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Citations de Philippe Beaussant (73)


_Dîtes-moi Pierre. pouvez-vous m'expliquer pourquoi si souvent les infirmières paraissent plus jolies que la moyenne des jeunes femmes que l'on croise dans la rue?...
_Cela vient de ce que leur vêtement est tout à fait impersonnel. Ainsi, on ne regarde plus que leur visage, et on y cherche sans y penser toutes les traces possibles de la grâce.....
Regardez les portraits flamands....
_Toutes ces femmes, jeunes ou vieilles, avec la même fraise blanche plissée autour du cou, la même robe noire sans ornement, le même voile en pointe sur le front: comme leur visage devient personnel, de ce que leur habit ne l'est pas ....Voyez-vous Pierre , c'est pour cette raison que les Hollandais sont devenus de si grands portraitistes.....
p 10 11 et 12
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Il n’y a de musique possible que si le son n’est pas un bruit. Il n’y a d’art possible que si la danse n’est pas la marche, que si les mots du poème ne sont pas ceux de la vie.
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En regardant Rolf écouter la musique de Bali, je comprenais que le monde n’est pauvre que pour ceux qui n’en attendent rien. Les choses sont précieuses à proportion que l’esprit s’est aiguisé à déceler leur richesse.
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Il transmettait son savoir par bribes, par lambeaux, qu’il fallait mettre lentement bout à bout, assembler, composer. J’ai passé, au cours des années, des heures dans sa maison, tandis qu’il travaillait, qu’il parlait, qu’il enseignait la musique. Des semaines, de mois passaient entre une phrase ou un dicton et un autre qui lui donnait son sens. Des fragments s’appelaient, que je devais aller chercher dans ma mémoire, des mots qu’il avait dits et que je retrouvais, érodés, et polis par le temps, pour les accorder à d’autres qu’il me livrait, par hasard, ou qu’il livrait à un enfant. Il était accroupi sur ses talons, dessinant du bout de son pinceau, sur la pièce de cuir posée au sol, la figure de Sita, d’un trait infaillible, une courbe que son père, que son grand-père avaient tracée sans doute avant lui avec la même grâce et la même justesse.
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Un jour, les gens du village m’ont accueilli de manière étrange. Ils parlaient fort et faisaient de grands gestes de dénégation. Ils m’ont escorté bruyamment jusqu’à sa maison, mais je savais déjà : elle était morte un mois plus tôt. J’ai acheté sa flûte à Thao Sy, son petit-fils : personne n’aurait pu s’en servir désormais, n’est-ce pas ? J’en tirais des sons qui pour moi seul contenaient la poésie de Nang Suy, la vieille folle. Elle va mourir avec moi, tout à l’heure. Plus personne, plus personne, plus personne jamais ne saura qui était Nang Suy, la vieille Orphée. Moi, je savais. C’est un peu sot, n’est-ce pas ? de se dire qu’avec moi, quelque chose d’elle vivait toujours, qu’elle n’était pas morte tout à fait, que le souvenir… Eh bien, il y a plus bête encore. Docteur, je crois que je voudrais maintenant pleurer, je crois qu’il y a des larmes dans ma gorge, et qu’elles ne sont pas pour moi-même qui suis en train de crever devant vous, mais pour une vieille bonne femme dont je ne savais même pas la langue , et à qui je n’ai jamais parlé. C’est absurde. La mort est la mort. C’est une chose bien claire et bien simple. Quand vous détectez avec vos appareils que rien ne bouge plus, que rien ne bat plus, que tout est désormais bien inerte, que la petite usine a résolument cessé de fonctionner, de produire, de transformer, c’est bien la fin. Le reste, c’est de la poésie. C’est un rêve de vivants. Folie, n’est-ce pas , cette Egypte, ces milliers, ces millions de cadavres dans le sable raidis dans leurs bandelettes, avec leurs trésors, leurs yeux d’onyx et de cristal ouverts dans l’obscurité, ces peintures de danseuses exquises, de moissons et de festins que personne ne verra jamais, si ce n’est moi, l’archéologue qui fouille le sable …
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C’est beau, la science. C’est précieux. Moi, c’est autre chose. J’ai violé son secret. C’est moi qui ai violé sa tombe. C’est moi qui l’ai dépouillé. Je lui ai ôté les textes magiques qui devaient le protéger pour toujours. J’ai détruit sa chrysalide. Je l’ai arraché à sa demeure d’éternité, qu’il avait construit avec plus de soin que sa maison. Cet homme a vécu ses cinquante ans de vie dans une demeure faite de palmes et de boue séchée, et sa mort dans une tombe de pierres jointoyées avec un art ineffable, décorée de peintures que nul ne devait jamais voir. Quelle est cette foi absurde qui lui faisait emporter dans le néant son lit, ses sandales, son arc, ses bijoux, tout ce qu’il avait de beau et de précieux, ce qu’il avait aimé, et qui lui faisait dire : lève-toi vivant ?
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"les peintres, disait-il [Léonard de Vinci] dans son Codex Urbinus parmi ses innombrables manuscrits, désapprouvent une lumière trop brutalement divisée par les ombres. Pour parer à ce défaut, quand tu représentes des personnages en plein air, ne les montre pas sous le soleil, mais ingénie-toi à placer une certaine quantité de brume ou de nuage transparent entre les corps et le soleil."
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Les seuls personnages de La Tour qui n'ont auprès d'eux ni chandelle, ni flambeau, ce sont les aveugles.
Evidemment...
Les aveugles, ce sont ces hommes pour qui l'obscurité, la nuit, n'est pas autour d'eux, mais en eux, comme leurs yeux fermés, leurs paupières mortes, sont une fermeture sur le monde.
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Cette forêt sonore autour de moi, chaque nuit, dont la voix me parvenait par toutes les ouvertures, par tous les interstices, dans l’obscurité de ma chambre : ce n’est pas un tissu d’arbres immenses et de laines enlacées. C’est l’élément. C’est la racine des choses. C’est la mère. Tout ce qui existe vient d’elle, vit d’elle, meurt d’elle. On vit pour un instant distinct et séparé, et puis l’on retourne se fondre dans le grand Tout indifférent, les choses comme les êtres. Vat Preah Theat ne nous appartenait plus : ni à lui, Cambodgien, ni à moi, le Blanc, ni à aucun homme. Le grand Nâga, le serpent de pierre les en avait chassés lui-même. Il avait rendu le temple à sa destination première, qui était de disparaitre dans l’énorme florescence primordiale, de se noyer dans le grand Tout indistinct, la forêt.
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Quand la mort fait partie de l’ordre du monde, elle n’est pas la mort, elle est un passage. Moi, j’avais introduit le désordre. J’avais fait du passage une mort, et Chau Prak mourait devant moi dans l’horreur et dans l’angoisse. Tandis qu’avec fatuité je croyais recueillir la sagesse de son vieux père, je le vidais, lui, avec la science et la méthode que je lui enseignais, je le dépouillais de son ordre intérieur, et je le livrais, nu et vide, à sa mort …
C’est cela mon œuvre au Cambodge.
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La mère s'identifie au danger tant de fois qu'elle finit par être ce par quoi le danger vient au monde, autant que le recours contre lui. Elle nourrit, et elle ne parle que de poisons. Elle réchauffe, et elle incarne la peur du feu. Elle protège, et elle peuple le monde de loups-garous et de bêtes malfaisantes. Elle est la peur et la fin de la peur. (p. 93)
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La peur, le désir, le désespoir, l'appel, la peur surtout, et à l'opposé de la peur, lié à elle, l'ordre du monde édifié sur la peur, construit sur elle. (p. 87)
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C’est une flûte magique. Après des années, le mystère de ce qui se passe à l’approche de mes doigts se renouvelle chaque fois que je la touche. Elle capte tout l’insaisissable, l’indéfinissable entre deux sons. On peut tout dire avec ses quatre notes. Non, pas tout : pas Mozart. Très loin, très profond très ancien, inaccessible à la pensée, l’Asie. L’autre Asie, celle d’avant l’Inde, d’avant la Chine, d’avant Angkor, immémoriale, à la racine de l’homme. Le sorcier ne voulait pas que je l’emporte. Il craignait même d’abord que je la touche. La musique qu’il faisait était la voix des dieux, c’était le souffle des ancêtres. En me la donnant, il livrait la voix des ancêtres. Pourquoi la lui ai-je prise ? Entre quatre notes, avec une évidence envoûtante parce qu’elle ne peut pas se dire, quelque chose de l’homme, du mystère de l’homme aujourd’hui, transmis, semblable depuis vingt mille ans, et que personne ne peut dire avec des mots. La peur, le désir, le désespoir, l’appel, la peur surtout, et à l’opposé de la peur, lié à elle, l’ordre du monde édifié sur la peur, construit sur elle, apprivoisant sur une flûte le chaos …
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Sous ces yeux fermés, sous cette bouche, sous cette peau, sous les paroles et les actes de la vie, sous le temps qui passe, cette grimace comique à sept ans sur une vieille photographie, à cause du soleil dans les yeux, avec de grandes boucles sages et ce sourire timide auquel manquaient des dents de lait, au-delà du temps qui passe, sous ce qui change, au-delà de ce qui change, toi, qui es-tu ?
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C’est là que j’ai appris ce que je sais de la musique : son rapport avec le silence. L’ombre intérieure. Il n’y a de musique possible que lorsque les choses peuvent perdre leur contour, leur netteté. L’œil assure l’espace, il mesure la distance, il sépare. Halte-là, objet, tu n’es pas moi. La musique est ce qui pénètre, ce qui réduit l’autonomie des choses et la mienne, les fait entrer en moi et peupler mon silence.
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Tout d'abord on est parfaitement immergé dans le XVIIème, ces contraintes, ces manières d'être et de percevoir le monde, chose qui est véritablement très intéressante. Le concept du livre m'a beaucoup plus, l'on part du réveil du Roi-Soleil pour suivre petit à petit sa journée. A cela s'ajoute de nombreux détails, l'on s'y croirait et de nombreuses questions qui trouvent parfois réponse dans les écrits de l'auteur mais qui en suscite d'autres pour nous même.
Et surtout, les questions ont un vrai sens, au delà du politique, de l'analyse exact de sa vie il y a quelque chose en plus dans ce livre. Je dirais que c'est plus c'est parce que l'auteur à chercher à se placer du point de vue d'une personne du XVIIème. Il cherche à comprendre les réflections de Louis XIV, comme homme, comme roi; comment distinguer ces deux entités ? Sont-elles différentes ou complémentaires ? Louis XIV avait-il deux personnalités ? Cela pourrait continuer longtemps, tant de questions et si peu de réponses pour un roi qui a passé sa vie à jouer la comédie.
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Il ne faut jamais reprocher aux hommes leur ignorance , mais seulement leur obstination à construire des systèmes sur ce qu'ils ne savent pas.
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La voix de la sagesse et de la raison était celle des vaincus, des faillis (p. 92)
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Je comprends que le monde n'est pauvre que pour ceux qui n'attendent rien. Les choses sont précieuses à proportion que l'esprit s'est aiguisé à déceler leur richesse. (p. 66)
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Je deviens vieux. Je m’approche de la musique. Bientôt j’entendrai la musique.
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