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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Evidemment la grande force du Nageur, c'est son histoire, l'histoire exceptionnelle d'Alfred Nakache ( 1915-1983 ), tellement romanesque qu'aucun écrivain n'aurait osé imaginer un scénario aussi tragiquement débridé : un garçon juif né à Constantine devenu champion d'exception ( recordman du monde du 200 m brasse, quintuple champion de France entre autres ), représentant la France aux Jeux olympiques berlinois de 1936 puis ceux de Londres en 1948 après avoir résisté, été dénoncé et finalement déporté plus de seize mois à Auschwitz puis Buchenwald, décédé suite à un malaise alors qu'il nageait au large de Cerbère à 67 ans.

Le talent de biographe de Pierre Assouline n'est plus à prouver. Il excelle à raconter le parcours inouï d'Alfred Nakache avec un foisonnement de détails tous plus passionnants les uns que les autres : sur l'entrainement natatoire ( n'y connaissant rien au départ, j'ai eu l'impression de tout comprendre ), sur la France de l'Occupation et notamment la place du sport avec le ministre pétainiste Jean Borotra, sur la Résistance dans la région toulousaine. Y compris sur Auschwitz où je n'avais jamais lu certains faits relatés comme les combats de boxe qui y étaient organisés, déportés vs kapos voire soldats de la Wehrmacht auxquels participa le champion du monde Young Perez; ou encore le fonctionnement du Revier ( « l'hôpital » où Nakache fit office d'infirmier.

Pour autant, même si rien n'est romancé - cela aurait été indécent - tout est véridique. le Nageur n'est pas une biographie classique, c'est le récit biographique proposé par un écrivain, une mise en scène littéraire de l'Histoire absolument remarquable. A la rigueur biographique répond une intimité, une osmose, une empathie que Pierre Assouline crée pour totalement emporter le lecteur aux côtés de ce nageur.

Il lui imagine pensées et émotions aux différentes étapes de sa vie, comblant ainsi les trous laissés par les silences d'un homme qui a toujours été pudique et s'est toujours refusé à raconter les épreuves de sa vie. Il y a des scènes inoubliables dans ce livre. Si je devais en choisir une, ce serait celle où Alfred Nakache parvient à nager clandestinement dans un des bassins-réservoirs d'Auschwitz-Monowitz ( prévus initialement pour pomper l'eau en cas d'incendie, pleins d'une eau sale et stagnante ), un projet fou pour se prouver qu'il est encore un homme car « pour un nageur, c'est un moyen de survie que de retrouver l'eau, même cette eau-là », et oublier qu'il n'est ici que le matricule 172763.

Et puis il y a ce fil conducteur parfait pour donner une vraie dynamique romanesque au récit : « si je le revois, je le tue », première phrase du livre, leitmotiv que scande le Nakache d'Assouline à maintes reprises après son expérience concentrationnaire. Ce «le », c'est Jacques Cartonnet soupçonné d'être celui qui a dénoncé Nakache, sa femme et sa fille ( toutes deux décédé ), un rival jaloux devenu ennemi. Son opposé polaire. Autant Nakache apparait comme un homme exemplaire, modeste, travailleur dont l'intégrité force l'admiration, autant Cartonnet dégoute, se vautrant dans la Collaboration, intégrant la Milice et participant au journal antisémite Je suis partout.

La natation comme sport de combat. En offrant à Alfred Nakache une vie éternelle littéraire, ce magnifique récit biographique résonne comme un appel à se dépasser et à résister en toutes circonstances.
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« Rome : Si je le revois, je le tue ». Ainsi s'ouvre la première page de cette biographie qui est à la fois, une leçon de vie et un hommage au courage d'un grand nageur qui repose en paix dans le cimetière de Sète !

Comment ne pas être fasciné par le destin de ce nageur exceptionnel, Alfred Nakache.
Né dans une famille juive de Constantine en Algérie, en 1915, cet adolescent, contrairement à tous ses camarades, a une peur bleue de l'eau. Il guérit de cette phobie a treize ans, chez les scouts, lorsqu'après une partie de foot, ses camarades jettent sa paire de chaussures au fond de la piscine. Motivé par la peur d'une correction s'il rentre en chaussettes, il va plonger à plusieurs reprises, prenant ainsi conscience qu'il peut immerger sa tête hors de l'eau sans risque de se noyer.

Avec l'un de ses camarades, il assiste à un championnat de natation à Constantine où deux militaires y font l'admiration pour leurs performances. Enthousiasmé par l'ambiance qui règne autour de ces deux nageurs, Alfred Nakache plonge dans « le grand bain » du sport et choisit la natation. « Artem » est né. Il nage comme un sac mais son entraîneur à la Jeunesse nautique constantinoise remarque chez ce nageur foutraque « « un je ne sais quoi » de subtil, d'invincible. La légende est en marche !

Avec la rigueur d'un biographe, la curiosité du journaliste, la créativité, le style d'un écrivain accompli, des mots justes, Pierre Assouline rend un vibrant hommage à ce sportif de haut niveau, Alfred Nakache. Il s'intéresse à la destinée hors du commun de ce nageur plusieurs fois champion de natation dans les années de l'entre deux guerres. Ce récit passionnant met à la fois en exergue le talent d'Artem, son tempérament méditerranéen, sa jovialité, mais aussi cette période de l'entre deux guerres tant en Algérie qu'en France. Très tôt, devenu champion de France et d'Europe, recordman du monde du 200 mètres nage libre, il va participer aux Jeux Olympiques de 1936 à Berlin, dans un climat d'antisémitisme, pour terminer sa carrière à Londres en 1948.

A Berlin, avec l'équipe de France, il termine quatrième du relais 4 x 100 m nage libre, devant l'équipe allemande. Pour signifier son opposition à Hitler, sur le podium, il baisse la tête pendant que les autres font le salut nazi. Fidèle à ses principes, en 1942, il refusera de porter l'étoile jaune.

Devant ses performances et l'admiration qu'il suscite, Artem ne sent pas le danger arriver. Professeur d'éducation physique, c'est en zone libre qu'il prend ses quartiers avec sa femme et sa fille, à Toulouse où il s'entraîne avec les Dauphins du TOEC. Son entraîneur, Alban Minville, devant sa puissance musculaire, le persuade de pratiquer la brasse papillon.

« Tu resteras une savate en nage libre avec ton battement de pieds toujours défectueux ! Par contre en papillon, tu seras recordman du monde ».

Jacques Cartonnet qui pratique la brasse papillon, prend ombrage des performances d'Artem. La rivalité s'installe entre les deux nageurs. Cartonnet, collaborateur en herbe, dénonce Alfred en tant que Juif et résistant. Arrêté par la Gestapo, il est déporté avec son épouse Paule et sa petite fille Annie dans le camp d'Auschwitz. La notoriété d'Artem dépasse les frontières. Reconnu par ses tortionnaires, il va subir leur sadisme tout au long de sa captivité. Doté d'un instinct de survie, forgé dans le métal du dépassement de soi, auquel vient s'ajouter l'espoir de retrouver celles dont il n'a plus aucune nouvelle, son matricule gravé sur son avant bras « 172763 », il n'aura de cesse de lutter contre sa mort. Transféré à Buchenwald, il sera libéré par les américains. Terriblement diminué, il ne pèsera plus que 40 kg.
Seul un entraîneur tel qu'Alban Minville peut l'aider à se reconstruire. Pour un nageur, la sensation de l'eau peut l'amener à ressentir de nouveau son corps, ses cinq sens vont petit à petit renaître à la vie et c'est cette endurance, cette volonté, ce combat prodigieux qui suscite l'admiration. La nage va lui permettre de se reconnecter à son propre moi intime, loin du bruit, de l'agitation du monde. Evidemment, ses fantômes vont l'accompagner, se cristalliser au fond de lui, il réapprend à vivre, il résiste à la mort, domine ses pulsions, le récit est intense sous la plume de Pierre Assouline.

J'ai beaucoup aimé ce livre qui permet, à la fois de découvrir cet homme exceptionnel de courage mais aussi d'en apprendre encore un peu plus sur cette période. J'y ai découvert Constantine et les manipulations politiques, pénétré les coulisses de l'assemblée Nationale avec les débats où seule la voix de Pierre Mendes France s'opposera à la participation de la France au Jeux Olympiques de Berlin, observé l'attitude des sportifs devant la montée du nazisme, assisté aux discriminations dans les clubs sportifs, les rivalités mais aussi la solidarité.

Je pratique la natation depuis toujours même si aujourd'hui, je suis beaucoup moins assidue, Pierre Assouline m'a parlé. En suscitant ma sensibilité, il a provoqué un lien à travers son oeuvre par sa manière de décrire parfaitement la volonté et la force du travail qu'il faut pour parvenir à un objectif. J'y ai retrouvé les sensations de la natation et de l'entrainement. Ses profondes connaissances de l'histoire de l'occupation et du sport ont abouti à un récit passionnant de bout en bout. de nombreuses piscines portent aujourd'hui le nom d'Alfred Nakache et d'Alban Minville, nous leur devons bien cet hommage.

Pierre Assouline est un auteur que j'apprécie tout particulièrement. En séance de dédicace dans la librairie de mon quartier, je me suis offert ce livre sans hésitation et sans connaître le sujet de ce livre. Ce fut une très belle surprise !

Une autre surprise m'attendait. Un hommage à Léon Lehrer qui a été le compagnon d'infortune d'Alfred Nakache à Auschwitz mais qui est aussi le papa d'un ami très proche et dont j'ai le livre dans ma bibliothèque « Un poulbot à Pitchipoï ». Beaucoup d'émotions dans ce livre.

« le nageur est capable d'avancer dans la direction de son choix, si nécessaire à contre courant. Un nageur est maître de son destin ».
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Suivre ce nageur, dont Pierre Assouline nous raconte le parcours, est impossible dans sa ligne d'eau. Il nage trop vite. Pourtant tout gamin, à Constantine, il avait dû lutter contre sa phobie de l'eau... Et si c'était ça le secret du livre, la capacité d'Alfred Nakache à se battre contre l'adversité en mobilisant les valeurs inculquées par ses parents et sa volonté de vaincre. Je trouve que c'est une excellente idée d'aborder le sujet difficile de la déportation à travers un sportif adulé, ayant fait partie de l'élite sportive avant la seconde guerre mondiale. L'opposition frontale entre forces de vie et forces de mort atteint son plus haut niveau, plongeant le lecteur dans l'horreur du crime et des criminels mais aussi au coeur des forces individuelles permettant une résilience.

Nous faisons la rencontre d'un sportif hors-norme que nous suivons dès son enfance en Algérie jusqu'à son décès en 1983 dans le port de Cerbère en Pyrénées-orientales, alors qu'il boucle comme chaque jour son kilomètre à la nage. Entre les deux époques, il a été champion de France et d'Europe avant d'être sacré recordman du monde, puis déporté à Auschwitz et Buchenwald suite à une dénonciation. Il a 28 ans quand il est arrêté avec sa femme et sa fille de deux ans et demi. Pierre Assouline écrit qu'on n'arrête pas les enfants de résistants mais on arrête, on déporte et on gaze les enfants juifs.

« Le convoi numéro 66 s'arrête en pleine nuit trois jours après avoir quitté Drancy. Trois jours et deux nuits de cauchemar. […] Paule et sa fille sont envoyées dans la file de gauche pour être embarquées dans un camion avec d'autres mères, des infirmes, des vieux. Alfred dans celle de droite avec des hommes valides, robustes, ainsi que quelques femmes qui le paraissent tout autant et même le vieux Ruben Job, qui a tout de même soixante-quinze ans, mais qui est médecin. »

Il sera le seul à revenir à la fin du printemps 1945, parvenant à reprendre le chemin de la piscine et à participer en 1948 aux Jeux de Londres, premiers jeux après ceux de Berlin de 1936. Tout un symbole ! A travers la vie de ce nageur, l'auteur donne la parole à toutes celles et tous ceux qui dérangeaient (ou dérangent), que ce soit par leur opinion, leur religion, et dont l'existence en tant que telle est remise en cause directement. On observe le passage de la célébrité à la haine absurde, criminelle, contre un compétiteur qui fait de l'ombre à ses rivaux de club, notamment le sinistre Jacques Cartonnet, très actif dans la collaboration. Les nazis, également, n'ont pas oublié que Nakache a battu leurs nageurs aux jeux de Berlin en 1936. Sous le nazisme et le régime de Vichy, le sport est une affaire d'État.

Alfred Nakache, à son retour, rêve de vengeance contre les délateurs sans avoir de preuve irréfutable de la culpabilité de Cartonnet. Celui-ci, double champion du monde du 100 et 200 m brasse, membre de la milice, a été condamné à mort à la libération, mais sa trace se perd dans des couvents en Italie... Roland Gibel autre nageur en eau trouble qui venait à la piscine à Toulouse en uniforme de milicien muni d'un revolver passera devant les juges.

Des passages émouvants évoquent la vie dans les camps de concentration dont il est rappelé que les opposants ont été les premiers à y être regroupés, parvenant à une certaine entraide et solidarité, quelquefois, en plein cauchemar...

C'est un récit parfaitement mené, l'évocation d'une résilience exceptionnelle, de celle qui force le respect, la juste mémoire d'un sportif ayant connu la gloire à l'égal d'un Zidane ou d'un M'Bappé, brusquement plongé dans l'horreur du racisme, de l'antisémitisme. le nom Alfred Nakache a été donné à de nombreuses piscines (Paris, Toulouse, Montpellier…) et une pièce de théâtre intitulée « Sélectionné » a connu un beau succès cette année au théâtre Marigny. La déportation, les camps d'extermination, la Shoah ont été le fait des nazis mais Pierre Assouline rappelle que Pétain a décidé spontanément d'ouvrir en grand les vannes de l'antisémitisme en abrogeant le décret Crémieux dès l'instauration du régime de Vichy en 1940, les juifs algériens perdant alors la nationalité française, rabaissés au rang d'indigénat.

Pierre Assouline a été responsable du magazine Lire. Il siège au comité de rédaction de la revue L'Histoire et est membre de l'Académie Goncourt depuis 2012. Il a écrit de nombreux romans, biographies, articles et chroniques radio.
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Sur Bibliofeel ou Clesbibliofeel : chronique complète avec photo du livre sur fond de la piscine Alfred Nakache de Toulouse (plus grand bassin extérieur de France...). Lien direct ci-dessous.

Lien : https://clesbibliofeel.blog/..
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"Si je le revois je le tue."
C'est par cette phrase terrible, qui reviendra à plusieurs reprise, que débute le livre.
Mais que s'est-il donc passé pour en arriver là ?

Le nageur, c'est Alfred Nakache dont Pierre Assouline nous offre la biographie.
À la lecture de l'ouvrage, on comprend parfaitement pourquoi l'auteur a voulu raconter la vie de ce champion : c'est qu'Alfred Nakache n'est pas un nageur ordinaire et qu'il a connu un destin exceptionnel.

De natation, il en est naturellement largement question, et cet aspect du livre a ravi la nageuse passionnée que je suis.
J'ai appris beaucoup de choses sur les compétitions du début du vingtième siècle, sur les techniques de nage et d'entraînement utilisées.
Alfred Nakache aurait pu vivre une vie "ordinaire" de champion, vivre à fond sa passion de la natation, écumer les bassins et accumuler les médailles.
Il aurait vécu cette belle vie sportive s'il n'avait eu le malheur d'être né au mauvais moment.
Au moment où un totalitarisme fou s'est abattu sur le monde : le nazisme. Et Alfred Nakache est juif...

Dénoncé par un adversaire jaloux, notre nageur est déporté avec sa femme et sa fille. S'ensuit le calvaire que l'on connaît, hélas, trop bien pour avoir lu de nombreux récits similaires.
"Si je le revois je le tue."
Sa survie, Alfred Nakache la doit à la natation : il la doit à une condition physique et une volonté exceptionnelles qu'il s'est forgées en tant qu'athlète de haut niveau.
Cette volonté qui lui permettra de surmonter toutes les souffrances endurées et après guerre de se projeter vers l'avenir.

Un destin hors du commun qui méritait d'être raconté, merci à Pierre Assouline de l'avoir fait, et de l'avoir si bien fait.
Le nageur, c'est une biographie vivante et fort bien écrite. Un récit captivant qui mêle habilement sport, Histoire et politique.
Un très bel hommage, amplement mérité, rendu à un homme terriblement attachant, qui fut un magnifique sportif, un résistant très impliqué, un homme bon.

Tapez "Alfred Nakache images" dans un moteur de recherche : vous ne pourrez qu'être frappé par ce qui se dégage de cet homme toujours souriant.
Vous pourrez alors, peut-être, imaginer ce qu'il a dû subir pour en arriver à dire ce terrible "Si je le revois je le tue.".
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Un couloir de nage.
Pour ceux qui n'aiment pas nager, c'est un calvaire subi pendant la scolarité. Pour ceux qui ont des gènes de poisson planqués dans leurs cellules, des branchies cachées par le bonnet de bain, c'est la liberté. Un chemin vers le dépassement de soi. Avec cette sensation de fluidité, de puissance et d'apesanteur. La nage : c'est la vie. La piscine c'est le cocon. En peu frais parfois certes, mais où l'on a à la fois la sécurité et l'infini. Les soucis fondent dans l'eau. Il reste la coordination des mouvements qui fait croire pendant quelques brasses, que le monde est harmonieux et immuable. La nage, c'est une méditation. C'est une compétition.
Et pour ce nageur historique, c'est la survie.
Encore un autre aspect historique de la 2nde Guerre Mondiale qui est sorti de l'obscurité par la littérature. L'histoire de ce nageur pris dans la tourmente de l'Histoire. Encore un qui, juste parce qu'il était juif, a vu son destin sombrer dans la tragédie. Avant, il nageait. Après, il a renagé. Si on peut dire qu'il a survécu, on peut donc aussi dire qu'il a surnagé non ?
Le récit est factuel mais aussi très humain, lumineux, et passe avec beaucoup d'aisance des considération politico-sportives aux anecdotes amicales et familiales. On sent la saine envie de vivre, la franche envie de gagner. On sent la rage de survivre, puis la difficulté extrême de la vie après.
C'est une lecture d'une grande humanité, qui brosse le portrait d'un champion de la nage et de la vie. Qui pointe aussi du doigt ceux qui de près ou de loin ont tenté de le couler.
Alors, faut-il le lire ? Oui. En bonus vous allez renforcer votre culture générale sur la natation en compétition.
Effets désirables possibles post lecture : vous risquez d'avoir envie d'enchainer quelques longueurs pour méditer sur la vie de cet homme.
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Le nageur, c'est Alfred Nakache, 1915 – 1983, un champion de natation qui sera dénoncé en 1943, pour faits de résistance et parce qu'il était juif, et sera déporté à Auschwitz (où sa femme Paule et sa petite fille de 2 ans disparaîtront) puis à Buchenwald. Il en sortira vivant, grâce à l'intervention du professeur Waitz (déporté également) qui pourra le faire nommer au « revier » (l'hôpital du camp) en qualité de « pfleger » (infirmier).

Cette biographie est bien racontée, ni trop dense, ni légère. Elle suit Nakache de sa naissance en Algérie, dans la communauté juive de Constantine jusqu'en France où il fera ses débuts de champion, son entrée dans la résistance, sa déportation, sa survie et sa vie « d'après ». L'auteur écrit de façon juste, sans pathos, avec parfois quelques répétitions. Il nous décrit Nakache comme étant une belle personne, lumineuse, simple et modeste.

J'ai trouvé la vie de Nakache émouvante et intéressante. C'est la « petite histoire » dans « l'Histoire », celle de la France en pleine guerre 40. Des évènements qui viennent casser des vies et qui révèlent le pire de l'humanité avec quelques rares lumières d'espoir.

Le pire : c'est la délation, les camps, la mort des enfants, la déshumanisation, les trains de la mort. C'est aussi la mesquinerie de l'administration française qui ne voudra pas reconnaître les droits de Nakache à son retour, même après plusieurs années de procédure. Ce sera le seul des survivants de son réseau de résistants à ne pas être indemnisé. C'est aussi la « justice » française qui voudra juger Nakache, accusé d'avoir « frapper un codétenu » lors de son séjour dans les camps ! Il faudra les lettres du professeur Waitz et de plusieurs de ses amis survivants pour démentir cette accusation infondée et malvenue !

Ces amis, ce sont les lumière d'espoir dans cette traversée de l'horreur. Ses amis et sa famille. Il sera entouré et accompagné à son retour des camps. C'est grâce à eux qu'il pourra reprendre la natation et se refaire une vie au lieu de sombrer dans la dépression et le désespoir.

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Biographie d'Alfred Nakache, sportif de haut niveau mondialement connu et reconnu, qui, juif, se retrouvera à Auschwitz puis à Buchenwald.

Un témoignage de plus sur les atrocités des camps mais également la cruauté des dénonciateurs et de la vie politique française sous l'occupation.

Pierre Assouline, un romancier, comme Louis-Philippe Dalembert, Miguel Bonnefoy, David Diop, qui manie et magnifie la langue française. Un régal.
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Dans l'entame de cette critique, j'aimerais avant tout évoquer l'auteur Pierre Assouline, le romancier biographe.
Il nous livre aujourd'hui un magnifique portrait du nageur Alfred NAKACHE.
Par ses recherches fouillées, son érudition, son écriture accessible et addictive, il nous livre un parcours de vie unique et bouleversant.
A.Nakache, juif, né en 1915 à Constantine en Algérie et décédé en 1983 à Cerbère en France.
Entre ces deux dates, une épopée hors norme.
Enfant, A.N. souffre d'une phobie, la peur de l'eau.
Il va la surmonter en s'engageant dans des compétitions locales.
En 1933, il participe à ses premiers championnats de France et en 1936, il est présent aux JO de Berlin où il bat les nageurs allemands.
En 1937, devenu prof d'éducation physique, il est déchu de sa nationalité française, Pétain, le voilà.
Lui et sa femme se réfugient en zone libre (?) à Toulouse où il se rapproche des réseaux des résistants juifs.
En 1942, il gagne cinq titres de champion de France.
Il est le premier nageur a mettre au poing la nage papillon.
Et tout bascule en décembre 1943, il sera dénoncé par des jalousies et déporté, lui, sa femme et sa petite fille à Drancy puis à Auschwitz.
Pour en savoir plus, lisez ce récit-roman captivant.
Contre vents et marées.
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Biographie sous forme de récit du nageur Alfred Nakache. Livre absolument exceptionnel qui nous fait découvrir toutes les épreuves que ce juif français d'origine algérienne a du traverser pendant la guerre, de privilégié protégé par son statut (malgré la déchéance de nationalité et l'interdiction de pratiquer son métier de professeur) en passant par la résistance jusqu'à la déportation, Son physique et sa notoriété lui ont sauvé la vie dans les camps. Un livre à recommander aux passionnés d'Histoire.
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Dans le milieu de la compétition, sportive notamment, la rivalité est un phénomène courant qui agit parfois comme un stimulant naturel que l'on peut donc qualifier de positif. Or, quand ce booster est attisé par des événements politiques comme c'est le cas dans « le nageur », peut-on encore parler de rivalité positive ?

Alfred Nakache, juif né à Constantine est arrivé en France en 1933. L'eau n'était pas son élément favori, puis il suffit qu'une circonstance de l'enfance le force à explorer ce milieu jusqu'à ce que, en 1936, il représente la France aux Jeux olympiques de Berlin. Il ne pratiquera pas le salut olympique bras tendu.

En compétitions, dans un style toujours plus élaboré, il nage face à Jacques Cartonnet, né à Boulogne-sur-Mer. Deux styles, deux hommes aux idées antagonistes qui se révéleront sous la période de l'Occupation. Pétain abolit le décret Crémieux. Cartonnet rejoint la milice. Nakache est déporté avec son épouse et leur fille à Auschwitz puis à Büchenwald.

Transportée par l'écriture de Pierre Assouline, je participais aux pires moments, m'émouvait à chaque page devant le courage et la volonté déployée par Alfred Nakache, dénoncé à la Gestapo par la presse antisémite et sans doute, selon l'auteur, par Cartonnet. Ajoutés à l'histoire personnelle de cet homme, ces « détails » de l'Histoire que je ne connaissais pas ont rendu cette lecture bouleversante.

Lien : https://mireille.brochotnean..
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