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EAN : 9782843982125
156 pages
Apogée (29/03/2006)
4.4/5   5 notes
Résumé :
Ecrire au plus près de soi, dans un souci d'attention au monde. Interroger notre quotidien le plus banal. Creuser dans la mémoire et ses failles. Apprivoiser deuils et blessures. C'est l'un des objectifs que s'est donné Françoise Ascal. Les journaux Cendres vives et Le Carré du ciel constituent les deux premiers volets de cette entreprise que poursuit La Table de veille. Ecrit entre 1980 et 1988, Cendres vives aborde la mort d'un père, le monde clos de l'hôpital et ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Entre journal intime et poèmes en prose, Cendres vives de Françoise Ascal, est un livre saisissant.

Le Pré est la première partie de l'ouvrage. L'auteure évoque ici son enfance, la maison de campagne familiale, les souvenirs de l'été, d'une nature savoureuse et colorée, sonore et lumineuse, comblant l'insouciance et la curiosité d'une petite fille de 7 ans. Pourtant, dans une chambre à l'étage de la maison, le père allongé dans son lit, touché par la maladie, attend la mort.
Bien des années plus tard, l'auteure revient dans la maison de son enfance. Lieu vidé de toute présence, où seuls le silence et les objets jouent leur médiation avec le temps et les êtres, où la lumière modifie encore l'équilibre de l'endroit.
Et puis l'automne advient, il faut élaguer les arbres du verger. Les branches au sol sont comme un verger mythique ramené à la dimension d'une provision pour l'hiver.

Dans La Part du feu – deuxième partie du livre – l'auteure décrit son travail dans le milieu hospitalier, dans un service qui prend en charge des jeunes aux corps blessés, mutilés, touchés par la maladie. le côtoiement de ces jeunes patients va s'avérer de plus en plus difficile, le face-à-face avec la maladie font se disloquer, se disperser la pensée. Un moment en creux où il est difficile de trouver en soi quelque chose qui puisse la recentrer. Restent les mots :


« Pourquoi s'imposer ce travail de Sisyphe ?
Quelle est la nature de cet acharnement ?
D'où vient ce vouloir-vivre des mots, en dépit de
mes doutes, de mon sentiment du dérisoire ? »


Dans une écriture âpre et très introspective, l'auteure rend compte du malaise et du délitement d'une conscience confrontée en permanence à elle-même. le regard et le corps sont traversés de part en part, sans rien retenir. Tenter d'élargir la conscience, ce n'est que réussir à la fragmenter d'avantage.


« Laisser couler la source profonde, là où les mots
sortent de terre, modestes et pourtant irrépressibles.
Les mots au goût de racines pourrissantes, de jus
d'herbes, au goût d'enfance et d'yeux écarquillés. Laisser
monter la jouissance de vivre.
Boire sans tristesse l'eau amère des ferveurs retombées.»


L'angoisse, l'égarement, la solitude, « Pas plus qu'à la souffrance, on ne s'habitue à la splendeur » écrit Françoise Ascal, et pourtant... « En tentant d'ouvrir un chemin, j'efface paradoxalement mes traces », ces traces venues hors de soi, malgré soi.

Dans L'Ombre et l'éclat, troisième et dernière partie du livre, la poétesse avance dans une recherche d'apaisement. Son écriture se déleste de la marque de l'absolu, de cet encombrement de sens et d'inaccessible. Il faut avoir longtemps bu « sans tristesse l'eau amère des ferveurs retombées » pour s'émouvoir de nouveau, se saisir de sa réalité, de son propre reflet dans le miroir, savourer l'instant sans mesure.

Cendres vives est le premier livre que j'ai lu de Françoise Ascal. Sombre et lumineuse, son écriture tout en contraste, parle des détours que prend l'existence, comme d'un lieu de traverse qui va de soi jusqu'à soi. Les mots sont des repères poétiques qui servent à dire notre part essentielle, celle qui nous revient chacun.


« Que le soir vienne,
Que la nuit s'avance,
Ombre maternante, enveloppante, avec son ventre
de fraîcheur qui seul calme l'essaim des pensées en feu.
Que le bleu sombre envahisse l'espace,
Qu'il fasse reculer jusqu'à l'horizon la douteuse
lumière du jour,
Qu'il efface tout relief, tout contour et qu'en lui,
toutes formes bues, je me résorbe. »


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Citations et extraits (5) Ajouter une citation
J'ai fait un gâteau, lavé du linge, dessiné, nourri les chats, lu Segalen et le miracle consiste en ce que tout cela allait de soi. Gestes s'accomplissant avec naturel. Sans questionnements oiseux à leur propos concernant leur sens ou leur non-sens. Le simple fait d'être vivant allant de soi. C'est ce caractère d'évidence qui se retire si souvent de moi.
J'ai senti les appels du printemps et je m'y suis livrée sans que le poison du ricanement n'apparaisse. Fraîcheur retrouvée. Acceptation de la vie sans l'habituel tribunal convoqué pour expertise: oui ou non, vaut-elle d'être vécue ?
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(En pensant au père qui n'est plus...)

Ne sommes-nous que des relais? Est-ce que j'entends les merles pour toi, je veux dire "réellement", et de même, est-ce que G. sentira l'odeur de menthe aquatique longtemps après moi, au long de ses descentes heureuses en kayak, de telle sorte que mon amour des rivières me survivra à travers lui? Je recueille les chants d'oiseaux avec la plus grande attention, parce que leur écoute te prolonge, j'en suis sûre. Si ma conscience est assez vive, assez dilatée, alors elle s'agrandit de la tienne, et ton absence au monde semble moins triste.
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Septembre

Entretenir le feu, ramasser les fruits, travailler au jardin, écouter une cantate de Buxtehude ou lire quelques pages soigneusement choisies. Réussir une journée comme celle-ci, dans le plaisir continu, dans la saveur des gestes simples, dans le sentiment d'amour envers la vie, m'est aussi précieux que réussir un poème.
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Etty Hillesum: "pulvériser l'absolu"...
Oui, pulvériser l'absolu, pulvériser cet insatiable désir de faire de chaque instant quelque chose d'élevé, de spiritualisé. Un peu d'humilité. Venir à bout du désir même de quête.
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Je crois que c’est fini. L’exploration de la « maison », dans tous ses recoins. La maison du corps, la maison de l’âme, de la cave au grenier. Fini. J’ai vu jusqu’au fond du puits. J’ai ausculté les moindres fissures. Je sais tout des fondations, du grès archaïque qui les constitue, des silences enterrés, des douleurs murées, des impossibles scellés sous la pierre. Je sais tout du terreau nourricier, des possibles renaissances, des floraisons inattendues, des dépérissements inévitables. La maison du corps abrite celle de l’âme et c’est parfois la seconde qui veille la première, seule lueur dans la nuit, la maison née de leur union se dresse, unique, pour un séjour incertain, sur un sol incertain, dans une incertaine lumière. Maintenant j’ouvre les fenêtres. Maintenant j’entends le grondement du monde, villes, forêts, océans. Maintenant je regarde par-delà les limites coutumières. La petite lueur ne vacille pas. Elle connaît les ombres et les murs. Elle sait les brises et les tempêtes. Elle s’accommode. Juste place. Elle a trouvé la sienne. Maintenant je peux m’oublier. Maintenant je peux partir. Quitter son socle dur, ses morts pétrifiés, ses recoins d’angoisse. Maintenant il s’agit d’habiter le monde. Rejoindre d’autres séjours. Explorer d’autres maisons. D’autres forêts, océans, villes. Même si, on le sait déjà, la mort règne en maître.
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