Avant l'oubli

Tristement beau, étonnant et troublant.
La lune va se fracasser contre la terre, la fin du monde arrive, et en attendant l'apocalypse…
C'est un récit de fin du monde inhabituel, avec un ton calme et apaisé, en opposition avec le sujet. le graphisme est simple et brut, au crayon, peu de couleurs, un trait mal assuré qui apporte une fragilité à ses personnages, les couleurs sont pâles, salies par l'estompage du crayon, il se dégage une tristesse, un abandon et pourtant beaucoup de calme. On passe d'un personnage à l'autre, surtout des gens qui n'ont pas eu le courage ou l'envie de quitter le quotidien, la mère de famille en plein déni, la conservatrice trop attachée aux oeuvres de son musée, des enfants perdus , quelques millénaristes… J'ai été troublé par ce ton décalé, un peu perdu parfois, mais c'est tellement touchant et juste sur la nature humaine, espoir et désespoir se confondent dans une perte des repères, la beauté est racontée avec un minimum de moyens, elle n'a pas besoin d'être lyrique ou grandiloquente, elle est juste cette petite étincelle avant l'oubli…

Si ce génial ovni n'avait pas figuré dans la sélection Quai des bulles, je serais sûrement passée à côté. Pourtant, il vaut clairement le détour, alors foncez !

La lune poursuit sa course vers la terre. La mission dite de la dernière chance a échoué et la collision est désormais inévitable. Certains tentent de fuir dans des navettes d'évacuation. D'autres, dans le déni total, préfèrent faire comme si de rien n'était. D'autres encore veulent profiter à fond : dernier rendez-vous Tinder, dernière visite d'un musée, dernier restaurant, orgies. D'autres enfin choisissent de rester là où ils se sentent le mieux : maison, appartement, lieu de travail.

Cet excellent récit pré-apocalyptique s'attarde sur l'état d'esprit de gens de tout âge, seul.e ou à plusieurs, à l'approche d'une catastrophe qui s'annonce imminente. Les neuf trajectoires que l'on voit sur la première de couverture vont, en se croisant, se révéler de façon lumineuse.

Les réflexions philosophiques de certains personnages m'ont bouleversée : la femme en rémission qui devait tout le temps faire attention et s'apprêtait enfin à profiter de la vie, le grand-père triste pour les jeunes générations (magnifique métaphore), la femme enceinte qui se rend au musée et admire un tableau de la natalité de Botticelli.

Mentions spéciales aux analyses brillantes sur les films (déformation de la réalité) et les objets (attestation de notre existence).

Derrière un dessin épuré, l'autrice glisse de nombreux clins d'oeil (affiches délicieusement ironiques) et indices (objets). le trait minimaliste et une mise en couleur aux teintes douces font ressortir l'injustice de la situation : l'échographie noire sur le mur blanc du musée, quel uppercut !

À titre personnel, je me suis demandée ce que je ferais : prendrais-je la navette de la dernière chance au risque de ne pas pouvoir entrer par manque de place et de me retrouver seule ? Ou au contraire resterais-je chez moi, dans mon cocon rassurant, en attendant l'inéluctable ?

Un excellent roman graphique qui interroge et remue nos certitudes sur la vie et le monde !

Pitch: c'est la fin du monde ! Tu prends la navette et si tu ne peux pas ..
Voilà donc le sujet de ce livre.
Et c'est assez cocasse, ce sujet de la fin du monde est quand même de plus en plus abordé. Youpi.
Le monde post-covid où l'impensable s'est produit. du coup la fin du monde serait-elle proche avec tout ce que l'activité humaine a réussi à détruire et sa capacité à en avoir relativement strictement rien à faire ? On peut le penser. Reste à savoir : quand ? Comment ? de plus en plus d'oeuvre en parlent. Les livres et la BD SF en parlaient depuis longtemps, mais voilà que ça en devient des sujets mis en avant dans le grand public via des films comme "Don't Look Up" ou "Le Monde après nous" (excellents au demeurant).
Ici, on a donc des saynètes de vie, de ce qu'il en reste chez ceux qui restent sur cette bonne vieille terre. Avec les absurdités qui y sont liées.
Oui il ne sert plus à rien de faire attention à ce que l'on mange, oui on peut enfin faire n'importe quoi (au risque de se dire qu'on passe à côté d'une belle histoire dans "la vie d'avant"). Oui on ne reverra probablement plus telle personne après l'avoir quitté.
Oui il est futile de s'occuper de ses légumes, de son logement, de son corps. Demain ne sera plus.
Fatalité.
Un sujet particulier, un traitement scénaristique intéressant, un graphisme qui ne me convient pas vraiment, et surtout une fin que j'aurai aimé traitée différemment.
Mais une BD qui reste intéressante par son propos et traitement, et qui questionne : que ferait-on dans ces situations si on était tel ou tel personnage ?
Préparez-vous, on ne sait jamais .. 😊

La lune se dirige vers la Terre. Les scientifiques ont tout tenté mais rien n'y fait, l'humanité va disparaître.
L'autrice offre un petit panel de personnages durant leurs derniers instant sur Terre.

Un volume intéressant, tout en réflexion. J'avoue que le style graphique n'est pas particulièrement à mon goût, même s'il est très lisible.
La construction et l'enchainement des scènes m'a fait pensé à Skin party de Thimothée Leboucher, malheureusement sans la tension.

Avec Avant l'oubli, j'ai plutôt ressenti une sorte d'abandon, de ralentissement.
C'est différent, ça interroge et parfois, avec une petite pointe d'humour plutôt agréable.

D'un thème éculé (l'imminence de la fin du monde), Lisa Blumen brode une série de saynètes émouvantes, introspectives et existentialistes, reliées par la récurrence de certains personnages. de rayonnages pillés en orgies pré-apocalyptiques, de musées vides de sens en potagers survivalistes, ceux-ci questionnent leur avenir limité à quelques jours, puis heures, avec rage, résignation, déni, urgence, autorité, regret, nostalgie, fièvre, gourmandise ou fuite en avant. le dessin, sobre crayonné faussement naïf tâché d'empreintes digitales, souvent intimiste, parfois inquiétant, tranche avec la gravité du propos par ses tonalités pastels, du vert de gris urbain au vert menthe campagnard, rehaussés de rose layette. de ces rues vides, valises bouclées sans conviction, exils dans les hautes herbes et appartements désertés se dégagent franche empathie (encore renforcée par l'opacité des lunettes qui habillent tous les personnages) et vraie tendresse.