Le récit est rétrospectif : dès le prologue, nous savons qu'un an a passé, que Manon va bien, qu'elle a pour la première fois des nouvelles de Lisa (qui donne son prénom au titre) et de Clémentine, qui était sa meilleure amie jusqu'à présent. Sa cousine Ambre est là aussi. Manon, en tout cas, semble vivre au coeur d'un foyer aimant, fille unique (elle a trois frères) proche de sa mère.
Au début, j'ai cru que l'homosexualité serait au coeur de l'intrigue. Oui et non, ai-je envie de dire. Manon est attirée par Lisa, elle en est plus ou moins amoureuse, jusqu'au jour où elle découvre, à la piscine, que le bel androgyne est une jeune fille. Et puis, cela s'arrête là. Manon veut désormais "son amitié" et ne s'interroge pas plus avant sur ce qu'elle a ressenti. le changement de classe de Lisa (ah ! ces méchants profs qui vont changer les élèves de classe parce qu'ils ont eu un soucis avec eux – du moins, c'est l'opinion de Manon) leur permet de se rapprocher jusqu'à ce que Lisa se confie (un peu) à elle.
La suite de l'intrigue est basée sur le fait que les parents les laissent partir en vacances les quatre amies/cousines, avec pour seule chaperon l'aînée des cousines, à peine majeure. Et là, j'entends une ancienne chanson de
France Gall (époque yéyé) : mes premières vraies vacances, c'est à dire des vacances sans les parents. Alors oui, ils ont tout prévu, sauf que la responsabilité n'est pas forcément un mot que les tout jeunes adultes connaissent, surtout quand elles ont été très protégées et ont envie de s'encanailler un peu. Puis, si les ennuis commencent, il est hors de question de prévenir ses parents – elles sont tout à fait capables de faire face à ce qui leur arrive. Jusqu'à ce que ce soit vraiment trop tard.
Constat assez pessimiste que ce roman, puisqu'il semble impossible d'être insouciantes. Les jeunes filles le paient très cher, au propre comme au figuré. Elles ont tout de même beaucoup de chance, dans ce récit, que la justice fasse son travail, quel que soient les drames ou les tragédies survenues. Je regrette, finalement, que les garçons soient très en retrait dans ce court roman, ou soient présentés sous un jour négatif. le seul doté de qualités ne fait qu'une brève apparition et à cause de cela, me paraît peu crédible. L'ellipse d'un an, pendant lequel Manon, la narratrice, s'est reconstruite, aurait été intéressante à raconter, tout comme le périple de Lisa, tout comme la cause de la transformation de Clémentine, fille à papa qui a pris conscience que sa riche famille ne se préoccupait pas tant que cela d'elle.
Les yeux de Lisa est un roman trop court pour l'ensemble des thèmes qu'il brasse. La collection auquel il appartient le veut sans doute. Certes, il offre la possibilité d'ouvrir un débat entre parents et jeunes lecteurs – encore faut-il que les parents en prennent le temps.