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Vinçon Jérôme (Autre)
EAN : 9782364262607
140 pages
Al Manar (18/06/2020)
4.1/5   5 notes
Résumé :
Tenir un journal pour faire front. Pour résister aux noirceurs, celles de l'époque et celles des épreuves intimes. Ecrire dans l'accueil de ce qui vient : la maladie, la vieillesse ou la joie "sans pourquoi".
Saluer la beauté passagère, étreindre la vie si fragile soit-elle.
C'est ce que tente une fois encore Françoise Ascal dans .ces nouveaux carnets 2012/2017. Irriguée par ses sources tutélaires - la nature, la musique, la peinture, les livres, ell... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique


Françoise Ascal appelle toujours son lecteur par des titres vivifiants et interrogeants tels des bribes de haïku : le Bleu d'octobre, Rêve de verticalité, Table de veille … L'Obstination du perce-neige s'inscrit dans cette lignée, complétant la suite poétique. Ce carnet dévoile, par fragments, des années de vie et de réflexions de 2012 à 2017. le lecteur est invité à entrer en intimité, pas de manière voyeuriste, plutôt pour partager, en humilité, les questions du quotidien. Comment se débrouiller pour se sentir en vie, pour louer ce qui nous est donné, malgré la maladie, malgré la violence du monde, comment cultiver l'obstination du perce-neige, « bulbe confié à la nuit » ? L'autrice ne donne aucune leçon, avoue ses doutes, ses manques, ses redites de livres en livres qui rythment sa quête. Elle décrit, comme nulle autre, ses instants d'abandon face à la praire de Melisey, moments brefs où elle sent qu'elle a « une place sans lutte, ni menace », que s'asseoir « à la petite table sous le sapin » suffit, « sans rien forcer. » L'expérience n'a rien de tiède ni de mou, malgré son apparence de « rêvasserie ». En contrepoint, il est des pages où la maladie dévore, réduit les possibles, réveille le spectre de la souffrance, son injustice, son incompréhension, même si l'empreinte de joie et de calme creuse de petites galeries souterraines. Quel courage d'avoir gardé le fil avec ses carnets malgré la méfiance grandissante vis à vis de l'écriture ! En ces traversées souffrantes du « journal du deuxième sous-sol », en ces temps de vieillissement, et même dans ces moments où seul le bonheur de vivre, d'être en adéquation avec les choses comble, continuer à écrire ne va pas de soi. Cette problématique n'est pas une mise en abyme formelle, ou une coquetterie d'auteur, non, elle est philosophique, métaphysique, taraude avec passion beaucoup de ceux qui déposent des bouts de vie dans des carnets : « cette conscience des mots qui trahissent l'amont des mots », « la difficulté d'atteindre l'observation sans lui donner forme par les mots. » Ce carnet pose la question essentielle de la vie avec ou sans l'écriture et en même temps, il est un hymne permanent et percutant à la musique, à la nature, aux livres des autres reçus comme autant de compagnons de route. A la fin de ma lecture, je me suis sentie apaisée : la quête que mène Françoise Ascal est celle que nous menons tous à notre façon, sauf qu'elle nous fait le don de ses paroles, approche pour nous la lampe du lieu vers lequel on court souvent en aveugle. La réponse à la justification de l'écriture ne peut émerger timidement qu'après coup : le carnet posé sur la table permet la vie sous les sapins et ces pages seront des cairns sur le chemin d'un lecteur, pages qu'il n'aura de cesse de glisser dans ses poches comme les cailloux du Petit Poucet mais peut-être cette fois pour mieux se perdre en forêt et s'oublier, ou sur la piste d'une pierre turquoise étrangement disparue.
Françoise Ascal parvient, dans ce journal où la maladie est omniprésente, à proposer un livre d'une grande force, de cette force qui déborde de soi pour aller rayonner chez le lecteur. Même aux jours de désespoir, les pages dégagent quelque chose de solaire, qu'on peine à quitter, vers lequel on voudrait revenir à peine le livre quitté. Une phrase, à l'entrée du 15 novembre 2016, pourrait résumer ce volume – comme, rétrospectivement, ceux qui lui sont antérieurs : « Je suis en vie ».
Les encres de Jerôme Vinçon accompagnent chaque transition d'une année à l'autre, de leur noir profond et lumineux, comme une pause accordée, une autre forme possible de méditation.

« Pour mes dernières années, je choisis la gratitude et la lumière ».
(Marcelline Roux et Frédérique Germanaud)
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
2017



10 août

Balade à Saint-Colomban. C’est un lieu qui évoque les petites chapelles bretonnes visitées durant plusieurs étés au moment de « L’art dans les chapelles ». Rencontre alchimique entre la roche, les arbres, la pierre, le ciel. Une « densité » qui diffuse son énergie.
La prairie, malgré sa superficie d’un hectare, est un jardin clos. Une forme de vaste non inquiétant. Le contraire de l’infini des Landes. C’est habitable. Les dimensions sont humaines. Les grands arbres bornent le regard. L’au-delà peut devenir désirable, rêvé, imaginé, non imposé comme la ligne d’horizon de la mer. On demeure dans une échelle proportionnelle au corps, au pas, à notre capacité d’appréhension, voire d’étreinte.
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2017



9 août
Extrait 2

Plénitude qui ne peut se dire. L’éprouver suffit. Je voudrais posséder moins. Laisser davantage de vide pour qu’elle puisse surgir. Est-ce cela que je cherche ici, une vacance de l’être ? Contempler dissout les questions. Ici, plus facilement qu’ailleurs, j’assiste à la disparition de ce qui d’ordinaire est entrave. Comment oser dire que regarder pousser l’herbe, littéralement, s’absorber dans le flux des nuages, écouter la chute de quelques aiguilles de pin est une expérience des plus nécessaires ? Comment soutenir que cela modifie l’humain ? Le rend meilleur, plus tolérant, plus respectueux, plus aimant ?
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2017



7 août

Jaccottet évoque les dix mots du poète Buson (dix-sept syllabes dans l’original) « assez limpides pour tinter au chevet d’un mourant comme une clochette de temple annonçant qu’une porte va s’ouvrir ». Il parle aussi de « descension », opposée à l’ascension de Dante vers le paradis, une descension vers le plus humble, « les verdures basses » dont « nous serons un jour, avec un peu de chance, revêtus ».
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2012



9 septembre

Sous mon crâne, les souches d’orme, celles qui ont longuement séjourné dans notre jardin près du saule. Énormes souches dans lesquelles G. enfant a beaucoup joué. Nous les avons vues se métamorphoser petit à petit, s’arrondir, s’enfoncer, devenir terreau. Très paisiblement. Sans déchirure. Penser à cette disparition aide à accepter d’autres disparitions. Toutes les « choses du monde » sont prises dans ce processus à long terme. Et mon corps pareillement. Ainsi le fameux saule a lui-même fini dans la cheminée, en compagnie de Kawabata.
Oui, je lisais Kawabata alors. N’est-ce pas une belle fin pour un arbre ?

Musique lecture feu. Revenir à ces fondamentaux. Jouir de la maison, du jardin, de l’espace, du silence, tout ce qui est possible avant la grande vieillesse ou la maladie invalidante.
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2017



5 août

 Chutes de Miellin.  Ce lieu est toujours aussi moussu,
aussi japonisant que dans mon souvenir.  Il y a plus de
cinquante ans, je m’y baignais nue, avec un corps solide
de jeune fille éprise des fougères.

Mélancolie en songeant à ma vie, en la considérant de
l’extérieur,  comme une chose presque achevée. Une
petite vie.  Sans grandes audaces.  Aurais-je pu faire
mieux ?
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