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4,18

sur 1985 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Toute « La Maison aux Esprits » est contenue dans la dédicace de l'auteur :
« A ma mère, à ma grand-mère et à toutes les femmes extraordinaires de cette histoire. »
Car ce roman est avant tout celui de cinq femmes .
L'arrière-grand-mère tout d'abord, Nivea del Valle, l'une des premières suffragettes chiliennes. Comme ses homologues britanniques, cette épouse d'un athée franc-maçon n'hésita jamais à s'enchaîner aux grilles devant les hauts lieux de la vie politique du pays. Prête à seconder activement son mari en politique dans le seul espoir de faire un jour promulguer une loi donnant le droit de vote aux femmes, Nivea est – déjà – une forte personnalité, allergique au clergé catholique et moderne avant l'heure puisqu'elle entend ne pas trop contrarier la Nature dans l'éducation de ses enfants. C'est qu'elle a mis au monde quinze enfants dont onze seulement survivront. Parmi ses filles, l'aînée et la cadette connaîtront un destin étrange : par une farce macabre du Destin, la seconde finira en effet, après le décès de la première, par épouser le fiancé de celle-ci.
La grand-tante ensuite, Rosa, d'une beauté si sculpturale et si étrange que, bien qu'il appartienne à une famille singulièrement appauvrie par les folies paternelles, Esteban Trueba comprend, dès qu'il la voit, que ce sera elle, et personne d'autre. Pour lui garantir le train de vie auquel elle est habituée, le jeune homme part pour deux ans exploiter une concession minière. Travail ingrat et désespérant qui, le jour même où il porte enfin ses fruits – la découverte d'un filon prometteur – perd sa raison d'être : par un télégramme de sa soeur, Férula, Esteban apprend que Rosa vient de mourir, empoisonnée par erreur pour avoir bu une liqueur destinée à son père et dont on ne saura jamais qui en avait déposé la bouteille chez les del Valle.
La grand-mère enfin, pivot central du roman, Clara, soeur cadette de Rosa. Pressé par sa propre mère alors aux portes de la Mort et frappé par la beauté de la jeune fille, qui lui rappelle celle de la disparue, Esteban l'épouse dix ans après le décès de Rosa. A cette époque, lui-même est devenu un parti plus que présentable. Outre les bénéfices de la concession minière qu'il continue d'exploiter par ingénieur interposé, il a remis sur pied une propriété qu'il tenait de sa mère, les « Tres Marias. » C'est donc à un homme riche, terre-à-terre et rude que se lie Clara, en toute connaissance de cause puisque ses prémonitions l'en avait avertie. Toute enfant, Clara avait déjà des prémonitions (elle avait annoncé la « mort pour une autre » de Rosa et, terrifiée d'avoir si bien prédit, se refusa par la suite à émettre un seul son pendant les dix ans qui suivirent). Elle parlait aux esprits et, toute sa vie, les esprits accompagneront et chériront ce charmant médium qui, jamais, ne se laissera aller au pessimisme ou au désespoir. Quand elle mourra, après une vie bien remplie, laissant derrière elle un Esteban Trueba inconsolable, « la Maison aux Esprits, » qui donne son nom au roman, perdra beaucoup de son âme.
La mère, Blanca, fille de Clara et d'Esteban. Si sa mère ne lui a pas légué son talent pour faire tourner les guéridons et ressentir la présence de l'Au-delà, elle lui a assuré le caractère fort et rebelle aux conventions établies qui, depuis Nivea, semble caractériser les femmes de la famille. A tel point que, le temps venu, Blanca n'hésite pas à devenir la maîtresse du fils de l'un des fermiers de son père, Pedro Garcia III. On imagine la fureur d'Esteban … Comme Blanca se retrouve enceinte, elle doit finalement se résoudre à épouser, pour sauver la face, un aristocrate français qui passait par là, le dénommé Jean de Satigny. Mais, lorsqu'elle finit par découvrir les étranges préférences sexuelles de son époux, elle s'enfuit et s'en retourne chez ses parents. Et c'est dans « la Maison aux Esprits » que naît la quatrième héroïne du conte …
… la petite-fille et arrière-petite-fille, Alba, la narratrice principale. C'est elle qui retrouvera les « cahiers de notes sur la vie » que la grand-mère Clara avait commencé à rédiger alors qu'elle n'avait même pas dix ans. C'est elle qui aura l'idée de demander à son grand-père de l'aider à reconstituer ce qu'elle peut encore ignorer du passé familial. Et c'est donc elle qui introduira dans ce roman si dominé par les femmes la seule voix masculine d'envergure qui s'y fera entendre. Cela se passera après le coup d'Etat de Pinochet et de la Junte, après que le vieil Esteban sera parvenu à faire sortir Alba des geôles du pouvoir. le monologue effondré du vieillard, s'en allant demander de l'aide à la seule personne susceptible de faire libérer sa petite-fille, constitue, je trouve, l'un des morceaux de bravoure du livre. Toute l'histoire du Chili, depuis la fin du XIXème siècle jusqu'aux jours sombres de la Dictature post-Allende, défile ici en un saisissant et émouvant raccourci, exposant les faiblesses et les forces non seulement de la classe possédante « traditionnelle » dont Trueba est le rude représentant mais aussi de la classe « prolétaire », symbolisée pour sa part par Miguel, un guerillero gauchiste dont Alba est tombée amoureuse.
Bref, même s'il faut s'habituer à un style qui privilégie les virgules au détriment des points, ce roman paraît touché par la grâce et on le lit presque d'une traite tant les personnages qui le traversent sont prenants et convaincants. L'auteur est une conteuse-née, la chose ne fait aucun doute et cet art se fait trop rare de nos jours en littérature pour qu'on ne l'apprécie pas comme il se doit. Bonne lecture ! ;o)
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Dans ce roman on va suivre la famille Trueba sur plusieurs générations : d'Esteban riche propriétaire d'une grande ferme sur les terres sauvages du Chili, de son épouse Clara à l'esprit libre et aux tendances occultes, de leurs enfants...jusqu'à la Révolution chilienne qui va secouer leur destin.

Une saga romanesque que j'ai vraiment beaucoup aimé, ce fut une réelle surprise pour moi. J'ai adoré le décor de cette maison et des paysages alentours, j'ai adoré le personnage de Clara forte, libre et qui amène un vent de fraîcheur, j'ai bien évidemment exécrée Esteban et pourtant j'ai trouvé très touchante sa relation avec sa petite-fille. J'ai moins accroché sur la partie politique du pays. C'était hyper bien écrit, j'ai passé un super moment de lecture. Attention quand même parce que bien évidemment la condition de la femme et les agressions peuvent choqués certains et c'est à replacer avec l'époque bien sûr !
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Un des plus beaux livres que j'ai lus ... passionnant et bien écrit !
On se plonge dans l'histoire qui nous entraîne avec délice dans cette saga familiale .
Le meilleur livre d'Isabelle Allende ! Bien sûr , on pense à "Cent ans de solitude" autre chef-d'oeuvre ...
A lire absolument !!!
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N°274 – Juin 2007

LA MAISON AUX ESPRITSIsabel ALLENDE – FAYARD.
(traduction Claude et Carmen Durand)

Je le confesse bien volontiers, avant ce livre, je ne connaissais pas Isabelle Allende, mais mon irrésistible passion pour les écrivains sud-américains m'a tout naturellement entraîné vers elle. J'ai lu son livre avec gourmandise et intérêt, je n'ai pas été déçu! Faire des comparaisons, évoquer d'autres écrivains qu'on juge “cousins” à la lecture d'un roman est toujours un exercice à haut risque, parce que, sans renier l'apport de ses pairs, même s'il s'agit d'un premier roman[publié en 1994], l'auteur veut toujours être lui-même. La quatrième de couverture sacrifie à ce qu'on peut considérer comme une tradition. Eh bien, que mon improbable lecteur me pardonne, tout au long de la lecture de cet ouvrage, j'ai pensé à Gabriel Garcia Marquez! Ici, j'ai retrouvé sa verve intarissable, son sens du détail où l'humour le dispute à la précision du verbe.

Comme lui, elle a ce don de l'écriture qui prend le lecteur au début du récit par une phrase courte et apparemment anodine, ici “Barrabas arriva dans la famille par voie maritime, nota la petite Clara de son écriture délicate”, et l'abandonne quelques cinq cents pages plus tard, émerveillé par ce qu'il vient de lire, étonné d'avoir pu être tenu en haleine par un récit rendu passionnant autant par un style jubilatoire que par le sens consommé de la relation d'une histoire où jamais l'ennui ne s'insinue dans sa lecture, où le réalisme le dispute au burlesque et parfois au tragique, et surtout un peu triste que cela s'arrête!
Je dois également souligner que la traduction n'est pas être étrangère à cette complicité heureuse qui se tisse entre l'auteur et son lecteur.

Isabelle Allende nous invite donc dans cette famille dont elle nous présente chaque membre à travers l'histoire de sa vie et les arcanes de son destin; elle le fait comme un témoin qui rassemble ses souvenirs pour les confier au papier, mais laisse Esteban Trueba, le grand-père qui va mourir, exprimer à la première personne et brièvement, ses états d'âme et ses remords.

Il y a, certes, l'humour qui marque les choses, ce petit arrangement avec l'existence qui permet de s'en moquer. Elle paraît ainsi moins dure, plus acceptable, moins invivable. Il y a, aussi le compte rendu fait au lecteur autant qu'à soi même par l'auteur, l'histoire qui arrache un sourire intérieur en se disant que « voilà au moins quelqu'un qui écrit bien »... Mais quand même, il faut aller au-delà et bien des scène rapportées ne prêtent pas à sourire, bien au contraire. le talent de l'écrivain force l'attention parce qu'elle rend compte de la réalité de la vie, qu'elle choisisse de décrire un paysage désolé, la condition du petit peuple ou l'édification d'une fortune, la décrépitude d'une personne en fin de vie. C'est que l'histoire de cette famille, racontée sur trois générations se confond avec l'histoire de ce pays d'Amérique latine jamais nommé, mais que le lecteur identifiera facilement, surtout à la fin parce qu'il évoque désormais la démocratie assassinée, mais aussi parce que le nom de l'auteur y est également et définitivement associé. Elle y plante le décor, dans cette maison labyrinthique dite « du coin », elle est un peu une unité de lieu comme l'est aussi celle des « Trois Maria ». Esteban Trueba y traverse le temps, y bousculent les événements, les épousent en fonction de ses intérêts ou de ses convictions, entouré de ses bâtards, de ceux qu'ils appelle pompeusement « ses gens », de flagorneurs et surtout de femmes. Car les véritables personnages de ce roman sont des femmes, Rosa la belle qu'il ne put épouser, Clara la clairvoyante qui la remplaça, Blanca sa fille et Alba sa petite-fille, et même secondairement les soeurs Mora, Férula et Transito Solo... Chacune d'elles imprime sa marque, pèse sur ce qui fait la trame de cette histoire. Certaines d'entre elles ont des dons paranormaux et, invoquant les esprits des morts, les font réapparaître et lisent l'avenir dans leurs rêves. C'est à Alba, sa petite fille et non à un mâle, qu'il passe en quelque sorte le relais et la responsabilité de transmettre la vie et de faire perdurer la dynastie qu'il a fondée. C'est le souvenir de son épouse morte qu'il invoque avant lui-même de remettre son âme à la mort. Pourtant, au risque d'étonner mon lecteur, je dirai cependant que cette histoire est assez banale. Toutes les familles comptent dans leur sein des êtres uniques qui emplissent l'espace autour d'eux et parfois écrasent ceux qui vivent dans leur ombre. Ici, l'art de la romancière transcende les événements qu'elle rapporte, met en scène les personnages pour le plus grand plaisir du lecteur.

Dans un roman, on prend la mesure du temps et de l'usure des choses, de la dimension des personnages, de leur côté dérisoire et parfois ridicule. le lecteur attentif comprend que le monde y est petit et que la vengeance qui anime les êtres finit toujours par déverser son fiel, il assiste à la réalisation de cette fresque sans fard de la condition humaine, de ses grandeurs, de ses facettes cachées, pitoyables ou secrètes parfois, de sa force mais aussi de ses fragilités... comme dans toutes les sagas, il y a ceux qui réussissent et ceux qui lamentablement échouent, ceux qui s'adonnent aux plaisirs de la vie et qui lui brûlent des cierges, ceux qui préfèrent parler à Dieu et Lui offrir encens et prières, ceux qui veulent tout changer et ceux qui jettent sur elle le regard désabusé du spectateur blasé que rien n'étonne plus, ceux qui choisissent de n'être rien qu'eux-mêmes... Au cours de ses chapitres on célèbre la vie mais la Camarde pousse son linceul... Par le miracle à chaque fois renouvelé des mots, les morts ressuscitent et les souvenirs se débarrassent de leurs scories de malheur, s'habillent d'une douce patine.

La vie, l'amour, la mort, ces thèmes éternels peuplent les romans depuis que l'écriture a été instituée comme support de la mémoire, des fantasmes et de l'imagination, comme moyen d'exprimer ses joies et d'exorciser ses peines, parce que, malgré les apparence, le livre est un univers douloureux où l'auteur modèle à l'envi d'évanescentes aquarelles, des esquisses sombres ou des dessins couleur sépia.


© Hervé GAUTIER - juin 2007
Lien : http://hervegautier.e-monsit..
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Une saga familiale qui se suit sur plusieurs générations de femmes, dont un seul homme en est le fils conducteur.

Oscillant entre problèmes sociétaux, politiques, paranormaux, histoires d'amour, d'amitié de tromperie et de trahison... On en voit de toute les couleurs !

Excellemment bien écrit, ce livre nous plonge dans la bourgeoisie sud-américaine sur plusieurs époques.

L'on sent tout de même que les moeurs ont bien changé, notamment quand une femme violée, tombée enceinte, se réjouit de sa maternité, peu importe qui en est le père et dans quelle condition il a éventuellement été conçu. Sans compter la femme qui reproche a sont maris de violer ses domestiques mais le laisse faire sans y mettre le moindre hola.

C'était une autre époque...

Un peu longuet sur la fin mais d'un grand intérêt tout de même
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Une nouvelle plume pour moi que celle d'Isabel Allende. Dans le cadre du challenge Lecture solidaire 2023 initié sur Babelio, plusieurs auteurs.trices sont mis.e.s en avant et j'ai choisi de débuter avec Isabel Allende. Et le choix du livre étant libre, j'ai décidé de commencer, tout naturellement par son premier roman : La maison aux esprits.

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4ème de couv. :
Une grande saga familiale dans une contrée qui ressemble à s'y méprendre au Chili.
Entre les différentes générations, entre la branche des maîtres et celle des bâtards, entre le patriarche, les femmes de la maison, les domestiques, et les paysans du domaine, se nouent et se dénouent des relations marquées par l'absolu de l'amour, la familiarité de la mort, la folie douce ou bestiale des uns et des autres, qui reßètent et résument les vicissitudes d'un pays passé en quelques décennies des rythmes ruraux et des traditions paysannes aux affrontements fratricides et à la férocité des tyrannies modernes.
La Maison aux esprits, premier roman d'Isabel Allende, tantôt enchanteur, tantôt mordant, a été traduit dans de nombreuses langues et a obtenu le prix du Grand Roman d'évasion 1984.

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Je suis entrée très facilement dans ce roman, qui s'ouvre malheureusement sur un décès. Et je me suis très vite attachée à cette famille « particulière » et notamment à leur fille cadette, la petite Clara.

Il s'agit là d'une histoire de famille, sur trois génération. Tout ce que j'aime. Et j'ai aimé cette lecture. Mais, je ne sais pas pourquoi, j'ai mis longtemps à la lire …
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Lu il y a très longtemps, lorsque j'étais adolescente, il m'avait fait une forte impression.
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Le Chili avant, pendant et après Allende, raconté à travers les péripéties d'une riche famille chilienne. le tout est arrosé d'un brin de fantastique sud américain.

Superbe livre, mais dommage que les derniers chapitres soient un peu lourds à lire.
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J'avoue être assez peu entré dans les passages fantasmagoriques du roman, heureusement marginaux en fin de compte. En revanche, on en apprend beaucoup sur la société chilienne avant la dictature et pendant, puisqu'aussi bien la fiction est très relative et les descriptions très réalistes. Ce livre aide ainsi à comprendre certaines caractéristiques de ce peuple à part en Amérique latine à bien des égards.
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Un roman aux multiples visages : la saga d'une famille chilienne au coeur du XXe siècle et de ses grandes péripéties, sur fond de réalisme magique, politique et social.
Un récit complexe mais résolument engagé (notamment contre la violence de la dictature, décrite crûment), avec des personnages mémorables : en particulier celui du père de famille conservateur, Esteban Trueba, presque attachant malgré sa violence et ses égarements, et de sa femme lunatique et un peu sorcière, Clara del Valle.
Un très bon moment de lecture tenu par un style généreux, mais dont le propos m'a parfois paru manqué d'unité (mais peut-être est-ce intrinsèque au genre de la fresque…)
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