Je ne dis rien de toi que je ne vois pas en toi

👄Chronique👄

« Nous sommes si peu de choses en ce monde. Habituez-vous à cette évidence. Tout ira bien. Je sais qu'une telle vérité pourrait blesser votre amour-propre, mais…»

Quelle dose d'amour, s'accorder quand on est multiple? C'est la question qui me hante après cette lecture…
Parce que de l'amour, il en faut. de l'amour-propre aussi. Surtout quand l'esclavagisme et l'inquisition sévissent. Surtout quand l'identité se scinde. Surtout quand les trahisons sont le vice de sinhô et de sinhà…Alors on s'accroche à l'amour, à la pierre, ou au saint?
Vitória regarde droit devant. Elle devenue l'invincible victorieuse. Elle s'est recréée en oracle, à mi-chemin entre la sorcière et l'amant irrésistible. Elle s'est recréée dans sa vérité. Une vérité que certains ne sont pas prêt à concevoir, encore moins à accepter. Elle est celle qu'on craint mais qu'on aime passionnément, celle qu'on dénigre mais qu'on consulte obstinément, celle qu'on désire mais qu'on condamnerait sans regret. Ce personnage est magnétique. En étant indéfini et multiforme, elle devient aimant. Une attraction puissante et complexe. Je ne dis rien d'elle que je ne vois pas en elle, mais je dis qu'elle est mon crush, dans toute cette histoire…
Pourtant, les autres personnages qui se dévoilent dans ces pages sont tout aussi passionnants et passionnés. Ils sont tous pétris de haine et d'amour, de craintes et de joies, de feux et d'or. Ils ont soif de libertés. Mais Vitória brille au dessus du lot, peut-être parce qu'elle a déjà vécu cinq vies, qu'elle sent le jasmin de nuit, ou alors qu'elle m'aurait envoûtée, que sais-je? Mais elle, elle sait. Elle sait les secrets des uns et des autres, elle connaît le coeur des hommes, le noir des âmes, les vices des puissants…Elle sait et elle joue et déjoue les manigances des maîtres et de l'Eglise pour mieux se rapprocher de l'Amour…
J'ai trouvé ce roman fascinant. La plume de Eliana Alves Cruz est incroyable de poésie et de beauté. Sans compter, qu'elle apporte un éclairage sensible et engagé sur la colonisation et la transidentité. J'ai aimé sillonner les chemins du passé au travers de ce narrateur bien mystérieux qui nous conte les enjeux politiques et religieux du Brésil au XVIIIe siècle, tout en nous poussant à rencontrer une famille dans la tourmente, avec des moeurs plus ou moins controversées…Mais quid de l'or ou de l'amour arrivera à libérer les choses, les vérités et les opprimés?
Je ne dis rien de plus, mais toi, tu devrais aller voir la belle Rio qui vibre de multiples passions en eux. Je ne vois ce qu'il y aurait de mieux à faire, alors regarde bien droit devant, et fonce lire des amours interdites et libérées…
Captivante et avant-gardiste, je vous conseille vivement de suivre cette autrice talentueuse! Coup de coeur 💘
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Voyager dans le temps a toujours été un fantasme inatteignable pour beaucoup, le roman d'Eliana Alves Cruz "Je ne dis rien de toi que je ne vois pas en toi", à défaut de vous rendre le goût des fraises de votre enfance, vous permettra au moins de voyager dans le Rio de Janeiro du XVIIIème siècle sans quitter votre canapé.

Le décor est luxuriant, la frénésie humaine bat son plein à l'idée de tout l'or abrité sous ces cieux, le fanatisme catholique veille au grain de la bonne marche du monde. Nous sommes bien dans le règne cynique du capitalisme (avec sa pierre angulaire : le commerce triangulaire) et de sa chère comparse : l'Inquisition.

Mais, comme de tout temps, le décor ne fait pas toute l'histoire. La vie est affaire de personnages et si ceux d'Eliana Alves Cruz ont pour vocation d'incarner leur époque, ils le font dans une remarquable diversité.

Les familles Gama et Muniz, dont la renommée dans la région et outre-atlantique n'a d'égale que la richesse matérielle, s'apprêtent à s'unir par le mariage utile de leur progéniture. Si l'étincelle de l'amour des jeunes Sianinha et Felipe ne risque pas d'incendier la ville, c'est que chacun d'eux semble avoir le regard attiré dans une autre direction. Qu'importe, l'essentiel pour leurs familles reste d'assurer leur statut social, de mettre la main sur le précieux métal nouvellement découvert dans la région du Minas Gerais, en évitant de trop en reverser à la couronne, et de faire en sorte de dissimuler leurs origines juives qui les mettent dangereusement en péril. Pour leurs esclaves, les enjeux sont plus modestes, il s'agit de survivre au milieu de toute cette folie et si possible d'esquisser un possible chemin vers l'affranchissement.

Tout est chamboulé par l'arrivée du grand inquisiteur Frei Alexandre Sardinha qui compte bien lever le voile sur les dissimulations des uns et des autres, et de l'afflux soudain de missives anonymes qui font trembler moult individus.

Pourtant il est une personne qui semble n'avoir peur de rien. Elle est noire, prostituée, transgenre et sa puissance réside sans doute dans le fait qu'elle vit dans sa vérité. Qu'on la voit sorcière ou guérisseuse, oracle ou démon, elle est elle. Héritière de ses cinq vies et de ce nom légitime : Vitória.

Entre les codes du conte, la structure du théâtre, et la critique sociétale, l'autrice m'a embarquée dans les aventures de ses personnages si différents mais tous intéressants. Jusqu'au plus mystérieux de tous : le narrateur caché.

En février 1732, Frei Alexandre Saldanha Sardinha, représentant portugais de L'Inquisition arrive à Rio de Janeiro. Grâce à la délation récompensée, il entend bien découvrir le vrai visage des grandes familles de colons portugais. Notamment des familles Muniz et Gama, ces colons juifs enrichis par le trafic d'or de la région de Minas Gerais qui se prétendent aujourd'hui chrétiens.
Antonio Gama a trois fils. Les deux aînés nés d'un premier mariage gèrent l'entreprise à Minas Gerais et à Lisbonne. Felipe, fils de sa seconde femme Manuella, doit épouser Sianinha, fille de Dona Branca Muniz afin d'unir leurs deux fortunes. Mais Felipe aime en secret Vitoria, une prostituée transgenre. Né homme au Congo, Vitoria est devenue prêtresse avant d'être déportée en Amérique pour être finalement libéré de l'esclavage au Brésil grâce à ses pouvoirs de guérisseuse et de voyance.
Depuis l'arrivée de l'Inquisiteur, les Gama reçoivent des lettres anonymes pouvant compromettre leurs ambitions. La peur des uns et des autres créent une atmosphère conspiratrice.
Dans cette atmosphère de suspicion s'élève le personnage de Ze Savalu, esclave au service de Dona Branca. Avec sa compagne Quiteria, il suscite la jalousie de Sianinha. A tel point qu'il demande la permission d'aller à Minas Gerais afin d'obtenir de l'or pour acheter sa liberté et celle de Quiteria enceinte.
L'expédition vers Minas Gerais est longue et périlleuse. Ze est embarqué comme esclave de Frei Alexandre. Sur ordre de son père qui voit un moyen de resserrer les liens avec l'inquisiteur, Felipe les accompagne.
Eliana Alves Cruz nous emmène au coeur d'une expédition dangereuse dans une nature sauvage soumise aux éléments. Trois mois de voyage à traverser montagnes et rivières pendant lesquels certains liens se resserrent et des haines s'attisent. C'est aussi la découverte des conditions de travail dans les mines, l'exploitation d'enfants, les tentations de la contrebande. Des passages passionnants entre l'entraide des esclaves et la perversité des maîtres.
Pendant leur année d'absence, tant de choses se sont jouées à Rio chez les Gama.
Aucun temps mort dans ce récit passionnant rythmé par les passions amoureuses, les manipulations, les trahisons et les expéditions dangereuses dans une nature belle et sauvage.
Si il faut quelques pages pour se familiariser avec l'époque, les lieux, les multiples noms des personnages, les explications bien amenées par l'auteur nous plongent facilement dans cette histoire d'où s'élèvent renégats et coeurs purs. Si je retiens les personnages De Felipe et Vitoria, c'est sans nul doute la personne de Ze Savalu qui me restera en tête.
Plongez dans ce roman, vous ne serez pas déçu!
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Après la Moldavie, les éditions Tropismes m'ont embarqué dans un voyage vers le Brésil et dans le temps. Destination Rio de Janeiro au XVIIIe siècle. Un mystérieux narrateur nous conte l'histoire d'amour interdite entre Vitória et Felipe. Leurs différences vont de la couleur de peau aux origines, en passant par la richesse et le métier. Elle, est d'origine africaine, née dans un corps masculin, ancienne esclave, prostituée. Lui, d'origine juive, mais le dissimulant, possède la richesse et la réputation et doit en épouser une autre. Leur relation passionnée est mise à mal par toute l'hypocrisie, les secrets et les lettres anonymes qui gravitent autour d'eux.

Attention, ce roman historique n'est pas seulement une histoire d'amour. Les thématiques évoquées sont multiples et complexes : religion, lutte des classes, antisémitisme, prostitution, inquisition, colonialisme et esclavagisme. L'ambiance est à la peur. L'autrice met en lumière une héroïne forte et "victorieuse" mais aussi les esclaves ou "esclavisés", comme elle dit, venus d'Afrique. Arriveront-ils à s'affranchir et à terminer leur périple sains et saufs ? Les secrets des puissants seront-ils révélés ? Qu'adviendra t-il de Vitória et Felipe ?

Malgré les thèmes difficiles, la plume de l'autrice est aussi belle que l'illustration qui orne la couverture. On est emportés dans ce roman foisonnant, vibrant qui est avant tout une formidable quête de liberté... Une très jolie découverte.
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Un roman vibrant autour de l'Inquisition, de l'antisémitisme, du racisme et de la prostitution.

Felipe est jeune, riche et blanc. Sa vie était faite de cours d'équitation et de maniement d'armes, d'études harassantes, de dîners silencieux, de messes, de leçons de piano monotones, de conversations insignifiantes et de visites polies à sa promise depuis sa plus tendre enfance.

Vitoria est prostituée, sorcière et transgenre. Elle est née au Congo puis est partie au Brésil où elle a été vendue, revendue et à connut plusieurs maîtres avant de parvenir à conquérir sa liberté.

Entre eux, l'amour est puissant mais cette relation avec le fils d'une famille aussi prestigieuse était un véritable interdit, puni par les galères, le bannissement ou la mort.

Entre suspicions, expéditions dangereuses et trahisons, on suit l'histoire des familles Gama et Muniz utilisant des noms d'emprunt pour se mettre à l'abri de la religion unique et officielle, au milieu de laquelle vient se loger la magie et l'énergie de Vitoria.

Un roman historique passionnant ! A lire !
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