Pour moi, c'est simple : c'est le meilleur recueil de nouvelles de SF française.
Il y a beaucoup de nouvelles de qualité, avec des personnages attachants et des intrigues qui vous prennent aux tripes.
Pas certaine qu'il soit encore disponible, mais si c'est le cas, foncez !
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Attention : chef d'oeuvre ! Des nouvelles finement ciselées...
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__Préface de Jean Claude Dunyach__
En 1990, la parution au Fleuve Noir du premier tome de _La Bohème et l'Ivraie_, signé d'un inconnu doté d'un pseudonyme à coucher dehors, déclencha de furieux haussement de sourcils dans le Landernau local. Le livre, en question, premier tome d'une série de quatre, s'installait d'emblée sur le terrain d'une SF d'envergure, insolente et un brin agressive. Il décrivait un empire humain aussi vaste et rigide que ceux d'Asimov, pour le plaisir de le faire écrouler à coup de Bohême, de spectacles en plein air et de coups de pied là où ça fait mal. Ses personnages étaient des artistes, des adolescentes « no future », des marginaux de toutes sortes, grands donneurs de leçons et terroristes désinvoltes. Ses héroïnes étaient vraiment – mais alors vraiment – le genre de personne à qui je rêve personnellement de coller une bonne fessée, avec la certitude d'en être incapable. En plus, l'auteur avait du talent à revendre, et ça, c'était vraiment énervant.
Autant dire qu'Ayerdhal avait réussi son entrée.
Dix ans plus tard, et quelques bons milliers de page de plus – l'homme est généreux dans sa production – on avait le sentiment que, OK, Ayerdhal était le meilleur dans le genre « je dénonce les dangers de tous les systèmes politiques globaux et de toutes les théories totalitaires » en cinq cent pages et plus si affinité, couverture de Francescano. On le devinait à l'aise sur le marathon, le souffle régulier, la foulée ample. Les cadres étaient vastes, les personnages nombreux, les péripéties s'inscrivaient dans une histoire plus large, elle même incrustée en toile de fond dans une métahistoire de l'humanité. Le tout sur fond de conflits démesurés, d'effondrements des théories ou des empires, et de remises en cause des idées reçues sexuelles – on lui doit la Sexomorphose –, politiques, économiques et j'en passe.
On pouvait en décuire que 1) le bonhomme avait de quoi tenir quelques belles décennies à nous balancer des gros missiles bien mahousses sur le coin de la conscience et que 2) il ne toucherait jamais un caramel dans l'art subtil, minimaliste et délicat de la nouvelle.
Le présent recueil a pour but de démontrer le contraire.
Ma vie contre la tienne. Là, tout de suite, on fait l'échange. Je me glisse dans ta peau et tu te débrouille avec ma carcasse. Juste pour voir. Le temps d'un tour de Grande Roue. Non, pas un. Un, c'est pas assez. Disons deux.
Aller, retour. Aller, retour. Deux boucles complètes. Deux fois quarante ans dans les dents. Deux fois...
Et pourquoi seulement deux ? Pourquoi mégoter ?
Tiens, c'est mon jour de bonté. Pour le même prix, je te solde non pas un, non pas deux, non pas dix ou vingts maigrichons petits tours de roue. Je t'offre tout.
L'éternité.
– je t'aime, Axen. Cela ne concerne pas notre couple. Ce n'est même pas comme si nous nous séparions, puisque tu me rejoindras un jour et que nos imagos reconstruiront ce que nous avons si bien partagé.
Quinze années de quiétude, j'en porte chaque seconde en moi. C'est inscrit en majuscules à coté de la certitude que ce n'est pas moi que tu quittais, comme la preuve indélébile que nous avons toujours été à part, si différents de nos semblables et de leurs contrats d'un an, au pire reconductibles, que l'idée de m'était pas venue.
Bien sûr... dans dix jours ou dans cinq ans, quand tu en auras marre de la chrysalide, quand tu auras appris à dompter l'Energie, quand tu sauras te dessiner une dernière apparence, quand tu fendras le cocon pour exposer enfin à la face de l'Univers.
Extrait de la conférence "Scintillements! Hommage à Ayerdhal, maître de la SF et du thriller" aux Imaginales 2019.