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EAN : 9782840496670
427 pages
Seguier Editions (02/11/2013)
4/5   4 notes
Résumé :
Propos de peintre est une compilation des meilleurs portraits de peintres et autres figures intellectuelles du début du précédent siècle, écrits par Jacques-Émile Blanche, tels qu’ils furent publiés entre 1919 et 1928. La sélection des textes a été réalisée par Frédéric Mitterrand. L’exposition en 2012 à la Fondation Pierre Bergé a rappelé combien Jacques-Émile Blanche était un artiste incontournable de son époque.
Et à en croire Philippe Dagen du Monde : « ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Jacques Emile Blanche (1861-1942) est le fils du docteur Blanche qui poursuivit lui-même l'oeuvre de son père, le célèbre aliéniste Esprit Blanche, dont la clinique de Passy accueillit entre ses murs jusqu'à la fin du XIXe bien des mélancolies d'artistes. Encouragé à la peinture par les plus grands il tenait salon, fréquentait et portraiturait avec brio et de manière plutôt flatteuse tout ce que le gotha intellectuel et artistique de son temps comptait de mieux -Marcel Proust, fleur de gardénia à la boutonnière, dont le Musée d'Orsay conserve le portrait, ou André Gide chapeauté et emmitouflé d'une vaste houppelande, parmi d'autres. Son oeuvre n'a pas pour autant marqué la postérité d'un souvenir impérissable.

Injustice ? Certains le pensent. Une exposition à la Fondation Bergé, l'année dernière, tentait de le prouver avec succès. J. E. Blanche a également laissé quelques écrits où il se fait commentateur de la plupart des débats qui agitèrent une période artistique très riche allant de la Belle Epoque aux Années folles. Il est question ici d'une sélection de ses textes publiés en trois volumes entre 1919 et 1928, choisis par Frédéric Mitterrand et édités par Séguier. La préface du tome 1 (amicale et teintée d'une légère ironie) faite en son temps par Marcel Proust est judicieusement reprise.

Ces Propos de peintre sont avant tout ceux d'un praticien. C'est ce qui fait un peu le charme de cet épais volume. Sa position de "professionnel" donne à Blanche une aisance et une assurance indéniables. De même la connaissance des ateliers où il promène le lecteur et celle des artistes qu'il fréquente satisfont certaines curiosités. Le lecteur est ainsi informé de ce qui touche à la matière et relève de l'exécution d'un tableau comme des techniques de composition autant que de l'engagement physique du peintre. Blanche fait de la virtuosité l'alpha et l'oméga de la peinture. Tout ce qui relève de l'intuition, de l'inspiration ou de l'esthétique ne retient guère ses faveurs.

Parmi ses portraits de plume ceux de James Mac Neill Whistler, d'Henri Fantin-Latour ou de son ami Paul Helleu sont les plus réussis. Ses commentaires des nombreux salons ou des expositions restent toujours au plus près de la palette. Concret, souvent très pertinent, personnel et anticipateur aussi, soulignant des paradoxes quand il n'est pas lui-même paradoxal : "A mesure que les moyens de communication se multiplient, le phénomène d'une production artistique sans cesse accrue rétrécit le champ de vision de l'amateur". Blanche s'avère, du moins dans les premiers textes, sensible et élégant, donnant à ces écrits une valeur quasi documentaire où il y a plaisir à s'immerger.

Ami de collectionneurs tels que les frères Rouart, il livre leurs goûts qui sont souvent les siens ("Notes sur la peinture moderne", 1913, peu avant la dispersion de leurs collections). Il regrette que la spéculation récente et galopante sur les oeuvres d'art ne soit en passe de saper le "métier" de peintre, par abaissement qualitatif de la facture, et n'ouvre la voie au "cosmopolitisme" en art. Admirateur de Corot et Millet, il estime que certaines qualités "nationales" de la peinture doivent perdurer. Sur Gauguin et Monet il se risque à des analyses contestables. Les Nymphéas sont mises sur le même plan que la chromolithographie (il fallait oser). Ou bien encore parlant des Joueurs de cartes de Cézanne : "Laissons ces mauvais tableaux aux milliardaires". Il redoute les théoriciens comme Maurice Denis ou Charles Morice (théoricien du Symbolisme) et ignore leur contribution à l'histoire de l'art ; se méfie des Manifestes et de l'abstraction. Son admiration pour la peinture ancienne et traditionnelle qui parcourt tout le livre n'exclut nullement, contre toute attente, une compréhension du Cubisme. Ses inquiétudes sur l'évolution de l'art et de la critique sont exprimées plus avant dans "Spéculation et critique".

Lucide et pertinent sur les modes et les engouements du public -très drôle lorsqu'il évoque les "Cézannisant"- et de la critique, il aborde les polémiques concernant les avant-gardes (Fauvisme et Futurisme). Il peste contre les suiveurs, les "littérateurs" et les spéculateurs, rendant hommage sans flagornerie à ceux qui l'ont encouragé et pas des moindres (Renoir, Manet ou Fantin). Tantôt modeste, tantôt très sûr de lui. Réglant des comptes avec Fritz Thaulow : " Thaulow se croyait à l'avant-garde. [...] Thaulow (le beau-frère de Gauguin) était béat devant les plus violentes recherches de couleur. Les tons vifs et frais le charmaient, comme les verroteries les sauvages." Blanche peut irriter, mais son écriture alerte retient, sa plaisante ironie envers les enthousiasmes juvéniles de sa jeune amie Olive, qui le conduit dans le midi de la France au printemps 1914, amuse aussi ("Sur les routes de la Provence, de Cézanne à Renoir", publié dans la Revue de Paris le 15 janvier 1915).

On l'a compris Jacques Emile Blanche est surtout le défenseur d'une certaine "tenue" en peinture : formation par apprentissage, soin d'exécution (études des valeurs, dessin et composition comme socle du métier) et hiérarchisation des genres sont encore valorisés quand il écrit au début du XXe. Une sorte de nostalgie d'un temps révolu court entre les lignes, celui où Ingres et Delacroix dominaient la scène. Blanche oscille entre fidélité à la tradition et attrait inévitable pour le progrès et les innovations techniques (photographie, reprographie) qu'il procure.

Lorsqu'il prend part aux débats critiques qui secouent les milieux artistiques dans la forte accélération des révolutions esthétiques d'après 1870, il est moins convaincant. S' il acte les ruptures et certaines conséquences pour la peinture - surtout après l'apparition de l'Impressionnisme et du Néo Impressionnisme - ses points de vue restent un peu prisonniers de l'académisme du monde feutré qui est le sien. Dans les derniers textes il devient plus virulent et plus polémique ("Van Gogh" et "De quelques peintres anglais modernes"). A lire pour son intérêt documentaire sur une époque où l'effervescence artistique touchait vraiment tous les arts, création littéraire incluse. Les écrits de Blanche, amusons-nous un peu, seraient à l'histoire de l'art ce que les textes apocryphes sont à la Bible.
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Jacques-Emile Blanche est un peintre du début du XX° siècle. Mais il semble avoir eu une notoriété en écrivant des considérations sur des artistes qu'il a rencontré, connu ou des courants artistiques dont il a été le contemporain.
Il fait preuve d'une érudition mais il parle de l'art et de la peinture avec son âme. Ses points de vue sont tout à faits subjectifs mais il donne un caractère très vivant aux oeuvres.
C'est un livre qui ne se lit pas d'une traite, il faut y piocher une chronique par-ci par-là, en ayant si possible un livre d'histoire de l'art sous la main pour visualiser les oeuvres car il faut pouvoir visualiser les oeuvres pour saisir ce qu'ils nous décrit.
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D'abord l'objet livre : un papier, une couverture et une mise en page raffinée font de cet ouvrage un objet que l'on apprécie posséder dans sa bibliothèque et que l'on ouvre et lit avec plaisir.
Mais Propos de peintre permet surtout d'approcher l'univers artistique du début du vingtième siècle à travers le regard d'un peintre et non d'un critique. La préface est de Marcel Proust dont Jacques-Emile Blanche peint le portrait auparavant, en 1892. L'auteur dresse les portraits de ses contemporains sans chercher à poser un oeil critique et synthétique mais nous présente ces peintres sous un jour nouveau, où le regard sur le quotidien remplace les affirmations pompeuses des « professionnels » de l'époque.
Un livre qu'on lit avec beaucoup de curiosité et qui apporte donc une connaissance enrichie et approfondie de cette période.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
La pensée ne prend sa valeur totale que sur le papier, écrite, quand, de vague, il lui faut devenir précise, ou s'évaporer en quelque sorte : épreuve la plus concluante à laquelle nous puissions soumettre notre cerveau.
L'acte de peindre, pour des êtres intelligents, est une épreuve analogue, et qui se mêle, comme pour le pianiste, à la satisfaction d'un exercice physique où le corps est engagé comme l'esprit. Elle "matérialise" la pensée, lui donne une forme que nos sens contrôlent. Elle grave dans la mémoire, le contour et la couleur des sites qui se déroulent devant nous, le volume des êtres et des choses.
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Préface de 30 p. de Marcel Proust

Propos de peintre est une compilation des meilleurs portraits de peintres et autres figures intellectuelles du début du précédent siècle, écrits par Jacques-Émile Blanche, tels qu’ils furent publiés entre 1919 et 1928. La sélection des textes a été réalisée par Frédéric Mitterrand. L’exposition en 2012 à la Fondation Pierre Bergé a rappelé combien Jacques-Émile Blanche était un artiste incontournable de son époque.
Et à en croire Philippe Dagen du Monde : « Ce Blanche-là (écrivain) a compris son temps avec une justesse enviable. Certaines de ses analyses le placent à la hauteur de Valéry. »
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Cézanne fait son oeuvre comme l'on découpe du bois avec un tour, comme l'on met du vin en bouteille. Y a-t-il encore de ces hommes là ? L'âme d'un Cézanne serait-elle maintenant "viable" ?
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Mais que vaut une affirmation en matière d'art ? Ce que vaut le critique.
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Videos de Jacques-Émile Blanche (2) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jacques-Émile Blanche
« Je serai poète, écrivain, dramaturge. D'une façon ou d'une autre, je serai célèbre, quitte à avoir mauvaise réputation. » Oscar Wilde (1854-1900) était un homme de parole : il fut poète, écrivain et dramaturge, il eut une mauvaise réputation et il est célèbre. […] le jeune Wilde, élève brillant, entre au Trinity College de Dublin avec une bourse […] et suit des études classiques : histoire ancienne, philosophie et littérature. Il commence à voyager et découvre l'Italie et la Grèce. […] Il s'installe à Londres et fréquente les milieux élégants intellectuels. […] Il se fabrique une image d'esthète : […] ses tenues vestimentaires de dandy font fureur… Oscar Wilde est à la mode. […] il fait une tournée de conférences sur « l'esthétisme » aux États-Unis, avant de séjourner à Paris où il rencontre Hugo (1802-1885), Daudet (1840-1897), Zola (1840-1902), Edmond de Goncourt (1822-1896) (qui le décrit comme « un individu de sexe douteux »), Verlaine (1844-1896), et les peintres Pissarro (1830-1903), Degas (1834-1917) et Jacques-Émile Blanche (1861-1942). […] […] Un second voyage à Paris lui permet de rencontrer Mallarmé (1842-1898), Pierre Louÿs (1870-1925), Marcel Schwob (1867-1905) et André Gide (1869-1951). Juillet 1891 marque le début d'une liaison qui ne se terminera qu'à la mort De Wilde : Alfred Bruce Douglas (1870-1945), « Bosie », vient d'entrer dans sa vie. […] Accusé de sodomie, Wilde […] est arrêté et jugé, […] déclaré coupable d' « actes indécents » et condamné à la peine maximale : deux ans de travaux forcés. […] Wilde séjourne dans plusieurs prisons […]. Au bout de quelques mois, son état de santé lui vaut d'être dispensé de travaux forcés proprement dits. Ne pouvant payer les frais de justice du procès […], il est condamné pour banqueroute et ses biens sont vendus aux enchères. […] En 1900, un abcès dentaire dégénère en méningite et Oscar Wilde meurt le 30 novembre après avoir reçu, à sa demande, l'absolution d'un prêtre catholique. le convoi funèbre est composé de quelques artistes anglais et français, dont Pierre Louÿs ; Wilde est enterré au cimetière de Bagneux. Ses restes seront transférés au Père-Lachaise en 1909. » (Dominique Jean dans Oscar Wilde, Maximes et autres textes, Éditions Gallimard, 2017)
« […] Les aphorismes traduits ici ont été publiés en 1904, quatre ans après la mort de leur auteur, par Arthur L. Humphreys, qui s'appuyait sur un recueil « analogue » qu'il avait lui-même publié en 1895 sous le titre Oscariana : Epigrams. […] le recueil de 1904 s'intitulait simplement Sebastian Melmoth, Oscar Wilde n'étant mentionné qu'entre crochets. […] Cet ensemble donne un aperçu de la pensée et de l'esprit De Wilde, et si les aphorismes sont parfois contradictoire, ils n'en sont pas moins - précisément - le reflet exact de sa personnalité. Wilde, en public, offrait un tel feu d'artifice de mots d'esprit et de paradoxes que le poète Yeats (1865-1939) a dit qu'il donnait l'impression de les avoir préparés à l'avance […]. » (Bernard Hoepffner)
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Références bibliographiques : Oscar Wilde, Aphorismes, traduits par Bernard Hoepffner, Éditions Mille et une nuits, 1995
Oscar Wilde, Pensées, mots d'esprit, paradoxes, traduits par Alain Blanc, Éditions V
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