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Les nouvelles de Chinua Achebe dans Femmes en guerre ont le mérite de nous montrer son évolution entre 1952, avant l'Indépendance du Nigéria, et 1972, après la guerre du Biafra, où l'auteur s'est impliqué (et Foccart envoyé par De Gaulle, aussi) en faveur des Igbos révoltés.
Récit de la force des féticheurs, qui excluent un homme jugé fou car poursuivi par un fou, mots d'ordre «  aujourd'hui nous appartient », recherche, monnayée, des votes, en un mot corruption électorale :
« Malgré une histoire de grossesse qui compromettait l'institutrice, … il était aujourd'hui le chef et ministre », en quoi Achebe parle avec acuité et cynisme, de l'humaine condition tout en présentant les particularités africaines.

Avant d'arriver à la nouvelle éponyme, « Femmes en guerre » le ton politique monte :

Voyons le chagrin d'un vieil homme qui voit son fils unique se marier avec une femme de la ville, qui hésite à le répudier, aidé en cela par toute la communauté, puis répudie ses propres idées pour faire la paix avec les siens.

Essayons de comprendre l'éducation chrétienne de Chike » selon les principes des Blancs », Qui doit refuser de manger de la nourriture des voisins » parce qu'ils les offraient aux idoles ».

Amusons-nous du portrait au vitriol de Mrs Emenike, digne d'un récit De Maupassant, en butte à la nouvelle loi du Ministre de l'Éducation : « l'école primaire gratuite », qui fait que les petits porteurs, les « petits boys » y compris la bonne d'enfant, un comble, prennent leur congé.
- Pars et ne reviens plus ici quand tu auras échoué, dit le mari.
- Moi pas choué, répond le jardinier, y en avoir un homme pour not'village, lui yena pus vieux que ma père.
« Ce qui prouve bien que ça ne servait à rien d'être bon avec ces gens-là. Après tout ce qu'elle avait fait pour eux. »
Digne de Maupassant, le cynisme des époux qui exploitent une petite fille en lui promettant qu'elle fera des études est vite compris par sa mère, qui comprend vite ce monde de riches.

Comprenons la force des interdits, dont celui qui frappe un directeur d'école, ayant posé des clôtures autour du jardin, acte jugé par l'inspecteur blanc « un zèle intempestif. »

Intégrons la présence des mami watta, ces déesses du fleuve, puisque nous sommes sur les berges du Niger et de la place du marché où tous les biens se troquent.

Enfin, dans Femmes en guerre, la transformation d'une révolutionnaire qui arrête Reginald Nwanwo, du ministère de la justice, au début de la guerre du Biafra en une poupée maquillée, des années après, montre qu'elle a été sûrement manipulée. Chinua Achebe salue le courage de ceux qui «  dans les camps de réfugiés perdus dans des endroits reculés, dans les haillons trempés, dans le courage de ceux qui, sans rien dans le ventre et sans armes, montaient en première ligne ».
Pourtant, l'humain étant humain, pour survivre, les compromissions avec les trafiquants de cigarette et autres qui envoient les jeunes se faire tuer sont monnaie courante. 
Ce qui est frappant chez Chinua Achebe, c'est qu'à partir de coutumes igbos, et plus généralement africaines, l'auteur nous conduit à l'humain, trop humain : envie, égoïsme, ignorance, attachement aux traditions, volonté de pouvoir.
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Ce recueil de nouvelles traite en partie de la guerre civile au Nigeria et de ses effets sur la population. Les douze nouvelles qui composent le recueil ont été écrites sur une période de vingt ans, les premières sont donc des oeuvres de jeunesse publiées dans des journaux.
La tradition est dans une certaine mesure importante. Tout du moins la rupture avec elle est néfaste. À préciser qu'étrangement la superstition semble plus favorable que la tradition : il y a ainsi des passages fantastiques. La corruption est omniprésente : elle gangrène tous les rapports humains. Elle est traitée avec « drôlerie » dans « The Voter » (1965).
La question de l'éducation est évoquée : difficile, mais essentielle.
Une très belle lecture pour moi.
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Pour commencer, il s'agit bien ici d'un recueil de douze nouvelles, apparemment écrites entre 1952 et 1972. Il semble qu'Achebe ne les considérait pas comme son oeuvre majeure, sans doute plus concentré sur ses romans. Quoiqu'il en soit, j'aurais presque tendance à dire que c'est un livre idéal pour qui veut s'initier à la littérature africaine en général, nigériane en particulier, de langue anglaise et dans le texte. Dans l'ensemble, le recueil est court (environ cent pages) et compte douze nouvelles (donc en moyenne huit pages par nouvelle). L'anglais y est très abordable, en dehors de quelques traits culturels, et encore, beaucoup sont expliqués par le contexte. On peut même suivre une évolution chez Achebe : au début, on perçoit assez nettement une humanisation de l'Afrique, en opposition avec les descriptions qu'en ont faites par exemple Joseph Conrad et Ernest Hemingway. On peut noter par exemple l'amusant parcours de Chike à travers les mots de l'anglais, ou même l'ironie déjà amère des scrutins achetés dans "The Voter".
Dans "Girls At War", nouvelle écrite en 1972, après la guerre du Biafra et des tentatives politiques, marquées sans doute par des désillusions, le Nigéria, toujours décrite au plus près du quotidien (si vous voulez savoir comment faire en cas de pénurie de préservatif...) ressemble néanmoins un peu plus à celle de Conrad et l'on n'est pas loin de l'apocalypse, maintenant.
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Une jolie nouvelle pour débuter, pas encore de femme en guerre mais une histoire de fou. Une nouvelle très bien troussée un comique de situation que n'auraient pas renié Gogol ou de Pirandello énoncée doctement d'un ton très désabusé. On imagine, là-dessus, aisément un sketch vidéo à la Charlie Chaplin, muet et saccadé comme autrefois... bref de l'excellente littérature africaine.
Ensuite vient l'art de voter avec corruption, art aux valeurs toutes africaines dit-on, incitations avec quelques pièces d'un coté et quelques billets de l'autre sans oublier les menaces du iyi de Mbanta le féticheur, au cas où. le problème pour Rufus Okeke c'est de savoir comment il va voter dans la mesure où il a mangé dans les deux râteliers , entre pièces et billets il n'a pu choisir. L'iyi menaçant est suspendu au-dessus de sa tête comme un épée de Damoclès.
Un mariage qui réjoui l'époux car il est tombé sur une femme comme il faut et navre le père de celui-ci car les convenances n'ont pas été respectées. Petit drame raciste inter-africain causé par l'archaïsme de la société tribale. Amour quand tu nous tiens.
Akueke a le ventre qui gonfle : ses frères l'isolent, elle meurt et le fantôme revient mais Akueke a un papy génial. Là encore la coutume prise au pied de la lettre est mise à mal mais il y a toujours des hommes (ou femmes) faisant preuve de clairvoyance et d'humanisme. Réconfortant
Chike est un enfant Osu descendant d'esclave au statut non reconnu mais qui est baptisé : il est heureux car il aime les mots. Une enfance «littéraire» somme toute agréable: peut-être un futur «Achebe»
Kitikpa un véritable fléau qui décore les humains ,vide les marchés, terrifie tout le monde même le commis en noix de palmiste mais bon il y a des parades notamment l'oeuf!
Est-il bon que l'école soit gratuite? Pas toujours sauf si une petite fille a un très grande envie d'y aller...
Les esprits n'aiment pas le jardin de l'école
Et puis d'autres nouvelles un peu plus amères lorsqu'il est question de guerre et de pénurie alimentaire. Les femmes elles aussi sont mêlées à la folie des hommes et font la guerre en Afrique et en sont les victimes
Entre l'iyi le gri-gri électoral, l'Amalile le gri-gri séducteur, l' Alusi*, les mami-wataslil** le Kitikpa,*** y a toujours un petit espace ou l'homme peut agir mais il faut faire preuve de débrouillardise et de délicatesse mais bon quand la superstition règne en maîtresse difficile de faire autrement Et puis aussi la guerre, autre malédiction récurrente de l'Afrique, fait des ravages
On a l'impression qu' Achebe Chinua parle de son Afrique avec beaucoup de détachement Parfois il prend un ton amusé, fataliste, pince sans rire et parfois un ton amer voire désespéré. Il sait aussi ajouter une note dramatique, avec l'histoire terrible de Véronique, petite fille de dix ans prête à tout pour aller à l'école. Un véritable gouffre entre la première nouvelle amusante et la dernière terrible cruelle. Il donne une vue de l'étendue de son talent d'écrivain: un grand écrivain africain.
*esprits ** des mamans de la rivière *** variole
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Ce recueil réunit des nouvelles qui sont des tranches de vie d'habitants du Nigeria. L'auteur nous plonge dans un pays et une société en pleine mutation : l'occidentalisation bouscule les traditions, la guerre tord les caractères.
Le ton est souvent acide, jamais méchant ni amer.
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Décevant. Les récits sont pourtant bien vivants, les personnages et les situations bien réels, et on se sent en Afrique à la lecture de ces nouvelles. Mais pour moi le principe d'une nouvelle, c'est d'avoir une chute, et là on a juste l'impression que l'histoire s'arrête brutalement, parfois sans comprendre pourquoi.
Ca ne correspond pas à ce que j'attends d'une nouvelle.
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