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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
« Je m'étonne parfois que nous puissions être frivoles […]. Comme si l'on pouvait tuer le temps sans en aucune manière meurtrir l'éternité ».
Tel un mantra ces propos de Henry Thoreau semblent animer les pensées d'Edward Abbey qui nous livre un récit qui va bien au-delà de la simple jouissance d'une nature encore préservée, bien au-delà d'un simple texte de Nature Writing à la sauce américaine.
Un récit structuré en onze nouvelles, tournant autour de la rivière, écrites dans les années 1980 et éditées pour la première fois en français en 2021, par les formidables Editions Gallmeister, dans lequel la Nature se veut engagement.

La rivière est supérieure au lac, écrit Henry Thoreau dans son Journal, de par son influence libératrice. Libératrice elle l'est pour Edward Abbey dont la descente en canoë avec une poignée d'amis, en ce jour d'élection, sur la Green permet en effet de libérer pensées, songes, observations et méditations. Flot cristallin de réflexions personnelles, comme si Abbey nous parlait directement, tasse de café ou pagaie en main, réflexions sous le parrainage de Thoreau. Qu'aurait pensé ce maitre à penser, iconoclaste et indépendant, des problématiques d'aujourd'hui (c'est-à-dire celles du début des années 80) ? Industrialisation, immigration, capitalisme, Abbey nous livre ses réflexions à l'ombre de celles de son maitre qui viennent clapoter et éclabousser son raisonnement. L'imprégner.

Certes, « En descendant la rivière » est un éloge à la nature observée lors de descentes sylvestres, souvent calmes, parfois fougueuses (comme dans les 5ème et 7ème nouvelles) de rivières à l'eau glacée, au coeur de canyons sauvages, de bivouacs sur les rives duquel faune et flore nous sont détaillées. Beautés qui ne manquent pas de faire éclore des réflexions existentielles. La Nature est-elle le symbole d'une réalité spirituelle supérieure qui se trouve au-delà et en dedans, ou La Nature est, tout simplement. C'est tout. « Et c'est plus que nous ne pouvons en comprendre » ?

« Dans le courant de la nuit, un cerf passe près de notre bivouac d'un pas nerveux. J'entends le bruit puis, un peu avant l'aube, lorsque je me lève, je vois ses délicates empreintes en forme de coeur. J'attise le feu et confectionne notre première cafetière de café de cow-boy noir et riche, et dans la solitude j'en bois la première tasse, en me réchauffant les mains sur l'émail brûlant. Les dernières étoiles disparaissent lentement, le ciel s'éclaircit, perçant la lueur verte de l'aube pour éclater dans la splendeur ignée du lever de soleil ».

Ce témoignage, c'est la conscience des moments de partage dans toute leur simplicité et leur bonheur, les repas par exemple, très souvent décrits avec appétit, dans le menu. Sous des airs gênés qu'il tente de cacher sous un vernis humoristique ou sarcastique, c'est un partage sensible d'instants beaux et éphémères. D'instants gourmands.

« Nous buvons et, assis au soleil sur le grès clair, nous déjeunons – tranches de pain noir, assez authentique, acheté dans une boulangerie bohème de Moab ; beurre de cacahuètes hippie tendance hardcore, lourd comme du béton humide, acheté dans une coopérative alimentaire beatnik de Durango, dans le Colorado (où vivent Teale et Corson) ; confiture de framboise ; et miel sauvage, épais comme de la graisse d'essieu, pour la lubrification oesophagienne ».

Mais « En descendant la rivière » c'est aussi, et surtout, un brulot. Un cri écologique que lance Abbey en prédicateur exaspéré par tout ce qui creuse, fore, excave les montagnes, épand du bitume, construit des barrages, mine à ciel ouvert, changeant les montagnes en taupinières « pour cette course de rats qu'est notre vie moderne ». Un brulot contre le pouvoir, le capitalisme qui ne cesse d'exploiter les hommes et les ressources, ce capitalisme dont le rythme s'accélère précisément au début des années 80. Dont les conséquences, notamment en terme de suicides, l'interpellent et le navrent. Un brulot contre l'agrobusiness (très bien expliqué d'ailleurs dans la 6ème nouvelle).

« Nous sommes des esclaves en ce sens que nous dépendons, pour notre survie quotidienne, d'un empire agro-industriel condamné à croître perpétuellement s'il ne veut pas s'éteindre – une machine de cinglé – que les spécialistes sont incapables de comprendre dans son intégralité, et que les managers sont incapables de manager. Empire qui, par ailleurs, dévore les ressources mondiales à une vitesse exponentielle. Nous sommes, pour la plupart d'entre nous, des employés dépendants ».

Voilà pour la première nouvelle qui donne le la à ce recueil. Les autres nouvelles sont parfois davantage ancrées sur la terre ferme, dans la forêt, ou sont des réflexions approfondies, sauf la 5ème nouvelle, véritable expédition sur canoë en Alaska dont nous suivons jour après jour la progression, ou encore la 7ème nouvelle, descente rapide sur la San Juan.
Réflexions sur la beauté insoupçonnée et l'utilité écologique des vautours, les rencontres avec un ours, les visites de courtoisie des serpents à sonnette, les hurlements des coyotes, la quête craintive du grizzli. Il nous offre des descriptions sentimentales sur la nature, des développements érudits sur la biodiversité ; Il raconte Abbey, il raconte avec passion, sarcasme, engagement. Avec coeur toujours. Avec chauvinisme oh oui ! Et quelques relents de nationalisme aussi (ses réflexions sur les immigrés notamment m'ont quelque peu interpellée même s'il explique ce refus d'accueil du fait de la croissance démographique, sa façon de narrer est discutable), tout en se demandant chaque fois ce qu'en aurait pensé aujourd'hui ce bon vieux Thoreau, dans le contexte qui était le sien au milieu du 19ème Siècle ?

« Réunis sur leur arbre mort préféré, dodelinant de la tête à l'unisson, les vautours ressemblaient, depuis notre site d'observation, à un congrès de chauves et judicieux gérants de pompes funèbres discutant de leurs perspectives d'avenir – toujours bonnes. Fiables. Les individus adultes ont une tête rouge ridée et déplumée ; les juvéniles ont la tête bleuâtre, elle aussi déplumée. Ils ont le crâne chauve parce que c'est plus propre, plus sûr, plus hygiénique, étant donné leur domaine d'exercice. Si vous gagniez votre vie en plongeant votre bec, vos yeux, vos oreilles et votre cou au plus profond des entrailles en décomposition, disons, d'une vache morte, vous aussi, vous préféreriez être chauve comme un vautour. Avoir des plumes sur la tête nuirait à sa rétractation rapide, en cas d'urgence, et ces plumes offriraient une multitude de petits recoins aux asticots, aux scarabées, aux vers et bactéries. Pour ce boulot, mieux vaut être lisse et net ».

J'aime cette idée que la vie au grand air, vie libre et vigoureuse, soit bonne pour les humains. « Ça les emplit de joie et de bonne humeur, garantes de santé et de longévité » nous dit l'auteur. Nous savons de plus en plus que l'essentiel tient en une eau pure, une nourriture fraiche et de l'activité physique. J'aime lorsque Abbey se fait le chantre de ce style de vie. Une vie à observer, regarder, inlassablement. S'émerveiller. Tout simplement. Pour se sentir libre.

Le message d'Edward Abbey est contemporain, atemporel. Et quand il se fait poète mettant un peu de côté sa rhétorique tantôt boudeuse et source de longueurs, tantôt militante et engagée alors source d'une érudition passionnante, cela donne de magnifiques éclats lumineux, inoubliables.

« La nouvelle lune flotte comme une tranche de citron dans le ciel lie-de-vin. Les sombres frondaisons découpent des colonnes de lumière ».


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Le nombre de livres de mon auteur préféré étant restreint, je les lis à dose homéopathique sur plusieurs années. Comme le titre l'indique, Edward Abbey nous décrit ses descentes de rivières, sous forme de nouvelles, en y sublimant la nature, ses concitoyens atypiques, ses points de vue sur l'humanité. le tout avec engagement (il donne même une adresse où lui écrire), poésie et humour. Une nouvelle permet de voir Henri Thoreau sous un autre jour.
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« Un jour ou l'autre, tout homme se doit de descendre la rivière ».

Il aura traîné longtemps dans ma PAL. Et puis l'envie d'un peu de nature writing et d'écriture contemplative l'a imposé, comme une pause bienvenue dans une période un peu trop bousculée.

Dans En descendant la rivière, traduit par Jacques Mailhos, Edward Abbey fait le job, racontant successivement plusieurs de ses descentes – la Green, la Tatshenshini, la San Juan ou le Rio Dolores -, ponctuées des rituels du genre : navigation, bivouac, contemplation, randonnée, navigation…

Les amateurs adoreront ; les autres s'ennuieront ferme. Ou pas…

Car à travers ces différents textes rassemblés, Abbey se lâche davantage que dans ses romans et se révèle sociologue, politique, un peu moraliste et même… drôle ! En particulier lorsqu'il nous livre son regard sur l'oeuvre et la pensée de Thoreau, son grand ancien.

On y sent la balance constante entre admiration et critique d'un précurseur probablement trop extrémiste, là où Abbey recherche davantage l'équilibre et croit que la cohabitation de la ville et de l'industrie avec la campagne et la nature, est encore possible. Puis d'un seul coup, Abbey se lâche :

« Oh, allez Henry, ça va, arrête de nous glapir au nez. Va donc faire l'amour à un sapin (vu que la nature tout entière est ton épouse). Fiche-nous la paix. Laisse-nous tranquille ». Voilà, ça c'est fait !

Plus loin, c'est une vision politique assez traditionnelle qui s'exprime : retour à la préservation d'un espace minimum naturel pour tout homme ; promotion du modèle traditionnel de la ferme familiale ; glorification des grandes figures US :

« L'Ouest américain ne nous a, jusqu'à présent, pas donné assez d'hommes à la hauteur de nos montagnes. Pas depuis la mort de Crazy Horse, Sitting Bull, Dull Knife, Red Cloud, Chef Joseph, Little Wolf, Red Shirt, Gall, Geronimo, Cochise, Tenaya ».

Une vision qui devient plus discutable quand il oppose les progrès de la médecine face aux bienfaits de la nature ou fustige les avancées scientifiques : « Ce qui s'appelle la science de nos jours nous apporte de plus en plus d'informations, une indigeste débauche d'informations, et de moins en moins de compréhension ».

Au fil des textes, Abbey témoigne enfin de la félicité de sa vie simple : joie de planter un arbre, de naviguer avec sa fille, effroi de la rencontre avec le grizzly (Ursus horribilis) ou plaisir des heures passées à veiller un éventuel début d'incendie dans les forêts alentours.

Une lecture apaisante, qui se termine sur ce conseil de bon sens : « Lis la rivière comme tu lirais un livre. Et si tu persistes à rester dans le doute… ? Saute du bateau. Reste chez toi. Lis un livre » !
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Edward Abbey, disparu en 1989, fut en son temps une icône de la contre-culture et un militant écologiste radical, pionnier de la contre culture et de la conscience écologique aux États-Unis.

Abbey aura publié un certain nombre de texte chantant les louanges de la nature, dans la droite lignée d'Henry David Thoreau, auteur qui est plus passé à la postérité que lui.

"En descendant la rivière" est un recueil de onze nouvelles publiées dans les années 80 et restées jusque là inédites en France avant que Gallmeister ne les publie en France en ce début d'année 2021 .
Dans ces nouvelles, Edward Abbey sonde la beauté impérissable des derniers grands espaces sauvages, exprime son incompréhension et même sa rage devant sa destruction annoncée; bref assène des réflexions bien dans l'air du temps un peu anarchistes de l'époque mais en même temps assez visionnaires.

Plus largement, ce recueil inédit rend un vibrant hommage aux grands espaces américains, et plus particulièrement aux rivières et remet en avant une personnalité incontestable du nature writing.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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En descendant la rivière est une compilation de 11 textes ou nouvelles écrites par Edward Abbey dans les années 1980. Elles sont éditées pour la première fois en français en 2021 par les Éditions Gallmeister. Merci à elles !
Edward Abbey, américain, disparu en 1989 est l'un des grands personnages de la contre culture et l'écologie radicale.
Son roman le plus célèbre devenu culte, le gang de la clé à molette, est un creuset de contre culture et d'écologie radicale.
Edward Abbey est l'un des plus grands écrivains de l'Ouest Américain, qu'il s'agisse de parler des déserts, des canyons et rivières mais aussi des barrages et des effets néfastes de l'homme sur la nature.
Nous retrouvons ces thèmes sans les 11 textes formant En descendant la rivière.
Ces textes écrits dans les années 1980 n'ont pris aucune ride ! Bien pour la lecture mais inquiétant pour la prise de conscience insuffisante de la place de l'écologie et de la nature sur notre planète.
L'un des textes les plus long nous met en présence de Henry David Thoreau naturaliste et philosophe américain du 19 ème siècle. Un écologiste radical de la veine d'Edward Abbey. Mais surtout un homme de conviction, qui marque encore de nos jours par ses écrits et positions contre l'esclavagisme.
A côté de ce texte fort, quelques textes courts pour nous parler de l'ours, du faucon crecerelle et des rivières et des canyons.
En ayant toujours à l'esprit la grandeur de la nature et sa beauté
Un petit bémol : Edward Abbey est américain ; donc quelque soit les situations America First. Cela dénature le propos quelquefois.
Mais cela reste mineur. En descendant la rivière reste un livre salutaire qui interroge sur notre place et sur les motivations de nos dirigeants et de nous mêmes.

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En descendant les rivières sauvages de l'Ouest américain, l'auteur nous fait part de ses pensées et réflexions sur la nature en général et l'eau en particulier. C'est ainsi qu'il commence par dialoguer librement avec Henry David Thoreau, l'auteur de Walden, livre que l'auteur emporte toujours avec lui dans sa boîte étanche pour le protéger dans les descentes de rapides. La plupart des chapitres sont des plaidoyers écologiques pour dénoncer l'asservissement des rivières sauvages aux besoins humains (production d'énergie, irrigation, tourisme...) bien trop nombreux et bien trop voraces. Si certains passages semblent désormais un peu datés, c'est néanmoins un plaisir fort rafraîchissant de lire ces récits et méditations du "philosophe de la nature sauvage", ainsi que le surnomment ses compagnons de routes aquatiques et tumultueuses.
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Ce roman est une sorte de récit, l' expérience métaphysique d'Edward Abbey sur les flots de la Green River, sur le Colorado. En descendant ces rivières à bord de son canoë, en accompagnant des groupes, il "médite” sur la beauté des paysages, le modernisme, les traditions, sur l'agriculture raisonnée et celle qu'on dit industrielle, sur l'état de notre triste monde, les relations entre les êtres humains, et puis Henry Thoreau, qu'il admire pour sa liberté et son ascétisme parfois extrême ( la sobriété ). Ce n'est pas une contemplation, mais une recherche active du bonheur fait de simplicité (un bivouac, une offre pour chercher de l'or sur une rivière, une descente réussie de rivière qu'il connait par coeur, quelques bières, un bon bourbon, le sourire d'une équipière, contempler les arbres). Il y a cette ironie contre le mercantilisme, la concurrence et l'avidité de l'homme.
On se laisse donc porter par ses réflexions pleine de bon sens, c'est une divagation lente et parfois tumultueuse dans les rapides. Comme l'auteur, parfois provocant lors de ces voyages, on ne sent qu'une menace... Celle de l'ours, le grizzli qui rôde et pourrait décimer l'équipée sauvage... Bref, il n'y a pas vraiment d'histoire, mais c'est une lecture agréable modestement éclairée par les pensées d'Edward Abbey. Il cite Thoreau, Traven (le meilleur selon lui) , des auteurs loin du conformisme américain. le livre s'effeuille (oui oui, j'ose), on en ressort rassasié de nature, de bonne air et de bonne humeur, et si le Zambèze ?
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En ce début 2021, les éditions Gallmeister nous font un cadeau, le ce genre de cadeau qu'on aime découvrir sous le sapin : un inédit en français de Edward Abbey, un des auteurs les plus engagés et les plus engageant que je n'ai jamais lu ! Larry McMurtry, papa littéraire de la sublime série Lonesome Dove (promis je vous en parle prochainement) considère Abbey comme le Thoreau de l'Ouest américain. Prenez le temps, revenez à l'essentiel, oubliez le tumulte environnant et partons en voyage dans les terres Abbeyennes.

En 1944, à l'âge de 17 ans, Edward Abbey quitte sa Pennsylvanie natale pour parcourir le pays en auto-stop. Quand il découvre l'Ouest américain, il tombe en amour du désert et cet amour durera toute sa vie. Pendant ses études universitaires, il place sa thèse sous « L'anarchie et la moralité de la violence ». Ses écrits et ses positions lui vaudront d'être surveillé par le FBI. Surveillance qui durera toute sa vie et à quoi Abbey rétorque « Je considérerais comme un affront qu'ils ne fassent pas attention à moi. »
Pendant 15 ans, Edward Abbey officie comme Ranger dans divers parcs nationaux. C'est le parc des Arches, dans l'Utah, qui lui inspire Désert solitaire, sorte d'autobiographie pamphlétaire. Un chef-d'oeuvre qui est devenu un classique du nature writing. Irrévérencieux et tumultueux, Désert solitaire est sans conteste l'un des plus beaux textes jamais inspirés par le désert américain. Entre l'année de son voyage en stop et celles de ses etudes, l'Ouest américain a subi de plein fouet les avancées du progrès. A cette découverte, Edward Abbey entre dans une colère incommensurable et en noircit les pages dans une déclaration d'amour bouleversante à la sauvagerie du monde. Peu d'ouvrages ont autant déchaîné les passions que Désert solitaire: publié pour la première fois en 1968, il est en effet de ces rares livres dont on peut affirmer sans exagérer qu'il « changeait les vies »
Désert solitaire posait les jalons d'un autre chef d'oeuvre: le Gang de la clef à molette. Si le premier est autobiographique, le second, bien qu'il recèle toute la révolte et l'admiration de la nature de l'auteur, est pure fiction. Ce roman va pourtant s'ancrer dans notre réalité et ce, pour toujours.

Révoltés de voir la somptueuse nature de l'Ouest américain défigurée par les industriels, quatre insoumis décident d'entrer en lutte contre la « Machine ». le Gang se compose de Seldom Seen Smith, un guide mormon polygame ; Doc Sarvis, un chirurgien poète aussi riche qu'avisé ; Bonnie Abbzug, sa jeune compagne sexuelle, droguée et toujours prête à allumer les mèches d'explosifs ; et George W. Hayduke, le plus bizarre des vétérans de la Guerre du Vietnam, très friand de bière et de dynamite. Quatre activistes écologiques inoubliables, tour à tour détestables et attachants dont on suit les aventures avec passion et palpitation ! le roman connait un tel succès que son titre anglais « Monkey Wrench » devient synonyme de sabotage écologique aux États-Unis. Sorte d'éveilleur de conscience, de manuel de désobéissance civile, le roman provoque la naissance du groupe écologique radical Earth First! au même titre que Printemps silencieux de Rachel Carson.

Pas besoin d'être un fervent écologiste, un anarchiste ni même un contestataire dans l'âme pour apprécier le Gang de la clef à molette. Être amoureux de la littérature suffit amplement. S'il est subversif, ce roman est aussi un hommage appuyé à la nature sauvage, une dénonciation cinglante du monde moderne et surtout un grand roman épique à la verve tragi-comique sans égale ! Une plume redoutablement efficace, limpide et poétique qui vous touche profondément. Lire du Edward Abbey c'est passer du rire à la révolte, du grognement à la larme à l'oeil, de bouffées d'air pure au coeur empesé. Suite au mythique Gang de la Clef à Mollette, je peux difficilement vous en parler sous divulguer bon nombre de coup de théâtre du premier tome. Si dans le premier roman, c'est l'énorme barrage du Glen Canyon qui symbolise l'ennemi à abattre, dans ce second opus, Abbey ne voit pas plus petit. le retour du Gang, ou ce qu'il en reste, se réunit pour arrêter la marche de « Goliath », un super-excavateur géant qui détruit des espaces sauvages. le plus gros engin terrestre mobile de la planète est en mission pour l'Industrie ; celle de dévaster une colossale surface de la Kaibab Forest. Parce qu'il faut bien créer des routes pour atteindre la future mine d'uranium… Paru 15 ans après le Gang, cette suite est tout autant cynique, militante et peut-être encore plus drôle que le premier. On y retrouve des personnages incontournables et quelques nouveaux, tout aussi captivants ou méprisables. La plume d'Edward Abbey a gardé toute sa poésie et sa densité pour nous décrire des paysages fabuleux à la vie riche, hostile et pourtant éblouissante. Les convictions sont toujours là, saupoudrées de sarcasmes qui donnent une saveur piquante à cet éco-terrorisme anarchiste. le retour du Gang est un vrai bonheur de lecture et assied définitivement Edward Abbey en auteur incontournable de la contre-culture. Un conservateur sauvage et utopiste, aux yeux écarquillés et au coeur sanglant.
Mort en 1989, Edward Abbey est enterré illégalement dans le désert. Aujourd'hui encore, personne ne sait où se trouve sa tombe mais sur cette dernière est gravé l'épitaphe « No comment » Il restait un écrit d'Abbey encore non traduit, le voilà enfin et nous retrouvons l'auteur américain poète et provocateur à son meilleur, au moment où nous avons le plus besoin de lui. Exploration de la beauté impérissable des derniers grands espaces sauvages américains, En descendant la rivière nous entraîne dans des paysages où le corps et l'esprit flottent librement. Et leur immensité réveille des méditations sur des sujets allant de la vie d'Henry David Thoreau à la militarisation des grands espaces. On y entend alors une condamnation passionnée des coups portés à notre patrimoine naturel au nom du progrès, du profit et de la sécurité. Rempli d'aubes enflammées, de rivières brillantes et de canyons radieux, ce recueil est chargé d'une rage sincère et déchaînée contre la cupidité humaine.
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Je n'avais pas encore lu Edward Abbey, j'avoue que je sais pas trop pourquoi, surtout que j'ai le gang de la clef à molette dans ma PAL, mais voilà, il fait parti de ces auteurs qui m'impressionne et qui me font un peu peur, si je puis m'exprimer ainsi. Bon, voilà, c'est chose faite maintenant … Et bien je peux vous dire qu'il m'impressionne d'autant plus… Tout commence avec sa préface, où, je découvre une grande gueule qui sait de quoi elle parle et qui ne mâche pas ses mots. C'est posé direct, on sait à quoi s'attendre et je peux vous dire que je n'ai pas été déçu. Il parait que c'est un grand du Nature Writing, il le prouve parfaitement dans ces nouvelles.

Du coup, j'ai découvert Edward Abbey avec ce livre, mais pas que, j'ai également fait la connaissance de Henry David Thoreau cet écrivain du XIXème siècle dans la première nouvelle de ce recueil. Dans celle-ci, Abbey descend une rivière et au grès de son parcours il nous présente Thoreau, il s'adresse à lui même. Cette nouvelle se lit un peu comme un essai, elle peut paraître lourde mais eu final elle parle de tellement de chose que cela en devient super intéressant.

La force de ce livre c'est qu'il a été publié dans les années 80 mais qu'il est toujours autant d'actualité. Abbey parle de la nature et plus précisément des rivières avec une passion débordante. Il nous fait réfléchir sur la mondialisation, l'agriculture industrielle, le tout profit. Il peut être très revendicateur dans ses propos et je pense qu'il a dû pas mal se faire bousculer à son époque.

J'ai vraiment pris beaucoup de plaisir à descendre les rivières en compagnie de Edward Abbey. Encore un livre de plus qui me donne envie de découvrir les États-Unis. En descendant la rivière est un vrai livre de Nature Writing, Gallmeister sont vraiment excellent dans ce mouvement, encore un grand merci à eux.
Lien : https://readlookhear.wordpre..
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Edward Abbey est un de mes écrivains américains préférés, en plus il est traduit par un de mes traducteurs favoris (Jacques Mailhos) et enfin il est publié dans une maison d'édition que j'adore (Gallmeister). Voilà un trio parfait pour nous offrir un très beau moment de lecture.

J'ai lu absolument tous les livres de cet auteur, les romans comme les récits, chacun apportant une pierre supplémentaire à l'édifice monumentale qu'est l'oeuvre de cet immense écrivain.

En descendant la rivière est un recueil de récits personnels, un nouvel hommage à la nature comme seul sait le faire Edward Abbey, un plaidoyer à la méditation mais aussi une critique affirmée de la destruction des grands espaces, de certaines politiques, des changements radicaux entraînés par la quête perpétuelle d'un progrès contestable.

En effet qu'est-ce que le progrès ? Détruire la nature pour construire des routes, des barrages et des habitations, est-ce du progrès ? N'est-ce pas plutôt un mépris de ce qui a été avant nous et de ce qui restera bien après lorsque nous ne serons que poussière ? Croire qu'un immeuble est plus moderne qu'un arbre est le signe d'un manque cruel de respect et de bon sens. La nature évolue, s'adapte et saura faire face lorsque nous ne serons plus là. La nature est à la fois un ancêtre et un héritage, un avant et un après. Nous ne sommes que le présent, une ligne dans l'histoire de l'univers...

C'est en lisant ce recueil que le lecteur va être ainsi amené à réfléchir sur son environnement, sur lui-même, sur la société mais n'ayez pas peur, je ne suis pas une grande adepte des essais, ce livre n'en est pas un. Ce sont des morceaux de vie, des traversées de rivières et de paysages magnifiques où l'auteur laisse divaguer ses pensées pour accompagner le silence. L'auteur se livre continuellement, nous offre ses doutes et ses certitudes et nous invite ainsi à partager les nôtres. de nombreux sujets seront abordés et nous sortons grandis de cette lecture.

En définitive, Edward Abbey nous propose à nouveau un grand moment de littérature sublimé par la traduction toujours remarquable de Jacques Mailhos.
Lien : https://leatouchbook.blogspo..
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