Un bel ouvrage très documenté et pointu, qui trace une rétrospective détaillée de l'histoire des serres depuis le XVIIe siècle, avec force détails et schémas architecturaux. Il s'adresse à mon sens à tous les jardiniers et horticulteurs passionnés, et ceux qui veulent connaître avec précision l'aboutissement d'années et d'années de recherches, essais, ainsi que d' échanges entre divers pays (de graines, de techniques, etc.) pour arriver à la maîtrise de la culture des plantes, légumes ou fleurs de tous horizons. Pour cela, il a fallu maîtriser non seulement la chaleur, le soleil, mais aussi le froid et l'eau, ainsi que les matériaux des constructions.
De nos jours, les serres s'intègrent également dans des lieux touristiques, à l'instar d'aéroports, centres de loisirs aquatiques ou autres, pour notre plus grand plaisir.
On n'oubliera pas que, de toute façon, l'adaptation d'une plante exotique dans une nouvelle contrée nécessite plusieurs générations.
S'il manque des photos concernant les orangeries et jardins d'hiver qui ont été détruits, les schémas détaillés pallient cette absence. Par contre, j'aurais aimé plus de photos de serres actuelles, afin de rêver un peu plus ! Je me suis heurtée à trop de technicité, mais c'est probablement l'objectif de l'auteur d'être très spécialisé.
La magnifique couverture avait orienté mon choix, aussi je remercie les éditions Quæ ainsi que Babelio pour cette opération Masse critique.
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L'apparition des serres a coïncidé avec la volonté des hommes de conserver hors de leurs chauds climats d'origines, dans des édifices ad hoc, à commencer par les orangeries, des plantes d'agrément ou aux fruits comestibles. Sous l'impulsion des jardiniers, architectes et techniciens ont multiplié les trouvailles d'ingénierie pour y parvenir, en ne cessant d'améliorer le bâti et les systèmes de chauffage, chacun s'inspirant aussi des expérimentations des pays voisins. « Une histoire des serres » s'intéresse de près à cet aspect très technique, ce qui n'est pas étonnant puisque l'ouvrage est paru aux éditions Quæ, qui affichent leur volonté de publier « Des livres au coeur des sciences ». En revanche, faute d'avoir pu feuilleter l'ouvrage puisqu'il s'agissait d'une masse critique, j'avais minimisé la part (conséquente) que ces recherches techniques et leurs résultats, dûment détaillés, occuperaient dans le livre.
L'ouvrage nous décrit ainsi l'évolution des serres, directement liée à celle des progrès technologiques, de leur émergence à nos jours. L'étude est agrémentée d'une belle iconographie, allant des documents d'époque (croquis et dessins d'études, illustrations et tableaux) aux photos.
Sans s'y attarder, « Une histoire des serres » évoque aussi l'aspect social de certaines de leurs implantations : prolongeant les demeures, quand elles ne représentent pas de superbes bâtiments ornant les parcs des châteaux, les serres permettaient en effet aux classes aisées de bénéficier d'un jardin d'hiver propice à l'évasion ou à la tenue de réceptions. Cet usage s'est ensuite démocratisé avec, de nos jours, la multiplication des vérandas.
In fine, l'auteur s'intéresse aux serres actuelles, entre autres à celles qui, loin de créer de la beauté, tant par leur esthétique que par l'agencement des plantes qu'elles abritent, ne visent qu'à intensifier les productions artificielles car hors sol de fruits et légumes, tout en détruisant leur lieu d'implantation.
« Une histoire des serres » est un beau livre qui devrait satisfaire les curieux souhaitant aller au-delà de la simple contemplation de merveilles architecturales, en s'interrogeant sur la genèse et le développement de leurs installations et fonctionnements.
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Il faut posséder les fruits du plaisir, comme les oranges, les figues fraîches, le raisin de table..., puis, au cours du XVIIIe siècle, le melon, l'ananas, la banane...,sans parler des asperges en hiver ou des pêches au printemps. Or seule une production locale permet de garnir les tables de la classe dominante, qui se doit de posséder les jardiniers compétents pour conduire des cultures parfois difficiles et délicates.
Une grande partie des avancées technologiques de suivis climatiques et agronomiques fins n’a réellement d’intérêt que pour les plantes dont on connaît avec précision les besoins en température, humidité, intensité lumineuse…et ce, à chacun de leurs stades physiologiques. Or, dans les serres de collection ou de présentation, la multiplicité des genres et espèces, des origines géographiques, la diversité de leur stade biologique et l’absence quasi-totale de connaissance de leurs besoins rendent peu efficientes de telles installations sophistiquées.
À l’exception des serres courbes, entièrement reconstruites entre 1995 et 2000 sur un projet de l’architecte français Paul Chemetov, les deux pavillons du Jardin des plantes, conçus par Charles Rohault de Fleury, sont donc, en dépit des modifications effectuées lors de leur restauration en 1874 suite aux bombardements prussiens de 1871, les plus anciennes serres « modernes » encore debout et abritant des collections végétales vivantes.
Ces édifices [orangeries] deviennent progressivement autant des œuvres architecturales allant du style classique à la chinoiserie, au service de la beauté et de la vie sociale, que des lieux de culture et de protection pour les plantes exotiques, rares et fragiles.
C’est ce mode de transmission en grande partie orale et née de la pratique que certains auteurs appellent le « savoir silencieux », savoir qui fait toute la force et la faiblesse de la profession de jardinier.