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EAN : 9782913896741
112 pages
Al Manar (26/10/2009)
3.7/5   5 notes
Résumé :
Ensemble de contes populaires d'Algérie, réservés aux adultes et organisés en un récit suivi, à la façon des Mille et une nuits.
Y sont mis en scène des maris ivres de jalousie et immanquablement trompés, des amantes amoureuses, des épouses naïves… le tout, orchestré par une gent féminine rouée comme il se doit ! Le beau prince de ces contes, sorte de Sheherazade au masculin, est lancé dans une série d’aventures et de découvertes étonnantes. Il parcourt de lo... >Voir plus
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Au sud-ouest de l'Algérie, entre la corniche de Ténès au nord, et le Sahara et le Mzab au sud s'étend la région des hauts plateaux du djebel Amour. Et dans cette région où se vénère Sidi Khaled, celle des villes de Tiaret, Frenda, Tousnina, Sougueur, Mellakou, vivaient naguère, il y a un peu plus de cinquante ans à peine, des populations de nomades transhumants, aujourd'hui en grande partie sédentarisés. C'est une région de traditions fortes, terre d'un vieux royaume originaire de Perse et plus près de nous, terre d'Abd El-Kader. Ce peuple rural, qui remontait du Sahara à la belle saison, était et est encore un peuple de conteurs, ou plutôt de conteuses. le soir – obligatoirement le soir car qui conte le jour risque de devenir chauve ! – les femmes et les jeunes filles se réunissent autour de l'une d'entre elles pour écouter des histoires magiques de princesses, d'ogres, de Djinns et de sorcières, comme partout, mais aussi des contes transgressifs, inconvenants, où les femmes se taillent la part belle en revendiquant leur droit au plaisir à la barbe des hommes, gardiens de l'honneur et de la tradition.
Nora Aceval a baigné dans cette culture. Franco-Algérienne, descendant par sa mère de la tribu des Ouled Sidi-Khaled, petite-fille de nomades sahariens vivant encore dans la khaïma, fille, petite fille et nièce de conteuses, quoi d'étonnant à ce qu'elle soit devenue conteuse elle-même ? Elle a très vite senti la nécessité de préserver la mémoire du monde dans lequel elle avait vécu et, après un travail de recherche à l'université Paris XIII sous la direction de Jean Perrot[2] (L'Algérie des contes et des légendes : hauts plateaux de Tiaret[3]), elle s'est lancée dans ce travail – nombreux voyages de collecte dans sa terre natale, traduction et rédaction a minima des récits recueillis.
Ces contes sont donc intéressants à plus d'un chef.
Tout d'abord, sociologiquement, ce qui saute aux yeux c'est que ce corpus va à l'encontre de tous les préjugés sur la soumission des femmes en culture méditerranéenne et tout spécialement musulmane. Malicieuses et libertines, les conteuses et leur public (féminin) mettent en scène leur profonde liberté sexuelle, malgré la jalousie des hommes et toutes les règles de la tradition. Leur corps leur appartient, leur sexualité leur appartient : « Ce n'est pas parce que tu m'enfermes que je ne te trompe pas » dit l'une d'elle, « Les femmes sont impossibles à surveiller ! Pour votre quiétude, laissez-leur la liberté », psalmodient deux maris trompés et, au terme de sa quête, le prince qui est parti acquérir la science des femmes et de l'amour reconnaît « A présent, je sais les femmes impossibles à surveiller, je sais les portes impossibles à verrouiller, je sais les murs impossibles à dresser, je sais les coffres impossibles à sceller… », paroles de prince, certes, mais à travers lui, profession de foi d'une vieille femme indocile qui tisse son conte à l'intention de ses soeurs et des pré-adolescentes qui s'éduquent en l'écoutant. Et pourtant, cette profonde indépendance des femmes ne devrait pas étonner qui connaît l'érotisme des Mille et une nuits. Ce type de récits relève de ce que Malek Chebel[5] appelle la culture du sérail, où « des femmes cloîtrées réinvent(ent) le monde à leur mesure pour mieux le maîtriser ». Mais il révèle aussi, au-delà même de toute revendication féministe, l'irréductibilité absolue de la jouissance et de la liberté.
En un second lieu, les thèmes de ce corpus de contes oraux sont les mêmes que ceux repérés par Aarne et Thompson, ces thèmes folkloriques qui circulent dans toute l'Asie Mineure, l'Europe et le pourtour méditerranéen, qu'on retrouve parfois mot pour mot[6] dans les fabliaux, les exempla et autres récits brefs, parfois même les sourates du Coran et jusqu'à la littérature de colportage, parfois dans les traditions orales d'Amérique du sud.
de plus, ils participent de la culture orale, antérieurs donc, dans la constitution du corpus, à nos fabliaux. Ils permettent peut-être de mieux imaginer par quels vecteurs ces histoires brèves, très volontiers scatologiques ou scabreuses, se sont répandues dans l'inconscient collectif. Avant l'itinérance des hommes, jongleurs des foires, trouvères des châteaux, on peut se figurer la sédentarité des chaumières où, à la veillée, de vieilles illettrées revenues de tout égrènent pour un public familial quelques histoires salaces pendant que s'accomplissent les menus travaux du soir.
Enfin cet ensemble de contes présente un dernier intérêt, sociologique celui-ci, en ce qu'ils expriment le désir du changement d'un mode de civilisation, le passage du rural nomade au citadin sédentaire. Désir ? Fascination, plutôt, car, disent les nomades, « lorsque tu ne voyages plus, tu meurs ». Les contes opposent la vie frustre des nomades, qui ne possèdent que le minimum vital, facile à déménager au confort de la vie sédentaire, ressentie comme riche, voire princière. Les nomades ne se déplacent qu'avec l'essentiel, avec parfois, sur un chameau, un coffre au contenu étrange : « désignant le coffre, ce dernier se vanta d'avoir trouvé, lui, le plus jaloux des jaloux, la plus fiable des solutions pour garantir la fidélité de sa femme Il expliqua fièrement qu'il avait enfermé l'épouse dans un coffre et qu'il transportait celui-ci partout avec lui… Il ne sortait la pauvre « créature » (comme il l'appelait), que le soir au coucher du soleil »[9] D'autres éléments de la vie nomade sont plus réalistes, les pots pour le lait et l'eau, le plat où l'on roule le couscous, les palanquins richement ornés où voyagent les femmes, le cortège des chameaux et des chamelles. Mais surtout, plus de la moitié des contes recueillis traitent du passage d'un personnage de la vie nomade à la vie sédentaire, pour sa plus grande satisfaction. Quelques uns (Herbe verte, par exemple, hors corpus des contes libertins) présentent une double quête, du nomadisme à la sédentarité, puis de la sédentarité au nomadisme.
http://mondesfrancophones.com/espaces/maghrebs/le-maghreb-les-femmes-et-le-libertinage-tresors-de-la-culture-orale/
Lien : http://mondesfrancophones.co..
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Nora Aceval nous donne avec son livre l'occasion de visiter le monde féminin et ses ruses avec le regard d'un prince au cours d'un voyage initiatique qui le mènera vers la connaissance de la femme et de l'amour. Plaisir de lire des contes que l'on a l'impression d'entendre comme au temps des Mille et une nuits. Je le recommande à tous les amateurs de contes et aux amoureux des cultures du monde.
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Nora Aceval nous donne avec son livre l'occasion de visiter le monde féminin et ses ruses avec le regard d'un prince au cours d'un voyage initiatique qui le mènera vers la connaissance de la femme et de l'amour. Plaisir de lire des contes que l'on a l'impression d'entendre comme au temps des Mille et une nuits. Je le recommande à tous les amateurs de contes et aux amoureux des cultures du monde.
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Vidéo de Nora Aceval
L'ÉMISSION "QAADA" DE LYNDA TAMDRARI, ÉMISSION FRANCOPHONE TRÈS REGARDÉE PAR LES ALGÉRIENS, TANT EN ALGÉRIE QUE DANS LA DIASPORA, ENREGISTRÉE SOUS LA TENTE À TINERKOUK près de TIMIMOUN , a été DIFFUSÉE EN DIRECT SUR LE SITE DE CANAL ALGÉRIE , LE 1er JANVIER 2010 À 21 H. Invités : Nora Aceval, Sylvie Brunel, Rachid Arhab,
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