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Critiques de Simone Weil (137)
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La sécurité, le risque

Ce court extrait de “L’Enracinement”, dernier ouvrage de la philosophe française Simone Weil, disparue en 1943, analyse l’équilibre entre la sécurité et le risque, polarité nécessaire à une société humaniste et démocratique.



Simone Weil fut spécialiste de la “condition ouvrière” et praticienne iconoclaste de sa matière, loin des chaires de philosophie, dans l’usine avec les militants et ouvriers.



“La peur ou la terreur, comme états d’âme durables, sont des poisons presque mortels, que la cause en soit la possibilité du chômage, ou la répression policière.”



La Sécurité, Weil l’oppose à la peur qui, comme état permanent, ne peut être admissible. Si les romains laissent un fouet en évidence dans le vestibule pour entretenir cette peur nécessaire chez leurs esclaves, les égyptiens eux se targuaient lors du jugement dernier de n’avoir causé de peur à personne.



L’absence totale de risque est paralysante, elle provoque un ennui, une aboulie maladive, oblomoviste.

Le risque est utile lorsqu’il est réel, lorsque la peur a une cause, la philosophe note déjà les dangers de ce qu’on pourrait appeler la dépression résultant d’“une angoisse diffuse sans risques précis”. Vivre en société demande du courage, et c’est le risque qui forge et travaille le courage car il commande “une réaction réfléchie c’est-à-dire qu’il ne dépasse pas les ressources de l’âme au point de l’écraser sous la peur”.



Ces quelques pages constituent une introduction plus qu’alléchante à l’oeuvre d’une philosophe peu connue et sont d’une actualité bien comprise par la Collection Tract.



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La pesanteur et la grâce

SIMONE WEIL OU LA PENSÉE ARDENTE.



Exercice ô, combien périlleux que de résumer en quelques lignes, en quelques mot un tel ouvrage, presqu'autant assimilable à un compagnon spirituel, à un livre de vie - sans qu'il soit pour autant qualifiable de "livre de sagesse", comme cela se trouve beaucoup dans le domaine religieux - qu'à un essai bâti à fin de démontrer une hypothèse philosophique, d'engager une controverse. Et pourtant, nul doute que nous sommes-là au cœur d'une certaine idée de la philosophie.



Mais avant d'entrer un peu plus avant dans le vif du sujet, il est indispensable d'entreprendre une présentation biographique aussi succinte que possible.



Lorsqu'elle rédige ce qui deviendra donc La Pesanteur et la Grâce, Simone Weil n'a que trente-trois ans et pourtant son oeuvre tout autant que son existence sont singuliers et remarquables à plus d'un titre. D'abord élève du Philosophe Alain durant son Khâgne à Henri IV - il la surnomme affectueusement "la martienne" -, elle sort de l'Ecole normale supérieure de la rue d'Ulm en 1931. Elle obtiendra son premier poste de professeur au Puy-en-Velay, où elle s'engage auprès des ouvriers, des paysans et des chômeurs, tout en élaborant les bases d'une philosophie de l'action et du travail, éloignée toutefois de l'orthodoxie marxiste, tant ses vues sur l'URSS sont d'une rare lucidité. Femme d'action éprise de contemplation, intellectuelle n'hésitant pas un instant à partager un temps la vie des ouvrières de son époque, non comme sujet futur d'étude mais par conviction intime, juive rejetant le judaïsme pour mieux embrasser le christianisme - sans s'être cependant jamais fait baptiser -, se proclamant de l'héritage de Platon (mais refusant Aristote) tout en avouant sa fascination pour l'Inde et l'Occitanie Cathare, Simone Weil n'en finit pas de nous surprendre par ses apparentes contradictions



La défaite de 1940 va pousser Simone Weil sur les routes de l'exode, jusqu'à Marseille où elle participe à la belle aventure des Cahiers du Sud, aux côtés de Jean Ballard et d grand poète Joë Bousquet, rédigeant un somptueux "L'Iliade ou le poème de la force", sous le pseudonyme anagrammatique d'Emile Novis, le "reclus de Carcassonne". Ascétique, et selon les règles de vie qu'elle s'impose à elle-même depuis des années, elle décide de dormir par terre, puisque tant de réfugiés sont privés du confort le plus élémentaire. Désireuse de travailler aux champs, elle trouve également une place d'ouvrière agricole en Ardèche, chez le philosophe catholique - et monarchiste - Gustave Thibon. À son départ pour Oran, et avant les USA en compagnie de sa famille, Simone Weil confira à l'auteur de L'Echelle de Jacob une serviette contenant une dizaine de gros cahiers contenant notes, réflexions, pensées diverses et citations dans toutes les langues. C'est à partir de ce matériau brut et de l'amitié vraie, fuit de ces mois d'exode, et de leurs conversations bien souvent contradictoires que naîtra La Pesanteur et la Grâce. Gustave Thibon ne s'en est jamais caché : si l'essentiel était présent dans ces lignes manuscrites, il lui fallu opérer un genre de classement au sein de ces pages afin de rendre l'ensemble plus intelligible.



Témoin de la foi chrétienne, tout autant immense que peu commune (au sens où elle ressemble assez peu à la foi telle qu'on l'entend généralement), de Simone Weil, ce recueil d'aphorismes d'une puissance d'introspection rare n'est pas sans rappeler l'un des modèles du genre le plus connus : Les Pensées de Blaise Pascal. Et par bien des aspects, il est possible de mettre les deux personnages autant que les deux intentions philosophiques en parallèle. Mais Simone Weil ne saurait se contenter d'un simple pari.



Pour la philosophe, si Dieu s'est retiré de sa propre création, s'est en nous laissant face à deux forces liée l'une à l'autre, dans la mesure où l'une ne peut être sans l'autre, et donc invariablement opposée l'une à l'autre, mais dont il faut parvenir à se détacher - la pesanteur - pour entrer dans la plénitude de la seconde, c'est à dire la grâce. De cet affrontement naissent des mouvements dans lequel «la grâce, c'est a loi du mouvement descendant» tandis que «la pesanteur morale nous fait tomber vers le haut.»



Ce qui peut surprendre, dans cette philosophie pourtant tournée toute vers Dieu, c'est qu'elle s'adresse tout aussi bien à l'athée, dont elle estime d'ailleurs qu'il se trouve plus proche de Dieu que celui se disant croyant ! Car la pesanteur, cela peut se révéler être des choses aussi que le goût du pouvoir ou de l'argent, que le désir sans amour, le jeu, les religions ! Ainsi, certaines pages sont-elles terribles pour ceux faisant profession de foi catholique ou protestante. Plus intransigeante encore est-elle à l'égard de la religion hébraïque dont elle estime que le Dieu est trop terrestre, humain, pour être véritablement le Dieu lumineux qu'il peut seul être dans son absence...



Nous sommes tous, "je" est, à des degrés divers, pris dans la pesanteur. Et c'est par la destruction du je, par l'humilité (mais pas celle que "je" peux jouer. Une humilité vraie, terrible par certains aspects, jusqu'au boutiste en tout cas.) que l'on peut accéder à cette grâce lumineuse, à cette chlorophylle, comme Simone Weil l'explique.



Texte parfois difficile à saisir sans relecture, d'une écriture particulièrement dense bien qu'usant d'un vocabulaire des plus immédiat, la pensée de Simone Weil est une pensée en tension permanente, lumineuse, ardente, ascétique. Et l'équilibre qu'elle n'a cessé de rechercher tout sa vie durant, entre action et contemplation, bien et mal, amour de son prochain et retrait, est un exercice des plus difficiles à entreprendre, même à qui s'y consacre intensément. Même sa foi obstinément christique est à même de dérouter le plus pur des croyants !



Les dernières pages de la fin de cet ouvrage véritablement hors du commun sont consacrées à des thématiques précises et plus "habituelles" comme l'art, la beauté, l'argent, le pouvoir, le "gros animal" comme elle l'écrit en référence à Platon, la société, Israël, à l'égard de qui elle profère des mots d'une dureté incroyable, idem pour Rome et son héritage, mais encore le travail, la musique ou la poésie. Mais si ces thèmes sont des classiques de la philosophie occidentale, le traitement que Simone Weil leur fait subir est lui aussi déroutant et profond. Car tout procède de cette recherche entre pesanteur et grâce, aucun sujet ne pourrait s'en trouver libéré sans nouvelle approche.



La Pesanteur et la Grâce est ainsi l'exact opposé de ces recueils de pensée toute faites, prêtes à porter, tels qu'il s'en fabrique à longueur d'édition. Il s'adresse à qui pourra prendre le temps de la réflexion, de l'introspection. Le chemin suivit par Simone Weil, parfois qualifiée de sainte laïque - elle qui se méfiait comme de la peste de la supposée sainteté, et qui n'avait que mépris pour le martyrologue - est des plus singuliers, abrupt aussi. Mais, indéniablement, l'existence si brève de cette femme étonnante - elle décédera à Londres l'année suivante, à l'âge 34 ans, des suites de la tuberculose et, plus encore, des mauvais traitements qu'elle infligeait à son corps : elle avait décidé de ne rien manger de plus que ce à quoi les tickets de rationnement de la population française donnait droit... Ne jamais se renier sur le chemin de la vérité et de la grâce. La première leçon de de cette philosophe inclassable, insaisissable et belle.



A lire, et à relire, et encore, et encore, sans doute jusqu'au seuil de la mort dont elle dit ceci : «Philosopher, c'est apprendre à mourir.»
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L'enracinement

Dangereuse et brillante. Simone Weil peut faire tourner la tête à n’importe qui. Une liesse croissante s’empare au cours de la lecture de l’Enracinement. Oui, oui, oui ! c’est cela ! J’imagine Simone Weil parler en face d’un auditoire et le public l’applaudir sans discontinuer… ou rester muet, figé d’humilité à l’écoute de paroles aussi pures et authentiques.





« Quatre obstacles surtout nous séparent d'une forme de civilisation susceptible de valoir quelque chose. Notre conception fausse de la grandeur ; la dégradation du sentiment de la justice ; notre idolâtrie de l'argent ; et l'absence en nous d'inspiration religieuse. On peut s'exprimer à la première personne du pluriel sans aucune hésitation, car il est douteux qu'à l'instant présent un seul être humain sur la surface du globe terrestre échappe à cette quadruple tare, et plus douteux encore qu'il y en ait un seul dans la race blanche. »





Comment aurait évoluée la République française après 1789 si Simone Weil s’était imposée en amont ? Que serait devenu le marxisme si Karl Marx avait planché sur ses écrits ? Quel monde aurait créé Hitler s’il avait été biberonné aux idéaux de cette mystique ? Que deviendrait notre société si, enfin, on faisait une croix sur des valeurs héritées du mensonge ?





L’analyse historique de Simone Weil s’éloigne de toutes les considérations habituellement remâchées. Qu’est-ce que cette fierté française qu’on veut nous faire avaler ? Le triomphe de la force et de l’esclavage, hérités de la Rome antique, avilissent les hommes, les sociétés et les valeurs et corrompent la justice, empêchant le rétablissement de tout équilibre. La situation devient critique à partir des siècles derniers, alors que la volonté d’unification sous le couvert de la notion galvaudée de « patrie » se charge d’effacer les dernières traces de corporatisme ou de régionalisme. Ce qui restait d’authentique et de vrai disparaît, dominé par une nouvelle forme de violence qui se dissimule sous les oripeaux de la devise « Liberté, égalité, fraternité ». La revendication de laïcité rend obsolète une religion qui, déjà, s’était laissée contaminer par la force et l’individualisme depuis qu’elle avait été associée à la monarchie –première étape vers sa destruction. La science la remplace, sans se rendre compte qu’elle ne constitue qu’une nouvelle manifestation de la foi dont le contenu métaphorique aurait été remplacé par un contenu métonymique sans aucune valeur nutritive. Cette science perfide, remuée avant tout par des intérêts qui visent la gloire personnelle et l’entretien financier plus la justice, ne ressemble plus à la science noble pratiquée par les grecs antiques. Elle se dégrade en même temps que la notion de justice et aboutit à la conception de l’utilitarisme, cette doctrine qui légitime la toute-puissance de la force en lui permettant de se fondre à l’insu de tous dans la coquille vide de la justice. L’utilitarisme légitime à son tour le libéralisme économique lorsque la force se quantifie en pièces sonnantes et clinquantes, elle légitime le marxisme lorsque la force prend le nom d’Histoire et admet la lutte des classes, elle légitima le nazisme et légitime encore aujourd’hui la violence d’une société vouée entièrement à la consommation et à la distraction, au détriment des valeurs fondamentales nécessaires à l’épanouissement de l’être humain. Toutes nos fonctions d’alimentation sont désormais assurées, sauf celle qui confère à l’âme sa substance. Simone Weil a analysé les formes du déracinement dans les milieux ouvrier et agricole, on en analyserait aujourd’hui les formes telles qu’elles se manifestent dans la classe moyenne sous l’apprêt de névroses ou de suicides programmés. Les névrotiques, éternels insatisfaits, désespérés et malheureux, subissent le déchirement que nous inflige une société qui se meut dans l’erreur. Les racines de ces malheureux n’ont pas été totalement arrachées, celles qui restent leur rappellent encore l’inscription de tout individu dans la continuité d’un monde peuplé d’ancêtres, de tradition et de vie. Ceux qui programment leur condamnation sont ceux qui n’ont plus de racine, ou qui ne les écoutent plus : ils se sont lancés dans la bataille tête la première et ont oublié que les victoires durables ne sont pas seulement celles du triomphe personnel. Il ne s’agit peut-être là que d’une forme plus accentuée de névrose.





Restent ceux qui sentent leurs racines plus que les parasitages du monde extérieur. S’ils veulent renouer le contact, ils se libèreront progressivement de la détresse et de la lassitude. Ils doivent croire qu’ils ne sont pas seuls. Simone Weil fournit une première voix qui confère la confiance.





« Tant que l'homme tolère d'avoir l'âme emplie de ses propres pensées, de ses pensées personnelles, il est entièrement soumis jusqu'au plus intime de ses pensées à la contrainte des besoins et au jeu mécanique de la force. S'il croit qu'il en est autrement, il est dans l'erreur. Mais tout change quand, par la vertu d'une véritable attention, il vide son âme pour y laisser pénétrer les pensées de la sagesse éternelle. Il porte alors en lui les pensées mêmes auxquelles la force est soumise. »





Sa parole est une grâce à laquelle on craint d’abord de céder –les pires tyrans ne sont-ils pas ceux qui revendiquent l’absolue vérité de leur parole envers et contre celle de tous les autres ? mais si on consent à lâcher la bride une fois, l’effusion de chaleur se répand. Rien ne permet de prouver la bonté qui sous-tend le discours de Simone Weil, sinon cette adhésion spontanée de l’âme qui n’a pas besoin d’être érudite pour discerner le bien durable du bien immédiat, celui qui est bientôt couronné par ses conséquences funestes. C’est aussi ce que le philosophe grec Epicure discernait lorsqu’il différenciait les désirs naturels des désirs vains (richesse, gloire, immortalité…).





Simone Weil propose des mesures concrètes qui permettraient de transposer au niveau terrestre la transcendance qui remplissait le message chrétien avant sa corruption. Rien de compliqué : il s’agit de rendre à l’individu sa dignité afin qu’il lui soit permis de se tourner vers ses semblables le cœur plein d’amour et de grâce parce que libéré de ses frustrations. Il s’agit de le rendre conscient de l’harmonie prodigieuse qui relie l’immanence de sa vie terrestre à la transcendance de l’humanité, sur terre et dans le ciel (ou au moins dans la continuité de nos généalogies, traditions, civilisations et âmes collectives). Cela peut se faire sur le plan intellectuel, par exemple en ôtant la culture des mains du pouvoir dominant et en lui rendant son caractère véridique, en lien avec les réalités endurées au quotidien par les hommes. :





« Par exemple, quelle intensité de compréhension pourrait naître d'un contact entre le peuple et la poésie grecque, qui a pour objet presque unique le malheur ! Seulement il faudrait savoir la traduire et la présenter. Par exemple, un ouvrier, qui a l'angoisse du chômage enfoncée jusque dans la moelle des os, comprendrait l'état de Philoctète quand on lui enlève son arc, et le désespoir avec lequel il regarde ses mains impuissantes. Il comprendrait aussi qu'Électre a faim, ce qu'un bourgeois, excepté dans la période présente, est absolument incapable de comprendre – y compris les éditeurs de l'édition Budé. »





Cela peut se faire également sur le plan pratique, en rendant leur âme aux ateliers à la manière des corporations médiévales :





« Un ouvrier pourrait parfois montrer à sa femme le lieu où il travaille, sa machine, comme ils ont été si heureux de le faire en juin 1936, à la faveur de l'occupation. Les enfants viendraient après la classe y retrouver leur père et apprendre à travailler, à l'âge où le travail est de bien loin le plus passionnant d'un métier, et pourraient à leur choix se perfectionner dans celui-là ou en acquérir un second. Le travail serait éclairé de poésie pour toute la vie par ces émerveillements enfantins, au lieu d'être pour toute la vie couleur de cauchemar à cause du choc des premières expériences. »





Mesures utopiques dans l’état actuel des choses, non seulement au niveau politique mais aussi au niveau éthique. Même les meilleurs d’entre nous doivent être purgés pour retrouver le sens d’un monde régi par la justice, l’obligation et l’obéissance à la vérité. Après des siècles passés à nous faire prendre l’esclavage pour la liberté, nous ne savons plus que la liberté n’est possible qu’à condition d’être obéissance au bien éternel, et non plus aux satisfactions temporelles de la force. La notion d’obéissance même fait peur et nous rappelle les pires totalitarismes mais c’est parce que nous l’avons subordonnée à la force depuis des millénaires, alors que l’obéissance à la vérité et à la justice ne devrait pas conduire au malheur de l’humanité. Et qu’importe si ce n’est qu’une utopie ? Irréalisable peut-être, mais concrète dans les exigences qu’elle requiert et dans les idéaux qu’elle construit.





« On n'a même pas la certitude que l'idée d'un ordre où toutes les obligations seraient compatibles ne soit pas une fiction. Quand le devoir descend au niveau des faits, un si grand nombre de relations indépendantes entrent en jeu que l'incompatibilité semble bien plus probable que la compatibilité.



Mais nous avons tous les jours sous les yeux l'exemple de l'univers, où une infinité d'actions mécaniques indépendantes concourent pour constituer un ordre qui, à travers les variations, reste fixe. Aussi aimons-nous la beauté du monde, parce que nous sentons derrière elle la présence de quelque chose d'analogue à la sagesse que nous voudrions posséder pour assouvir notre désir du bien. »





L’obéissance ultime, sur le plan de notre réalité terrestre, se concrétise selon Simone Weil dans l’assujettissement absolu au travail physique. C’est ici la conclusion la plus définitive de la disparition de l’âme individuelle dans l’âme collective, mais c’est en même temps son chant du cygne et l’éclat paradoxal de sa gloire, qu’il serait peut-être bon de rapprocher de cette humble constatation de Sainte Thérèse :





« Un jour que je me plaignais d’être obligée de manger de la viande et de ne pas faire pénitence, j’ai entendu qu’on disait qu’il y avait parfois plus d’amour du moi que de désir de pénitence dans un semblable chagrin. »





L’extrémité d’un tel sacrifice devrait rester un horizon pour nos destinées, ou la tentation d’un ultime orgueil. Mais peut-être ne le devrait-elle pas et alors, Simone Weil court beaucoup trop loin devant nous pour que nous puissions la rattraper. Nos âmes ne sont peut-être pas encore assez passionnées, ni assez affamées pour reconnaître la nécessité d’une telle consomption. Le prophète est à l’heure, mais le Messie vient toujours trop tôt.
Lien : http://colimasson.blogspot.f..
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La pesanteur et la grâce

La Pesanteur et la grâce, il est fort difficile de parler de ce texte de la philosophe Simone Weil.

Je vais vous épargner toute analyse de ce texte, je préfère vous en faire une lecture enrichie de mon ressenti.

Simone Weil est une personnalité exigeante avec elle-même et les autres. Cela se ressent dans son écriture et sa pensée. J'ai aimé cette forme de pensée dans l'exigence d'aller sans cesse contre soi-même, ne rien céder.

J'ai découvert que le livre dont je veux vous parler n'est pas

Il semble que La pesanteur et la grâce est sans doute le livre le plus connu de Simone Weil. Or, il n'est pas réellement d'elle, du moins pas tout à fait sous cette forme...

La pesanteur et la grâce est sans doute le livre le plus connu de Simone Weil. Le titre n'est pas d'elle même si les mots sont d'elle, le choix des textes n'est pas d'elle mais celui d'un ami auprès duquel elle avait confié ses cahiers, Gustave Thibon, philosophe qui l'avait hébergée chez elle.

Le texte, tel qu'il nous est livré, fut publié après la mort de Simone Weil, survenue en 1943. Il est un recueil de plusieurs textes, classé par thèmes. Découvrant la pensée tumultueuse de Simone Weil, il n'est pas certain qu'elle aurait fait elle-même ce choix

C'est un texte à la fois séduisant, déroutant, exigeant.

Pourquoi séduisant ? Cette idée d'une grâce qui peut nous toucher, du moins si nous en faisons l'effort, l'effort pour tenter de l'atteindre est en effet fort séduisante. Simone Weil nous montre une forme de chemin. J'aime cette idée de quelque chose de plus grand que nous qui nous pousse à grandir, l'idée d'une grandeur et pourquoi pas spirituel me séduit... Laïc assumé s'agissant de la vie de la cité, agnostique par ailleurs s'agissant de mon cheminement personnel, l'idée d'une spiritualité ne me semble pas contradictoire avec mes valeurs fondamentales. Simone Weil m'a réconcilié avec parfois mes questionnements.

Effectivement, parfois je me pose des questions dans cette dichotomie entre laïcité et spiritualité. Il pourrait y avoir des déchirures. Chez moi je tente d'en faire des chemins et je tente d'en faire bien la part des choses.

Oui, la lecture de ce livre m'a aidé, m'a réconcilié avec quelques doutes sur mes cheminements. Quelle richesse, la pensée de cette femme ! Totalement toujours elle-même en contradiction avec sa pensée, une pensée contre elle-même... Mais parce qu'en même temps elle décortiquait tout, toute pensée jusqu'à l'os.

Lire Simone Weil, c'est un peu entrer dans une zone d'inconfort, entrer dans la tempête, mais c'est aussi prendre le risque de peut-être se régénérer, penser contre soi-même...

J'ai aimé cette idée de la grâce et de la pesanteur qui font partie de nos vies.

Mais c'est quoi la grâce ? Simone Weil nous dit que la grâce est un don sans condition sans raison sans mérite, c'est une faveur, une bénédiction qui nous est accordée. La grâce, c'est accorder quelque chose à quelqu'un sans que cela ne lui soit dû.

Simone Weil nous dit que l'attention, l'attention à nous aux autres, est une manière de favoriser cette grâce.

À l'inverse, posséder c'est souiller. Aimer purement, nous dit Simone Weil, c'est consentir à une forme de distance.

L'attention, la pureté, c'est une façon de dénoncer la volonté de puissance, l'exercice de la puissance. C'est donc un texte actuel. Lu dans le contexte actuel, j'ai ressenti que ce texte ne prenait pas une ride, était plus que jamais actuel.

L'attention nous arrache aux tentations idolâtriques. Elle est abandon à la grâce.

L'attention nous déconstruit et nous reconstruit.

J'aime ces paroles écrites dans les années 40, déconnectées des textes de développement personnel qui affluent plus que jamais, surtout en ce moment.

Il s'agit d'accueillir, faire le vide dans sa pensée, ajourner ses idées, avoir un éclair d'attention.

Il faut former les éveils à cette attention.

Peut-être qu'il y a quelque chose à retenir pour l'école, les élèves, apprendre et cultiver l'attention.

Attention, oui mais à quoi ?

A la vérité. Dans son rapport au bien. Elle est attente. Attente de la vérité qui est bien.

Bien sûr, Simone Weil évoque Dieu... Son image est celle d'une philosophe marquée par la religion. Or, il n'en est rien.

Dans son travail d'exigence, elle est sans concession avec la religion, juive ou chrétienne...

Elle a une idée d’un Dieu épuré et non providentiel.

Elle croit en un athéisme purificateur, passage nécessaire qui conduit à un Dieu épuré, vide de toute idolâtrie.

Simone Weil nous dit que Dieu s'est retiré du monde après la création de ce monde, mais que Dieu, en se retirant du monde, fait venir un espace neuf à combler...

J'aime cette idée...

Je retiens de cette lecture que la grandeur ne peut être que spirituelle. Simone Weil nous révèle que nous avons besoin de grandeur, de choses plus grandes que nous, il ne faut pas placer la grandeur au mauvais endroit car cela mène à la barbarie. Il faut chercher une grandeur spirituelle.

À chacun d'y mettre les mots, les gestes, les actes, qui peuvent nous permettre d'être plus grands que nous, individuellement ou collectivement...

Ce texte est farouchement d'actualité.
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Oeuvres choisies

[EN CHANTIER]

Je suis impressionné par la somme que constitue ces Œuvres de Simone Weil et par la puissance de réflexion d'une femme morte si jeune, et dont la vie n'a pas été un long fleuve tranquille. encore plus impressionné de voir que ce n'est qu'une partie de sa véritable œuvre littéraire, bien plus colossale que ces 1280 pages choisies dans ses livres, carnets et lettres.

A 34 ans, elle avait plus agit et écrit que certains en toute leur vie, ces certains ne se gênant pourtant pas pour donner de grandes leçons sur la vie !

Nous avons néanmoins dans les mains ici les écrits les plus marquants de la penseuse. Car en effet je trouve un peu réducteur de dire philosophe, bien que ce soit sa formation initiale. Elle a été aussi militante, ouvrière, intéressée par les mathématiques, le grec, la littérature évidemment, l'histoire européenne, la politique et l'économie. Une approche éclectique donc, et un remarquable talent de synthèse et de pénétration de ces disciplines forts distinctes se dégage de ces pages, nombreuses.



Pour moi, ce livre et la vie de Weil se divise en deux parties que je n'ai pas goûtées de la même manière.



D'une part, et c'est le plus gros morceau, ses activités politiques et philosophiques autour du monde du travail, du communisme, de la situation européenne avant la seconde guerre. De ses années de formation avec Alain à sa participation à la guerre civile espagnole, en passant par les usines Renault et ses écrits sur le travail, on trouve une grande cohérence dans sa pensée, toujours très ancrée à gauche, très vite lucide sur la réalité de l'URSS, déçue de la politique des partis et du sorts des travailleurs et du travail manuel en France et ailleurs.

Elle décrit avec une remarquable acuité tout ce qu'elle expérimente. Intellectuelle, professeur, elle se fait embauchée malgré ses problèmes de santé dans des usines et partage le quotidien des ouvriers, non sans mal.

Sa vision des années si tendues et étranges avant le déclenchement de la guerre est géniale, et tellement juste...



Ensuite vient la seconde période, où à mon avis la pensée de Simone Weil s'effondre, son courage est usée, sa santé encore plus fragile, son pays brisée ainsi que l'Europe. Elle se tourne vers une mystique chrétienne, interprétant l'histoire et la littérature dans cette optique, des pythagoriciens aux druides en passant par Platon et les albigeois. Si elle reste une écrivaine sensible, douée, capable de voir la situation de son pays les yeux en face de la barbarie et des lâchetés, elle ne propose que la foi comme solution réaliste. La science, les partis, tout l'a déçu et plus rien ne lui semble beau que la chrétienté. Elle a rejeté la religion juive de ses ancêtres (ses parents ne croyaient ni ne pratiquait) et embrassé le nouveau testament avec la ferveur des nouveau convertis. Elle ne sera cependant jamais baptisée.

Cela a rendu la lecture de la dernière partie pénible pour moi.

Mais cela est avant tout le fait de la résonance qu'a en moi cette pensée.



Un dernier trait m'a attristé. Son frère essaie de lui faire lire Nietzsche, qu'elle renie d'un revers d'un main, arguant qu'avec la fin qu'il a eu, il ne peut professer de philosophie de la vie et du bonheur.

Pourtant, bien des choses les liaient: une grande lucidité, un amour de l'étude, du grec et des grecs anciens, leur désaccord portait avant tout sur Jésus dont Nietzsche a fortement rejeté l'héritage alors que Weil l'a embrassé de toute son âme.

Elle meurt 10 ans plus jeune et dans une désespoir bien plus terrible que le penseur allemand, dont la fin de vie n'est pas réjouissante non plus. Finalement sa pensée offre-t-elle mieux ?

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La pesanteur et la grâce

La pesanteur et la grâce est un recueil d'aphorismes dont la lecture doit se faire sur le long terme.



Il est sidérant de profondeur d'analyse et son exigence éthique et métaphysique frôle l'impossible.



Simone Weil propose une philosophie de l'élévation si austère, si exigeante, qu’on peut s’en effrayer.



Volupté de la souffrance non charnelle, volupté spirituelle comme consommation ultime de l'union. Mais que la volonté ne doit pas rechercher. Sinon on tombe dans la pesanteur.



Attendre la Grâce : philosophie de l'attente et de l'attention portées à leur plus haut degré.



Je me suis parfois demandé si Simone Weil croyait en Dieu.



Est-ce la question ?



Croire, même si Dieu n'existe pas, croire comme un arc tendu au dessus de l'abîme.



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L'Espagnole

SI VIS PACEM...



... Faut-il pour autant se mettre en guerre, la préparer, et comment, dans le cas d'une réponse positive à ces questions ? C'est l'une des questions fondamentales que se pose la philosophe Simone Weil tout au long de ces quelques textes rassemblés ici sous le titre générique L'Espagnole, proposé en lecture par la très belle petite maison d'édition suisse Abrûpt, à l'occasion du Masse Critique de février consacré aux non-fictions et que je remercie infiniment, de même que Babelio, pour cet envoi précieux.



La philosophie de Simone Weil est, à tout le moins, doublement exigeante : en premier lieu, en tant que pensée se prémunissant sans cesse, fuyant même, à raison d'une critique permanente, lumineuse mais parfois aride, tout esprit de système, de tout a priori, de toute facilité dialectique ou expérimentale. En second lieu, c'est une philosophie opérante, vivante, en action, c'est à dire que, contrairement à bien des philosophes "modernes", peut-être à partir de l'époque des lumières mais sans doute plus encore à la suite d'Emmanuel Kant ou de Georg Wilhelm Friedrich Hegel, le philosophe s'est avant tout fait penseur bien avant qu'acteur, surtout en ce qui concerne sa propre existence quotidienne. Chez Simone Weil, rien de cela : la philosophie est avant tout une manière de vivre afin de se rapprocher au mieux de la vérité (notion essentielle dans l'oeuvre de Simone Weil), de la justice (autre notion de très grande importance, tout particulièrement dans ses textes à caractère politique et sociaux), de soi-même, de l'autre et, vers la fin de sa vie, de l'idée de dieu, que l'on retrouve dans l'un de ses plus grands - et parfois douloureux - textes : La Pesanteur et la Grâce. Cette absence de système véritable est sans aucun doute l'une des raisons pour laquelle cette pensée a longtemps été mise sous le boisseau, non pas oubliée (son oeuvre est intégralement éditée et globalement aisément disponible) mais pas forcément la plus étudiée non plus. Tout juste se souvient-on ainsi des écrits admirables qu'elle a rédigés tandis qu'elle avait décidé d'embrasser la cause ouvrière non pas seulement en lui rendant hommage et honneur par quelque écrit bien tourné d'une haut d'une tour d'ivoire universitaire, mais en vivant dans sa chair le quotidien des ouvriers de son temps. Cela donnera, entre autre textes d'importance son essentiel Journal d'usine que les éditeurs rassembleront plus tard avec d'autres, fruits de cette expérience, sous l'intitulé de "La Condition ouvrière", et que l'on ferait bien de relire à l'aune des évolutions d'aujourd'hui, qui n'en sont peut être pas tant.



Par ailleurs, plusieurs points communs entre cet ouvrage posthume (dans sa mise en page) et L'Espagnole : Dans les deux cas, il s'agit de mettre en conformité, pour reprendre une expression actuelle qui lui aurait certainement déplue, sa pensée - en l'occurrence politique - avec son existence propre ; dans les deux cas, il procède d'abord d'une expérience vécue, forte, jusqu'au-boutiste : Son état de santé défaillant de longue date l'empêchera, après une longue année de double labeur (l'usine mais aussi son travail intellectuel), et à des postes volontairement difficiles, de poursuivre cette sorte de tâche incarnée qu'elle s'était donnée pour mission d'accomplir - jamais nulle tricherie, nulle volonté "documentaire", nulle "fabrication" chez Simone Weil : c'est toujours tout ou rien (et c'est souvent tout) -. De même, c'est une brûlure assez grave au pied qui aura raison de son implication dans la guerre d'Espagne, à son corps défendant, si l'on peut dire. Voilà pour les correspondances directes.



L'oeuvre de Simone Weil est, pour une large part, tout à la fois anthume et posthume. Ou, pour le dire autrement, c'est une oeuvre en grande partie éclatée et recomposée dans la décennie suivant sa disparition que l'on connait aujourd'hui. Mais éclatée ne signifie aucunement qu'elle n'a aucune ligne directrice, qu'elle est dénuée de tout fil, de toute pensée globale (mais surtout pas globalisante). C'est même l'exact inverse. Et c'est la raison pour laquelle un ouvrage comme La Condition ouvrière a toute sa raison d'être, tandis qu'il est de composition posthume, exactement comme cette Espagnole, qui amène tout à la fois son lot de témoignage de même que la confirmation que cette pensée sans cesse en mouvement (de la pensée d'Alain, son premier maître, elle se dirigea peu à peu vers une pensée théodicée à la fois toute personnelle et infiniment christique, mais dans une version qu'aucune église ne sera jamais fondée à reconnaître pour sienne - à l'exception, peut-être, du message de l'humble d'Assise, mais nous nous écartons.



Pour en revenir aux textes proposés par cette magnifique petite maison d'édition suisse - dont nous avouons la découverte totale à l'occasion de cette Masse Critique : couverture originale un rien déroutante (pas de titre, pas de nom d'auteur, juste un collage), beau papier, format parfait pour la lecture omnivore, propositions diverses et contemporaines complémentaires surprenantes : l'anarchie n'est décidément pas un chaos. - ils montrent une fois encore à quel point l'éthique de Simone Weil est inséparable de sa vision politique : sans concession à l'égard des communistes-staliniens mais guère plus à l'encontre de ses camarades anarchistes du CNR dont elle réprouve, définitivement, les manières d'être - et l'être n'est pas une vague notion chez elle - laquelle ne se satisfait jamais des entre-deux ni des entre-soi. Son besoin (et non un "désir") de pureté ne pouvant admettre la lâcheté de ceux estimant que le massacre d'aucun homme, fut-il fasciste, ennemi, curé, bourgeois est excusable, tandis que la philosophe humaniste Simone Weil estime impardonnable ce massacre en ce qu'il est, d'abord et avant tout, le massacre d'un homme, quoi qu'il pense. Il y a de la faute première, biblique, dans ce qu'elle note dans son journal : «S’ils me prennent, ils me tueront… Mais c’est mérité. Les nôtres ont versé assez de sang. Suis moralement complice.» Ce sens rare et parfait de la Justice, une fois encore.



Deux autres moments sont immenses. En premier lieu, cette longue lettre adressée à Georges Bernanos. Resituons : Rien n'est plus différent de la pensée sociale et anarchiste de Simone Weil que celle de l'auteur du Journal d'un curé de campagne. Pire : il fut, un temps, du côté de Drumont, l'un des penseurs français de l'antisémitisme ! Pour autant, Simone Weil admira certains écrits de Bernanos pour ce qu'ils étaient : des avancées, n'oubliant sans doute pas ce que furent les pensées de cet homme, mais ne méconnaissant pas, non plus, son évolution. En nos époques d'absolutisme mou et sectaire à la fois, cette parole est vivifiante !

Il y a, par la suite, cette prolongation politique à la pièce de Jean Giraudoux, La guerre de Troie n'aura pas lieu qui définie la vision profonde que Simone Weil éprouve vis à vis des démocrates et de leurs impérities.



Dense est la pensée de Simone Weil, et ce n'est certes pas en quelques lignes bien imparfaites d'une critique noctambule que celle-ci saurait être précisée. En retenir toutefois quelques originalités : La perfection peut être de ce monde, à condition de ne pas la soudoyer, même à raison de -logie. La vérité prime tout. Elle n'est pas concession, elle est. La Justice est une de ses plus ferventes compagne, mais, bien évidemment, pas n'importe quelle justice. L'ennemi peut être au plus proche. Y compris chez celui qui est supposément "dans nos rangs". La pensée Weil ne se targue jamais d'être plaisir ni plaisante. Elle saura, plus tard, ce qu'est l'amour - par le Christ, mais c'est là une autre épreuve du Sens -. N'empêche, cette pensée ravaude nos certitudes faibles, elle les remet en jeu, leur réapprend la foi en nous même, humains. Comment ne pas être subjugué par cette incroyable pensée laïque et bientôt mystique ?
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L'enracinement

« L’enracinement », signé Simone WEIL, est souvent présenté comme le prélude à une déclaration des devoirs envers l’être humain. ‘Devoirs’, concept que l’auteure, Simone WEIL, remet en question dès les premières lignes en le couplant au concept de ‘droits’, entité ‘droits et devoirs’ à laquelle elle préfère la notion ‘d’obligations’ ! On a déjà ici tout une belle et forte perspective de réflexions et de révisions de nos jugements habituels sur ce qui est censé fonder nos vies.

Simone WEIL, figure mystique chrétienne, atteinte de tuberculose, préféra quitter New York puis Londres où elle travaillait pour la France du Général de Gaule et venir finir ses jours sur les terres de France pour y partager les souffrances de ceux restés au Pays. Elle y mourut le 24 août 1943.

Son essai est un essai philosophique, religieux et politique, écrit avec brillance, référencé à souhait et, même si la poussière du temps à quelque peu recouvert ses lignes, les propos sont utiles, compréhensibles. Ils interpellent et respectent le lecteur qui sera seulement invité à se situer en profondeur sur ce qu’il nomme besoins indispensables, racines de l’âme et de la vie collective, sens et pouvoir de la vie, de la mort, du travail et de l’obéissance qu’il se doit à lui-même et au monde quand il déroule sa vie, ses envies, ses passions et combats.

Je ne pense pas que ce livre exige, pour être lu et compris, un partage des convictions de foi de l’auteure. Il ne se veut en rien un essai prosélytique et, par ailleurs, le coup de plume de Simone WEIL se transforme parfois en coups de griffes bien acérées lorsqu’elle dénonce les reprises du message de foi initial par les puissances terrestres de son époque comme de celle des grands empires grecque et romain à qui nous accordons trop facilement à ses yeux le label d’origines fécondes de notre humanité.

Le seul ‘acte de foi’ que réclame l’adhésion à un volonté de lecture intelligente de cet essai est celui de reconnaître que l’Homme doit rester lucide face à lui-même, à l’Histoire qui lui tient lieu de tuteur plus que de vérité nourricière et qu’il lui faut garder au cœur de sa vie les besoins qui sont légitimes à la grandeur de l’Humanité et les obligations que toute vie fait naître dès qu’un individu se revendique Homme parmi les Hommes, avec ou sans dieux.
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De l'attention

Un Ange.... Mais qu'est ce qu'elle écrit bien ! C'est fluide, limpide : )

Le propos est philosophique. L'attention est une valeur importante de la réussite scolaire. Mais on peut faire attention et rester en échec devant un problème géométrique. Ce n'est pas grave, c'est un progrès quand même. La concentration investie sera réemployée sur autre chose. __

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On parle encore de l'échec, de l'obstacle comme épreuve positive, un de mes "dadas".

Dire que ce ne fait qu'un an que j'ai entendu parler de cette philosophe. C'est trop bien, ce qu'elle écrit, et comment elle envoie ses messages. J'aurais une dizaine de citations à recopier de ce petit livre !... Et pour une fois que je dis qu'un ( e ) philosophe écrit bien.... : )

C'est philosophique, mais aussi religieux et pédagogique. Cette agrégée de philo, élève d'Alain, a marqué ses élèves.

D'origine juive, mais à la recherche de la Vérité, elle renie l'Ancien Testament, où trop de violences ne sont pas la solution, selon elle. En discutant avec un Dominicain à Marseille en zone libre en 1942, et en découvrant Saint François d'Assise, elle franchit un palier de connaissance vers la Vérité, et demande le baptême catholique !

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Cette femme, homonyme de notre Simone Veil adorée, qui n'a pas partagé ses idéaux politiques, est une humaniste autant qu'elle, prônant l'attention à Dieu et aux autres, particulièrement aux malheureux, pour lesquels, dit-elle, la pitié ne suffit pas. Si son charisme avait suivi son engagement, elle aurait pu devenir une mère Teresa ou un abbé Pierre.

Elle est partie beaucoup trop tôt, emportée par la tuberculose à 34 ans.
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L'Iliade ou le poème de la force

Une jolie fresque poétique et philosophique! Simone Weil S'inspire de l'Iliade pour nous décrire le monde moderne qui n'a pas pour autant changé avec celui de l'époque de l'Iliade car l'homme, toujours en quête de la puissance, mesure son existence par la force, au même moment qui force, dit faiblesse quelque part, qui dit force, dit maitre, et qui dit maitre dit esclave quelque part. C'est cette relation qu'entretiennent les hommes, elle est basée sur la force alors que celle-ci est aussi faillible qu'on ne peut le penser. En décortiquant l'iliade, autant des situations qui s'y révèlent que ses illustres personnages, Simone Weil nous décortique également le concept de la force qui parait en même temps comme une épouse insatiable, qui voudra toujours que l'époux en fasse plus, encore et encore jusqu'à ce qu'il se pende, c'est à ce moment que la courbe tombe, la force chute.
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La pesanteur et la grâce

Conseillée par des amis, j'ai ouvert ce livre "la pesanteur et la grâce" alors que je ne connaissais pas du tout la philosophe Simone Weil (1909-1943)

Cet ouvrage se présente comme un recueil de pensées sous forme de courtes méditations classées par thèmes : l'intelligence et la grâce, la beauté, le détachement, le mal, la violence, le moi, etc…

L'ensemble témoigne d'une exceptionnelle profondeur, d'un esprit entièrement tourné vers la recherche de la vérité, sans compromis, terriblement exigeant, tourmenté aussi parfois, mais toujours d'une grande justesse et pertinence.

A méditer, plus qu'à lire d'une traite.

Un livre auquel revenir régulièrement pour y piocher nourriture, réflexions habitées, sens de l'homme et du mystère.

Une très belle découverte !
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La pesanteur et la grâce

Je ne connaissais Simone Weil que de nom vraiment, mais depuis longtemps. Ce livre mis en avant dans ma médiathèque m'a enfin permis de l'aborder. J'ai trouvé l'introduction de Gustave Thibon très enrichissante car celui-ci présente Simone Weil dans sa vie et sa personnalité, ce qui m'a permis de mieux saisir les pensées qui jalonnent ce recueil. Celui-ci est composé, donc, de réflexions notées en vue de les développer plus tard, en lien avec de grands thèmes tels que la foi, l'amour, le désir, la violence ou encore l'univers, pour n'en citer que quelques-uns.

J'ai trouvé, personnellement, l'approche difficile car très abstraite, en tout cas pour moi. Sans doute est-elle une autrice qui mériterait d'être étudiée en classe, comme Pascal par exemple, pour mieux saisir le cheminement de sa pensée...

Ceci dit, ça fait des années que je ne suis plus du tout familiarisée avec ce type de lecture philosophique qui reste un exercice ardu dans ce cas-là.
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La révolte des Ciompis : Un soulèvement prolétari..

En 1378, la révolte des plus pauvres des ouvriers de l’industrie de la laine à Florence, les Ciompi, menace l’édifice social du capitalisme naissant. Les croyant capables de tout, la bourgeoisie déploya une violence répressive pour les réduire à rien. Dans ses Histoires florentines, Machiavel relate ces évènements dans lesquels Simone Weil verra « l’ainée des insurrections prolétariennes ».

(...)

Réunir ainsi des textes complémentaires et apporter des clés d’analyse et de compréhension, permet assurément de nourrir les réflexions. Nous ne pouvons que saluer la pertinence de cette démarche éditoriale car, comme le rappelle justement Emmanuel Barot : « La mémoire des luttes n’a que leur avenir pour enjeu. »



Article complet sur le blog :
Lien : https://bibliothequefahrenhe..
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Note sur la suppression générale des partis p..

Il n'y a rien de plus confortable que de ne pas penser, dit Simone WEIL. Par son exposé 'datant de 1950!), elle illustre à merveille cette absence quasi totale de réflexion qui stagne dans le monde politique à propos de l'utilité des partis et leur suppression possible.

Son postulat de départ, simple -tout le contraire de simpliste - , pose que sur le Continent d'Europe, le totalitarisme est le péché originaire des partis. En effet, on peut considérer qu'un parti politique est une machine à fabriquer de la passion collective. Construite de manière à exercer une pression identitaire sur chacun des êtres humains qui en sont membres, la seule raison d'être de cette machine électorale est sa propre croissance, sans limite, sans fin.



Si telle est l'Alpha et l'Omega des partis, Simone WEIL n'hésite pas à dire que relevant du Mal et s'opposant au Bien, ils peuvent être supprimés. Car qu'est-ce que le Bien? Pour l'auteure, seule les notions de Vérité, de Justice et d'Utilité publique relèvent du Bien. Comme on force la culture des endives (chicons, diront les belges), des tomates ou des fraises, au point d'avoir des fruits ou légumes énormes, formatés sous un même moule et produit, si possible en avance sur les autres, tout parti force les idées devant être exprimées par ses membres, réduit l'expression des idées aux seuls pans relevant de ses mécanismes d'élargissement et de sa doctrine. La perte sèche, pour tous, est la possibilité que perdent les citoyens de produire des idées personnelles et de les enrichir par la confrontation, sans pression, à celles d'autrui.

La justice des analyses des projets politiques déposés et, surtout, celle des votes exprimés dans les assemblées d'Etat ne peut tenir la route puisque cette justice est, en fait, dictée par une discipline de parti dans son rapport de force aux autres et non par la recherche et la construction progressive d'une vraie bonne idée capable de résoudre les problèmes du citoyen. Dans la foulée, la notion même d'utilité publique est entièrement absorbée par la soif de puissance et de croissance des partis.



La démocratie étant, plutôt devant devenir, la recherche permanente d'un état d'équilibre satisfaisant les besoins d'une population constituée pourtant d'innombrables particules en mouvemente et inter-actions ininterrompues, c'est du choc mêmes de ses intérêts personnels et de leurs régulations mutuelles que peut naître une réponse sage,convenant à tous, pour autant que cette 'surface de population' ne soit pas troublée par des vents d'orage et de rage qui se cristallisent autour de la confiscation de la pensée individuelle au bénéfice d'une pensée unique, politiquement forte, dépersonnalisée et offrant la suprématie du parti le plus fort sur les autres.



C'est dans le bien, le juste, le vrai, l'authentique que les hommes peuvent converger et se reconnaître uniques, différents et pourtant semblables. Les rapports de force, les mensonges, les revendications d'unicité de la seule bonne doctrine qui puisse être, celle de mon parti, ne peuvent créer que divergences, éloignements et conflits.



En toute logique donc, Simone WEIL déclarera que la suppression des partis devrait diminuer le Mal et l'Injuste et que cette suppression serait du Bien presque pur. Devenant donc légitime, elle eput s'opérer d'autant qu'elle ne semble susceptible que de bons effets.



Les partis n'étant plus, Simone WEIL préconise pour tout homme politique l'obligation de non appartenance à un parti de référence. L'homme politique devra définir sa position face aux différents projets devant répondre aux attentes des citoyens. Le choix électoral se fera donc sur des positions concrètes affirmées en regard des situations à régler et non sur base d'une obédience à un parti, une liste de noms, voire des règles de report de voix ou des votes en tête de liste.



Même si on peut se dire qu'il existera toujours des groupes d'idées, des cercles de personnes ayant des avis ou une argumentation proches, ne pouvant se parer d'aucune appartenance à un quelconque groupe partisan, les politiques devront, de facto, se situer dans la pluralité des options d'alliances, agissant ici pour telle solution avec ceux-ci et agissant là-bas, avec d'autres, pour trouver une solution à tel autre problème. Chaque réponse devant rencontrer, en son âme et conscience, les critères de Vérité, Justice et d'Utilité publique.



Finis donc les jeux de la bipolarisation de toute gouvernance et les oppositions de principes. Bienvenue aux bonnes volontés cherchant avec tous les acteurs politiques - et pourquoi pas des citoyens ? - les bonnes réponses à apporter aux vraies questions. Actuellement, par son totalitarisme, péché originaire, tout mouvement politique institué déforce la volonté d'une recherche en vérité, justesse et équité publique. Il ferme la porte au consensus réfléchi, à la soif d'équilibre, même au prix de justes compromis.



Avec cette note sur la suppression générale des partis politiques, Simone WEIL ouvre la voie (dès 1950) à une autre manière de vivre la démocratie. Constatant que, depuis, le monde politique n'a jamais cessé le jeu de recherche du pouvoir au détriment de la pensée riche, diversifiée, utile, rassemblée et, finalement, juste, il est peut-être grand temps d'arrêter de toujours remettre une couche de ce qui n'a jamais vraiment marché. Le dernier choix des électeurs français (mai 2017) pour désigner un Président n'ayant, pour ainsi dire, aucun parti structuré sur la bipolarité (même si, je le constate, il est lui aussi en recherche de pouvoir), ce choix est peut-être l'occasion de s'ouvrir à de nouveaux modèles de réflexions démocratiques avec - qui sait - une nouvelle éthique visant le Bien, le Juste, le Vrai au service de l'Utilité publique... L'avenir nous le dira.



Quoi qu'il en soit, la réflexion de S. WEIL ne devrait pas nous laisser indifférents.Qu'on aboutisse - ou non - à son modèle a moins d'importance que l'énorme avantage que nous aurions tous à réfléchir au modèle citoyen que nous sommes prêts à partager avec les politiques ... quitte à les bousculer quelque peu dans leurs us et coutumes!



"Note sur la suppression générale des partis politiques", un tout petit livre de moins de quarante petites pages... mais quelle belle et grande vision sur un nouveau monde que nous méritons!
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Amitié : L'art de bien aimer

L'amitié…Idée, chose, concept, émotion... sentiment ?

En ces quelques pages, qui sont d'une très grande richesse, d'une incroyable densité, Simone Weil nous rappelle à l'ordre universel de l'âme, du coeur et de l'esprit.

Parlons en amitié, entre nous donc.

Puisqu'il ne peut se concevoir d'amitié sans un cercle.

Non resserré, l'amitié n'est pas un collet, un cercle qui doit au contraire tendre à s'élever et à s'élargir.

Amitié. Quelle belle parole. Quel mot extraordinairement difficile à définir. Ressentir oui. À se dire, c'est beaucoup plus sérieux.

"C'est mon amie", ..."voilà mon ami" .

Ce n'est pas rien. C'est un engagement. Pas une promesse. Un engagement.

Ces pages de Simone Weil sont extraites des « Formes de l'amour implicite de Dieu ».

Elles ont pour objet le devenir de notre pensée comme nous le rappelle Valérie Gérard dans sa préface.

« Devenir de notre pensée. »

Pensée d'amitié dans « la force des affects et de l'attachement à l'autre ».

Et c'est avec une netteté et clairvoyance de langage que Simone Weil taille devant nos yeux le portrait de l'Amitié.

Il faut tout d'abord, chasser le Mensonge. Mensonge qui tenterait de cacher la réalité de l'affect.

J'ai besoin de satisfaire un élan hors de moi pour rejoindre l'autre qui est extérieur à moi.

Je suis un être sociale, social, socialisant, socialisé. Mais si le rapport se ressert j' intériorise l'autre par exces, et l'élan se brise.



L'amitié s'étiole, s'étouffe, s'efface.

Ne pas reconnaître cette contradiction éternelle de l'amitié est un mensonge.



Donc lorsque l'on parle d'amitié il faut parler d'équilibre.

Il faut tendre à ce parfait équilibre, la bonne proportion des choses.

Puisqu'en réduisant l'autonomie ou au contraire en le revendiquant avec trop de force on risque de briser le cercle.



Équilibre des choses. On ne peut pas supprimer ces deux extrêmes on peut juste tenter de rester un merveilleux équilibriste.



L'Amitié. Ce sentiment divin.



« L'amitié est le miracle par lequel un être humain accepte de regarder à distance et sans s'approcher l'être même qui lui est nécessaire comme une nourriture ».



Oui effort, l'amitié réclame un effort d'équilibre. de distance.



Elle transforme, enseigne. Enseigne qu'il faut savoir s'arracher de ses propres affects pour ne pas transformer une amitié en fusion destructrice.



L'amitié. Sentiment de pureté.



Il n'y a pas de séduction en amitié. Plaire n'est pas un verbe d'amitié. Il n'y trouve pas sa place.

Plaire c'est convaincre d'une vilaine manière.

Il faut sans sens aller se confronter au monde et à ses contradictions.

Quite à se mettre en zone d'inconfort. Oui c'est parfois inconfortable de faire un effort. D'exiger la réalité. de reconnaître l' altérité et l'intégrité.

Faire la part entre la necessité et le besoin.



« la contradiction nous fait éprouver que nous ne sommes pas tout ».



Non nous ne sommes pas tout, ni pour soi, ni pour les autres.

Penser autrement serait monstrueux.

Nous ne sommes pas voués à être des monstres.



« le réel c'est essentiellement la contradiction.Car le réel, c'est l'obstacle, et l'obstacle d'un être pensant, c'est la contradiction. »



C'est la pensée qui nous faire passer les obstacles, elle ne les efface pas, ne les chasse pas.



Pour Simone Weil l'amitié est nécessaire et impossible à la fois. Tant le désir nous fait sortir de nous.

Mais on y tend, on y oeuvre, on y explore, on s'y exerce. Et c'est une joie. Une joie car malgré l'instabilité que provoque cet affect, et bien, le miracle se produit.



Un miracle de vie.



Tout est là pour que cela ne fonctionne pas, et pourtant , l'amitié agit. L'amitié agit et ouvre l'espace de la pensée. On grandit, on s'élargit. La pensée ne s'arrache pas des affects mais elle doit être disposé à se laisser affecter. Pas infecter, pas empoisonner.



Le vivant a le pouvoir d'être affecté.

Sans cela peut on parler d' âme ?…



Être sensible, être vulnérable, être imparfait, mais qui tend à rester en équilibre constant pour ouvrir sa pensée en toute liberté, et offrir, partager cette pensée en Amitié.



C'est ainsi que cette pensée peut fonctionner et si elle pose problème elle trouve réponse en elle même.

Car l amitié est une matière qui vit dans la réalité, et pour s'y maintenir elle force la pensée à bouger, à « sortir de ses cadres ».



L'amitié est le reflet de l'amour divin, une union des contraires, une harmonie.

C'est pureté et vérité également. La nécessité peut empoisonner une relation.La détruire.

Là où il y a nécessité il y a contrainte, domination, souffrance donc.

C'est un malheur.

Seul le miracle de l'amitié peut rétablir l'équilibre



« L'amitié est une égalité faite d'harmonie » disait les pythagoriciens.



L'amitié est beauté, c'est une clé de l'architecture du monde.



Sans amitié rien ne se construit. Et rien ne peut s'élever sans liberté.



« il y a égalité parce qu'on désire la conservation de la faculté de libre



consentement en soi-même et chez l'autre ». « Il n'y a pas d'amitié dans l'inégalité ».



Je pourrai résumer très schématiquement cette pensée :



1+1 = 3

et 1+1 =2



2=3



2 ne sera jamais un.



1+1+1=4 également et ainsi de suite, ainsi, ainsi de suite.



L'amitié est exponentielle comme l'univers.

Car c'est une loi universelle.

Deux amis ne forme pas un.

Ils sont toujours des êtres dissociés, ils sont toujours 1+1.

Le fait qu'il soit ensemble réuni en amitié fait n'être, apparaître une étincelle, une lumière, une intensité que l'on peut appeler divine.

Ils ne forment pas le couple, la paire, une entité fusionnelle, un monstre hybride, il ne s'imbriquent pas l'un en l'autre, il ne s'entre dévore pas.



Non. Il sont 2 et 3 à la fois. Et le 3 c'est justement le miracle.



La présence de ce miracle.



« L'amitié a quelque chose d'universel. Elle consiste à aimer un être humain comme on voudrait pouvoir aimer en particulier chacun de ceux qui composent l'espèce humaine.

Comme un géomètre regarde une figure particulière pour déduire les propriétés universelles du triangle, de même celui qui sait aimer dirige sur un être humain particulier un amour universel »



Cette vision est d'une puissance , d'une force extraordinaire !



Simone Weil était une des intelligences les plus remarquables et indispensables à l'humanité.



Elle était philosophe. . Elle est venue en Amitié.



Elle est à présent la bienvenue pour l'éternité.



Cette lecture je l'adresse à mes amies et amis que j'aime, et à tous ceux que je rencontrerai demain.

Qu'il me soit pardonné parfois mon manque d'effort mais qu'il me soit reconnu ma tentative constante d'équilibre.

Cette dernière surpassant le premier, je crois que le miracle ne cessera jamais de se réaliser.

Et je vous rassure je n'ai nul nécessité et nul besoin d'écrire cela. et comme je reconnais notre altérité, je vous assure que vous n'avez nul besoin ni aucune necessité à lire tout ce que j'écris là.



La route n'est pas droite, il y a des creux, il y a des bosses, mais Dieu que la route sait nous rendre beaux surtout lorsque les philosophes éclairent notre chemin d'une si puissante façon.



Simone Weil fut une militante engagée, une très grande humaniste,

une femme qui a toujours su s'indigner.



09.2016

Astrid Shriqui Garain

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L'enracinement

Nombreux sont ceux qui se disent humanistes , mais combien l'on véritablement ce"statut" ? Mme Weil peut le revendiquer , mais elle ne le fera pas . En personne qui veut aider l'humain à sentir mieux dans ce monde , elle livre une derniére "partition" , qui compléte son oeuvre au service de l'humain . Son texte on 'pourrait le dire contemporain , d'une actualité incontournable , tellement ces mots sont en phase avec le monde contemporain . Mme Weil est hélas partie trop tot , mais son oeuvre est là et il faut absolument la découvrir .
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L'Iliade ou le poème de la force

❤️ 📜𝕸𝖔𝖓 𝖗𝖊𝖘𝖘𝖊𝖓𝖙𝖎📜 ❤️



l'iliade ou le poème de la force de Simone Weil.



Simone Weil, née à Paris le 3 février 1909 et morte à Ashford le 24 août 1943, est une philosophe d'origine juive d'abord militante communiste antistalinienne qui souhaite un temps partager la vie de la classe ouvrière puis convertie au christianisme à la veille de la guerre. Résistante elle quitte la France pur Londres à l'invasion de la zone libre et meurt l'année suivante de la tuberculose.

Ne doit pas être confondue avec la femme politique Simone Veil.

Voyons voir cet ouvrage , je vous averti , simplement .

Il y a force et force celle employée au sens fort du mot

c'est a dire la force musculaire, mécanique ,

la guerre asservissement des hommes dans un pays, brutalité dans une famille , etc..

celle là est maudite elle avilit celle ou celui qui l'emploie .

Et puis celle qui ennoblit l'homme , la force de caractère, du mental,

“ Ce n'est pas la force du corps qui compte, mais la force de l'esprit. ”

Ces réflexions pour donner un peu (juste un peu !) la trame de cet ouvrage de Simone Weil, car bien que je comprennes les textes ,je ne suis pas féru en métaphysique ! et peu en philosophie , mais bon je ne suis pas ignare quand même.



Elle a choisi le poème d'Homère "L'Iliade " qui illustre bien ce qui résulte de l'emploi de la force d'un peuple sur un autre ,sur la guerre en général et ses effets négatifs .



c'est un essai de Simone Weil qui réunit des textes

écrits entre 1933 et 1943, sur la guerre - et la force en général -

Elle nous explique ce qu'il advient de la pensée de l'homme ,quand il se trouve prit dans des querelles extrêmes ! du néant !!

Ces écrits appartiennent aux derniers de Simone Weil qui, participent à la fois de l'essai savant, du traité politique , de la métaphysique et du texte poétique.

Avant garde de ce que pourrait être la pensée dans les temps futurs.

Son écriture est simple malgré la difficile prise de conscience de ses réflexions .

Je cite : """Il s'adresse à la fois à l'érudit et à l'homme du commun, au croyant comme au non-croyant, au combattant comme au non-combattant.

Il permet de penser une société fondée sur les devoirs moraux et non sur les seules règles économiques ou sur la technique""".



Ces écrits ont été publiés en 1942 dans les Cahiers du Sud à Marseille.

En fait c'est un appel à combattre en toutes occasions la force brutale.

Bon j'espère vous avoir assez convaincu .

Je sais je fais des erreurs parfois de jugements .

Que les érudits en la matière veuillent m'en excuser.

Fabiolino
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L'enracinement

Je ne savais pas comment faire un commentaire sur cet essai et aujourd’hui quelques jours après avoir fini ma lecture, j’ai enfin décidé de me lancer dans la rédaction de quelque chose.

Quelque chose ? En effet … Je ne sais pas trop quoi en dire ni quoi en penser …

Alors je vais tâcher de vous exposer un rapide résumé. L’enracinement se décompose en trois parties. La première expose les besoins de l’âme puis les décline comme le besoin d’ordre, la liberté, l’obéissance, la responsabilité, l’égalité, la hiérarchie, l’honneur, le châtiment, la liberté d’opinion, la sécurité, le risque, la propriété privée, la propriété collective et enfin la vérité. On enchaîne ensuite sur une partie qui explique le déracinement, notamment le déracinement ouvrier, celui paysan et le lien étroit entre le déracinement et la nation. On termine par une partie relative à l’enracinement.

Donc trois parties, le compte est bon ! Mais je ne viens que de vous proposer le sommaire de cet essai … En effet, ce résumé pose plus de questions qu’il n’en résout … Et maintenant je vais essayer de préciser le propos de Simone Weil dans la mesure de mes pauvres capacités. Ne me tenez pas rigueur si mes explications sont peu claires car j’avoue tout de go que moi-même je me suis perdu plus d’une fois et je ne suis même pas sûr d’avoir toujours retrouvé le bon chemin …

Il serait utile de comprendre ce que Simone Weil entend par besoin de l’âme. Ce besoin de l’âme est intimement relié à une notion d’obligation. En effet, S Weil entame son essai ainsi :

« La notion d’obligation prime celle de droit, qui lui est subordonnée et relative. Un droit n’est pas efficace par lui-même, mais seulement par l’obligation à laquelle il correspond »

Voilà qui n’éclaire guère notre lanterne. En fait, cette pensée se précise peu à peu

« Un homme qui serait seul dans l’univers n’aurait aucun droit, mais il aurait des obligations »

« La notion de droit, étant d’ordre objectif, n’est pas séparable de celles d’existence et de réalité. Elle apparaît quand l’obligation descend dans le domaine des faits ; par suite elle enferme toujours dans une certaine mesure la considération des états de fait et des situations particulières. »

« L’obligation seule peut être inconditionnée »

« L’obligation ne lie que les êtres humains »

« Cette obligation a non pas un fondement, mais une vérification dans l’accord de la conscience universelle. »

Voici quelques points qui permettent de comprendre le concept d’obligation selon Weil.

« La liste des obligations envers l’être humain doit correspondre à la liste de ceux des besoins humains qui sont vitaux, analogues à la faim. »

Evidemment ces besoins ne sont pas que physiques mais peuvent être moraux et s’étendre :

« On doit du respect à une collectivité, quelle qu’elle soit – patrie, famille, ou tout autre – non pas pour elle-même, mais comme nourriture d’un certain nombre d’âmes humaines.

En ce qui concerne les concepts d’enracinement et de déracinement, j’ai trouvé le paragraphe introductif du second chapitre assez explicite

« L’enracinement est peut-être le besoin le plus important et le plus méconnu de l’âme humaine. C’est un des plus difficiles à définir. Un être humain a une racine par sa participation réelle, active et naturelle à l’existence d’une collectivité qui conserve vivants certains trésors du passé et certains pressentiments d’avenir. Participation naturelle, c’est-à-dire amenée automatiquement par le lieu, la naissance, la profession, l’entourage. Chaque être humain a besoin d’avoir de multiples racines. Il a besoin de recevoir la presque totalité de sa vie morale, intellectuelle, spirituelle, par l’intermédiaire des milieux dont il fait naturellement partie. »

Par la structure de cet essai en petits paragraphes quasi indépendants les uns des autres, Simone Weil fait preuve d’une fulgurance qui porte le lecteur à s’armer de son arme préférée pour noter des citations. Oui, pour moi, l’Enracinement est incontestablement une machine à citation : phrases courtes, percutantes et le plus souvent dans un contexte minimaliste. D’ailleurs, si on considère la biographie de Simone Weil, elle apparaît comme un caméléon aux idées multiples, voire contradictoires si ce n’était pas elle qui les énonçait.

Et dans ce texte, il me plait de penser qu’elle dévoile une partie de son intimité, ses « besoins d’âme ». Je n’ai pu m’empêcher de faire un lien entre son mysticisme avéré et son propos qui semble dans un premier temps peu étayé ou justifié mais plus de l’ordre de la révélation. Mais ceci n’est en réalité que le premier niveau de lecture, le premier sentiment à cette lecture étonnante et détonante. Car la justification et l’étaiement se construisent au fur et à mesure, de manière diffuse, sans liens réellement perceptibles. Je pourrais dire que finalement les propos sortent de l’ordre de la compréhension pour être plutôt ressentis ou perçus (du moins c’est mon analyse personnelle …).

Après je ne voudrais pas oublier la richesse et le foisonnement des idées et des propos qui sont souvent étonnants ou déroutants : ne va-t-elle pas jusqu’à trouver des excuses à Hitler ?

Hitler ? Oui il en est question mais aussi de Rome, des Grecs de l’antiquité, de Richelieu, de Charles VI … Weil intègre et justifie souvent ses propos par une relecture de l’Histoire selon des périodes et hommes clef. Je l’ai d’ailleurs trouvée le plus souvent un peu trop péremptoire dans ce registre.

Mais l’enracinement c’est aussi un cri d’amour à la France et cela ne m’ait apparu évident qu’aujourd’hui, jour de commémoration de l’armistice de la Première Guerre Mondiale. C’est un essai éminemment français dans ses références et offert aux Français : je me demande bien ce que pourrait penser un étranger d’un tel texte … Un cri d’amour perdu ou éloigné car ce texte transpire par toutes ces pages les heures sombres pendant lesquelles il a été rédigé : une France bicéphale alternant entre De Gaulle ou Pétain, entre la résistance et la collaboration.

Et maintenant, qui a envie de s’enraciner ?

Et pour la bonne bouche, une citation :

Une anecdote hindoue raconte qu’un ascète, après quatorze années de solitude, revint voir sa famille. Son frère lui demanda ce qu’il avait acquis. Il l’emmena jusqu’à un fleuve et traversa à pied sous ses yeux. Le frère héla le passeur, traversa en barque, paya un sou et dit à l’ascète : « Cela vaut-il la peine d’avoir fait quatorze ans d’efforts pour acquérir ce que je peux me procurer pour un sou ? » C’est l’attitude du bon sens.

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Conditions premières d'un travail non servile



"Exister n'est pas une fin pour l'homme." S'il faut travailler seulement pour subsister, le travail n'est pas animé par le désir. Et travailler pour ne pas mourir, c'est l'esclavage. C'est le point de départ de l'analyse de Simone Weil : " ...dans la nature humaine, il n'y a pas pour l'effort d'autre source d'énergie que le désir. (...). Et il n'appartient pas à l'homme de désirer ce qu'il a." Il faut une finalité autre pour le travailleur.



Ses réflexions s'appuient sur l'expérience de travail en usine qu'elle a connue en 1934-35, après s'être mise volontairement en congé de l'enseignement (cette expérience est relatée dans la seconde partie de ce Carnet de L'Herne). La finalité ne s'accroche nulle part dans le travail en usine. "La chose fabriquée est un moyen : elle sera vendue. Qui peut mettre en elle son bien ? La matière, l'outil, le corps du travailleur, son âme elle-même, sont des moyens pour la fabrication. La nécessité est partout, le bien nulle part."



Supporter ce vide n'est possible qu'à une série de conditions décrites par Weil qui adopte une position tranchée sur l'idée de révolution : "L'absurdité est que, dans ce rêve, la domination serait aux mains de ceux qui exécutent et qui par suite ne peuvent pas dominer." Si la révolution en tant que remède à l'injustice sociale est saine, elle est un mensonge si elle se dresse contre la condition même des travailleurs. Weil assimile la révolution à un opium, comme Marx l'a fait pour la religion.



Que propose la philosophe ? La beauté rend la monotonie supportable par sa lumière d'éternité. "Puisque le peuple est contraint de porter tout son désir sur ce qu'il possède déjà, la beauté est faite pour lui et il est fait pour la beauté." Voici la charnière où s'articule la pensée de Simone Weil : si la beauté et la poésie sont nécessaires au peuple comme le pain, elle n'a qu'une source, Dieu, et elle ne peut être que religion. La faim de finalité des travailleurs ne peut être rassasiée que par des valeurs spirituelles.



Par suite, l'athée pourra quitter la réflexion. Je crois qu'il s'agirait d'une erreur. Chacun sait croire en une valeur qu'il porte assez haut pour permettre à ce texte de conserver sa portée.



La démonstration débouche sur la notion essentielle d'attention, d'abord discursive (basée sur le raisonnement) puis intuitive (sensitive, de l'esprit) qui débouche sur l'art, le beau et les découvertes scientifiques lumineuses. Travail manuel et travail intellectuel sont liés par le point commun d'une transcendance acquise grâce cette attention située au-dessus de toute obligation sociale.

Les souffrances dues à une certaine subordination et une certaine uniformité du travail ne dégradent pas. Mais les circonstances du travail qui excluent toute source d'une forme de poésie supérieure sont mauvaises. La première étant la souffrance physique, hors celle qui est manifestement inévitable par les nécessités du travail.

D'autre part, le superflu n'est pas à sa place, selon Weil, dans la vie ouvrière. "Il est possible de sortir de la condition ouvrière ou paysanne par manque d'aptitudes professionnelles ou par la possession d'aptitudes différentes, mais pour ceux qui y sont, il ne devrait y avoir de changement possible que d'un bien-être étroitement borné à un bien-être large ; il ne devrait y avoir aucune occasion pour eux de craindre tomber à moins ou parvenir à plus." La sécurité dans les deux directions. On retrouve le superflu, aigu de nos jours.



L'écrit proposé dans la seconde partie est intitulé "Expérience d'une vie d'usine". On trouve un développement, parfois effrayant, de ce que représentait le travail à la chaîne dans les années 30. La question se pose de l'actualité de cette analyse. Les conditions de travail ont beaucoup évolué. On ne travaille plus chez VW ou Renault aujourd'hui comme chez Alsthom en 1934. Pourtant.



Éviter, surtout, de travailler avec dégoût. Actuellement, est-on sûr que ceux qui fabriquent dans l'ombre vêtements et objets, de luxe ou pas, en Europe ou ailleurs, sont exclus des conditions décrites par Simone Weil ? À quelle source puise-t-on encore les moteurs de l'attention ?



Remerciements aux éditions de L'Herne et à Babelio pour la découverte de ces textes.


Lien : http://www.christianwery.be/..
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L'enracinement

«La lecture est une drogue incomparable, parce que, plus qu'à la médiocrité de notre vie, elle nous permet d'échapper à la médiocrité de notre âme.»

Nicolás Gómez Dávila



L'enracinement est un livre inachevé, assez foutraque. Il mélange programme politique pour l'après Libération, analyse historico- philosophique et mysticisme chrétien. Une lecture à priori peu faite pour plaire à un sceptique. Et pourtant...



Ce livre est traversé par l'intelligence intuitive et la sensibilité: il est le reflet de la personnalité de Simone Weil, de son rapport au monde, de sa morale. Une pensée haute, pure, exigeante, intransigeante, fruit d'une sensibilité extrême, fondée sur le respect et l'amour, sur une compassion totale. Simone Weil, l'intellectuelle mystique, me fait penser à Louise Michel, la militante anarchiste. Une même éthique, une même morale, un même sacrifice de soi. Leurs différences, notamment politiques, ne sont que des bagatelles. Toutes deux sont admirables, et si peu d'êtres le sont.

Je ne retient pas tout, je n'approuve pas tout. Une telle morale, appliquée au domaine politique, peut parfois être dangereuse. Trop utopique, trop absolue, pour ainsi dire pas assez humaine. Un ami de Stendhal disait à ce dernier: « Vous tendez vos filets trop haut. » Ce mot s'applique tout à fait à Simone Weil. Il n'empêche, on se prend à rêver que des politiques s'inspirent d'elle (aucune chance). En attendant, c'est nous qu'elle devrait inspirer.
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