
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C’est là que j’ai appris ce que je sais de la musique : son rapport avec le silence. L’ombre intérieure. Il n’y a de musique possible que lorsque les choses peuvent perdre leur contour, leur netteté. L’œil assure l’espace, il mesure la distance, il sépare. Halte-là, objet, tu n’es pas moi. La musique est ce qui pénètre, ce qui réduit l’autonomie des choses et la mienne, les fait entrer en moi et peupler mon silence.
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Il transmettait son savoir par bribes, par lambeaux, qu’il fallait mettre lentement bout à bout, assembler, composer. J’ai passé, au cours des années, des heures dans sa maison, tandis qu’il travaillait, qu’il parlait, qu’il enseignait la musique. Des semaines, de mois passaient entre une phrase ou un dicton et un autre qui lui donnait son sens. Des fragments s’appelaient, que je devais aller chercher dans ma mémoire, des mots qu’il avait dits et que je retrouvais, érodés, et polis par le temps, pour les accorder à d’autres qu’il me livrait, par hasard, ou qu’il livrait à un enfant. Il était accroupi sur ses talons, dessinant du bout de son pinceau, sur la pièce de cuir posée au sol, la figure de Sita, d’un trait infaillible, une courbe que son père, que son grand-père avaient tracée sans doute avant lui avec la même grâce et la même justesse.
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Cette forêt sonore autour de moi, chaque nuit, dont la voix me parvenait par toutes les ouvertures, par tous les interstices, dans l’obscurité de ma chambre : ce n’est pas un tissu d’arbres immenses et de laines enlacées. C’est l’élément. C’est la racine des choses. C’est la mère. Tout ce qui existe vient d’elle, vit d’elle, meurt d’elle. On vit pour un instant distinct et séparé, et puis l’on retourne se fondre dans le grand Tout indifférent, les choses comme les êtres. Vat Preah Theat ne nous appartenait plus : ni à lui, Cambodgien, ni à moi, le Blanc, ni à aucun homme. Le grand Nâga, le serpent de pierre les en avait chassés lui-même. Il avait rendu le temple à sa destination première, qui était de disparaitre dans l’énorme florescence primordiale, de se noyer dans le grand Tout indistinct, la forêt.
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Quand la mort fait partie de l’ordre du monde, elle n’est pas la mort, elle est un passage. Moi, j’avais introduit le désordre. J’avais fait du passage une mort, et Chau Prak mourait devant moi dans l’horreur et dans l’angoisse. Tandis qu’avec fatuité je croyais recueillir la sagesse de son vieux père, je le vidais, lui, avec la science et la méthode que je lui enseignais, je le dépouillais de son ordre intérieur, et je le livrais, nu et vide, à sa mort …
C’est cela mon œuvre au Cambodge.
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C’est beau, la science. C’est précieux. Moi, c’est autre chose. J’ai violé son secret. C’est moi qui ai violé sa tombe. C’est moi qui l’ai dépouillé. Je lui ai ôté les textes magiques qui devaient le protéger pour toujours. J’ai détruit sa chrysalide. Je l’ai arraché à sa demeure d’éternité, qu’il avait construit avec plus de soin que sa maison. Cet homme a vécu ses cinquante ans de vie dans une demeure faite de palmes et de boue séchée, et sa mort dans une tombe de pierres jointoyées avec un art ineffable, décorée de peintures que nul ne devait jamais voir. Quelle est cette foi absurde qui lui faisait emporter dans le néant son lit, ses sandales, son arc, ses bijoux, tout ce qu’il avait de beau et de précieux, ce qu’il avait aimé, et qui lui faisait dire : lève-toi vivant ?
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et pour vous découvrir toute ma pensée, je crus qu'il n'était pas de mon intérêt de chercher des hommes d'une qualité plus éminente,parce qu'ayant besoin sur toutes choses d'établir ma propre réputation, il était important que le public connût par le rang de ceux dont je me servais, que je n'étais pas en dessein de partager avec eux mon autorité et que même, sachant ce qu'ils étaient ne connussent pas de plus haute espérance que celle que je voudrais donner.
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