La poignée de la porte est moite
La poignée de la porte est moite. Un rayon s’y
reflète comme un sourire. Un lézard minuscule et
doré se faufile par la serrure. Vers l’extérieur. Le
panneau de bois transpire du parfum des fleurs et
du cri jouissif de la mésange.
J’ouvre la porte. Le bleu m’envahit. Entièrement.
Les courants d'air apportent les battements fragiles du dehors. Une musique : Lady sings the blues. Elle traverse les pièces de sa robe bleue. Sensuelle. Ses pieds nus frôlent à peine le dallage. Derrière son passage, les portes claquent. Ne reste qu'un parfum discret de gardénia.
L’ampoule de la lampe crépite
L’ampoule de la lampe crépite au bruit du
tonnerre. Ses motifs de feuilles rouges
tressaillent, se détachent et se mettent à
tournoyer dans l pièce. En vérité, ce sont des
zygaena filipendulae. Ils s’amusent à papillonner
les nuits d’orage. À se pendre au lustre du salon.
En laissant sur leur passage des fils transparentes
et lumineux.
Extrait 2
Au-dessus de la cheminée, le cri de Munch ne résonne plus.
Sa bouche ouverte a avalé trop de fumée. Même la chanson
de Tino Rossi ne fera pas revenir le Père Noël. Des fourmis
rouges grésillent dans la cendre à la recherche d’une forêt.
Des pissenlits dans les cheveux
Des pissenlits dans les cheveux. Une odeur
forte d’humus. La terre du géranium blanc se
soulève sous le poids des ongles. L’engrais salé
n’engraisse pas la plante ni le souvenir. Des
pissenlits dans les cheveux et dans l’assiette en
plastique. Des pissenlits au goût amer.
Dans le cadre du projet "Hair in the Wind", en soutien aux femmes d'Iran, proposé par l'artiste Antje Stehn, Lydia Padellec lit son poème "Cri incandescent des femmes debout".