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Critiques filtrées sur 1 étoiles  
J'aime feuilleter la presse littéraire entre deux romans, je suis abonnée à Lire-Le Magazine littéraire, j'achète de temps à autres America. le Monde et Le Figaro, et d'autres peut-être, éditent des suppléments hebdomadaires littéraires, je n'ai eu le temps que de les survoler pour l'instant même si ce n'est pas l'envie qui me manque. Mohammed Aïssaoui est journaliste au sein de la rédaction du Figaro Littéraire, il est également auteur d'essais, Son pays natale, l'Algérie, a précédemment été au centre de l'un de ses écrits le goût d'Alger, on ne s'étonne donc pas de le voir surgir ici sous la forme romanesque du récit. Les funambules a été pressenti pour le prix Goncourt, mais n'a pas passé la dernière sélection, qui vient de tomber au moment ou j'écris ces lignes (le 27 octobre).

Nous plongeons dans l'histoire, à la fois algérienne et française, d'un narrateur d'une trentaine d'années. Un homme solitaire mais qui écrit pour et à travers les autres. Car c'est toujours à travers l'autre, sa mère, ses amis, qu'il se montre, mais son métier, et sa personnalité, l'amène davantage à jouer le porte-parole de son semblable que de lui-même. Et c'est ce qui est appréciable ici. Avec cet oeil finement observateur sans jamais être inquisiteur, mais toujours juste, un esprit à l'affut de ce que son interlocuteur exprime à travers son attitude et ses gestes, ce qu'il ne dit pas. Et un fil conducteur, Nadia, sa Nadia, celle qu'il recherche, afin de clore un chapitre, le sien, peut-être le leur.

Je ne sais pas vous, mais me concernant, je commence à saturer de ces romans dans lesquels les auteurs s'épanchent à longueur de temps. Et notre narrateur, est-ce seulement Mohammed Aïssaoui, quelques éléments le laissent croire, c'est surtout l'autre qui l'intéresse, sa vérité. Non rien d'époustouflant, rien de transgressif, de blasphématoire dans ce roman, et je peux comprendre celui qui est davantage habitué à lire Bernanos ou d'autres écrits très engagés, que ce roman puisse ne pas le contenter (toute ressemblance avec une personne existante ou ayant existé n'est, bien entendu, pas fortuite). Moi, j'ai été frappée par la justesse de son regard, de celui qui se préoccupe de ces gens de tout les jours, de moi, de vous peut-être, de ce que leur apparent anonymat dissimule, mais un regard toujours pertinent et bienveillant. Voilà un narrateur, un homme qui sait mettre son interlocuteur en valeur, qui décèle ses fragilités, ses faiblesses, ses « failles » comme il le dit lui-même, qui prend soin de ne pas juger – à quoi bon ? – et surtout de rendre extraordinaire l'apparente banalité de chacun. Il est de ces hommes qui lit dans l'histoire des gens. Il est plus facile de parler de l'époustouflant que de l'immensément ordinaire, la beauté n'est seulement pas dans l'éclat du subversif mais dans la banalité de l'ordinaire que la plume de Mohammed Aïssaoui dépoussière d'un clin d'oeil.

Et puis, j'ai eu une approche plus personnelle à ce roman, Parce qu'à travers ce quartier de Paris où il a essayé de se recréer un foyer, lui l'exilé, j'y ai vu une réplique de ces petites ou grandes villes de province qui ont vu arriver à diverses époques, italiens, espagnols, turcs, algériens, tunisiens, portugais, marocains, et j'en oublie. Ces villes qui abritent ces bars, un peu passés, mais que son propre grand-père, frère, père fréquentait, avec les mêmes individus, un peu paumés, les mêmes piliers de comptoir. Approche personnelle aussi parce qu'il a su percevoir du premier coup d'oeil les défaillances de certaines familles qui s'adressent à lui, les égos disproportionnés.

C'est un regard presque affectueux sur les gens, une douceur apaisante qui fait du bien à coté des coups de griffes continuels des uns et des autres, des critiques littéraires qui confondent un peu parfois leur stylo avec un pic à glace. Un regard qui pénètre et sonde les gens, qui parvient à capter leur personnalité profonde au-delà de toute forme de jugement péremptoire. Cette image du narrateur avec son crayon, son bloc-notes face aux personnes qu'il interroge me fait penser à une forme de psychothérapie avec tous ces individus qui s'ouvrent à lui. C'est aussi le roman d'un homme qui cherche sa place, perdu entre plusieurs mondes, celui qui était le sien, celui qui l'est devenu, celui qui fut un temps près de Nadia. Il semble être à la recherche d'un lieu qui l'adopte, qu'il adopterait, mais finalement, peu importe le lieu, il s'agira peut être de découvrir que ce sont les gens qui l'entourent, et c'est à lui d'adopter. Les Funambules parvient à décrire la précarité, l'équilibre chancelant, de ces personnes fragiles qu'il rencontre, qui se maintiennent en vie grâce au mince fil d'une raison, d'une cause, d'une passion. Grâce à Mohammed Aïssaoui, on se rend davantage compte de la fragilité de ce qui peut nous tenir en vie, et de certaines personnes dévouées aux autres.

J'ai lu un retour négatif sur ce roman, car il n'a pas d'intrigue à proprement parler, j'avoue que c'est le genre de roman qui peut décontenancer dès lors que l'on s'attend à une structure classique, incipit, intrigue, dénouement. Je pense qu'il faut se laisser porter par les différents récits de ces personnes dont il croise le chemin et dont il sait capter l'âme comme personne. de l'observation, de la réflexion, sur ceux qui se vouent aux autres, le contraire ne l'intéresse pas, et leur redonner une parole lui permet quelque part de trouver la sienne de voie, lui le témoin presque invisible, de ces voix que personne n'écoute plus.







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