Dans la Palestine des années 1920, placée sous mandat britannique, l'auteur nous dévoile par petites touches l'existence singulière de
Tehila. Âgée de 104 ans, elle mène une vie charitable et suscite l'admiration du narrateur et des personnes qui croisent son chemin dans les rues de Jérusalem.
Lauréat du
Prix Nobel (partagé avec
Nelly Sachs en 1966), Shmuel Yosef Agnon est né dans l'actuelle Ukraine et rejoignit la Palestine bien avant la création d'Israël en 1948. A la différence d'
Isaac Bashevis Singer (autre lauréat du
Prix Nobel qui n'écrivait qu'en Yiddish), Agnon a choisi de rédiger toute son oeuvre littéraire en Hébreu. Mobilisant de nombreuses références à la Torah et aux écritures sacrées, Agnon se révèle davantage comme un écrivain de la Judaïté que comme un écrivain israélien à proprement parler. de fait, il est souvent nécessaire de se référer au glossaire pour saisir les évocations symboliques de son propos. de même, la lecture de la postface (remarquablement écrite par Dan Laor) met en valeur nombre de subtilités qui auraient pu échapper aux lecteurs qui ne maîtrisent pas parfaitement la culture juive.
C'est probablement le principal défaut d'un tel ouvrage. Loin de proposer une vision universaliste, l'histoire de
Tehila semble recroquevillée sur elle-même, sur le petit monde de Jérusalem, sur la pesanteur des usages religieux propres au Judaïsme.
A la différence des écrits de Bashevis Singer ou (bien plus tard) d'
Amos Oz, ce court ouvrage de
S.J. Agnon donne parfois le sentiment de célébrer la bigoterie du personnage principal, au détriment de l'histoire belle et tragique de cette centenaire.
Facile à lire mais complexe à appréhender dans toute sa finesse, ce livre laisse donc un sentiment partagé : ancré dans un symbolisme religieux et une mystagogie trop souvent hermétique, cet ouvrage ne saurait être recommandé à des lecteurs qui ne disposent pas d'un minimum de savoirs préalables sur le monde juif.