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EAN : 9782707147479
686 pages
La Découverte (01/10/2005)
4.3/5   5 notes
Résumé :
Depuis 1992, la violence qui ravage l'Algérie nous est présentée comme une guerre d'intégristes islamistes contre des militaires qui se battent pour sauver la démocratie. Quant à la France, elle se serait contentée d'une bienveillante " neutralité ". Aujourd'hui, ce scénario apparaît comme une vaste construction médiatique. C'est ce que montrent, preuves à l'appui, les auteurs de ce livre explosif. Pendant six ans, ils ont enquêté en Europe et en Algérie, recueillan... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Ouvrage très fourni et documenté qui dénonce le pouvoir des militaires en Algérie et plus particulièrement son rôle dans « la troisième guerre d'Algérie » pendant la décennie noire des années 90. En s'appuyant sur des enquêtes, des témoignages et des recoupements, Lounis Aggoun et Jean-Baptiste Rivoire nous dévoilent comment quelques généraux se sont accaparés le pouvoir pour instaurer un système de corruption mafieux. Les nouveaux maîtres de l'Algérie ne se sont contentés de détourner et piller les richesses du pays. Pour se maintenir au pouvoir, ils ont instrumentalisé et infiltré les groupes islamistes radicaux plongeant leur pays dans la violence, la terreur et le chaos.
Les conséquences ont été dévastatrices pour la population et l'économie du pays. La société algérienne en est sortie brisée. Aujourd'hui une minorité, le noyau central autour du pouvoir et affiliée à la France, s'accapare toutes les richesses et asservit le reste de la population.
Les auteurs mettent l'accent sur la complicité active de la France au niveau des différents gouvernements, de certains intellectuels et du milieu des affaires qui ont aidé le régime algérien et couvert ses crimes.
Il faut rappeler que les entreprises françaises ont largement profité du sytème de corruption mis en place par le clan des généraux en Algérie.
Mais les autres puissances occidentales ne sont pas en reste, notamment les États-Unis puisque la junte au pouvoir est prête à céder les ressources du pays pour avoir leur soutien.
En conclusion, les auteurs annonçaient « le régime des généraux algériens est au bout du rouleau ». C'était en 2004 à la sortie du livre, il a fallu attendre 15 ans en février 2019 pour que la peuple se réveille à nouveau et lance un large mouvement de contestation « le hirak ». Même si pour le moment le mouvement semble s'essouffler, c'est un signe d'espoir pour les algériens.
Un livre indispensable à lire pour tous les algériens et leurs amis en France.
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Certes, comme pays souverain, l’Algérie perdure en tant que contour géographique dans les atlas. Mais dans sa réalité politique et sociale elle s’est scindée en deux entités inconciliables, en état de guerre latente : une minorité qui possède tous profondément ancrée à la France et dont la capitale symbolique est plus Paris qu’Alger; et l’écrasante majorité, réduite par la première à l’état de soumission absolue.
ces deux populations antagonistes sont déployées sur deux espaces distincts. Un territoire utile pour la première constitué du Sahara et de ses richesses en hydrocarbures, piloté principalement depuis un réduit à l’ouest d’Alger, autour d’une petite localité emblématique, le Club des pins, qui agglomère tout ce que la région compte comme terrain viable, soit peu ou prou ce que Bugeaud préconisait du temps de la conquête comme espace de la « colonisation restreinte ». S’y rassemblent quelques milliers d’individus auxquelles tout est permis, au-dessus des lois, disposant de tout le pouvoir économique, politique, militaire et médiatique, protégés par le tout puissant DRS et entretenant dans le pays réel des réseaux de plusieurs centaines de milliers d’obligés - membres des forces de sécurité ou Affairistes aux petits pieds bénéficiant de la corruption institutionnelle. C’est l’Algérie-Club des pins avec sa façade « démocratique » occupée pour la galerie internationale par une brochette de civils « présentable » au premier rang desquels le président Abdelaziz Bouteflika, réélu comme prévu en avril 2004.
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En 1832, deux ans après le débarquement français en Algérie, une sombre affaire de vol commis par des membres de la tribu des Ouffas provoque la colère du gouverneur d’Alger, le duc de Rovigo, qui vient d’être nommé par la France. En représailles, il lance contre les Ouffas une attaque au cours de laquelle « tout ce qui y vivait fut voué à la mort » : « En revenant de cette funeste expédition, racontera le colonel Pélissier de Reynaud, plusieurs de nos cavaliers portaient des têtes au bout de leurs lances et une d’elles servit, dit-on, à un horrible festin. » Simple dérapage d’un colonel français, ou massacre prémédité ? « Des têtes. Apportez des têtes, aurait demandé à l’époque le gouverneur d’Alger. Bouchez les conduits d’eau crevées avec la tête d’un Bédouin que vous rencontrerez. » Bilan, « il y eut douze mille morts chez les Ouffas. On trouva, les jours suivants, bracelets et boucles d’oreilles en abondance au marché algérois de Bab-Azoun. La devise de Rovigo était :’’On m’a coupé trois têtes ; si dans quarante-huit heures les coupables ne sont pas livrés, j’irai chez vous et je prendrai trois cents têtes ; et il tenait parole’’. »

Dès lors, et jusqu’en 1848, les troupes françaises engagées dans la conquête de l’Algérie multiplie les expéditions meurtrières. En 1834, une mission parlementaire dresse à son retour d’Algérie un sévère bilan de la conquête : « En un mot, nous avons débordé en barbarie les barbares que vous venions civiliser et nous nous plaignons de ne pas réussir auprès d’eux. » A partir de 1837 et l’arrivée de la Légion étrangère commandée par Achille de Saint-Arnaud sous la supervision du général Bugeaud, les massacrés délibérés prennent une dimension effarante. L’objectif affiché, que l’on n’hésiterait pas aujourd’hui à qualifier de génocidaire, est de réduire les effectifs des populations algériennes, pour permettre à la colonisation de prendre ses aises. L’expression consacrée est : « Comprimer les Arabes » – elle est d’Alexis de Tocqueville, qui préférait cela à l’ « extermination » des Indiens en Amérique.

Pour Bugeaud, le but « n’est pas de courir après les Arabes, ce qui est fort inutile ; il est d’empêcher les Arabes de semer, de récolter, de pâturer, [...] de jouir de leurs champs ». « Allez tous les ans leur brûler leurs récoltes [...], ou exterminez-les jusqu’à dernier ». (pp. 21-22)
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Benjamin Stora, historien et spécialiste reconnu de l’Algérie, ne cachait pas son agacement à l’égard des penseurs habitué à surfer d’un sujet à l’autre, en fonction de l’actualité : « ces intellectuels était silencieux et tout d’un coup lorsqu’il y a 80 000 morts, les gens comme André Glucksmann prétendent expliquer l’Algérie. Leur légitimité est purement médiatique, elle ne s’ appuie pas sur la connaissance. Certains intellectuels disent que les islamistes du FIS sont des égorger et qu’il ne faut pas discuter avec eux. Alors faut-il continuer la guerre à outrance et avec qui discuter ? Interdire un parti, Est-ce faire disparaître la question de l’intégrisme religieux ? Et si l’on ose ajouter des évidences en rappelant par exemple que l’Algérie est un pays musulman on vous regarde de travers. Les islamistes ne sont pas des extraterrestres habillés en vert. Les politiques préfèrent écouter les penseurs médiatiques qui ne travaillent sur rien et ont un point de vue surtout”.
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Régulièrement informés par la DGSE et la DST, François Mitterrand Jacques Chirac Lionel Jospin Alain Juppé ou Jean Louis Debré ne pouvaient ignorer la sauvagerie de la répression s’abattant sur la population algérienne. Ils pouvaient encore moins ignorer l’ampleur de la corruption qui caractérise les relations économiques entre Paris et Alger.
Plus grave : il apparaît aujourd’hui démontré qu’à partir de 1994, les dirigeants politiques français ont compris que le GIA était manipulé par les services algériens, notamment quand il poser des bombes dans le RER parisien. Alors pourquoi ce silence officiel ? Comment expliquer qu’un gouvernement français ait pu fermer les yeux sur un terrorisme d’État commis sur son propre sol ? Comment comprendre que fin 1997, alors que d’épouvantables massacres de civils commis sous protection militaire venaient d’endeuiller la banlieue d’Alger, ces généraux soient parvenu à enterrer tout projet de commission d’enquête internationale, au point qu’aujourd’hui encore on ignore jusqu’au bilan chiffré de ces massacres ?
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En 1830, on tue, on brûle, on pille et on s'en vante avec une décontraction qui en dit long sur la façon dont les militaires français considéraient les « indigènes ».
Entre 1945 et 1962, les méthodes sont comparables, mais l'époque a changé. Certes, les Algériens sont encore des indigènes dépossédés de droits, mais avec la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée en 1948, il devient plus difficile d'assumer les crimes contre l'humanité commis par l'armée. Pour combattre l'ennemi avec succès sans s'aliéner l'opinion publique internationale, les militaires français mettent au point des méthodes de « guerre moderne » particulièrement
efficaces : obsédés par leur échec en Indochine face au « Viêtcong», leur objectif premier est de couper les résistants de la population (« retirer l'eau au poisson »), grâce à l’« action psychologique » et aux techniques de basse police, qui frappent cruellement la population civile.
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