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Elle vient d'avoir dix-huit ans. Elle vit avec sa soeur et sa mère dans un appartement des Lombriconi, la « cité des Lombrics », près de Bologne. Son père vient de sortir de prison, et il n'est pas le bienvenu à la maison. Mais Adele a d'autres soucis : elle est enceinte de Manuel, la petite frappe du quartier, qui l'a laissée avant que son
corps ne déforme, préférant faire carrière dans la mafia locale, son t-shirt « Born to lose » sur le dos.

« Trop jeune pour se faire déchirer les entrailles », Adele a pourtant tenu à garder ce bébé. Par peur de l'abandon d'abord, et dans l'espoir qu'il lui ramène Manuel, ce jeune voyou qui est tout pour
elle. Pourra-t-elle en assumer la responsabilité jusqu'au bout ?

« le roman s'ouvrait sur ça, sur la réalité des faits » : une citation on ne peut plus vraie tant le style réaliste de l'auteur vous étreint dès les premières pages de ce roman. Tout en douceur mais avec un
talent certain pour la mise en scène et l'identification, suivons ses pas à la découverte d'une Italie hors des cartes postales estivales. [...]

Neuf mois de grossesse, neuf mois d'espoir pour « une vie parfaite ».
Si elle ne peut élever son enfant, elle fera tout pour lui donner la chance d'avoir « une vie meilleure ».

« Une mère ne suffit pas. Les pères aussi ça compte. Même les menteurs et les voyous. » Adele évolue et on la suit avec un intérêt décuplé tant l'écriture de Silvia Avallone nous emporte.

« le banc d'où la vie est parfaite »

Les personnages défilent et les émotions se déchaînent. Comment ne pas évoquer Dora Cattaneo qui, à l'opposé d'Adele meurt de ne pas pouvoir enfanter. le drame de la maternité, désirée ou non, et donc de la condition féminine dans l'Italie d'aujourd'hui y est magistralement illustré.

« Il y a des forces contres lesquelles on ne peut rien ». Tous ces personnages s'imbriquent et se déterminent par leurs forces respectives et leurs conditions sociales qui les enferment.

Après "D'acier", "Le Lynx", ou "Marina Bellezza", vous ne résisterez pas au
nouveau roman de Silvia Avallone, certainement parmi les auteurs
italiens les plus importants du moment. Poignant et addictif, son style épouse parfaitement les contours de la « vraie vie ».

Alors, il ne nous reste peut-être plus qu'à nous asseoir comme Dora,
sur ce banc d'où elle imaginait sa vie rêvée, car « le monde est plein
de perfection, il faut seulement se laisser conduire. » Laissons-nous
donc conduire par cette vie parfaite...

Lu en juillet 2018.

Article complet sur Fnac.com/Le conseil des libraires :
Lien : https://www.fnac.com/La-Vie-..
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Silvia Avallone, le retour . Enfin !

Fervente admiratrice de l'auteure , je viens de passer une longue année à guetter la traduction de "Da dove la vita è perfetta ". Et ça en valait la peine .

Même veine que " d'Acier " .
On y retrouve les thèmes de l'avenir d'une jeunesse sacrifiée qui croupit dans des banlieues tristes , ici hauts-lieux de la précarité et de la misère du monde .
Pourtant , certains se battent , parfois ils chutent , parfois ils espèrent , ils rêvent , ils s'aiment : ils essaient de vivre , ils souffrent mais ...ils sont jeunes .

Et on va les suivre ces héros du quotidien en prenant de plein fouet uppercut sur uppercut : elle frappe fort la Silvia !
Un récit magistral qui allie si bien la force et la fragilité , le sordide et le merveilleux , le rêve et la réalité .

Les personnages sont bien campés, attachants , terriblement vivants .
Ils se croisent , disparaissent , renaissent .
Ils s'aiment, ils se déchirent ils s'entraident , ils s'épient , ils s'ignorent, ils se quittent .
Une superbe fresque de la comédie humaine , avec en son coeur un joyau , l'enfant de la jeune Adèle.
Et il faut être de marbre pour résister à l'émotion suscitée par la merveilleuse description de ces liens mère-enfant et des moments de la vie intra-utérine .

Si ce livre est un roman c'est aussi un essai sur la maternité et le désir de parentalité vus sous différents angles selon la catégorie sociale et qui met en exergue les difficultés des uns résolvant celles des autres .
Une analyse psychologique et sociétale fine et très complète . Beau travail .

C'est un récit poignant servi par un style sécant , vif.
Des phrases qui claquent .
Terriblement réaliste , souvent dur mais aussi pétri d'amour, de tendresse , d'intelligence et d'une once d'espoir .

Voilà donc que s'achève pour moi la lecture de ce superbe roman signé par la toujours engagée, toujours rebelle et toujours extraordinaire Silvia Avallone .
Et comme j'ai déjà dévoré tous ses romans , je suis condamnée à encore attendre le prochain ...








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Une douleur viscérale. Des cris stridents. Des efforts bientôt récompensés par l'arrivée de cette enfant aussi inattendue qu'inopportune. Car Adele, originaire de la Cité des Lombriconi, n'a que 18 ans. Quant au père, Manuel, il croupit en prison. C'est seule qu'elle a pris le bus pour aller à la clinique. Et c'est seule qu'elle accouche dans cette chambre gris-vert. Quel autre choix pour cette toute jeune adulte que de laisser sa petite fille, dorénavant attendue, à un autre couple, sûrement en mal d'enfant ? Juste quelques minutes entre elle et sa fille avant de l'abandonner...
Dans le centre-ville de Bologne, Dora est professeure d'italien. le couple qu'elle forme avec Fabio, architecte, se délite progressivement, au fil des fécondations in vitro et des micro-injections. Démunie face à cette stérilité, à la fois amère et triste de voir toutes ses tentatives échouer les unes après les autres, Dora désespère un jour de pouvoir donner la vie...

Rien ne semble lier le destin de Dora et Adele. L'une riche, l'autre pauvre. L'une instruite, l'autre déscolarisée. L'une habitant le centre-ville, l'autre la banlieue. Rien ne lie ces deux femmes si ce n'est la maternité. Ardemment désirée pour l'une, accidentelle et subie pour l'autre. Sylvia Avallone fait lier ces deux femmes, ces deux combattantes parfois désespérées ou désemparées, s'entremêler leurs destins. Autour d'elles, des femmes bafouées ou malades. Les hommes ne sont pas en reste : trafiquants, alcooliques, lâches, irresponsables ou encore infidèles. Seul Zeno, l'ami d'Adele, scolarisé dans un lycée classique, semble s'en sortir. Autour de ce thème, la maternité, mais aussi sur fond d'amitié, d'amour, de misère sociale, de transmission, l'auteure nous plonge dans un roman saisissant et empreint d'une grande humanité. Cette fresque sociale, à la construction vigoureuse et porté par une plume vivante, s'avère riche et émouvant.
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La vie parfaite est un rêve adolescent qui échoue presque toujours confronté à la réalité. Adèle et Dora issues de milieux différents au seuil de choix cruciaux vont en faire la dure expérience. Adèle parce que son dénuement sa jeunesse et l'emprisonnement de son père décident de l'avenir de son enfant. Dora parce que son statut de privilégiée ne peut rien pour son obsession de maternité inassouvie.

Comme sa célèbre consoeur, Elena Ferrante, Sylvia Avallone décrit les affres de la jeunesse italienne, pauvre mais aussi bourgeoise, ses rêves et ses dérives et ses réussites parfois. C'est plutôt bien écrit, vivant et réaliste. C'est un peu long aussi, avec des débuts de paragraphe où on ne sait pas de qui il s'agit. Néanmoins, un beau roman très inspiré sur le déterminisme social, la maternité et le désir d'enfant, la violence masculine et la place des femmes dans un pays résolument machiste.

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Les Italiens sont-ils tous immatures, volages et violents ?
Les Italiennes sont-elles toutes hystériques, capricieuses et hurlantes, mais assez solides pour pallier les défaillances masculines, tenir une famille sur leurs épaules, remplacer les hommes/maris/pères qui fuient ?

A en croire Silvia Avallone, Elena Ferrante, Luca Di Fulvio, la réponse est OUI. Et ces trois auteurs le démontrent avec des galeries de personnages très fournies - on peut s'y perdre. Ils évoquent aussi brillamment les rêves d'ascension sociale.
Là, c'est façon « Ici, nos rêves sont étroits / C'est pour ça que j'irai là-bas. » ♪♫ Et tant pis si le « là-bas » mène tout droit à la case prison. Fallait être crétin pour ne pas les voir venir, ces barreaux, mais les hommes sont d'éternels gamins...

Dans ce dernier roman, Silvia Avallone m'éblouit encore. Toujours sur fond d'amitié (et donc de trahisons), de misère sociale et affective, elle centre cette fois son intrigue sur la maternité. Maternité dont elle montre toutes les facettes : grossesse, désirée ou non, IVG, accouchement avec déclaration officielle et retour radieux avec bébé à la maison, ou plus sinistre, sous X. Mais aussi stérilité, FIV, mères porteuses, adoption, éducation des enfants, ambitions parentales pour la progéniture...
Avec, en parallèle, une large palette de scènes de la vie conjugale, du rose au noir.

Ces destins entrecroisés de femmes et jeunes filles perdues, de 'mauvais' pères, de bébés abandonnés, d'enfants mal-aimés m'ont beaucoup touchée, pour plein de raisons, plus ou moins intimes, plus ou moins viscérales, plus ou moins raisonnées.

Je place Silvia Avallone dans mon top 3 des auteurs féminines, avec Virginie Despentes et... ? Dans mon top 2, alors... ♥
___
♪♫ playlist :
https://www.youtube.com/watch?v=_Yhyp-_hX2s
https://www.youtube.com/watch?v=HfzGl1aFH4g
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Tout a été dit déjà.

J'ajouterai qu'après la force « D’acier » , en 2011, humain et social, solaire et poignant , énergique et fou, ses héroïnes inoubliables dans la Toscane ouvrière de Silvia Avallonne «  La vie parfaite  » m'a fait penser à «  L'amie prodigieuse »d'Elena Ferrante...

Adèle, née du mauvais côté de la ville de Bologne, part accoucher seule à dix- huit ans : «  Les pères ça n'existe pas. » ,Impossible à raisonner comme dirait Rosalia sa mère, enceinte de Manuel, un faible crétin, pourtant intelligent , lecteur de Dostoïesvski, qui deviendra dealer de beuh...... «  Pourquoi tu m'écris pas? » , «  La douleur est une forme de langage . » , les maris et les pères fuyant leurs responsabilités ......
Adèle met au monde une petite fille : Bianca..

En parallèle à une petite poignée de kilomètres , jeunes , diplômés , aisés , Dora et Fabio , la trentaine , essaient en vain de concevoir, un enfant , ils avaient pourtant tenté de devenir , en envisageant l'adoption, les parents d'un enfant « autre ».
Dora est animée d'un désir profond de maternité , inassouvi qui la torture. ....
L'auteure décrit minutieusement leur état d'esprit , progressiste aux idées larges.
Mais l'idée d'un enfant qui ne serait pas le « sien »taraudait Fabio,...

Ils ne parvenaient pas à faire «  le Deuil » de l'enfant « Biologique. »


Autour d' Adèle et de Dora , au seuil de choix cruciaux ,( Adèle envisageant l'idée d'abandonner son bébé) , gravitent des personnes qui se croisent, faisant le lien avec les autres , des témoins de leur histoire qui cherchent peut- être un ailleurs, où ils pourraient entrevoir une vie parfaite ....
N'en disons pas plus.

C'est une oeuvre chorale réaliste, poignante, pétrie d'humanité déroulant l'idée de maternité , toute entière au coeur de l'ouvrage, contrairement à « Dacier », décrivant la misère sociale : pauvreté, précarité.
Un roman pétri d'humanité prenant en compte les réalités de son temps parfaitement construit en trois parties .


L'auteure y explore minutieusement, de l’intérieur , la réalité des cités, la capacité des femmes à porter à bout de bras parfois le foyer lorsque l'homme est absent ou fuit ses devoirs...occupé ailleurs
.
...On retrouve le souffle incandescent de cette auteure engagée , née en 1984, entre résignation d’une jeunesse italienne écartelée entre fatalité , immense espoir et précarité .

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Dans une banlieue imaginaire de Bologne, la vie est dure , sans pitié .Les hommes font souvent défaut et les mères font de leur mieux, quand elles n'ont pas baissé les bras , pour accompagner du mieux possible leurs enfants. C'est le royaume des Bolofeccia.
Adèle, presque 18 ans , est sur le point d'accoucher , seule .Pendant ce temps , Dora et Fabio se meurent de ne pas être encore parents. Eux ce sont des Bolobene , des gens bien comme il faut...

Après la cote toscane où elle a passé sa jeunesse , puis les vallées alpines où elle est née, Silvia Avalonne nous attire dans sa ville , Bologne.
Elle le fait avec le même thème principal, celui d'une jeunesse perdue, livrée à la misère et rejetée de ces centres villes majestueux où tout semble hors de portée.
Elle ajoute ici celui de la douleur parentale, sous diverses formes. le deuil, la grossesse non désirée ou l'infertilité et les ravages moraux que cela peut entrainer.

La construction du livre demande lors de la deuxième partie , la plus conséquente des trois, de rester un chouia concentré car l'auteur navigue entre les personnages , les époques , les lieux..

C'est un bon livre , prenant, poussant le lecteur à s'attacher à Adèle ou d'autres. Il me semble un brin moins réussi que les deux autres, D'Acier ou Marina Bellezza, mais peut être aussi que l'effet de surprise ne joue plus.
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Troisième roman de Silvia Avallone, dont j'ai déjà eu l'occasion de dire ici qu'elle était à mes yeux la relève littéraire d'un Pratolini, d'un Pasolini, d'un Moravia, voire en remontant plus loin dans le temps d'un Verga.
- D'acier - et - Marina Bellezza - s'inscrivaient dans la veine d'un néo-réalisme, lucide, sans concessions, obstiné.
- La vie parfaite -, titre quasi sarcastique, poursuit avec force et brio le sillon creusé par une écrivaine prodige à la limite du "militantisme" politique.
Car il n'a échappé, je veux le croire, à personne que Silvia Avallone nous dresse dans ses trois romans le tableau d'une Italie rongée, minée par le capitalisme dérégulé, la mondialisation, une société déboussolée dans laquelle chacun vit selon les aiguilles d'une boussole qui oriente vers de multiples nord qui les mènent tous n'importe où mais jamais vers aucun pôle.
Une Italie gangrenée par les déterminismes sociaux implacables, qui a laissé derrière elle, et c'est heureux, ses "années de plomb", pour se laisser séduire par les paillettes du berlusconisme et les appels des sirènes mafieuses.
Comme dans ses deux premiers romans, - La vie parfaite - offre la part belle aux femmes.
Non pas en tant que représentantes d'une société qui aurait exaucé les revendications féministes, mais en tant qu'héroïnes positives de ses romans.
Ainsi, avec Aragon, S.A "déclare" face à sa génération que la femme est l'avenir de l'homme.
Les deux protagonistes, les deux faces d'une même médaille, sont, dans ce roman, deux femmes.
Adele jeune fille de dix-sept ans, scolarisée à l'école buissonnière, vit dans la périphérie miséreuse de Bologne.
Aux Lombriconi, deux mégas tours alvéolées de milliers de logements sociaux, petites cages dans lesquelles s'emprisonnent des vies qui subsistent le plus souvent grâce à des aises sociales, des petits boulots et de multiples trafics.
Son père est en prison.
Sa mère fait ce qu'elle peut.
Dora est professeur de lettres classiques.
Elle vit confortablement dans le centre de Bologne dans un appartement coquet, qu'elle partage avec Fabio, son époux architecte.
Rien à voir a priori entre ces deux femmes.
Détrompez-vous... Adele est la petite amie de Manu, beau garçon brillant de son âge, qui a mal tourné.
Il a mis Adele enceinte.
Adele va devoir affronter seule les neuf mois du parcours d'une combattante parturiente mineure.
Dora, elle, ne peut pas avoir d'enfants.
Elle a eu recours à tous les recours.
Rien n'y a fait... mais elle s'entête.
C'est donc autour du thème de la maternité que va s'écrire l'histoire de ces deux femmes et s'inscrire l'histoire puzzle de ce roman.
Car entre Adele future mère célibataire contrainte d'abandonner son enfant à la naissance et Dora qui se bat pour l'adoption, vont graviter, comme les pièces d'un puzzle, des personnages qui, tous, sont liés ou reliés les uns aux autres, ce qui permettra à la fin de l'histoire, une fois le puzzle reconstitué, de voir apparaître, sous les yeux du lecteur étonné ( ce fut mon cas ) une fresque, un grand tableau "régional", allégorique d'une certaine Italie d'aujourd'hui.
Les neufs mois de grossesse d'Adele... entre la fécondation et l'accouchement, sont décrits par l'auteure avec une vérité, une authenticité, une force inouïes et un talent qui l'est tout autant.
La lutte acharnée de Dora pour obtenir ce qui n'a été pour Adele que le fruit d'un accident est là aussi à couper le souffle.
Et naturellement, les déterminismes sociaux auxquels certain(e)s essaient d'échapper avec leurs corollaires psychologiques, leurs affects, leurs échecs, leurs drames, ne sont pas en reste.
L'existentiel, le social, le sociologique, l'économique et le culturel occupent une place centrale que Silvia Avallone, depuis - D'acier - maîtrise du bout des doigts de son clavier avec un art consommé et une maestria d'orfèvre.
La grande force de cette écrivaine, c'est d'éviter les écueils du mélodrame et du pathos des soaps-opéras pour nous montrer que si la vie est, pour beaucoup, un drame, on peut de temps en temps consentir à faire la fête sous ces ténébreux orages.
Le style est au scalpel. Beau, juste et précis.
Mais la grande force de Silvia Avallone, c'est l'épaisseur incroyable qu'elle réussit à donner à ses personnages.
Aucun n'échappe au fusain magique de cette portraitiste hors pair.
Je note sur la pointe des pieds que la chute aussi réussie que - presque - inattendue...
Un troisième roman qui m'a, comme les deux qui l'ont précédé, emballé.
La sortie du quatrième est prévue dans le courant du mois d'août... vivement !
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La « périphérie » est un lieu d'exil par définition, un lieu de relégation- le « centre » étant , par opposition, celui des rencontres et des retrouvailles, "the place to be », le carrefour des possibles, la piste d'envol de tout futur.

La périphérie demande d'avoir- pour y tenir, y survivre- un point de vue d'où la vie est parfaite.

C'est le plus souvent une échappatoire sur le passé : un banc de square pour deux amies d'enfance, une vieille maison des beaux quartiers rappelant les jours heureux, ou , plus rarement, un appel d'air vers le futur : la grand' roue des plages de la Riviera, désertée par l'hiver mais qui permet d'apercevoir le vaste monde, l'endroit où on pourrait aller, fuir, revivre.

Ou alors le lieu d'où la vie est parfaite serait, en dernier recours, le refuge utérin, le ventre de la mère, où l'enfant à naître est encore merveilleusement protégé des agressions futures : délinquance, abandon, maltraitance, pauvreté, conditionnement social et culturel.

Ou enfin le lieu si particulier d'où s'opère la création – celle d'un roman,- salvateur, effacé, retrouvé ?- celle d'un petit film-docu, pour YouTube, peu importe : un lieu plein de choses fortes parce qu'elles sont nées du regard que l'on a porté sur elles, un lieu pour dépasser les murs de son ghetto, ou de sa prison, un lieu pour passer à travers comme le passe-muraille et se faire la belle.

Etre enfin hors d'atteinte parce qu'on se donne à tous.

Merveilleuse Silvia Avallone, qui, une fois de plus, prend la plume sans complaisance, sans vulgarité, sans populisme- après Acciaio (D'acier), après Marina Bellezza- pour donner la parole aux humbles.

Aux gens de la périphérie.

A ceux qui plus que d'autres ont besoin, pour échapper au désespoir, d'avoir un lieu d'où la vie est parfaite.

Je me baladais dans les Pouilles, il y a 8 jours, et dans la petite librairie d'Ostuni j'ai vu, en vitrine, son dernier roman « Da dove la vita è perfetta » Séduite par le titre - je ne sais encore comment on le traduira- , tentée par l'auteur que j'apprécie, je l'ai acheté, lu, très vite, dévoré en fait, et je me hâte de vous en faire le compte-rendu : parce que, dans ces jours sombres d'incertitude et de propos nauséeux, même sans habiter la périphérie, nous avons besoin d'avoir un lieu d'où la vie est parfaite.

C'est mon brin de muguet du 1er mai !

Revenons au livre ! C'est une sorte de chant choral où des personnages se croisent, se frôlent, parfois sans se connaître, mais sont brassés par le même coup de dés qui jamais n'abolira le hasard… Ils vivent dans le même coin d'Emilie Romagne, tout près de Riccione, sur la côte adriatique, non loin de Rimini, dans le quartier populaire du Villaggio Labriola, un quartier périphérique de HLM , surnommé par ses habitants I Lombrichi, les Vers de terre… Tout un programme !

Après un préambule tétanisant- l'accouchement sous X de la petite Adele, 17 ans, toute jeunette et désemparée, qui met en jeu tous les protagonistes, le récit repart quelque neuf mois en arrière et chaque personnage acquiert profondeur et relief. Puis on revient aux enjeux de la première partie.

Suspense d'autant plus assuré qu'on s'est attaché à tous, et que les choix nous paraissent cornéliens…

On retrouve les mêmes schémas familiaux que dans « Acciaio » : pères maltraitants, irresponsables, toxiques, mères seules et souvent dépassées, enfants sauvés par leurs études mais jusqu'à quand ? ou repris par l'économie maffieuse et criminelle qui leur offre une vie facile mais périlleuse. L'amitié est- toujours comme dans Acciaio- le seul rempart contre la solitude et le désespoir.

Mais le thème majeur du livre est la maternité.

Maternité non désirée -Adele et ,avant elle, sa mère- maternité instinctive presque animale – toutes les « mammas » italiennes du livre sont des lionnes parfois sans griffes mais jamais sans amour- et maternité refusée- le couple de Dora et Fabio, dévoré par le mal d'enfant, est littéralement épuisé par les FIVET- , maternité sans filiation : Fabio et Dora après leurs épreuves sont tentés par l'adoption, malgré l'examen insensé qu'on fait subir aux parents adoptants, quand tant de parents naturels se révèlent indignes.

Le livre est comme une gigantesque « pancia » -un ventre- où, à travers les cas particuliers, se dessine toute une mythologie contemporaine de la maternité.

Même les hommes ne sont pas en reste : Fabio, l'architecte, venu lui aussi des quartiers populaires, est un ancien obèse – une « pancia » à sa façon…- qui rêve, pour les classes ouvrières déshéritées de son ancien quartier, d'accoucher d'une ville nouvelle où il ferait enfin bon vivre.

Et surtout il y a le personnage de Zeno- dont le nom lui a été donné par sa mère costumière en hommage au livre d'Italo Svevo, La Conscience de Zeno.

Zeno la conscience , le point focal d'où la vie est parfaite…

Zeno est une sorte d'OVNI parmi les personnages masculins :enfant sans père, mère pour sa propre mère, alitée et dépressive, père de remplacement pour l'enfant que porte Adele, ami-amant- père pour Adele elle-même, père pour son ami Manu, le bad boy, et surtout père du roman qu'il porte depuis 9 mois, lui aussi, qu'il complète, corrige , efface par dépit, puis retrouve , puisque sans doute c'est celui qu'à la fin du roman nous avons lu….

Zeno qui voudrait être le Frédéric Moreau- ou le Flaubert- d'une Education sentimentale des Lombrichi dont Adele serait la Madame Arnoux…

Un roman d'une rare richesse, d'une humanité vibrante et forte, fichtrement bien construit et qui nous donne des raisons d'espérer sans sombrer dans l'idéalisation béate, les bons sentiments bêlants ni la simplification.

Un roman réaliste, souvent dur, d'où pourtant on entrevoit des coins de ciel, des coins de parc, des banquettes de bus, des nacelles de grand'roue d'où la vie est parfaite.


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La maternité à la croisée de deux parcours féminins, entre désir d'enfant et grossesse subie.

Gros coup de coeur pour cette vie (presque) parfaite qui place l'enfant à venir face à l'impact social de ses origines parentales.
Dans un monde idéal et politiquement incorrect, l'accueil du nourrisson devrait se faire dans les meilleures conditions de bonheur et de sécurité. Mais la loterie de vie en décide souvent autrement ...

Dora, professeur trentenaire, épuisée d'attendre une grossesse qui est sa seule raison de vivre, en fait une obsession égoïste et fragilise son couple.
Adele est jeune lycéenne dans un quartier populaire de Bologne, fille d'un père évaporé et d'une mère sans le sou, enceinte avant ses 18 ans d'un jeune trafiquant de drogue, emprisonné pour meurtre. Un contexte si lourd qu'elle envisage l'abandon dès la naissance.
Deux parcours décrits avec un grand réalisme, qui vont s'entrelacer, jusqu'à tromper le lecteur dans la chute qu'il imagine dans les couloirs de la maternité.

Silvia Avallone nous embarque dans un maelström de sentiments, par une lecture douloureuse où se croisent la solitude, l'abandon, la renonciation, la rage et l'impuissance face l'impossibilité de changer sa propre vie. Se racontent ici les multiples manières d'être enfants et parents, le déterminisme imposé par le destin ou les choix de vie.
Au-delà des parcours de Dora et d'Adele, l'auteure creuse la notion de parentalité, entre responsabilité et amour inconditionnel. Elle offre aussi aux hommes du roman des personnalités d'une grande diversité, autant dans leur fragilité que dans leur irresponsabilité.

J'avais déjà beaucoup aimé D'acier. Encore une belle réussite.

(Ne pas rater en cours de lecture l'iconographie du quartier d'Adele, que j'aurais trouvée plus pertinente placée en début d'ouvrage)
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