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EAN : 9791034900619
256 pages
Liana Lévi (04/10/2018)
3.03/5   16 notes
Résumé :
Présentation de l'éditeur :

Issue d'une famille de Bavière apparemment banale, Heidi grandit sans poupée Barbie ni dessin animé, dans un milieu où l'on prépare l'avènement d'un 4e Reich. On y expédie les enfants dans des camps paramilitaires clandestins, leur inocule la terreur de la guerre imminente et les immunise contre la « société contemporaine décadente ». Fragilisée par un père destructeur mais charismatique dont le fanatisme l'influencera long... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique

Témoignage tout à fait exceptionnel que celui d'Heidi Benneckenstein, née Heidrun Redeker en 1992 dans un bled près de Munich en Bavière.
Exceptionnel puisque le récit de néonazis qui ont compris très jeune encore leur erreur et ont réussi à modifier radicalement leurs "croyances" fondamentales est rarissime. Peut-être parce que les dangers auxquels s'exposent ces "Verräter" ou traîtres aux yeux des primitifs, stupides et violents néonazis, demande une forte dose de courage et raconter la cuisine interne de cette mouvance super-charmante n'est pas sans risques.
Je crois qu'il s'agit d'un témoignage unique, ne connaissant aucun autre de ce genre.

En tout cas, j'ai commandé cet ouvrage le 10 septembre dernier, sachant parfaitement bien que la date de publication par l'éditrice Liana Lévy était fixée au 4 octobre 2018. C'est vous dire ma curiosité !

Ce témoignage étonnamment honnête vaut la peine d'être lu pour se rendre compte de l'ampleur d'un phénomène hautement inquiétant : celui de groupes et de partis politiques qui proclament un nationalisme étroit, défendent des thèses xénophobes et sexistes, nient l'holocauste, ont la nostalgie d'un chef puissant du style Adolf Hitler, sont vigoureusement contre l'Union européenne et l'OTAN, admirent des gugusses comme Orbán, Salvini, Trump et Poutine.
À titre d'exemple, rien qu'en Allemagne le parti d'extrême-droite, Alternatives pour l'Allemagne, compte depuis les dernières élections, en septembre 2017, 92 députés au parlement fédéral ("Bundestag"), soit 12,7 %. Avant d'être désavoué, un de leurs leaders a même eu la délicatesse d'affirmer qu'il se réjouissait du problème des réfugiés !

Heidi Benneckenstein est issue de milieu modeste. Son père, un fonctionnaire des douanes et néonazi convaincu a inscrit sa fille au mouvement HDJ ("Heimattreue Deutsche Jugend") ou "jeunesse allemande patriote", lorsqu'elle était toute petite. À 3 ans, elle partait déjà, contre son gré et plein d'angoisse, pour son premier camp clandestin néonazi, à l'image de ceux des jeunesses hitlériennes : uniforme, discipline, et entraînement pour préparer la venue du IVe Reich et récupérer "leurs" terres en Pologne, Russie etc.
Et à part de la gymnastique et des marches forcées, qu'est-ce que vous pensez que ces braves gens font dans ces camps à l'abri des yeux des journalistes ? Mais écouter des bobards politiques sur les méfaits du gouvernement allemand et de l'UE, bien entendu. Pour une gamine comme notre Heidi cela a dû être le pied.

Et les vacances de notre gamine se passaient invariablement au Lac Balaton en Hongrie. La Yougoslavie, la Pologne et la Russie occupaient des terres allemandes et l'Europe occidentale était trop pourrie pour visiter, selon son père savant. Les Hongrois, en revanche, avaient été de très bons fascistes et cela se passait avant l'apparition du grand démocrate Viktor Orbán. Cela ne m'étonnerait pas que M.Redeker s'y soit installé aujourd'hui en permanence !

Sa mère était toute différente, mais ne faisait pas le poids contre son délicieux mari. Finalement, c'est la énième histoire extra-conjugale qui l'a incité à demander le divorce. Ses 2 soeurs aînées ont été confiées à sa mère, mais Heidi et sa jeune soeur ont été soumises au régime mixte, ce qui impliquait des visites régulières au paternel, ce dont elle avait horreur. Ses résultats scolaires furent tellement misérables qu'il ne lui restait que l'option d'une formation technique. En même temps, l'assistance sociale l'obligea de suivre une thérapie, la pauvre avait développé une névrodermite.

Coupable ou innocente ? Heidi avoue ses activités peu reluisantes pour la droite radicale, comme coller des affiches, perturber des manifestations pacifiques, mais imprégnée dès qu'elle était bébé de cette magnifique idéologie peut-on lui en vouloir ? Elle a tout particulièrement honte d'avoir, à l'occasion de l'enterrement d'un vieux néonazi, frappé violemment un journaliste. Mais elle n'avait que 15 ans, n'était pas la seule, le journaliste s'en est bien tiré et la police ne l'a pas arrêté, malgré des photos compromettantes dans les journaux.

En dépit de ce lavage de cerveau constant, de temps à autre elle était envahie par le doute. En lisant un livre d'un haut dignitaire nazi qui amena son unique fils, un handicapé, à un centre où il risquait l'euthanasie par exemple, ou lorsqu'un jeune basané du Kosovo la sortait des griffes d'une bande de néonazis bourrés.

C'est sa rencontre avec Felix Benneckenstein, pourtant un chanteur-compositeur néonazi quoique de plus en plus déçu du niveau de ses anciens camarades, et dont elle était tombée amoureuse, qui l'a fait réfléchir sérieusement. Losqu'à 17 ans elle s'est trouvée enceinte, elle a "remis en question ma vision du monde, mes amis, mon passé, toute ma vie" (page 183). Malheureusement elle a fait une fausse couche.

Décrocher complètement de ce milieu a été pour Heidi et Felix un difficile et long procès, mais ils y sont arrivés - entre autres grâce à une protection de la police - et ensemble ils ont créé une section bavaroise d'Exit, une organisation d'aide à la déradicalisation. le couple s'est marié en 2014 et a eu un enfant en 2016. Depuis 5 ans maintenant, Heidi travaille dans un jardin d'enfants, pendant que son mari parcourt l'Allemagne pour faire des conférences dans des écoles et centre de jeunesse.

Il y a à peine un mois, un reportage à la télé flamande a fait sensation en révélant l'existence de tout un groupe de jeunes fascistes, admirateurs d'Adolf Hitler, qui se baladaient en uniforme, se rencontraient clandestinement, étaient fascinés par les armes et surtout actifs sur internet, où ils proclamaient leurs messages xénophobes, antisémites, racistes, sexistes et misogynes, en s'inspirant des médias de l'ultradroite, genre Breitbart. Leur chef de file avait même réussi à se faire élire, comme étudiant, au conseil de l'université de Gand. Plusieurs membres de cette bande de guignols peu adultes et sortis des classes moyennes et de parents aisés figurent encore comme candidats pour les prochaines élections municipales sur des listes du parti de Bart de Wever, qui le pauvre n'en savait strictement rien ? Qu'est-ce que je peux dire, à part que j'ai vraiment honte et que j'espère du fond du coeur que cela coûtera beaucoup de voix à cet homme et à son parti !

Je peux recommander cet ouvrage d'Heidi Benneckenstein, qui n'est peut-être pas très littéraire, mais exceptionnellement honnête, instructif et qui a bénéficié d'une excellente traduction par Élisabeth Landes, qui a ajouté de fort utiles notes de bas de page.

C'est aussi un ouvrage d'espoir pour les jeunes, car il prouve qu'il est possible "de quitter le marais brun", de trouver un sens dans la vie... et d'être .... comme Heidi Benneckenstein a déclaré, il y a 2 semaines dans une entrevue sur une chaîne de télé allemande : "heureuse".
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Voilà, un ouvrage salutaire.
Un témoignage poignant, intelligent qui nous plonge au coeur des partis néo Nazis Allemands.

Comment cette jeune femme a-t-elle pu sortir de l'étreinte et du lavage de cerveau infligé par son père (pervers, manipulateur et néo Nazis) et son entourage. Enfant elle est embrigadé dans les mouvements de jeunesses néo Nazis et son éducation orientée à l'extrême droite.

Et tout cela dans les années 2000 pas dans les années 30. Un ouvrage salutaire car il montre aujourd'hui (comme si on pouvait en douter hélas!!!) que la bête n'est pas morte et est prête à ressurgir.

Heidi Benneckenstein fait preuve d'un immense courage accompagnée de son époux ex néonazi lui aussi, ils choisissent l'amour au lieu de la haine et s'en sont sortis.
Ce livre doit être lu car si nous ne faisons pas ce qu'il faut les partis populistes, extrême de tous bords sont là profitant de la crise et de la déception des peuples envers nos politiques pour prendre le pouvoir et nous ramener la misère, la haine, la violence et... la guerre.

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Un livre d'une grande sincérité, et quel courage!! Cette toute jeune femme a su revivre après un endoctrinement total. elle et son mari ont été capables de dire stop, de se rendre compte du monde dans lequel ils vivaient, de s'ouvrir et surtout d'aider! Quelle force et quelle leçon , en 2020 alors que les extrêmes frappent un peu partout, ce livre est à lire impérativement.
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Comment peut-il encore y avoir des familles néo-nazies en Allemagne ? C'est vraiment le tabou ultime dans cette grande démocratie. Et pourtant Heidi Benneckenstein à grandit au sein de l'une d'elles. Née en 1992 elle nous raconte son histoire. de l'extrême-droite assimilée, les parents de l'Association de la Jeunesse Allemande Patriote sont des notables cultivés, intellectuels, universitaires ou professions libérales supérieures.

Dans ce monde, tout est masques et faux semblants, les camps de vacances des enfants ressemblent à des camps scouts, mais sont complètement dévoyés pour devenir des camps paramilitaires préparant les officiers du quatrième Reich.

Une bande de dingues, peu nombreux, mais absolument terrifiants. Que l'on y soit par atavisme familiale ou par provocation, l'extrême droite et ses groupuscules sont très structurés et hiérarchisés.

Les fils de famille seront cadres, les fils de prolos seront second couteaux.

Terriblement archaïque mais terriblement efficace. Quant à l'endoctrinement et le fonctionnement c'est tout bonnement celui d'une secte lambda.

Ce chemin de croix nous est raconté avec une sincérité et une simplicité surprenante qui nous bouleverse.

Nous sommes à l'intérieur du monstre, dans son cerveau, son estomac, ses intestins, car la bête est vivante, elle dévore, recrache, défèque des jeunes gens et des jeunes filles en désespérance.

Ce témoignage, au plus près d'une enfance volée par une idéologie morbide, possède la force de la sincérité et de l'honnêteté.

« Coupable en toute innocence » est une pièce nécessaire à la déconstruction de cette pensée qui prône la haine de l'autre et qui grandit en ce moment dans le monde entier.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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COUPABLE EN TOUTE INNOCENCE 📚 Ce que j'ai trouvé le plus intéressant dans le récit Coupable en toute innocence, l'histoire d'une enfance allemande chez les nazis qui se passe non pas dans les années 40 mais aujourd'hui, c'est le préambule dans lequel elle explique pourquoi elle a écrit ce livre. Pour pouvoir commencer sa seconde vie elle avait besoin de tourner la page de la première.

Les idées de l extrême droite connaissent une nouvelle actualité en Allemagne (et ailleurs). Il est confortable de penser que le racisme se base sur la bêtise et l'ignorance mais ici les nazis ressemblent à monsieur tout le monde et sont des universitaires.
Ce qui m'a frappé aussi est qu elle parle des mouvements dont elle a été entourée pendant 20 ans comme une secte dont il est difficile de sortir car ils organisent tous les aspects de votre vie ou presque (vacances, loisirs).
Lien : https://www.instagram.com/p/..
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Citations et extraits (10) Voir plus Ajouter une citation
J’ai toujours été plus proche de ma mère que de mon père. D’ailleurs il préférait s’occuper de mes sœurs plus âgées à qui il pouvait faire part de ses théories singulières. Les nourrissons et les enfants en bas âge l’ennuyaient. Il fallait jouer avec eux et on ne pouvait pas leur parler. C’est ma mère qui s’occupait de nous vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Elle nous réveillait, nous faisait manger, lavait nos affaires, jouait avec nous et nous mettait au lit. Jamais mon père n’aurait accepté de nous confier à des mains étrangères les trois premières années.
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On ne peut pas remettre en question tous les événements de notre histoire. Ce n’est pas parce qu’une chose dépasse l’imagination qu’elle est forcément un mensonge. Il y a des événements dont il faut accepter la réalité, ils sont horribles, mais ils ont eu lieu, parce qu’il y a des gens horribles. On peut juste tenter de se confronter sans répit à cette horreur, dans l’espoir qu’elle ne se répétera jamais.
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J’ai réfléchi si souvent aux dix-huit premières années de ma vie que je peux en faire défiler tout le film dans mon esprit, revenir en arrière, zoomer et me projeter librement dans telle ou telle scène et dans telle ou telle phase de mon passé.
Ce n’est pas si bien que ça, ce que j’ai vécu. C’est généralement déplaisant, parfois horrible, souvent blessant, humiliant, choquant.
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Plus j’avançais en âge, plus j’étais anxieuse, car je comprenais de mieux en mieux les horribles histoires de guerre que mon père serinait à longueur de journée. Je tombais de plus en plus sous sa coupe, tout en sachant de moins en moins à quoi m’en tenir avec lui, si bien que je lui faisais des scènes un jour et briguais ses faveurs le lendemain.
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Évidemment la Hongrie n’est pas l’Italie et le lac Balaton n’est pas la Méditerranée, mais je m’en fichais. Je n’étais jamais allée en Italie et je ne me figurais rien de plus beau que le lac Balaton. Pour moi c’était le paradis : 30° à l’ombre, du soleil tous les jours et de longues heures sans école et sans stress.
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