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Critiques de Tirso de Molina (9)
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Le Trompeur de Séville et l'Invité de pierre

Tout le monde connaît le mythe de Don Juan, popularisé en français par la version de Molière (orthographié alors Dom Juan), mais moins nombreux sont ceux qui connaissent son créateur et sa version originale. Peut-être est-il intéressant de revenir à la source, à l’œuvre fondatrice par laquelle le mythe fut créé, l'un des rares mythes, d'ailleurs, pour lesquels nous ayons une date d'apparition et un auteur clairement désignés.



Même s'il subsiste une (très) légère incertitude sur l'identité de l'auteur de ce Trompeur de Séville et l'Invité de Pierre (parfois traduit aussi en français sous le titre L'Abuseur de Séville et le Convive de Pierre), presque tout le monde s'accorde à dire qu'il s'agit bien d'une pièce de Tirso de Molina, datant du début du XVIIème siècle, vraisemblablement 1630. (Notez qu'il s'agit ici de la pierre au sens de la roche et non d'un quelconque prénom.)



J'avoue ne pas bien comprendre pourquoi cette pièce originale, originelle même, ainsi que son auteur, demeurent si peu connus dès lors que l'on franchit les frontières de l'Espagne, car je trouve cette pièce vraiment très bien faite : bonne construction, bon rythme, personnages aux tempéraments marqués, propos osé et novateur pour son temps.



De plus, et c'est un point non négligeable, notamment par rapport à la version remaniée de Molière, on sait ici parfaitement qui est le commandeur et d'où vient sa statue. Concernant Molière, plus jeune, j'avais toujours du mal à comprendre comment ce commandeur intervenait, qui il était et pourquoi il était là. Je trouvais ce passage mal ficelé et un peu abscons.



Ici, enfin, c'est clair. le commandeur est le père d'une des femmes abusées par Don Juan, que celui-ci, pris la main dans le sac, a été obligé de tuer pour sauver sa peau. (Au passage, vous remarquerez que comme le veut la tradition espagnole, on écrit Don Juan et non Dom Juan comme l'a fait Molière par la suite, bien que l'origine latine du mot supposerait effectivement un M.)



Le roi d'Espagne, très affecté par la mort de son commandeur, a fait édifier sur son tombeau une statue le représentant. Et Don Juan n'hésite pas à profaner ce tombeau et à se moquer de cette statue de pierre et de ce qu'elle représente. On comprend donc mieux l'intervention et la présence de ce personnage surnaturel. Reste à savoir ce qu'il représente.



L'histoire débute dans le sud de l'Italie, à Naples, où Don Juan Tenero se rend auprès de son oncle, ambassadeur du roi d'Espagne auprès du roi de Naples. le père de Don Juan, Don Pedro Tenero, est lui-aussi un personnage important du royaume d'Espagne, puisqu'il est une sorte de ministre de la justice et plus ou moins le numéro 2 de l'exécutif. C'est un homme loyal et très estimé du roi. Il n'a qu'un défaut, c'est qu'il ne sait rien refuser à son turbulent fils Don Juan.



Lequel Don Juan qui, en plus du statut social, est doté d'une gueule d'ange à faire succomber toutes ces dames. Son courage et son sens de l'honneur n'ont rien à envier au restant de l'aristocratie, en revanche, son sens de la morale (notamment religieuse) vis-à-vis des femmes n'est pas des plus reluisants — on peut même avancer sans fard qu'il est plus bas que tout.



Disons, pour être précise, qu'il saute sur tout ce qui bouge et qu'il n'hésite pas, pour accéder à ses fins, à mettre quiconque dans l'embarras d'une situation scabreuse, voire, de mettre la vie d'autrui en danger.



À peine arrivé en Italie, notre brave Don Juan Tenero commence par déflorer une belle dame de l'aristocratie, la duchesse Isabela, et provoque de ce fait un vrai petit scandale diplomatique, si bien qu'il est obligé de regagner sa terre d'Espagne manu militari pour échapper aux poursuites.



Qu'il fasse naufrage et qu'il doive la vie et l'hospitalité à une villageoise de la côte ne l'empêche pas de lui promettre sa main afin de la posséder et de s'éclipser l'heure suivant comme le dernier des voleurs. (De même la scène du bord de mer s'explique difficilement chez Molière, ici, elle a une véritable explication et raison d'être, ce n'est pas juste un prétexte.)



Bref, toutes y passent : nobles, paysannes, riches, pauvres ! En outre, en garçon bien élevé, il n'hésite pas non plus à forcer des dames non consentantes où à embrocher des gentilshommes qui seraient venus leur porter secours. C'est ce qui arriva à la ravissante et distinguée Doña Ana, fille du commandeur Don Gonzalo de Ulloa. Vous en savez probablement bien assez quant aux nœuds de l'intrigue.



Si l'on examine maintenant la personnalité de Don Juan, elle est, reconnaissons-le, fort intéressante. Voilà quelqu'un d'authentiquement abject — quoique, sur différents aspects, ce point soit discutable — mais qui a le courage de ses convictions. C'est un raisonneur, un calculateur, un cartésien, un scientifique, presque, qui ne se laisse aller à aucune superstition, même quand son pleutre de valet, Catalinón, lui prédit les pires châtiments célestes.



Mieux que cela, il ne se laisse pas démonter lorsque la statue du commandeur vient à son rendez-vous qu'il lui avait donné par boutade. Bref, Don Juan est un homme moderne, truqueur et non croyant, qui ne s'embarrasse pas trop de préjugés moraux et des moyens pour arriver à ses fins, comme doivent l'être tous les hauts personnages de la politique, de la finance, du business actuels s'ils veulent réussir.



C'est cela que Tirso de Molina dénonce, la montée en puissance de ces amoraux aux plus hautes fonctions de la société, aux plus belles places de l'aristocratie.



Selon lui, l'ultime rempart à ses hommes ne sera jamais la justice des hommes, mais bien ce qui leur reste de conscience, qui se matérialise sous les traits d'un commandeur de pierre et qui dit à ce qui reste de fragments de pureté dans le cœur de Don Juan quelque chose du genre : " Es-tu fier de tout ce que tu as fait ? "



Une pièce que je trouve vraiment magistrale et qui, bien que globalement dévoyé par rapport au projet littéraire de son auteur, justifie pleinement l'avènement d'un mythe de Don Juan qui se répercute de siècle en siècle et que chacun réaménage à sa sauce, entre autres, Molière, Mozart, Byron, Pouchkine, Balzac, Montherlant, etc. (pour ne citer que ceux-là).



Lisez donc sans crainte cette toute première — et selon moi très réussie — première mouture de Don Juan, sans toutefois vous laisser tromper ni abuser par cet avis même pas sévillan, c'est-à-dire, bien peu de chose.
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Théâtre espagnol, tome II : Le Séducteur de Sévil..

Vous vous demandez peut-être qui sont ces deux gugusses espagnols morts et enterrés depuis bientôt quatre siècles. Juan Ruiz de Alarcón y Mendoza ? Tirso de Molina ? Des noms dont jamais, jamais personne ne m'a parlé en France, d'illustres inconnus. Et pourtant...



Si je vous dis Corneille, Molière, là, d'un coup, votre oeil s'égaye, vous vous dites, ça c'est du français, c'est du grand théâtre classique bien de chez nous (je m'adresse aux Français et m'excuse auprès des autres francophones de par le monde). le Cid ? ça vous parle ? Eh bien c'est juste une transcription française d'une pièce espagnole de Guillén de Castro. Dom Juan ? vous vous rappelez ? juste une transcription également de Tirso de Molina sus-mentionné. Le Menteur ? ça vous dit quelque chose ? là encore, juste une transcription de Ruiz de Alarcón.



Mais je ne lui jette pas la pierre à Corneille, d'avoir si abondamment puisé dans le répertoire espagnol car La Vérité Suspecte (La Verdad Sospechosa) méritait bien une transcription française et se fut Le Menteur. De même pour le Séducteur de Séville (El Burlador de Sevilla y convidado de piedra) qui renaîtra en France sous la plume de Molière en tant que Dom Juan.



Avec La Vérité Suspecte, on est dans de la comédie à la frontière de la tragi-comédie. En revanche, avec le Séducteur de Séville, on est dans de la tragi-comédie à la frontière avec la tragédie. le siècle d'or espagnol a vu fleurir un théâtre bien plus nuancé et riche que ce qui s'était fait auparavant. En ce sens, seul le théâtre élisabéthain peut soutenir la comparaison avec celui-ci, tant le niveau de ces Comedias est élevé.



Dans La Vérité Suspecte, Ruiz de Alarcón fustige, comme vous pouvez vous en douter, l'art du mensonge, malheureusement si répandu aujourd'hui comme hier et même parmi les plus hautes strates de la société. Ici, Don García a tout pour plaire : jeune, courageux, bien né. Les femmes devraient se bousculer pour s'éprendre de lui mais, le beau Don García ment comme il respire, au grand dam de son père, le très noble et très estimé Don Beltrán.



Du coup, Jacinta et Lucrecia, deux belles aristocrates à marier, hésitent à s'engager auprès de Don García tant elles ont pu surprendre de mensonges dans sa bouche. À telle enseigne que, même quand il dit la vérité, celle-ci paraît suspecte, d'où le titre qui est une forme sophistiquée de la formule crier au loup. Cependant, soucieuse de ne pas vous alerter sans raison, j'aime autant vous laisser découvrir le dénouement de l'intrigue par vous-même.



Quant au Séducteur de Séville de Tirso de Molina, j'avoue ne pas bien comprendre pourquoi cette pièce originale, originelle même, ainsi que son auteur sont si peu connu dès que l'on franchit les frontières de l'Espagne car je trouve cette pièce vraiment très bien faite : bonne construction, bon rythme, personnages aux tempéraments marqués, propos osé et novateur pour son temps.



De plus, et c'est un point non négligeable, notamment par rapport à la version remaniée de Molière, on sait ici parfaitement qui est le commandeur et d'où vient sa statue. J'avais toujours du mal à comprendre, plus jeune, comment ce commandeur intervenait, qui il était et pourquoi il était là. Je trouvais ce passage mal ficelé et un peu abscons. Ici, enfin, c'est clair.



Le commandeur est le père d'une des femmes abusée par Don Juan, que celui-ci, pris la main dans le sac, a été obligé de tuer pour sauver sa peau. (Au passage, vous remarquerez que comme le veut la tradition espagnole, on écrit Don Juan et non Dom Juan comme l'a fait Molière par la suite.)



Le roi d'Espagne, très affecté par la mort de son commandeur, a fait édifier sur son tombeau une statue le représentant. Et Don Juan n'hésite pas à profaner ce tombeau et à se moquer de cette statue de pierre et de ce qu'elle représente. On comprend donc mieux l'intervention et la présence de ce personnage surnaturel. Reste à savoir ce qu'il représente.



L'histoire débute dans le sud de l'Italie, à Naples, où Don Juan Tenero se rend auprès de son oncle, ambassadeur du roi d'Espagne auprès du roi de Naples. le père de Don Juan, Don Pedro Tenero, est lui-aussi un personnage important du royaume d'Espagne puisqu'il est une sorte de ministre de la justice et plus ou moins le numéro 2 de l'exécutif. C'est un homme loyal et très estimé du roi. Il n'a qu'un défaut, c'est qu'il ne sait rien refuser à son turbulent fils Don Juan.



Lequel Don Juan qui, en plus du statut social, est doté d'une gueule d'ange à faire succomber toutes ces dames. Son courage et son sens de l'honneur n'ont rien à envier au restant de l'aristocratie, par contre, son sens de la morale (notamment religieuse) vis-à-vis des femmes est plus bas que tout.

Disons même qu'il saute sur tout ce qui bouge et qu'il n'hésite pas, pour accéder à ses fins, à mettre quiconque dans l'embarras d'une situation scabreuse, voire, de mettre la vie d'autrui en danger.



À peine arrivé en Italie, notre brave Don Juan Tenero déflore une belle dame de l'aristocratie, la duchesse Isabela, et provoque un vrai petit scandale diplomatique si bien qu'il est obligé de regagner sa terre d'Espagne manu militari pour échapper aux poursuites. Qu'il fasse naufrage et qu'il doive la vie et l'hospitalité à une villageoise de la côte ne l'empêche pas de lui promettre sa main afin de la posséder et de s'éclipser l'heure suivant comme le dernier des voleurs. (De même la scène du bord de mer s'explique difficilement chez Molière, ici, elle a une véritable explication et raison d'être, ce n'est pas juste un prétexte.)



Toutes y passent : nobles, paysannes, riches, pauvres ! En outre, il n'hésite pas non plus à forcer des dames non consentantes où à embrocher des gentilshommes qui seraient venus leur porter secours. C'est ce qui arriva à la ravissante et distinguée Doña Ana, fille du commandeur Don Gonzalo de Ulloa. Vous en savez probablement bien assez quant aux noeuds de l'intrigue.



Si l'on examine maintenant la personnalité de Don Juan, elle est, reconnaissons-le, fort intéressante. Voilà quelqu'un d'abject — quoique, ce point soit discutable — mais qui a le courage de ses convictions. C'est un raisonneur, un calculateur, un cartésien, un scientifique, presque, qui ne se laisse aller à aucune superstition, même quand son pleutre de valet, Catalinón, lui prédit les pires châtiments célestes.



Mieux que cela, il ne se laisse pas démonter lorsque la statue du commandeur vient à son rendez-vous qu'il lui avait donné par boutade. Bref, Don Juan est un homme moderne, truqueur et non croyant, qui ne s'embarrasse pas trop de préjugés moraux et des moyens pour arriver à ses fins, comme doivent l'être tous les hauts personnages de la politique, de la finance, du business actuels s'ils veulent réussir.



C'est cela qu'aussi bien Ruiz de Alarcón que Tirso de Molina dénoncent, la montée en puissance de ces menteurs ou amoraux aux plus hautes fonctions de la société, aux plus belles places de l'aristocratie.



Selon Tirso de Molina, l'ultime rempart à ses hommes ne sera jamais la justice des hommes, mais bien ce qui leur reste de conscience, qui se matérialise sous les traits d'un commandeur de pierre et qui dit à ce qui reste de fragments de pureté dans le coeur de Don Juan quelque chose du genre : « Es-tu fier de tout ce que tu as fait ? »



Il y a donc beaucoup de points communs entre ces deux pièces judicieusement associées dans ce recueil. Deux pièces très plaisantes, surtout le Séducteur de Séville que je trouve vraiment magistrale et qui justifie pleinement l'avènement d'un mythe de Don Juan qui se répercute de siècle en siècle et que chacun réaménage à sa sauce, entre autres, Molière, Mozart, Byron, Pouchkine, Balzac, Montherlant, etc.



Lisez donc sans crainte ces deux moutures originelles, — selon moi très réussies — mais souvenez-vous que même la vérité est parfois suspecte et que finalement, elle ne signifie parfois pas grand-chose.

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Le Trompeur de Séville et l'Invité de pierre

Don Juan est une pièce de Molière que j'adore et j’étais curieuse de découvrir cette version espagnole écrite bien avant celle de l'auteur français. J'ai en plus la chance d'avoir une version bilingue (chez Folio) qui nous offre la possibilité de lire la pièce dans la langue originale avec sur la page d'en face la traduction. Cette dernière est d'ailleurs a souligné car je l'ai trouvé très fidèle même si mon espagnol est quasi nul maintenant que j'ai quitté le lycée depuis pas mal d'années.....



L’édition folio offre aussi une multitude d'explication concernant le texte car c'est une pièce très complexe et l'auteur fait souvent référence a des points historiques que l'on ne connait pas toujours. Les notes sont donc très utiles et surtout j'ai apprécié de les avoir sous les yeux et de ne pas avoir besoin d'aller dans un dossier tout a la fin du livre.



Le personnage de Don Juan est très drôle, et beau parleur (pas seulement parleur d'ailleurs) puisqu'il fait succomber toutes les femmes et aucune ne résiste a son charme très longtemps. Bref il arrive toujours a ses fins quitte a provoquer un scandale.



C'est une pièce très agréable a lire, pleine de rebondissements, drôle et qui se lit très bien que je vous recommande.
Lien : http://missmolko1.blogspot.i..
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Le Trompeur de Séville et l'Invité de pierre

Voici l'œuvre qui a inspiré Molière. Les chercheurs s'accordent à penser, même si un léger doute subsiste, que le moine et le dramaturge espagnol Tirso de Molina en est l'auteur.

Une pièce à lire en version originale si vous le pouvez afin d'en apprécier tout le sel.

Ici, Don Juan ne se contente pas de mentir et de tromper son monde, c'est un violeur dénué de morale et d'humanité qui, pourtant, se dit croyant...
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Le Trompeur de Séville et l'Invité de pierre

L'Abuseur de Séville donne à lire les origines de Don Juan. Si on devait tenter les rapprochements avec la littérature française, ce séducteur a plus à voir avec Renart qu'avec le Don Juan de Molière : c'est un homme qui trompe, qui manipule même ses amis qu'il n'hésite pas à humilier voire à condamner. Ce n'est pas le libertin que présente Molière : le personnage de Molina se joue un peu des esprits, ne semble pas craindre Dieu (mais il veut néanmoins se confesser...) mais c'est surtout sur le plan charnel qu'il est présenté.

La pièce de Tirso de Molina est aussi bien plus sombre que celle de Molière : la situation de Don Juan ne sent le roussi qu'à la fin et son valet Catherinon s'inquiète de plus en plus des abus de son maître ; il n'y a donc pas cette légèreté que l'on trouve chez Molière et qui tourne en ridicule le séducteur (je pense à la fameuse scène avec Charlotte et Mathurine).



Enfin, l'intrigue est la même : un homme abuse des femmes (vierges, hein, sinon c'est moins drôle). Ces dernières se donnent à lui en pensant qu'il les épousera : il le promet à chaque fois ( Aminte, Thisbé), ou bien en pensant qu'il s'agit de leur amant ou futur mari qui les visite un peu avant la noce (Dona Anna, Dona Isabelle). Toutes ont à coeur leur honneur flétri et demandent réparation. Mais contrairement à Molière, la pièce est beaucoup plus misogyne et mouline les stéréotypes de l'époque tout en reflétant une situation sociale espagnole avérée (dixit la préface). En effet, les amantes ne vérifient pas la tête de l'homme qui se glisse dans leurs draps (mais il en a été de même pendant très longtemps en France, où le mari ne voyait qu'à peine le corps de sa femme) et les hommes se contentent de dire que les femmes sont inconstantes. Par ailleurs, les femmes ont à peine le droit de parole et aucune Elvire pour donner une vision féminine très moderne.



Enfin, sur la dramaturgie : les unités française de temps et lieu ne sont évidemment pas respectées dans cette pièce espagnole. Le baroque affleure d'autant à la fin de la pièce, lorsque le Commandeur propose un repas à Don Juan que n'auraient pas renié les sorcières de Macbeth.

Mais pour un lecteur habitué aux pièces classiques, certains éléments font sourire. Ainsi, Don Juan abandonne le Commandeur mourant. A peine a-t-il expiré que "des valets entrent en scène et emportent son cadavre". Bon, manifestement, les spectateurs n'ont pas de temps à perdre avec des pleurs, des cris de surprise ou de vengeance à la découverte du corps. C'est assez surprenant....



Pièce intéressante pour saisir l'évolution du mythe et comprendre les apports de chaque réécriture.



je vais un peu plus loin, pour ceux qui veulent bien me lire !

je ne connais pas la littérature espagnole du XVIIème siècle, mais j'ai un peu de mal à comprendre la position du préfacier, pour qui don Juan est "le châtiment des femmes" (titre que se donne effectivement le personnage). En somme, en ce siècle où un pouvoir matriarcal émerge et où les femmes se montrent plus légères, les femmes n'auraient que ce qu'elles méritent. Le préfacier écrit notamment, pour le cas de Dona Anna : "Comment Don Juan n'éprouverait-il pas l'envie de précéder Mota ? Tout l'y pousse et son tempérament et sa forfanterie et son souci de punir les femmes promptes à offrir leurs corps." (p.16) Mais jamais Don Juan ne justifie ses actes de la sorte, ni pour lui-même, ni à son valet, ni à son père. Il se contente de voir, de désirer et d'obtenir ! (Veni, vidi, vici !).

Le préfacier note cependant que la justice que veut exercer Don Juan "s'exerce à la façon de représailles et elle aboutit à remplacer l'équité par la méchanceté. Moraliste au départ, don Juan finit immoraliste." (p.12) Encore une fois, à aucun moment, don Juan n'essaie de justifier ses actes, j'ai donc beaucoup de mal à comprendre qu'il ait voulu faire oeuvre de justice.... J'arrête là ma critique ! ceux qui voudraient m'éclairer peuvent m'envoyer un mail !
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Le Trompeur de Séville et l'Invité de pierre

J'avais envie depuis assez longtemps de lire cette version de Don Juan (et je reste assez curieuse d'en lire encore d'autres) et c'est maintenant chose faite. Contrairement à la pièce de Molière qui reprend la même trame narrative, ce n'est pas une comédie classique dans les règles de l'art français et c'est bien mieux ainsi. Les personnages sont bien moins prudes et "bienséants" que chez Molière: les femmes n'ont que peu à faire de l'autorité du père et n'hésitent pas à se donner avant leur mariage à leurs beaux amants. Don Juan, l'Abuseur de Séville, se veut un vengeur face à cette montée de l'autorité féminine et se joue d'elles en se faisant passer pour leur amant par exemple, mais peu à peu, il dépasse les limites par ses promesses de mariage non tenues sur le nom de Dieu. C'est avant tout pour cette raison qu'il est puni à la fin, et non pas tellement à cause de son péché de luxure auquel se livrent d'autres personnages. La morale est donc présente aussi, mais différente et plus acceptable pour moi que celle qu'on trouve chez Molière.

Une belle découverte.
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Le Trompeur de Séville et l'Invité de pierre

La première oeuvre qui présente la légende de Don Juan sous une forme artistique et crée le mythe qui connaîtra dans la littérature universelle diverses incarnations;

Le Don Juan de Tirso est plus proche du Don Juan de Mozart que de celui de Molière; une sensualité insatiable le domine et c'est le pouvoir de la chair qui se rebelle contre Dieu..

Une oeuvre intéressante, aux sources du mythe de Don Juan..
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Le Trompeur de Séville et l'Invité de pierre

Le Don Juan de Tirso Molina nous amène à la genèse du Mythe et ce premier Don Juan est assez abject et sa vie ne consiste qu'à séduire, séduire, séduire sans se poser de question et sans respecter les femmes bien sûr mais aussi sans ce soucier de l'Honneur qui anime à cette époque la noblesse quitte à passer par l'épée tout esprit chagrin.

Sans craindre ni Dieu ni diable il devra pourtant , et dans un laps de temps beaucoup plus court que ce qu'il pouvait penser , répondre de ses vilenies.
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Le Trompeur de Séville et l'Invité de pierre

Le premier Don Juan est celui de Tirso de Molina, un moine espagnol.



En 1630, il présente Le Trompeur de Séville et le Convive de pierre, une pièce mettant en scène un séducteur, Don Juan Tenorio. Le personnage aime se déguiser pour séduire les femmes et ne respecte pas les morts. Il se repent trop tard devant l’apparition d’une statue mouvante, celle d’un Commandeur qu’il a autrefois tué après avoir séduit sa fille.



Ainsi naissait le mythe de Dom Juan, abuseur et usurpateur qui ne souhaite que jouir de l’existence sans se soucier des conséquences.



L’œuvre sera adaptée par Wolfgang Amadeus Mozart qui créa son célèbre Don Giovanni à Prague le 29 octobre 1787.



Avis :

Cette pièce de portée morale eut un énorme succès et l’œuvre de Tirso de Molina inspira de nombreux artistes au fil des siècles, Molière, Baudelaire ou encore Corneille et Pouchkine…

Un grand classique et surtout un bel avertissement à tous ceux qui pourraient enfreindre les lois – divines ou humaines.




Lien : https://delicesdelivres.go.y..
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